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1 avril 2016 5 01 /04 /avril /2016 06:00
Dis papy c’est quoi l’agroécologie ? Leçon de choses en prenant tous les  « chemins à l’envers » pour Martin au domaine de Cadablès

Avec Christine et Bernard Isarn du domaine de Cadablès ça a commencé ainsi 11 septembre 2012 :

 

« Au Bourg-Pailler, la nuit comme le jour, les portes étaient toujours ouvertes, c’est-à-dire jamais fermées à clé. Qu’avions-nous à voler ? Pas grand-chose certes, mais cette attitude reflétait surtout une façon d’être. Seule la tante Valentine pestait sur ce qu’elle considérait comme du laisser-aller. Je dois dire que tout le monde s’en fichait. S’encombrer de clés, se barricader, n’était pas inscrit dans notre ADN de bons campagnards. J’aime toujours les portes ouvertes où l’on frappe et où l’on répond : entrez !

 

Quand j’étais mioche, du fait du métier de mon père : entrepreneur de battages et de travaux agricoles la salle commune était très souvent occupée par des clients qui venaient soi-disant régler leur note mais qui très souvent après avoir éclusé quelques verres repartaient comme si de rien n’était. Cette forme de table ouverte, de maison où l’on entre et l’on sort, le ballet matinal des bonnes qui venaient quérir le lait pour leurs patronnes (tous les ragots venaient à mes oreilles), m’ont marqué à jamais.

 

De plus, mon pays étant un pays d’épais bocage où la clôture de fil de fer n’existait guère : le buisson entourait les prés et les champs et il était toujours possible de sauter les échaliers qui étaient comme des fenêtres sur.

 

Vous comprendrez donc plus aisément tout le plaisir que j’ai à accueillir du monde sur cet espace de liberté. Vigneronnes et vignerons vous êtes donc en permanence les bienvenus ici alors, une fois la vendange engrangée – faites de belles photos pendant – en surveillant le vin qui se fait profitez-en pour laisser libre-court à votre plume. Vous êtes les bienvenus. Aujourd’hui c’est Christine et Bernard Isarn qui s’y collent, merci à eux. »

 

Les revoili les revoilà :

 

 

Aujourd’hui, mieux campés sur nos terres, nous nous sommes ouverts à la culture car le vin est un esprit et l’entourer de beau est essentiel. La soirée d’opéra sous la lune, les amis corses venus chanter ici, les vendanges nocturnes au piano ou à l’orgue de barbarie, les concerts d’été ne nous ont pas fait oublier l’aspect cultural de la chose.

 

Métier éclectique : culturel et cultural. C’est en observant, en reniflant, en touchant qu’une évidence nous ait apparu. Travailler naturellement, aider, souligner, renforcer l’équilibre existant afin de laisser vivre le système pour qu’il nous délivre le meilleur.

Des raisins à l’état optimum, au paroxysme de leur forme, à la maturité complexe, à l’équilibre satisfaisant pour donner des vins fins, des vins différents, peut- être plus profonds, plus digestes, dès vins qui vous apportent un supplément d’âme, un « je ne sais quoi » de différent comme une étincelle de folie dans un monde technologique, standardisé. Une tache rouge dans le gris ambiant. Une tache rouge indélébile.

 

Le Domaine de Cadablès, sis sur un volcan, est principalement composé de terrasses qui s’étagent plein sud, surplombant la plaine. Au pied, le mas traditionnel abrite le chai. Vingt- cinq hectares de bois, de landes, de friches, de champs dont sept de vignes que nous cultivons dans le respect de l’environnement. Depuis longtemps nous travaillons en bio. Depuis cette année nous nous engageons vers un label reconnu, ainsi avons-nous préféré nous « purifier avant de rentrer dans l’église ». Et puis il nous fallait du temps pour absorber, pour ingérer tout ce système administratif et légal si complexe et retors qui use plus qu’on ne le croit. Qui empêche, qui surveille, qui scrute, qui tranche, qui inspecte, qui juge, qui interdit, qui désespère… Mais fi des paperasses, revenons à nos cultures.

 

Très vite, nous nous sommes penchés sur le concept d’agro- écologie, l’intégration de la vigne dans un ensemble afin de trouver une cohérence. Les vignes ceintes de nos terres, nos landes, nos bois poussent dans un espace protégé où nous avons banni tout intrant chimique en utilisant uniquement des traitements et des amendements autorisés en agriculture biologique.

 

C’est avant tout un ensemble que nous gérons et nous favorisons la bio-diversité en plantant de nouvelles essences, en gardant les haies, et, en éradiquant, mécaniquement, la mauvaise herbe uniquement où cela est nécessaire car on le sait, chaque essence favorise une vie intrinsèque qui équilibre le tout. Friches fleurie, eucalyptus, bientôt des fruitiers donnent une allure plus poétique à la chose et le regard au quotidien n’en est que plus flatté. Dans le fond des dizaines de plantes croissent sur la colline. Sauvages ou cultivée elles apportent au paysage senteur, équilibre et beauté… Les points d’eau aménagés ou naturels, rappellent que sous le volcan la nappe phréatique est bien là. Richesse sudiste absolue l’eau du calcaire rejaillit en des endroits secrets où les soirs d’été les croassements font écho aux hululements. Oiseaux, insectes improbables, venus d’on ne sait où, comme preuve tangible d’un équilibre sauvegardé.

 

 

 

 

Le sol : phénomène complexe vivant - pour peu que l’on ne l’ait pas tué – est rempli d’une vie incroyable de micro-organisme, de vers, de bactéries mieux décrite que je ne le fait par des scientifiques bien renseignés sur le sujet… Nous, c’est à la fois à l’instinct, à l’atavisme, en écoutant, en questionnant, en lisant, en étudiant que l’on comprend comment améliorer cette usine à vie, comment réinsuffler cette énergie vitale pour une vigne les pieds sur terre. Retrouver finalement une culture oubliée par une ou deux générations de chimistes inconditionnels. La chance a sourît aux débutants que nous étions, lorsque nous avons acheté Cadablès en 2004, les vignes étaient plus ou moins à l’abandon car l’ancien propriétaire préférait les joies de la bohème à celle du travail et avait toujours cultivé de manière plus ou moins sensible à l’environnement.

 

Ce merveilleux métier est école de patience. Un laisser venir pas un laisser-aller. On observe, on se questionne et les hasards, pourvoyeurs de bonheur, nous font rencontrer, il y a deux ans une jeune femme qui cherche à installer des vaches jersiaises afin de produire des yaourts. Nous lui proposons alors nos champs et, arrive à Cadablès, un troupeau qui paît l’hiver dans les vignes (tondeuse à l’avant épandeur de fumier à l’arrière) et l’été dans les champs. C’est aussi dans l’humain que l’on avance au quotidien, pas à pas, en confiance.

 

Les vaches, les veaux d’un côté, l’âne et les juments de l’autre, les volailles au milieu donnent au tableau une idée de nature vivante. Entretien animal de nos vignes. Il ne manquerait que des moutons et un berger dans le secteur proche. Il y a un potentiel terrible et nous nous chargerions, si tant est qu’un candidat surgisse, de convaincre les édiles panurgiques d’aller dans ce sens. Le sens du positif, le sens de la vie, le sens de l’évidence. Dussions nous allégrement leur mettre la pression L’idée est lancée : avis aux amateurs…

 

C’est avec l’ami Pierre, compagnon fidèle, que nous avons rajouté les abeilles. Féru d’apiculture et initiateur, il nous a installé quelques ruches pollinisatrices au-dessus du nouveau « terret ». Ses visites donnent lieu à des initiations apicoles, à des échanges fructueux sur l’équilibre global, à des dégustations grisantes où l’on revisite l’agriculture version paysanne, environnementale, humaniste, amicale et joyeuse. Le sens de l’humain au travail, le sens de l’intelligence de la main… Et Dieu sait si l’ami Pierre s’y entend.

 

L’ami Jean Louis, dit « l’expert Fouzilhon », jamais très loin, science paysanne locale, toujours debout, nous apporte en dehors de sa joie de vivre, de ses expressions occitanes, une véritable expertise empirique héritée de tant d’année à côtoyer le paysage.

 

Et le clan ? Au plus proche de l’aventure, nos enfants et leurs compagnes si soudés, si solidaires. Quatorze mains assidues toujours promptes à aider, à soutenir. Sept têtes en réflexion. Sept caractères en action pour le dessein global. Enguirlandages récurrents à l’aune de nos feux intérieurs rééquilibrés par l’immense bonheur d’être ensemble pour une cause commune.

 

L’agro écologie commence ici par les gens, les amis, les copains car faute de moyens financiers débordants nous nous sommes toujours tournés vers des richesses parallèles. Chacun vient ici donner, puiser et repart vers sa vie, puis repasse à son gré faire une bise, un salut, prendre des nouvelles. Cadablès, comme une ile, un foyer bien ardant. Le partage, l’entraide, le soutien, le conseil comme antidépresseur systématique.

 

Trombinoscope non exhaustif de notre petit monde créé sur mesure. Pour dire, il y a aussi des Parisiens, un Québécois qui use de sa faconde pour nous commercialiser à « la capitale « et des Suisses, et des Belges, même un Ricain et j’en passe… Le spectre est large. La galerie Cadablésienne s’enrichit chaque année de nouveau membre qui apporte au système, qui y puise aussi à l’instar de Jean Marie notre boulanger paysan local, époux de Miss yaourt, intarissable sur la farine, le pétrin, la boulange.

 

Les quelques têtes décrites ici ne sont qu’une partie d’un ensemble. La partie culturale. Peut-être devrais-je vous présenter aussi la partie des amis artistes plus éthérés venus maintes fois nous encourager dans nos pérégrinations. Mais pour l’heure nous parlons agro écologie, de façon culturale. Il va falloir aussi, un jour ou l’autre, que le Grand Manu, ami et soutien historique inconditionnel de nos balbutiements viniques, nous forme à l’alchimie de la bio-dynamie. Cela viendra peut-être via nos enfants… Cette entreprise : c’est une vie, me disait dernièrement Christophe, collègue châtelain.

 

Devant le temps qui court sans cesse nous mettons en place à Cadablès un système durable et produisons essentiellement du vin in situ. Un peu d’huile d’olive, un potager, des œufs, des volailles destinés seulement à notre consommation…

 

L’aspect cultural dans le but de produire du bon. C’est toujours difficile de dire que ses vins sont bons, on a du mal. C’est un peu comme ses enfants. Une pudeur s’installe lorsqu’on est tant engagé. C’est les autres qui en parlent le mieux. On ne fait que répéter leur avis. Etudiés depuis cette année à l’école hôtelière de Lausanne, adoubés par des chefs de talent, par de grands guides, exportés outre atlantique et en Europe, nos vins nous racontent la satisfaction de leurs buveurs.

 

Nos événements au Domaine nous font rencontrer tout ce monde. Echanges prolixes qui redonnent sans cesse la foi, qui recentre la voie. En définitive il y a toujours au bout du bout un quidam qui boit un verre et y prend du plaisir ou pas. C’est le sens de notre métier : donner du plaisir aux gens et pour cela il faut en prendre en fabriquant. C’est chose faite. Dans le respect, l’éthique, l’humain mais aussi, en prenant tous les « chemins à l’envers ».

 

Tout naturellement…

 

Bavardages incessants de vignerons enflammés capables d’user et d’abuser de la liberté à laquelle nous invite Jacques que nous remercions de son chaleureux accueil. Concluons prosaïques :

 

Pour plus d’infos : ICI et ICI 

 

Et puis, au plaisir.

 

Christine et Bernard Isarn vignerons indépendants

Dis papy c’est quoi l’agroécologie ? Leçon de choses en prenant tous les  « chemins à l’envers » pour Martin au domaine de Cadablès
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commentaires

B
Je n'ai pas bien compris ce que pourrait apporter de plus la bio dynamie par rapport à l'agroécologie
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B
Dans un concept global d'agro écologie je pense que les préparations biodynamiques notamment apporteraient un plus, une dynamisation globale qui ne pourrait être que bénéfique à l’ensemble. Du reste n'étant pas, loin s'en faut, spécialiste de la spécialité il va falloir que l'on s'y intéressent plus avant mais la réalisation d'un projet comme le notre est très chronophage et nous sommes forcement limités par le temps et les moyens et regardons la bouteille à moité pleine. Une chose après l'autre. J'ai exposé dans cet article les méthodes culturales qui ne sont qu'un aspect du travail... Il y en a tant d'autres.
P
Il devait faire bon vivre, au Bourg-Pailler, un monde sans clé ! Tout un état d'esprit ! Les clés c'est la plaie ! Et dans mon activité de syndic de copropriété, plus que jamais, au point que j'en suis venu à me poser la question de savoir si la vraie malédiction qui accompagna la sortie du paradis d'Adam et Eve ne fut pas plutôt ; Et tu vivras dans un monde ou tu devras gérer des clés !
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