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22 août 2010 7 22 /08 /août /2010 02:09

Trop c’était trop, le vase débordait, où que nous allions c’était toujours les mêmes antiennes, plus ou moins radicales, verbeuses, fumeuses, vraiment l’extrême-gauche internationaliste charriait une culture politique de bocal.  Ça sentait le renfermé, les chaussettes mal lavées, le tabac froid et la révolution fantasmée. Bien sûr, les types du MIR se colletaient du terrain, allaient au contact des larges masses, qui ici au Chili étaient vraiment composées de damnés de la terre : les mineurs de cuivre tout particulièrement ainsi que le lumpenprolétariat des journaliers agricoles, mais ils le faisaient à la manière des missionnaires pour les « évangéliser », leur bourrer le crane de discours lourds, indigestes, incompréhensibles. Leurs interlocuteurs, s’ils voyaient en eux d’éventuels libérateurs, voulaient avant tout accéder à l’étage du dessus, s’en sortir, nourrir leur famille, instruire leur marmaille. Le peuple pue, braille, picole, baise, il n’en a que faire des lendemains qui chantent confiés à de jeunes bourgeois dont ils sentent la puérilité. Je rongeais mon frein en silence pour ne pas indisposer Chloé qui semblait prendre un réel plaisir dans ces discussions interminables.

Comme souvent, lorsque je ne suis pas dans mon assiette, je me mettais le doigt dans l’œil et ma capacité à voir ce qui se passait sous mon nez s’en trouvait diminuée. Chloé dépérissait. Nous nous murgions la gueule quasi quotidiennement. Nous ne faisions plus l’amour, nous dormions côte à côte comme de vieux amants.  Alors, sans nous concerter, nous nous sommes mis à errer dans Santiago. Paris me manquait. La chape de pollution me piquait les yeux. Chloé masquait ses cernes derrière de grosses lunettes de soleil qui la faisaient ressembler à une star voyageant incognito. Ce jour-là nous étions levés à midi. L’Almeda était interdit à la circulation pour que des milliers de gosses puissent y faire du sport. Le socialisme a de ces naïvetés stupéfiantes : rendre la rue au peuple c’est beau comme Paris plage de l’actuel maire de Paris. Des cris, de très jolies filles et des mères appétissantes, je me complaisais dans un voyeurisme qui exaspérait Chloé. « Te gênes surtout pas petit coq gaulois va faire ta moisson dans le poulailler ! Elles n’attendent que ça ces petites bourgeoises : se faire reluire par un beau mec qui a une trique qui lui tient lieu de cerveau... » Cueilli à froid je prenais la mouche « Et toi va tailler des pipes à tes verbeux au moins ça t’évitera de dire des conneries... » Chloé explosait en italien, chez elle c’était une question de débit et de richesse du vocabulaire. Imaginez-vous une Sophia Loren, certes moins en chair, en furie, volcanique, torrentielle, ponctuant chacune de ses saillies d’une gestuelle où la vulgarité se mêlait à une sensualité, c’était beau.

« Mon amour j’ai un plan pour sortir de cette merde gluante... » Le mon amour touchait Chloé en plein vol, le bel oiseau s’immobilisait sans prendre la pause, posait sur mes yeux un regard interrogateur, fronçait ses sourcils circonflexes, redescendait à ma hauteur, abandonnait sa furie de femelle pour reprendre ses habits d’aventurière. « Un plan, mon beau légionnaire, tu me leurres, tu t’esquives, il faudra vraiment que tu me surprennes pour que cette fois-ci je te suive... » Je me faisais carnassier « Tu croyais vraiment que j’allais te laisser me quitter comme une vieille chaussette... » Sa réponse claquait « Oui ! 

-         Tu mens !

-         J’ai réservé une place sur le prochain vol pour Rome.

-         Je sais via Madrid.

-         Tu sais...

-         Oui et j’ai même ton passeport dans ma poche.

-         Salaud, rends-le-moi

-         Viens le chercher mon amour

-         Tu m’aimes ?

-         Pire, sans toi je me tire une balle...

-         Menteur !

-         Tu es mon double, ma seule raison de vivre...

-         Foutu mec, pourquoi ne cesses-tu pas de dilapider ta vie...

-         Que veux-tu que j’en fasse de ma vie ! Je n’en suis pas propriétaire...

-         Alors, et ce plan ?

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