En son temps, lorsqu’il vint sur mon blog j’écrivais « Nous ne nous sommes, Michel Rolland et moi, jamais rencontrés, mais j'avais l'intuition, qu'au-delà de son indéniable talent, l'homme avait du panache, de la classe et, suprême qualité pour moi, l'art de dire avec légèreté des choses importantes. Ses réponses sont à la hauteur de mes espérances » Je ne retire ni n'ajoute rien à ce propos.
Mon récent papier, avec un titre certes provocateur, qui s’inspirait du provocateur-roi de la Toile Rémi Gaillard, était dans une veine ironique, sans doute trop, mais il ne portait aucunement atteinte à « tout ce qu’a fait Michel Rolland pour le vin ». En effet, j’ai la faiblesse de penser que, lorsqu’on s’adresse aux Grands, et à sa manière Michel Rolland en est un, comme le fou du Roi, la révérence n’est pas de mise. Ma référence à Rémi Gaillard était dans la veine de la provocation en écho à celle de Michel Rolland telle que rapportée par le plumitif de Sud-Ouest.
J’écrivais « Provocateur l’homme l’est sans contestation mais là, de deux choses l’une, soit il prend ses interlocuteurs pour des demeurés, ce qui n’est pas à exclure, soit il ne veut pas que les médias l’oublient, donc il fait du bruit. Fort bien, grand bien lui fasse, pour l’heure, sans faire injure au grand journal de Bordeaux, ses propos n’ont éveillé que l’intérêt de Sud-Ouest du mercredi 15 septembre, et c’est page 17.
Je pense que la Toile va s'en emparer. D'ailleurs je suis en train de le faire moi-même. Que Michel Rolland veuille créer le buzz (1), faire de la provoc à 2 balles, c'est son droit de bon communicateur sur sa marque mais vraiment il aurait pu s'abstenir d'aller bourrer le mou de petits gars et de jeunes filles d'une de ces nombreuses et malheureuses écoles de commerce qui croient qu'en invitant un people ils se mettent dans les vents portants. Les pauvres, je les plains. »
Franchement ça ne dépassait pas les limites de l’ironie facile, nulle injure, nulle remise en cause du génie de Michel Rolland. Sous réserve que le journaliste ait fait son métier (à vérifier) je me suis cru autorisé au tacle glissant en lisant « Le terroir, paramètre sacro-saint dans le Bordelais, ne compte vraiment que pour les très grands crus, les vins naturellement complexes. Pour les autres, tout est affaire d'œnologie et de marketing. Les Indiens aiment le curry ? Fabriquez-leur un vin au goût de curry, répond Rolland. » Je m’y suis cru d’autant plus autorisé que j’ai depuis fort longtemps dit et écrit que, comme le déclare Michel Rolland « Dans l'avenir, le vin devra faire pareil : s'adapter aux différents marchés. » Pour ma part, je précise certains vins plutôt que le vin. Ce qui me déplaisait surtout, et je l’ai écrit, c’est que ces propos avaient été tenus devant des jeunes gens et jeunes filles d’une école de commerce. Mon ironie sur celles-ci était bien plus acide que celle que j’osais instiller à l’endroit de Michel Rolland.
Je m’attendais à tout sauf à me voir traité : d’envieux de la réussite de Michel Rolland, en étant en cela bien représentatif de la France aigrie et que l’on me rappela que le vin était un produit qui était destiné à la vente. C’est un vieux procédé : la disqualification de celui qui écrit et la condescendance à son endroit : parle de ce que tu connais coco. C'est gentil tout plein et je ne suis pas certain que Michel Rolland avait besoin d'un défenseur utilisant un tel procédé.
Oui j’ai pris le mord aux dents. Oui j’ai vu rouge. Oui j’ai été outrancier. Oui mes mots étaient des scuds disproportionnés. Je l’assume totalement et je conviens que j’aurais pu rester au niveau de mon interlocuteur. Défendre ses amis, oui. Je le fais moi aussi, confère l’affaire du Pinot Noir. Cependant je m’efforce de défendre aussi ceux qui ne sont pas dans la lumière mais qui sont plutôt dans la peine lorsqu’ils sont blessés par des propos ou des écrits hautains. Que l’on soit puissant ou misérable chacun à le droit d’être défendu.
Je conviens, qu’en définitive, tout cela se résume à un petit ouragan dans un verre à dents. La cour de récréation certes mais, tout de même, profiter de l’occasion pour en appeler à la hauteur de vue, ne doit pas pour autant, dans le respect des opinions et des personnes, transformer le débat en robinet d’eau tiède. La bienséance, la politesse, le respect, oui, la connivence, non ! L’entre-soi rassure mais je lui préfère l’expression ouverte, parfois dure, comme je l’ai admis outrancière, car elle permet ensuite de trouver des points de jonction.
Voilà, ni mea culpa, ni cendres sur la tête, simplement l’expression de ce que je suis, que j’assume non pour en tirer gloire, mais pour rappeler que mener certains combats, dans la pure gratuité – dans tous les sens du terme – et une certaine solitude, quand ce n’est pas l’hostilité, peut excuser, ou tout au moins aider à comprendre, que parfois je vois rouge face à des propos qui me prêtent des intentions que je n’ai pas et que je n’aurai jamais. Je n'implore ni pardon, ni soutien, je remets les choses à leur juste place. J'extirpe de mon texte les mots outranciers. La riposte se doit toujours de rester proportionnée à l'attaque - car n'en déplaise au commentateur - c'était une attaque intuitu personae. A l'avenir je prendrai le temps avant de riposter, ça m'évitera de déraper mais bonne parole n'est point parole molle... et bien sûr je serai plus circonspect de là où je mets les pieds.
Bonne journée à tous.
(1) J'ai appris depuis cet écrit que Michel Rolland ignorait qu'un journaliste était présent dans la salle, ce qui rend caduque ma seconde hypothèse. Elle est donc nulle et non avenue. Il se peut donc que la boutade de Michel Rolland ait été montée en épingle et sortie de son contexte. Je suis prêt à en convenir mais alors comment être informé de la réalité des propos de Michel Rolland ? Je lui pose la question.