J’ai décidé d’ôter toutes les ampoules de mes lignes pour n’y mettre que des vers, des vers sans pied, bien sûr ! Tout ça pour faire taire les va-nu-pieds, les va-de-la gueule, les va-t-en guerre, les commissaires du peuple, les janissaires aux petits pieds, tous les contempteurs incapables d’entrer de plain-pied dans la haute sphère de mes pensées éclairées.
Le gamin était flemmard
Et un tantinet ramenard
Il ne voulait pas être viandard
Mais bosser dans le pinard
Car il adorait le terroir.*
Comme il ne s’appelait pas Armand*
Qu’il avait donc un papa et une maman
Le bel enfant allait partout chantant
Rien que pour épater le chaland
Qu’il n’en avait rien à faire d’être tendre et saignant.*
Mais sa mère, bonne ménagère
Adulait Hugo Desnoyer le boucher
Tout proche de la rue Daguerre
Qui avait transformé le faux-filet
En veau d’or pour les étoilés.
Tu seras boucher mon fils !
Non je serai caviste !
Mais tu ne seras jamais une star
Je m’en fous je veux vendre du terroir
Tu n’atteindras jamais les sommets de la renommée
Mais maman je n’en ai rien à péter d’être une célébrité
Imagine-toi dans la peau du ténébreux Hugo
Vendre ta viande à Laetitia Casta et au beau Yannick Alleno
Non je veux fourguer le vin de Luc Charlier
C’est qui cet illuminé ?
Un enfant de Léon qui fait des petits litrons
Mon fils t’es vraiment trop con.
Non maman je veux faire la Révolution !
Moi qui te voyais déjà boucher des Grands
Je me contenterai maman
D’être rien qu’un petit caviste
Pour la grande armée des terroiristes...
Signé : Jacquou le croquant
* terroir : dédié à David Cobbold
* Armand en souvenir de Ricet Barrier (visionner ci-dessous)
* tendre et saignant titre de l’opus d’Hugo Desnoyer chez Assouline (voir texte ci-dessous)