« Je viens d’adopter un vieux...
Pensionné, je vivais seul, sans enfant ni parent. J’ai des amis, bien sûr, que je vois à l’occasion. Cela me suffit. Taciturne ? Pas du tout. Faut entendre les anciens collègues : »Toujours le premier à organiser les fêtes au bureau, une vraie dynamo. » Ou encore : « Un cœur grand comme ça ! » Bref, le candidat tout désigné pour le parrainage.
Je ne ressens pas le besoin de posséder un bateau ou une maison à la campagne. Quant à faire le tour du monde... Je partage l’opinion de cet auteur de génie qui a écrit : « Le voyage, ce petit vertige pour couillons. »
Un bonheur paisible, ici, chez moi, avec celui que j’aimerai comme mon enfant, sans avoir à l’éduquer. La voilà, ma retraite !
Il s’appelle Léo, il a quatre-vingt-dix-neuf ans. Je l’ai connu au centre d’hébergement où je visitais ma tante, les dimanches gros. Léo attendait. Il avait bon caractère. Je le sais pour l’avoir mis à l’épreuve plus d’une fois : je lui chipais ses Whippet... Il ne disait rien. Je les lui rendais et aussitôt, il m’en offrait un. »
L’auteur de ces premières lignes d’un tout petit opus « Mon vieux et moi » publié chez autrement 9 € est un natif d’Athabaska qui vit depuis 1960 au Québec. Un petit bijou de simplicité, d’amour et de tranquille vérité à lire absolument !
« Les vieux oublient, s’étouffent, font répéter, voient trouble, tombent, n’en veulent plus, en veulent encore, ne dorment plus la nuit, dorment trop le jour, font des miettes, oublient de prendre leurs médicaments, nous engueulent tant qu’on serait tenté de les engueuler à notre tour, pètent sans le savoir, répondent quand on n’a rien demandé, demandent sans attendre de réponse, échappent puis répandent, ont mal, rient de moins en moins, gênent le passage, s’emmerdent, souhaitent mourir et n’y parviennent pas… »