L’ouvrage dont est extrait cette contribution de Claude Villers : l’A-B-Cédaire porcinophile est une œuvre collective dont les textes ont été réunis par Jean-Pierre Fournier et André-Pierre Syren, publiés aux éditions Virgile en 2003, est fort goûteux et surtout bénéficie d’une remarquable préface : Saint-Cochon signée par Gérard Oberlé. Comme le V était déjà occupé le Vin a du se retrancher derrière le U de Uvale, même si c’est du raisin dont il s’agit. Qu’importe, ce qui compte c’est qu’il ne soit pas absent de l’abécédaire. Nul besoin de vous présenter Claude Villers le président débonnaire du Tribunal des Flagrants Délires du temps où France Inter était dirigé par des gens intelligents et non par deux rabougris comme aujourd’hui. Désolé pour les abstinents, nous sommes des omnivores...
« Que doit-on boire avec la viande de ce noble animal ? Tout d’abord des vins ni trop tanniques ni trop sucrés. Il faut, d’après les spécialistes, préférer des vins dits rustiques mais sans trop d’âpreté, des « vins de soif » comme disait mon camarade Jean Carmet, grand amateur de « charcutailles ». Et c’est vrai que le bourgueil (rouge), bien frais, si cher à son cœur, est idéal avec un saucisson, une terrine, des rillettes ou un rôti. Mais aussi, pour varier, un saumur-champigny, un morgon ou un corbières, voire un côte de Beaune, un minervois ou même un beaujolais-villages (mais est-ce du vin ?). En blanc, choisissez le vouvray ou le pinot d’Alsace.
La choucroute traditionnelle se cuit au riesling (très sec), donc pourquoi ne pas finir la bouteille (bien fraîche) ou une bonne bière avec ? Mais surtout évitez les rouges (sauf le pinot noir) ! Idem avec un jarret. Tout comme pour les rognons, cette couleur rouge a du mal à se marier. Rien de tel que le mâcon blanc. Il en est de même pour le jambon braisé aux épinards. Là aussi privilégiez un blanc comme le pouilly-fumé.
L’Auvergne, patrie de la potée met en avant sa production uvale peu connue, le côte d’Auvergne (rouge) ou à la rigueur, si vous n’en trouvez pas, du sancerre (rouge).
Le petit salé, évidemment aux lentilles, lui, ne supporte guère (et même pas du tout, à mon goût), le blanc. Allez chercher plutôt du côté de Brouilly, du Forez ou un saint-pourçain.
Pour ce qui est de l’andouillette, les puristes de l’AAAAA (Association Amicale des Amateurs d’Authentique Andouillette) recommandent un champagne très jeune ou (à ma préférence) un cidre bien sec ou une bière ambrée !
Dans les curiosités d’exigeants fondamentalistes intégristes, signalons l’irouleguy, basque, avec le boudin (noir, bien épicé) ou même un madiran, une côte de Castillon (proche de Saint-Emilion), ou un bordeaux-sainte-foy pour ce qui est du rouge. Proscrire à tout prix les blancs (à part, peut-être, un gewurtz et encore !).
Exactement à l’inverse du boudin blanc qui, lui, se satisfait de n’importe quel nectar de la même couleur. A ce propos, Jules Renard affirmait : « Quel animal admirable que le cochon. Il ne lui manque que de savoir faire lui-même son boudin »... ou de discerner la boisson qui la boisson qui lui convient le mieux !
Mais n’oubliez jamais que le porc étant une viande avant tout simple et économique, chez soi ou dans un restaurant de quartier, il n’est nul besoin de rechercher la complication et la sophistication pour l’accompagner ! Le regretté Robert Giraud, journaliste, grand soiffard et ami de Robert Doisneau, dans son livre Les Lumières du zinc (1988), citait cette phrase entendue au détour d’un comptoir de bistro : « Comment y s’appelle ton vin ? – Y s’appelle pas, y s’siffle ! »
Tente toutes les expériences, mais n’oubliez jamais que « cochon » rime avec « bouchon ».
Ce texte devrait amener des contestations. La rubrique commentaires est à votre disposition.