L’une des rares chansons de Johnny qui m’a trotté dans la tête c’est « Retiens la nuit », 1961, dans le film à sketches « Les Parisiennes » réalisé par Marc Allégret Johnny chantait pour Catherine Deneuve qui interprétait Sophie.
Retiens la nuit / Pour nous deux jusqu'à la fin du monde / Retiens la nuit / Pour nos cœurs dans sa course vagabonde / Serre-moi fort contre ton corps / Il faut qu'à l'heure des folies / Le grand amour raye le jour / Et nous fasse oublier la vie…
La nuit, les corps à l’heure des folies… il y avait de quoi faire rêver l’ex-enfant de chœur qui n’aimait rien tant, au moment de la distribution des hosties par le curé-doyen, lorsqu’il tendait le petit plateau sous le menton des jolies femmes de la paroisse, agenouillées, mains jointes, jamais tête nue, que d'imaginer : ils les imaginait dans les bras de leurs amants…
La nuit c’est aussi l’heure des alcools forts, l’Hemingway, la mythologie du barman qui, dès votre arrivée, vous prépare votre cocktail favori en vous donnant du mister Bogart, alors vous vous prenez pour Philip Marlowe, Mike Hammer ou pour Raymond Chandler, Mickey Spillane… les blondes platinées… les indics minables… les flics véreux… les politiciens stipendiés… Une faune, un écosystème qu’il faut cultiver afin de ne pas sombrer dans la mélancolie des temps post-modernes si conformistes...
Je ne suis pas un pilier de bar mais de ceux qui cultivent et défendent, non pas les night-clubeur mais les seigneurs qui savent encore retenir la nuit… refaire le monde… griller un peu la vie…
Trop d’asepsie tue la vie alors lorsque Carole m’a entraîné à LMDW Fine Spirits link du carrefour de l’Odéon pour que Stanislas Jouenne, barman et responsable de la boutique m’initie à l’art du vieillissement des cocktails, j’ai de suite dit oui.
Depuis quelques années, les hommes de l’art du cocktail, des mélanges, du mix, de part et d’autre de l’Atlantique s’intéressent au vieillissement en fût, technique jusque-là réservée aux vins et spiritueux. Son alchimie complexe, et notamment la subtile combinaison d’oxydation et d’extraction du bois, apporte fondu délicat, caractère et longueur en bouche au cocktail. En un mot, une création à part entière.
En 2011 Stanislas Jouenne, un passionné, a entamé ses recherches sur ce procédé. Aidé d’Alexandre Gabriel (Cognac Ferrand), il a mis au point une technique de vieillissement des cocktails directement inspirée de celle utilisée pour la maturation des spiritueux. Pour ce faire il a choisi des fûts de 10 litres en chêne du Limousin, préalablement culottés avec un spiritueux. L’alcool utilisé pour chemiser le fût est retenu en fonction des caractéristiques de chaque cocktail et de l’apport aromatique recherché.
Ainsi est née la collection Barrel Aged Cocktails composée de 7 recettes :
- Quatre grands classiques : Manhattan et Harvard (fûts culottés au rhum) ; Martinez et Negroni
(fûts culottés au cognac) ;
- Deux grands classiques revisités : Smoked Mexican Negroni et Rum’tan (fûts culottés au cognac) ;
- Une création originale : Botzaris, une base de cognac et rye whisky vieillie en fût culotté au rhum.
En tant que Taulier respecté sur la place de Paris j’ai eu le privilège de la part de Stanislas à un exercice exceptionnel :
- J’ai choisi 3 cocktails
- Stanilas me les a préparé en direct live puis a servi le même vieilli en fut de chêne ;
- J’ai dégusté et comparé les 3 x 2 ;
- L’effet vieillissement est évident à la fois pour l’aspect visuel du cocktail : plus de brillance chez le Barrel, et pour le goût : plus de finesse, de douceur et de longueur en bouche toujours pour le vieilli en fûts de chêne.
- J’ai choisi le Manhattan (Nikka Whisky+Angostura+Noilly Prat rouge) fût culotté au rhum.
Démonstration en images :
Pour les amateurs d’étymologie par traduction directe de l'anglais, « cock » veut dire « coq » et « tail » : « queue » mais je ne m’aventurerai pas sur les nombreuses spéculations quand à l’origine du mot
Les Barrel Aged Cocktails font l’objet d’une production limitée.
Chaque création est proposée en bouteille de 70cl. Prix entre 59 et 80 €, selon la création. Dans la limite des stocks disponibles comme on dit.