Toute la presse la voulait. Les chaînes de télévision la suppliaient. Même les anglo-saxons si prompt à chercher des poux dans la tête des français s’impatientaient. Quelques coups de fils discrets lui firent même savoir qu’en haut lieu elle serait la bienvenue. Et pendant ce temps-là Marie dormait comme une bienheureuse avec Lénine lové sur le second oreiller et Tintin au Congo qui logeait dans une grande volière posé sur un tapis persan. Elle rêvait d’Abraham son grand kanak si doux, si prévenant. Elle se voyait nager à ses côtés dans le lagon de la mer de Corail. Elle lui téléphonait. Il répondait de sa voix chantante. « Quand viens-tu me rejoindre » l’interrogeait-elle ? « Dès que je peux ma belle » lui répondait-il. Le lendemain matin Marie s’éveillait à l’aurore et tout en sirotant son café avec une paille elle appelait César Compadre pour lui accorder une interview exclusive. Il rappliquait dare-dare. Avec gentillesse elle se pliait au jeu des questions-réponses puis, elle lui déclarait, « et si je vous livrais un vrai scoop, ça vous ferait plaisir ? Le grand César en riait de bon cœur « Je vous écoute mademoiselle de Saint-Drézéry... »
« Beaucoup de beaux vins fait d’excellents vignerons ne sont pas vendus à leur juste valeur car leur appellation manque de notoriété. Alors comment faire pour percer dans un univers qui privilégie les situations acquises, comme celles des GCC qui vendent du luxe, du statut avant de vendre du vin, ou comme celles des vignerons stars qui vendent des mots avant de vendre leur vin, ou ceux qui s’en remettent aux grands épiciers car ils sont en capacité d’aligner des budgets de promotion permettant de mettre en avant les vins auprès des consommateurs ? Efficacité commerciale avant tout : les distributeurs de vin ne sont pas des mécènes. Pour autant faut-il tout sacrifier pour entrer dans le système médiatique qui permet de capitaliser de la notoriété par le truchement de la presse spécialisée, des faiseurs de roi ou des juges aux élégances ? « Mais alors ce n'est plus la bouteille qu'on juge... C'est l'attachée de presse ? » Je ne sais pas pourquoi la profession est trustée que par des nanas ? (rires) La notoriété se bâtit-elle sur le seul bruit du tambour médiatique ? La réponse est bien évidemment non car dans cet univers de l’instantanéité, du scoop, de la fausse différence, une nouvelle « découverte » chasse très vite « la petite merveille » dénichée la veille chez un small is beautiful du fin fond du terroir. Le nouveau vieilli vite aussi bien pour les produits de pur marketing que pour ceux surfant sur des tendances pas toujours solides... »
« Mon cher César, si je puis me permettre cette familiarité, puisque je vous ai tiré si matinalement de votre lit je vous propose que nous déjeunions à l’ancienne, sans chichis, avec le chef de culture et le maître de chai. Nous reprendrons ce bavardage le ventre plein.