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25 juin 2018 1 25 /06 /juin /2018 07:00
Veronica Lake by George Hurrell, c. 1942 

Veronica Lake by George Hurrell, c. 1942 

« Fais-moi une confiance aveugle... » Le message de Chloé avait le mérite d’être simple et clair. Benoît réduisait le bristol en mille morceaux et il tirait la chasse d’eau. Pendant sa courte absence le cercle s’était élargi de deux unités : debout derrière Bob Dole un grand noir, sosie de Sidney Poitier, costume gris perle impeccable, qui mâchouillait du chewing-gum d’un air las et, assise aux côtés de Chloé une femme blonde, très fardée, en tailleur noir dont la veste cintrée soulignait une taille de guêpe. Elle affichait en le voyant un sourire carnassier dévoilant une dentition blanc de blanc. Pour me conformer au désir de Chloé Benoît  s’abstint de toute remarque même si le côté mise en scène de cette étrange réunion commençait à lui taper sur le système. Nonchalamment le grand noir venait vers lui, le prenait par le bras et l’entrainait vers un grand Chesterfield au cuir craquelé qui occupait une sorte d’alcôve recouverte d’une grande verrière donnant sur un jardin potager. La blonde sophistiquée vint les rejoindre lorsqu’ils furent assis. Avec une décontraction surjouée elle se posait sur l’un des accoudoirs du canapé et sa jupe droite, en un retrait qu’elle ne cherchait pas à contrecarrer, dévoilait des cuisses d’un galbe impeccable et surtout le haut de ses bas retenus par un porte-jarretelles. En plongeant son regard dans son entrecuisses Benoît l’apostrophait grossièrement « Ma poule je carbure au café. Alors magne ton beau cul pour aller m’en chercher... » Ses faux-cils tressautèrent sous l’effet d’une incompréhension manifeste. En prenant le grand noir à témoin Benoît ajoutait « désolé mais ne comptez pas sur moi pour faire l’effort de parler votre putain de langue...»

 

Le français de Benoît les déroutait. Sur un claquement de doigt du grand noir Bob Dole rappliquait à grandes enjambées. Benoît exigea sitôt la présence de Chloé. La blonde, pensant qu’il n’entendait rien à leur sabir compressé et débité à la hache, s’adressait à Bob Dole d’un air courroucé en lui disait en substance « Que me veux cette petite merde de français ?» Bob, chagriné, tentait de l’apaiser en lui expliquant que Benoît tentait une diversion. Elle fronçait ses sourcils. Bob reprenait l’initiative « il nous comprend mais il fait sa forte tête et exige de ne parler que français. » La blonde suffoquait. Benoît en profitait pour lui tendre un index d’honneur. Chloé lui empoignait l’épaule « arrête tes conneries ! » Bob surenchérissait « vous jouez à quoi ? » Benoît explosait « au con bordel de merde ! J’en a plein le cul de votre cinéma. Si ça vous a échappé je viens de passer trois jours formidables dans un trou à rats trois étoiles entre les mains de nazillons à la manque qui m’ont attendri selon votre expression. Je croyais que nous étions raccord Bob, cartes sur table et voilà que vous tentez de me bluffer en me sortant cette pouffiasse qui se prend pour Veronica Lake et ce gandin qui joue les muets du sérail. Puisqu’avec votre arrogance congénitale vous prétendez tout savoir sur tout moi le petit con de français je vais vous dire ce que vous ne savez pas sur moi. Je bouffe à tous les râteliers. Pour du fric et du cul je vendrais ma mère, je prostituerais ma sœur et je trahirais même mon putain de pays... » Au grand étonnement de Benoît, dans un français impeccable, sans le moindre accent, le grand noir impassible interrompait ma diatribe d’un « ce jeune homme à parfaitement raison. Nous nous sommes mal conduits à son égard. Entre alliés ce n’est pas correct... » Il lui tendait sa grande main « Robert J. Parker ancien attaché financier à Paris. J’étais très ami de Claude Pompidou et du couple Chalandon... » Son large sourire soulignait la grosse perche qu’il venait de tendre à Benoît qui  lui secouait la main en se disant qu’il savait maintenant dans quelle catégorie il devait boxer.

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22 juin 2018 5 22 /06 /juin /2018 07:00
La résistible ascension de Benoît H ils prirent un taxi pour se rendre dans une villa du Neuilly berlinois de Dahlem. (125)

Benoît affichait une mine dégoûtée qui mettait en joie bob Dole « Vous les pacifistes ce que vous ne savez pas c’est que c'est pire que ce vous pensez et dénoncez. Là-bas nous tirons sur tout ce qui bouge. Nous y faisons, comme vous dites à Paris, des trucs à faire gerber. Cette guerre est dégueulasse et nous la faisons dégueulassement ». Le Bostonien le prenait-il pour un con ou était-il en train de le tester ? Comme la faim tenaillait Benoît il  fonçait tête baissée « Très franchement vos confidences sur vos horreurs au Vietnam moi je m’en bats les couilles ! Soit vous me sortez illico de ce trou à rats et je veux bien que nous en venions à l’essentiel de ce qui vous amène. Sinon je me tais et les teutons seront bien obligés de me laisser sortir sous la pression de mon consulat... » Benoît bluffait bien sûr puisqu’il savait pertinemment que, même si par je ne sais quel hasard son incarcération revenait aux oreilles du consul, celui-ci ne se précipiterait pas pour le sortir du trou. Bob Dole contemplait ses ongles manucurés avec l’air las d’un type qui a mieux à faire que de « traiter » un petit con de français prétentieux. Son dédain motivait Benoît qui jouait le tout pour le tout « c’est Sacha qui vous intéresse ! » Son affirmation faisait relever les sourcils du ricain dont les yeux bleus s’allumaient. « C’est un bel appât pour la pêche au gros. Il a tout pour nous plaire ce garçon mais il navigue dans des eaux qui ne nous sont pas accessibles alors nous souhaitons vivement que vous nous l’apportiez sur un plateau... » La réponse de Benoît fusait « et ça justifiait le traitement que m’ont infligé ces nazillons... » Dole soupirait « simple préparation psychologique et une couverture en béton vis-à-vis de vos petits camarades : à votre retour ils vous fêteront comme un martyr de la cause... » Benoît ricanait « je vous trouve bien sûr de vous : qu’est-ce qui vous fait croire que je vais marcher dans votre combine ? »

 

La soudaine gêne de Dole, qui se traduisait par un imperceptible dandinement doublé d’un soudain intérêt pour sa chevalière d’officier qu’il faisait coulisser au long de son annulaire, laissait pressentir à Benoît qu’il tenait du lourd pour le faire céder. Sa bonne éducation de wasp bostonien devait lui faire chercher les bons mots. Le corps endolori de Benoît se cabrait, il se concentrait. Ce salaud policé, indifférent aux massacres des niakoués, qu’est-ce qui pouvait bien le retenir de lui balancer son atout maître ? L’évidence cinglait Benoît qui gueulait « vous tenez Chloé ! » La commisération non feinte de Dole lui donnait des envies de lui foutre son poing sur la gueule. Il se réfrénait.  Sa levée d’écrous se fit dans les formes. Il ne fallait pas le griller. Chloé l’attendait à la sortie et ils prirent un taxi pour se rendre dans une villa du Neuilly berlinois de Dahlem. Ils restèrent silencieux tout au long du parcours mais Benoît connaissait suffisamment Chloé pour savoir qu’elle préparait la contre-attaque. Les américains adorent monter des opérations avec un luxe de détails, de précautions, de réassurances et pour ce faire ils mobilisent une flopée de spécialistes en tout genre. Une fois arrivés ils se retrouvèrent donc entourés d’une bonne demi-douzaine de types que l’on eut dit tout droit sorti d’un roman de John Le Carré.

 

La séance débuta par un diaporama commenté par Bob Dole. Dès les premières images le doute n’était pas permis : ces messieurs disposaient de taupes dans leur tanière. Seule la pruderie américaine les dispensa de visionner leurs ébats. Sacha y tenait bien sûr la vedette. Très vite Benoît comprenait qu’il entretenait avec l’Est des liens étranges : rendez-vous furtifs dans des cafés, passages réguliers à la Grande Poste où il recevait du courrier en poste restante, discussions dans des parcs toujours avec le même homme, un vieux type boiteux et affublé d’un imperméable militaire. Dans l’obscurité Chloé lui glissait un bristol dans la poche de mon pantalon. Quand la lumière se fit, l’un des adjoints de Bob Dole, un petit bouledogue aux yeux exorbités d’hyperthyroïdien, débitait à toute berzingue, en bouffant ses mots, la fiche de Sacha. Benoît l’interrompait en se levant et en proclamant un « j’ai envie de pisser » qui lui valait des regards dégoûtés. La cote de la France et des français, déjà bien basse pour les cow-boys de la CIA, en prenait un nouveau coup derrière la casquette. Benoît s’en tamponnais bien sûr l’important pour lui c’était de prendre connaissance du bristol de Chloé.

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21 juin 2018 4 21 /06 /juin /2018 07:00
La résistible ascension de Benoît H son accent traînant irlando-bostonien trahissaient le rejeton d’une famille patricienne. Il offrait à Benoît une Lucky Strike sans filtre (124)

Dire ce qui s’était passé ensuite, Benoît avait bien du mal à retracer le fil des évènements. Tout ce dont il se souvenait c’est qu’une fois Sacha porté en lieu sûr, il s’était fait alpaguer par la meute policière, rouer de coups de matraques et propulser dans un fourgon où il avait perdu connaissance. La cellule, comme toutes les cellules du monde, puait la pisse, les excréments et le vomi. Dès son premier interrogatoire, son statut de gaulois, lui valut un traitement de faveur de la part des bourres ouest-allemands. Par souci esthétique pas touche à son portrait mais pour le reste tout y passait avec un raffinement sadique. Benoît affrontait pour la première fois la torture. Ils le ramenaient périodiquement dans sa cellule pour qu’il ait le temps de méditer. Procédure classique pour mettre à mal ses dernières défenses psychologiques. Ce qui l’incommodait le plus c’était sa propre pestilence. Saoulé de coups Benoît ressentait plus rien. Son absence de papiers d’identité lui permettait de bien jouer son rôle de pauvre étudiant pacifiste. Les bourres, en dépit de leur traitement de faveur, ne lui apparaissaient pas vraiment soucieux de lui faire avouer où se trouvait la planque de Sacha qu’ils devaient sans nul doute connaître. Ils bénéficiaient de leur part d’une forme maîtrisée d’attendrisseur. Ils le préparaient en n’étant que des comparses minables et c’était ce statut qui les rendait si féroces. Le matin de son troisième jour de détention, un sec teuton faciès nazi en blouse blanche le convoyait jusqu’à l’infirmerie où une  grosse teutonne faciès nazi en blouse blanche le calfatait tant bien que mal. Ensuite il eut droit à une douche puis au barbier puis à un petit déjeuner teuton dans une sorte de réfectoire empestant le crésyl. Alors qu’il avalait leur jus de chaussette un grand échalas, cheveux blond roux en brosse, blouson d’aviateur, Ray Ban, sourire étincelant, lui tendait une large main couverte d’un duvet frisottant « Bob Dole ! »

 

La fermeté de sa poignée de main rajoutait une touche supplémentaire à sa dégaine faussement décontractée mais le pli impeccable de son pantalon de velours finement côtelé, le chic discret de ses derbys à semelles cousues Goodyear et son accent traînant irlando-bostonien trahissaient le rejeton d’une famille patricienne. Il offrait à Benoît une Lucky Strike sans filtre et lui tendait la flamme d’un Zippo avant de s’asseoir face à lui. Son irruption ne surprenait Benoît qu’à moitié mais, un peu parano, il s’interrogeait sur l’étendue de ses renseignements sur son pedigree. En toute logique, eu égard à l’infiltration des services de renseignements US dans ceux de ses alliés occidentaux, le soi-disant Bob Dole devait posséder sur son compte une fiche longue comme le bras. Le seul hic pour lui c’est qu’en fonction de la source d’où provenaient ses renseignements, il pouvait le classer comme du menu fretin facilement retournable ou comme un gros poisson qu’il faut ferrer avec soin. Le mieux pour Benoît était de prendre un profil bas, de jouer au con. Il lui proposa du café. Son rictus dégoûté tenait lieu de réponse. Il ironisait en français « il est un bon cousin germain du vôtre ». À son grand étonnement Dole goûtait manifestement le double sens de sa plaisanterie, en opinant avec un air entendu. Si la grande maison de Langley lui déléguait un francophile raffiné ça sentait le coup parti de très loin. Son très cher Ministre Marcellin, obsédé par la menace internationaliste, l’offrait-il en pâture à la CIA ou était-ce l’inverse : son petit jeu intéressait-il les américains ? Comme la marge de manœuvre de Benoît se résumait à peau de zibi il cessait de se poser des questions et se concentrait sur les propos de Bob qui lui apprenait qu’il avait servi pour la CIA au Vietnam.

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20 juin 2018 3 20 /06 /juin /2018 07:00
La résistible ascension de Benoît H Avec elle, même durant nos ébats les plus frénétiques, les questions essentielles fusaient, impitoyables. Aborder la nécessité de la révolution permanente, chère à Trotski et Bakounine (123)

Le printemps venait enfin d’inviter le soleil et celui-ci s’engouffrait comme un feu follet par la fenêtre de leur tanière pour jeter sur la longue chevelure blonde de Karen de la poudre d’or. Le moral en berne de Benoît s’était mué, dès leurs premiers transports violents et assouvis, en une euphorie rebelle. Karen se révélait une partenaire insatiable tant au plan sexuel que de la confrontation dialectique. Avec elle, même durant nos ébats les plus frénétiques, les questions essentielles fusaient, impitoyables. Aborder la nécessité de la révolution permanente, chère à Trotski et Bakounine, alors qu’elle le chevauchait, altière, allant et venant avec volupté, que le spectacle de ses seins noyés dans les flots de ses cheveux le transformait en un boyard lubrique, lui demandait des efforts qui le lessivaient plus encore que la fourniture de ma semence. Ils échangeaient en anglais. Couverts de sueur, alors que Benoît tenait à pleine mains ses fesses fermes, Karen lui confiait que sa vie ne pouvait être que celle d’une révolutionnaire professionnelle pourrissant la plupart du temps dans les geôles glaciales des porcs. Elle se décrivait enchaînée pour des travaux forcés, ce qui décuplait ses envies de knout et de foutre. Il lui confiait pourtant d’une voix essoufflée son absolue admiration pour sa longue marche vers la perfection radicale. Sa libido s’en trouvait renforcée car ce petit jeu, où il devait s’extirper de la violence de ses pulsions, le transformait en marathonien du sexe. Quoi de plus efficace pour se réfréner que d’aborder en pleine fornication la thèse de Régis Debray et de Che Guevara selon laquelle « si le prolétariat n’est pas assez prêt ou mûr, l’avant-garde doit se mettre à la place des masses. » Rien, sauf le summum, au bord de l‘extase, de la petite mort, se voir dans l’obligation, alors que votre bien-aimée, juste avant d’entrer dans les désordres de la jouissance, vous a sommé de prendre parti sur la légitimité de la violence, se mouler corps et âme dans le précepte de Frantz Fanon selon lequel toute violence exercée par les damnés de la terre, les opprimés de toutes les couleurs est légitime. Dégoupiller une grenade, alors que l’explosion monte en vous, la balancer sur les tyrans et les oppresseurs, en contemplant le lever de bassin de Karen, sa projection implorante, son retour à sa langue maternelle pour proférer des mots durs, le faisait chavirer dans la forme la plus aboutie de la dictature machiste.

 

Grâce au traitement de Karen Benoît retrouvait le goût des manifs, des sit-in, des occupations de bâtiments universitaires et parfois de l’érection de barricades. Tout ça pour délimiter un périmètre au centre duquel leur leader charismatique, Sacha, juché sur une caisse à savon, vilipendait « les vils laquais américains du soi-disant gouvernement de Bonn de blanchir le passé nazi allemand par le biais du consumérisme et de convertir la génération d’Auschwitz en un troupeau de gros moutons obnubilés par des réfrigérateurs, téléviseurs et Mercédès neufs. » Cet après-midi-là, en dépit des confidences inquiétantes d’un flic qui couchait avec Magda, une fraülen révolutionnaire, selon laquelle Sacha serait cette fois-ci embarqué, ils s’étaient sur la pelouse sacrée de l’Université libre. L’inégalité des forces en présence était patente et la qualité et la quantité des munitions révélatrices de leur incapacité à traduire notre discours belliqueux en actes. Sacha tenait une forme olympique crachant son mépris et sa haine sur cette Amérique pilonnant les villes du vaillant Vietnam, empoisonnant les moissons des rizières des courageux paysans, napalmisant la jungle. Il en appelait à un nouveau tribunal de Nuremberg pour les dirigeants US afin qu’ils comparaissent pour génocide et crimes contre l’humanité. Il vilipendait le shah et sa Savak, les colonels grecs financés par la CIA, « l’Etat fantoche américanisé d’Israël ». Il adressait son salut fraternel aux frères activistes de Paris, Rome, Madrid et aux courageux étudiants de Berkeley et de Washington « qui avaient ouvert la voie que nous empruntions tous ». Rien ne les ferait taire ! Ils ne seraient plus des enfants sages. Ils avaient retenu la leçon de nos parents muets sous les nazis. Et pendant ce temps-là le cercle se resserrait sur nous. Les casqués frappaient sur leurs boucliers avec leurs matraques. Les premières bombes lacrymogènes fusaient. Sacha imperturbable continuait de laïusser. Les canons à eau entraient en action. Pleurant, toussant, les premières lignes s’effilochaient. Le martèlement des sabots des chevaux paniquaient les étudiants. La débandade, les matraques qui cognaient. La masse des uniformes maronnasses les engluait. Dans un ultime effort, protégé par le Viking armé lui d’une batte de base-ball,  Benoît exfiltrait Sacha sur ses épaules.

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18 juin 2018 1 18 /06 /juin /2018 07:00
Berlin, le 7 novembre 1968, Beate Klarsfeld vient de gifler le chancelier Kiesinger. Elle sera immédiatement jugée.

Berlin, le 7 novembre 1968, Beate Klarsfeld vient de gifler le chancelier Kiesinger. Elle sera immédiatement jugée.

Le Centre de la Paix de Sacha, comme son appellation l’indiquait, ne draguait pas dans les eaux troubles et tumultueuses de l’activisme révolutionnaire poseur de bombes. On y débattait beaucoup, surtout des combats des camarades étudiants dans la Grèce des colonels, l’Iran du Shah et de sa sinistre Savak, et bien sûr dans l’Amérique de l’odieuse guerre du Vietnam qui, à Berlin, du fait de la présence visible de l’armée américaine, était un sujet plus que sensible. On y prenait des douches en commun. On y baisouillait dans des géométries variables. On tractait vaillamment aux coins des rues bourgeoises pour y fourguer des journaux indigestes. Ce n’était pas de tout repos car la petite et moyenne bourgeoisie de Berlin-Ouest en avait vraiment marre de voir ces étudiants privilégiés casser des vitrines, prôner la copulation en public, provoquer des embouteillages monstres et, le comble, baver en permanence sur ses sauveurs américains. Ils avaient droit à des insultes, à une vieille dame de la génération d’Auschwitz leur criant d’aller jeter leurs PQ là où ils seraient utiles, c'est-à-dire à l’Est de l’autre côté du mur, à des chauffeurs de taxis montant sur les trottoirs pour les mettre en fuite. Le comble pour ces partisans de la Grande Coalition présidée par un chancelier, Kurt Georg Kiesinger, membre du parti  nazi, qui avait travaillé sous les ordres de Goebbels, c’était de voir, moins de 25 ans après Hitler, leurs paisibles rues envahies par des bataillons de policiers antiémeutes, casqués et armés de matraques  face à des hordes de gauchistes sales et chevelus, au langage provocant « Tapez, tapez sur les flics, qu’ils soient plats comme des sandwiches » qui les lapidaient.

 

En dépit de sa bonne humeur affichée cette ville grise, découpée en tranches inégales, scindée en deux blocs par un mur ladre et couronné de barbelés, perdue dans une RDA sinistre et glacée, déprimait  Benoît. Tout ce qui s’y passait lui apparaissait irréel, ses colères lui étaient inconnues, son atmosphère lugubre s’ajoutant à l’humour macabre de ses camarades, toutes ces quêtes de grandes vérités l’enkystaient sans grand espoir de débouchés excitants dans ce troupeau d’égarés. Pour rajouter à son spleen Chloé menait son travail d’infiltration dans les eaux troubles des FAR et le délaissait. Il espérait beaucoup dans l’irruption du printemps pour sortir la tête de son pot au noir malheureusement la météo ne fut pas au rendez-vous. Des rafales de neige fondue balayaient leur sinistre horizon. La plupart du temps Benoît gisait frustré dans le réduit qui lui servait de chambre sans que ses petits camarades se préoccupent de son enfermement. Dans le creux d’un dimanche sinistre il entendait dans son demi-sommeil une voix qui me sommait de s’éveiller. Il tendait la main droite qui, au lieu de trouver le vide, rencontrait la fermeté glacée d’une fesse. Avant que ce qui lui semblait être un rêve ne se dissipa Benoît ouvrait les yeux pour découvrir, en surplomb, une Karen entièrement nue. Ses longs cheveux retombaient en cascade sur ses épaules étroites. Bêtement il  lui demandait « Qu’est-ce qui se passe ? Une descente de police ? » et l’entendais lui répondre, alors qu’il contemplait le lacis frisottant de sa chatte, « Pourquoi ? Tu as envie de faire l’amour avec les flics ? » Toujours aussi neuneu il l’assurait que non. Sans se soucier de son état d’hébétude elle l’interrogeait « Tu attends peut-être une autre fille ? » Là encore il la rassurait avec conviction « Mais non je n’ai pas d’autre fille » Elle se glissait alors sous les draps froissés en le prévenant « On va prendre notre temps. Tu es mon premier homme. Vous les français vous devez savoir faire cela avec les doigts » Benoît rectifiait « Tu veux dire avec doigté sans doute... » Elle se calait tout contre lui. « Tu ne diras à personne que nous avons fait l’amour car tous les hommes ici voudront passer sur moi... » En lui caressant la pointe dure de ses tétons Benoît l’assura de mon silence. « Tu seras mon amant secret et triomphant... » gazouilla-t-elle  alors que ses doigts glacés enserraient le sexe brûlant de benoît avant d’empoigner avec douceur ses gonades enflammées.

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17 juin 2018 7 17 /06 /juin /2018 07:00
La résistible ascension de Benoît H Rudi Dutschke tombé, sur la Kurfürstendamm de Berlin, sous les balles d’un ouvrier déséquilibré d’extrême-droite, perfusé de haine par la rhétorique fasciste du baron de la presse Axel Springer, via son torchon ignoble Bild Zeitung, était un martyr de la cause (121)

Pendant que Chloé épluchait ses carottes avec ses réfrénés des gonades dans l’appartement de  la Kommune I Benoît se shootait à l’histoire du mouvement étudiant. Il était toujours prêt à se faire réquisitionner pour la cause, devenant ainsi le dépositaire du nom des héros de l’épopée qu’avait été, le 2 juin 1967, la visite du shah d’Iran et de Farah Diba à Berlin. D’un côté les « Perses de la claque » Jubelperser, de l’autre les « Perses de la castagne » Prügelperser et au milieu les agents des services secrets du régime iranien qui se serviront des montants des pancartes des manifestants comme des matraques efficaces. Parmi ces héros d’abord Bahman Nirumand qui révéla toute l’horreur de la répression du régime du shah, soutenu par les impérialistes américains, aux étudiants entassés dans l’Audimax de l’Université libre. Et puis ensuite, le martyr, la figure sanglante de Benno Ohnesorg qui, le lendemain de la manifestation, sera abattu d’une balle dans la tête par un policier en civil devant l’Opéra de Berlin-Ouest. Aux obsèques de Benno, en dépit des démentis du maire et de la police, la ferveur militante s’était exacerbée accélérant ainsi l’ascension irrésistible de Rudi Dutschke, le fondateur de l’opposition extraparlementaire étudiante. « Tant de frères et de sœurs partout ! Tant de camarades qui partageaient le même rêve » qui ne savaient pas où ils allaient mais ils y allaient, précipitait Benoît dans une adhésion étrange.

 

Alfred Willi Rudolf, dit Rudi Dutschke tombé, sur la Kurfürstendamm de Berlin, sous les balles d’un ouvrier déséquilibré d’extrême-droite, perfusé de haine par la rhétorique fasciste du baron de la presse Axel Springer, via son torchon ignoble Bild Zeitung, était un martyr de la cause placé à la même hauteur qu’un Martin Luther King abattu le même mois. L’icône du Mai 68 berlinois était né de l’autre côté du mur, dans un bourg au sud-ouest de Berlin. Malgré son discours rebelle, plaidoyer contre le service militaire et la réunification de l’Allemagne, qu’il tint dans la salle des fêtes de son lycée, à Luckenwalde, les sourcilleuses autorités de la RDA  lui délivrèrent quand même son baccalauréat en 1958. C’était un fils de postier qui remerciera, dans sa Présentation de mon cheminement, son directeur de lycée de la bonne éducation qu’il avait reçu et qui tiendra à ses débuts, et pour un bref laps de temps, la rubrique sportive dans un journal populiste appartenant au groupe honni d’Axel Springer. Quand Sacha leur fit réécouter ses discours politiques Chloé, qui parlait et entendait parfaitement l’allemand, dit à Benoît, hors des oreilles du nabot, être très impressionnée par son extraordinaire capacité à proférer dans un haut débit un charabia pâteux et jargonneux. Restait, pour compléter le panthéon révolutionnaire, la grande prêtresse, l’immaculée conception de la révolution, l’ex-éditorialiste de la revue de son mec Klaus Rainer Roehl : Konkret qui s’était radicalisée jusqu’à devenir membre de la Rote Armée Fraktion (F.A.R) et qui participera en mai 70 à la libération d’Andréas Baader.

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16 juin 2018 6 16 /06 /juin /2018 07:00
La résistible ascension de Benoît H Chloé raconta à Benoît qu’elle passait son temps à éplucher des légumes à la cuisine avec les autres nanas pendant que les mecs se torturaient les méninges pour inventer des trucs pour choquer le bourgeois (120)

Leurs nouveaux camarades manifestaient dans les quartiers bourgeois : la Frei Universität, avec son grand amphi l’Audimax, où se tenaient toutes les AG, était située dans le Neuilly berlinois à Dahlem. La haute société berlinoise goûtait à demi la rhétorique très moralisante de ces étudiants chevelus. Il faut dire que c’était vraiment du grand théâtre et Sacha se révélait un as de la mise en scène sur le Kurfürstendamm : une belle avenue chic bordée de magasins opulents, de théâtres et de cafés aux baies vitrées où les mémères à caniche, les vieux beaux, des veuves poudrées, des gigolos en veste cintrée et col pelle à tarte et des poules de luxe en manteaux de loup se retrouvaient pour tromper l’ennui. Le café Krantzer était le QG préféré des chefs étudiants car le bureau du Sozialistischer Deutscher Studentenbund (SDS), le mouvement des étudiants socialistes était à quelques encablures de là. Très vite Chloé allait devenir l’égérie de la frange libertaire du mouvement : la Kommune I spécialisée dans la provocation extrême. Celle-ci louait un vaste appartement dans une rue avoisinante pour expérimenter une communauté prônant l’amour libre mais les frelons allemands se révélaient eux aussi, comme leurs homologues de la GP, totalement coincé du calcif : Chloé raconta à Benoît qu’elle passait son temps à éplucher des légumes à la cuisine avec les autres nanas pendant que les mecs se torturaient les méninges pour inventer des trucs pour choquer le bourgeois. Leur coup de maître fut une photo où sept d’entre eux posaient nus, les mains en l’air, les fesses tournées vers les caméras, comme pour une fouille de police. Pour corser la provoc un bambin blond se tenait à leurs côtés.

 

L’ambiance au Centre de la Paix, du fait de son recrutement international, se révélait bien plus propice à des copulations effrénées et à des enlacements féminins languissants. Curieusement, seule l’homosexualité masculine ne s’affichait pas ouvertement. Sacha entretenait avec les femmes des rapports brefs et utilitaires que nul ne songeait à interrompre lorsqu’un ruban rouge était accroché à la porte du grenier. Chloé charriait Benoît sur son abstinence face au nombre indécent de beautés qui se baladaient nues dans le squat. La plus assidue à le provoquer était bien sûr Karen, la blonde évaporée, compagne de chambre de Judith la grande hommasse. Peter le Viking lui ressassait que ces foutues gouines, avec leurs robes en grosse toile, leurs godillots militaires, leurs cheveux tirés en chignon, étaient des causes perdues avec lesquelles il ne devait pas perdre mon temps. Elles avaient apposées sur la porte de leur chambre un panneau « Allez-vous faire foutre ! ». Sacha ironisait sur le fait qu’elles passaient leur temps à lire des livres de droit. Et pourtant Karen, gracile et éthérée, ne se privait pas, à chaque fois que Judith s’absentait, de venir exhiber sous le nez de Benoît son opulente poitrine. Très vite elle avait sollicité de lui qu’elle lui apprenne le français au motif que sa compagne était une allemande du Nord qui cachait un feu intense sous son enveloppe de glace. Dès qu’il le sentait fondre face à ces minauderies Sacha lui ordonnait « Oublie-là ! Elle fait partie de ces filles de bonnes familles, toujours reçues dans les meilleurs salons radicaux de Berlin, dont la sexualité frise le zéro absolu. »

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15 juin 2018 5 15 /06 /juin /2018 06:00
La résistible ascension de Benoît H« Tu es un affreux petit français matérialiste. Quand nous aurons purgé tout ce qui est vieux et pourri nous bâtirons une société harmonieuse, fraternelle, spontanée... Benoît pouffait. « Je suppose que dans ton grand nettoyage tu ne touches pas au classement de 1855 »  » (119)

« Je vous attendais ! » C’était bien lui Sacha, nabot et impérial. La brune peu gâtée par la nature jetait sur Chloé des regards noirs. Ils subirent un examen de passage en règle. Les questions fusaient. Les réponses, comme au catéchisme, Chloé et Benoît les ânonnaient sans grande conviction. L’une d’elle où Benoît affirmait vaillamment qu’il leur fallait résister, par tous les moyens, à toute autorité irrationnelle lui valait une volée de bois vert « Irrationnelle ? Pourrais-tu m’expliquer ce qu’est une autorité rationnelle ? Toute autorité est irrationnelle ducon ! » Le nabot commençait à lui chauffer les oreilles. Benoît contre-attaquait « Tu partages l’avis de Marcuse lorsqu’il affirme que le positivisme logique c’est de la merde ? » Sacha encaissait en pinçant ses lèvres fines. Benoît marquait un point. Sacha enchaînait sur la révolution permanente des masses estudiantines contre les forces contre-révolutionnaires. Elles renouaient avec le passé spartakistes de l’ancienne capitale du 3ième Reich. Benoît ne l’écoutait plus vraiment intéressé qu’il était par le manège de la grande blonde qui, tout en se laissant peloter par Barberousse, lui lançait des œillades appuyées. Sacha stoppait sa diarrhée verbale et d’un geste impérieux congédiait sa cour. Tout le monde s’enfournait dans la trappe, y compris Chloé qui déclarait vouloir aller dormir à l’étage de la nursery. La brune laide lui signifiait que tout était prévu pour eux. Sacha retenait Benoît par la manche alors que la blonde des blés, lui susurrait à l’oreille son prénom, Karen, en plaquant son bassin tout contre lui. Le Viking lui tapait sur l’épaule « T’en fais pas ce sont des gouines... »

 

Lorsqu’ils se retrouvèrent seuls Sacha demandait à Benoît, de sa petite voix nasillarde, s’il avait apporté du vin. Celui-ci éclatait de rire car, lorsque le père de Marie lui avait proposé d’emporter dans son sac à dos un Latour 59, et qu’il lui avait rétorqué que ça ne me semblait pas être le breuvage emblématique des « larges masses », sa réponse lui revenait en mémoire « Tu as encore beaucoup à apprendre mon garçon. L’avant-garde de la classe ouvrière est toujours l’antichambre des nouveaux maîtres... » Sacha caressa la bouteille, la serra contre son gros pull et déclara à Benoît « avec de la saucisse ce serait un outrage aux bonnes mœurs... Nous carburerons à la vodka... » Et ils carburèrent à la vodka. Sacha s’épanchait, il affirmait qu’il fallait d’abord « Nettoyer l’ardoise de l’homme », en français postmoderne on dirait aujourd’hui «Changer de logiciel ». La bonne méthode : la purgation ! Benoît objectait « Le lavage de cerveau… ». Il rétorquait « Purification, désintoxication… ». Benoît renâclait. Sacha sortait un bocal de caviar d’un vieux frigo américain, le tartinait du pain noir. « Faut tirer la chasse pour débarrasser les cerveaux des inhibitions, des préjugés, des pulsions ataviques... » La vodka avait dû être distillée en fraude par des cosaques réactionnaires, elle décapait. Benoît reprenait l’initiative « D’accord tu cures les tinettes. Tu laves plus blanc que blanc. Tu fais place nette mais une fois que c’est nickel chrome tu mets quoi à la place ? » La question qui tue. Sacha le contemplait avec une moue dégoutée « Tu es un affreux petit français matérialiste. Quand nous aurons purgé tout ce qui est vieux et pourri nous bâtirons une société harmonieuse, fraternelle, spontanée... » Benoît pouffait. « Je suppose que dans ton grand nettoyage tu ne touches pas au classement de 1855 » Sacha goûta à demi son humour de petit bourgeois français.

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14 juin 2018 4 14 /06 /juin /2018 07:00
La résistible ascension de Benoît H au troisième sous la houlette d’un Jésus de Nazareth, enveloppé dans un drap de lin, une grosse douzaine d’individus des deux sexes, déclamaient du Brecht (118)

Le pire c’est que Benoît avait tapé juste. Alors qu’ils venaient de le laisser en plan le grand roux se ruait sur eux pas en gueulant « Comment tu sais ça ? » Sans même prendre la peine de se retourner Benoît gueulait à son tour « T’as la gueule de l’emploi. Communiste un jour, communiste toujours... » Au dévers de l’escalier ils le virent, totalement anéanti, se balancer d’un pied sur l’autre. Ils vivaient vraiment une époque formidable où, à chaque instant, le moindre pékin en rupture de ban pouvait passer de l’exaltation la plus échevelée à la déréliction la plus grande. À chaque étage qu’ils découvraient le tableau changeait : au premier une pouponnière, où flottait une odeur aigre de lait se mélangeant avec le parfum fade de fèces des moutards qui dormaient dans des panières pendant que leurs mères subissaient une séance d’éducation politique délivrée par une duègne revêche dont le sarrau, façon sac de jute, mettait en valeur son cul de poulain ; au second, régnait un calme post-coïtal baignant dans des odeurs d’encens et des fragrances de foutre tiède ; au troisième sous la houlette d’un Jésus de Nazareth, enveloppé dans un drap de lin, une grosse douzaine d’individus des deux sexes, même s’il leur sembla difficile de distinguer qui était qui puisqu’ils étaient tous revêtus de sortes de chasuble taillée dans du carton d’emballage, déclamaient du Brecht ; au quatrième c’était une fourmilière où des types hirsutes, couvert d’encre, s’acharnaient sur des presses manuelles pendant que d’autres tapaient comme des déments sur de vieilles machines à écrire ; enfin au dernier une échelle émergeant du plafond donnait accès sans doute à un grenier.

 

Benoît précéda Chloé, il émergea dans un grenier à peine éclairé par une baladeuse pendouillant d’un plafond bas mangé par des toiles d’araignée. Il tendit la main à Chloé pour la hisser. Devant eux, telle une galerie de mine, s’étendait un long couloir sombre tout au bout duquel ils apercevaient un quarteron, deux hommes, deux femmes, penchés sur un établi métallique couvert de cartes d’état-major et de bouteilles de bière. Les contours des corps étaient flous, vacillants sous la lumière jaunasse de bougies plantées sur des chandeliers d’église. Ils murmuraient. Benoît et Chloé avancèrent avec précaution. Le plus grand des types, genre Barberousse, leva les yeux vers eux sans donner le moindre signe d’inquiétude. À sa droite, l’une des filles, une brune au visage dur et ingrat agitait ses larges mains sous le nez d’une sorte de gnome aux épaules étroites dont la tête, couverte d’un béret noir enfoncé jusqu’aux sourcils, branlait en permanence. La seule se tenant immobile était une blonde bien en chair dont le pull de laine écrue soulignait la générosité de sa poitrine. Pour Benoît, aucun doute, Sacha c’était ce petit hanneton rabougri dont ils commençaient à percevoir les phrases hachées « Restez groupés... affrontez ces porcs toujours à découvert... l’important c’est que les caméras filment ce qu’ils nous font... nous sommes des pacifistes...» Sa voix nasillait. De ses mains de petit baigneur Colin, rose orangée, couvertes d’un duvet frisotant, il repliait les cartes donnant ainsi le signal de la fin de la séance d’état-major. La blonde en profitait pour se relever langoureusement afin de se plaquer son long corps le long du Viking qui lui empoignait les fesses.

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11 juin 2018 1 11 /06 /juin /2018 07:00
Une femme fait un signe à ses parents derrière le Mur en 1961. Licence

Une femme fait un signe à ses parents derrière le Mur en 1961. Licence

  • Français ?

 

Et en français avec le son teuton deux pandores les dévisageaient, avec une certaine surprise, se demandant ce qu’un couple pouvait bien fiche en ce lieu à cette heure-là. Benoît se retenait de répondre « Ça se voit tant que ça » mais il se contentait de tendre leurs deux passeports. Les deux poulets cinquantenaires maniaient le français avec une relative aisance souvenir sans doute d’un long séjour dans notre doulce France. Là encore Benoît évita de le leur faire remarquer. Ils les entraînèrent vers la lumière pour mieux examiner leurs passeports. Comme ils étaient en règle les pandores peu amènes se contentèrent de leur signifier de déguerpir de la zone et de gagner au plus vite leur lieu de résidence. Le plus gros, très bovin, ajoutait un « Tenez-vous à carreau » qui en disait long sur ses sentiments à leur égard. Son coéquipier, lui, s’intéressait essentiellement à la plastique de Chloé pourtant ensachée dans des vêtements informes, Benoît sentait dans ses yeux comme une folle envie de procéder à une fouille au corps. Ils revenaient sur leurs pas pour découvrir sur la gauche une ruelle qui se révéla être une impasse donnant sur un haut portail rouillé, entrouvert, sur lequel de blanches colombes de la paix façon Picasso encadraient un chat sans poils debout sur ses pattes arrière qui brandissait son pénis.

 

De la bâtisse, dont ils devinaient l’existence par les points de lumière piquetant sa haute façade, provenait un vacarme sauvage où se mélangeaient des éclats de voix et de la musique sans doute crachée par une batterie de haut-parleurs. Leur irruption, dans ce qui avait dû être la salle de pointage d’une usine désaffectée, ne troublait en rien les occupants qui se livraient, par grappes, à une forme de confrontation verbale et gestuelle débridée sur fond de chants révolutionnaires.  De l’un des groupes, une grande sauterelle, lovée dans un sari immaculé, se détachait pour s’approcher d’eux à petits pas chassés. Ignorant Chloé elle tourbillonnait autour de Benoît en passant ses longs doigts dans ses cheveux tout en ondulant des hanches lascivement. Grossièrement Benoît rompait le charme en la questionnant avec une brutalité qu’il regretta sitôt « Où est Sacha ? ». Très « Peace and Love » elle l’enveloppait de ses bras interminables en se plaquant sur lui « Essaie le Centre de la Paix, camarade... » lui susurrait-elle à l’oreille avant de repartir, tel une elfe, vers l’un des essaims peuplé que de filles qui mélangeaient leurs corps en une houle furieuse. Même Chloé, qui en avait vu d’autres, contemplait le spectacle avec étonnement.

 

- C’est où le Centre de la paix...

 

Le grand type roux, vêtu d’une vareuse vert de gris et coiffé d’un béret à la Che Guevara, à qui Benoît venait de poser la question, le regardait comme s’il découvrait une fiente de pigeon sur ses rangers impeccables. Dans un français tout aussi impeccable il lui balançait.

 

-         Au dernier ducon !

 

-         Tu devrais tirer la chasse plus souvent trouduc t’as une haleine de chiottes...

 

Chloé le tirait par la manche.

 

-         Laisse tomber, tu ne vois pas que notre camarade est un fils de pute...

 

-         Toi t’as des cuisses de gazelle et j’ai une trique d’enfer. Montes au premier avec moi je t’offrirai ma semence révolutionnaire !

 

-         C’est ça mon grand. Vas faire ta lessive à la main et lâche-moi la chatte !

 

-         Toi t’es italienne, une chatte sur un toit brûlant...

 

-         Viens Chloé notre camarade est un réviso en exil...

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