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11 juillet 2018 3 11 /07 /juillet /2018 06:00
Le palais d'hiver, résidence des tsars, où s'étaient réfugiés le gouvernement provisoire qui abdique face aux communistes dans la nuit du 7 au 8 novembre 1917 | Olivier Pauly / Ouest-France

Le palais d'hiver, résidence des tsars, où s'étaient réfugiés le gouvernement provisoire qui abdique face aux communistes dans la nuit du 7 au 8 novembre 1917 | Olivier Pauly / Ouest-France

Cette chronique est écrite en temps réel pendant la demi-finale Belgique-France à Saint-Pétersbourg.

 

Je suis calfeutré car je ne veux pas être influencé par les cris de joie ou de déception montant de la rue : beaucoup visionnent le matche dans un café…

 

Pendant toute la sainte journée sur les réseaux sociaux les deux camps se sont affrontés,avec plus ou moins d’humour, on sentait chez mes amis belges une jubilation sourde : enfin ils allaient claquer le bec à ces ramenards de Français jamais avare d’une bonne histoire belge. 

 

Moi ça ne me dérange, ça ne me touche pas, ce n’est que du football, un jeu, que le meilleur gagne je l’espère sans aucune contestation.

 

Comme je vous l’ai avoué je n’ai pas l’âme d’un supporter, j’aime le beau jeu et ces deux équipes sont capables d’en produire. C’est tout le mal que je leur souhaite.

 

Ça se passe à Saint-Pétersbourg la capitale des tsars, cette improbable ville flottante, fondée il y a plus de trois siècles (1703) Pierre le Grand a voulu faire de Saint-Pétersbourg une ville européenne et donner son premier port à l’empire. N’avait-il pas conçu ce rêve en apprenant la navigation en Hollande, dont il imposa les multiples canaux lors de sa construction ?

 

« Née d’une double victoire sur les Finlandais et les marais, Saint-Pétersbourg est un acte contre nature, issu d’un désir impérieux de voir triompher la volonté sur les éléments. Ici, tout est démesure : palais, ponts en fonte et quais de granit, jardins et églises, statues de bronze. La Neva, surtout. Fleuve qui inspira nombre de poètes et dont les reflets changeants, à l’aube comme au crépuscule, au soleil ou dans la brume, donnent à la ville une aura si particulière. Une sorte de douceur de vivre qui tranche avec la rudesse du climat.

 

Ce n’est donc pas un hasard si tous les auteurs russes, de Pouchkine à Gogol, ont vécu ici et non à Moscou. Si Voltaire, Gérard de Nerval, Sartre, Gide ont été fascinés par la bipolarité de la cité. Une fois visités les incontournables musées, palais et églises, il faut donc se faufiler dans le roman russe.

 

La perspective Nevski d’abord, chère à Gogol, qui s’étend sur plus de 4 km, de l’Amirauté à Ligovski Prospekt.

 

à 20 km de la ville : le palais Sainte-Catherine, dit Tsarskoïe Selo, et ses 100 hectares de parc. C’est dans le lycée impérial, contigu au palais d’Eté, d’inspiration baroque orné d’une splendide façade turquoise et or longue de 300 m, que Pouchkine, autre grand poète russe, fit ses études. Celui qui décrivait Saint-Pétersbourg « comme étrangère à sa propre patrie »

Magali Cartigny Le Monde

 

Les soirs d’été, lors des nuits blanches, une lumière inégalable décrite par Custine comme une fantasmagorie. Alexandre Dumas, dans Le Maître d’armes (1859), le résume ainsi : « Aimer pendant de pareilles nuits, c’est aimer deux fois. »

 

Aimer oui aimer…

 

Lorsque le résultat tombera, faisant des heureux et des malheureux, j’aurai une pensée pour Arno chantant Adamo.

 

Deux symboles de l’absence de frontière grâce à la musique.

 

Lorsque mon amie Magalie vendait des fromages français qui puent aux belges j’allais la rejoindre le week-end à Bruxelles. Elle habitait dans le quartier d’Arno et nous nous étions promis d’aller l’écouter ensemble.

 

23 mars 2016

Cher Arno, longtemps je me suis rendu à Bruxelles par le Trans-Europ-Express pour que nous ne connaissions plus la guerre… et la voilà chez toi... 

 

Arno en 2012 dénonçait l'absurdité de notre société de repus, il se méfiait de la contestation érigée en tendance, en ligne officielle.

 

« Je ne veux pas appeler à la révolte, autrement je serais comme Staline, Hitler, Mao. Moi, je suis seulement un chanteur de charme raté, donc je constate seulement ». Pas optimiste, optimiste notre Arno « J'ai peur parce que la gauche d'aujourd'hui est devenu la droite, et la droite est devenue l'extrême-droite. En Europe, le tendance d'extrême-droite est incroyable. Regarde ce qui se passe en France, en Belgique, en Hollande, en Italie, en Espagne, en Grèce… Mon père a vécu une guerre, mon grand-père deux, je suis la première génération qui n'a pas vécu une guerre en Europe. En 68, j'avais 19 ans et c'était la première fois dans l'histoire que les jeunes avaient leur propre culture. Pour nous, tout était possible. Maintenant j'ai des enfants et je vois que des jeunes font des études pour un métier qui n'existera plus dans trois ans. On vit le même changement que dans les années 60, mais avec un Etat des années 30. »

 

22 mai 2016

 

Et moi, pendant ce temps-là, je me retrouve dans une salle de concert, Le Trianon, pleine à craquer, c’est la première fois depuis la nuit du Bataclan que je retrouve au pied d’une scène, au coude à coude, comment ne pas y penser puisque lorsque j’avais réservé ma place j’avais noté « Les dates d'Arno, initialement prévues au Bataclan, sont reportées au 19 et 20 mai 2016 à 20h00 Le Trianon 80 boulevard de Rochechouart. Tous les âges, toutes les conditions, Arno a mis le feu pendant deux heures avec ses musiciens qui envoyaient du bois, même que la salle a chanté juste avec lui Putain, putain, nous sommes tous des Européens et, bien sûr, tout à la fin, les filles du bord de mer, nous ont permis de reprendre en chœur : et encore, et encore… de faire tchouin, tchouin… que du bonheur. Y’a pas d’âge pour ça et ça c’est aussi Paris…

 

Révolution russe. 100 ans plus tard, Saint-Petersbourg oublie et se souvient 

 

 

La statue de Lénine s’adressant au peuple est toujours en place. Monumentale, devant la gigantesque maison des Soviets. Un peu plus loin, le tout nouveau centre commercial arbore une architecture volontairement stalinienne. Mais sous ses arcades, ce ne sont que marques de luxe et autres étendards de la société occidentale, de la mondialisation.

 

Selon un récent sondage, un jeune russe sur deux ignorerait qui est… Lénine. Pourtant, dimanche, une foule immense, jeune, s’agglutinait place du Palais d’hiver, pour un son et lumière commémorant la révolution de 1917.

 

Cent ans plus tard, une génération de Russes qui n’a jamais vécu sous le communisme atteint la majorité. « Pour eux, il est extrêmement compliqué de concevoir ce qu’était l’URSS, estime Eugène Berg. Et vis-à-vis de l’Histoire, la Russie ne peut pas évacuer complètement Staline comme l’Allemagne a pu le faire avec Hitler. Les crimes commis sous Staline ne sont pas contestés mais il reste aussi celui qui a défait les nazis. C’est très compliqué. »

 

Point de départ de la révolution bolchevique d’octobre 1917, celle qui mettra un terme au tsarisme et bouleversera la marche du monde, Saint-Petersbourg est aujourd’hui à l’image d’un pays qui a tourné la page, et la tourne encore, d'un vingtième siècle communiste.

 

Cent ans plus tard, une génération de Russes qui n’a jamais vécu sous le communisme atteint la majorité. « Pour eux, il est extrêmement compliqué de concevoir ce qu’était l’URSS, estime Eugène Berg. Et vis-à-vis de l’Histoire, la Russie ne peut pas évacuer complètement Staline comme l’Allemagne a pu le faire avec Hitler. Les crimes commis sous Staline ne sont pas contestés mais il reste aussi celui qui a défait les nazis. C’est très compliqué. »

 

D’autant que pour chaque Russe, la relation à la période communiste est singulière. « Quand une famille a été privée de ses biens au nom du collectivisme, elle n’en a pas retrouvé la jouissance avec l’écroulement de la société communiste, explique Ivan Medved, dont les grands-parents ont vu leurs terres confisquées. Cela laisse des traces… »

 

Néanmoins, de l'autre bord, il reste des nostalgiques. Pour Youri, 55 ans, cela peut s’expliquer. « Sous l’URSS, nous avions un système éducatif très performant, rappelle ce Moscovite de passage dans l'ancienne capitale russe. Pareil pour la santé. Les droits acquis étaient nombreux. Quand on a fait le ménage à la chute du communisme, on est peut-être allés trop loin. »

 

Les cafés soviétiques : un concept nouveau à Saint-Pétersbourg 

 

« Les deux « cafés soviétiques » visités sont bien différents de ce à quoi on aurait pu s’attendre.  Est-ce vraiment comme cela que vivaient les Soviétiques, quand ils allaient prendre un verre ? Eh bien, tout simplement, ils n’allaient pas au café. A leur arrivée au pouvoir, les Bolcheviks ont tenté de mettre fin à ces enseignes, ainsi qu’à tout type de restaurants privés. Ces derniers, contraints de fermer, devaient être remplacés par des cantines collectives ou stalovaya, modèle socialiste de la restauration. Avec la croissance urbaine, nombre de ces cantines ont été construites, aménagées et gérées par le pouvoir central. Du fait de leur qualité médiocre, des restaurants privés « secrets » se sont développés en marge du système légal.

 

Après l’époque stalinienne et surtout sous l’ère gorbatchévienne, des établissements, restaurants et cafés privés sous forme de coopératives, ont été autorisés. Néanmoins, le café comme place de repos, où l’on peut s’asseoir et discuter, restait assez rare. Le système de restauration soviétique était marqué par une hiérarchisation. En haut de celle-ci se trouvaient les restaurants, réservés aux membres du Parti. A l’étage intermédiaire, les cafés proposaient des glaces, gâteaux, bonbons et autres produits sucrés. En théorie ouverts à tous, ils correspondaient en pratique à une population relativement aisée. Enfin, les stalovaya proposaient une nourriture de mauvaise qualité pour une population plus pauvre. »

 

Comme c’est étrange au moment où je mets le point final à cette chronique je regarde mon compte Twitter qui annonce :

 

 

La France disputera dimanche (17h00) à Moscou la 3e finale de Coupe du monde de son histoire après 1998 - victoire face au Brésil (3-0) - et 2006 - défaite face à l'Italie (1-1, 5 t.a.b. à 3) #CM2018 #AFP

Pour moi les terrains de foot n’ont pas de frontières je suis fou d’Arno lorsqu’il chante Adamo, ma part de belgitude est entière…

C’est fini. Enfin, pas vraiment, parce que les Belges joueront samedi pour la troisième place du Mondial, mais l’incroyable espoir qui traversait tout le pays depuis quelques jours, l’espoir de pouvoir gagner la Coupe du monde de football, le Graal absolu du sport numéro 1, s’est évaporé dans la nuit de Saint-Pétersbourg.

 

Un petit but qui fait toute la différence. Un petit but qui change un destin et qui transforme un rêve en réalité ou en regrets éternels, selon le camp où l’on se place.

 

On n’a pas assisté à une rencontre flamboyante, ce mardi, contre la France. Loin de la remontada face au Japon ou du football total contre le Brésil. On a, au contraire, eu droit à un match tactique, fermé, cloisonné par une formation hexagonale pas forcément chatoyante mais très impressionnante d’organisation, de maîtrise et d’efficacité. Une équipe de France plus que jamais à l’image de son entraîneur, Didier Deschamps. L’homme qui contrôle tout et qui s’adapte à toutes les oppositions a créé un collectif prêt à mettre le talent individuel au service de l’intérêt général et de la roublardise. La quintessence du football moderne, où il n’y a pas de place pour les sentiments mais où tout se joue sur le résultat. Chapeau.

 

La beauté et la cruauté du football à la fois

 

Et au final, donc, c’est un petit but, sur une phase arrêtée, qui a fait la différence. C’est toute la beauté et la cruauté du football à la fois. Ce petit supplément d’âme entre une occasion ratée et un corner réussi. Un petit but mais une différence énorme. Car toute la Belgique, ou presque, était devant le match en croyant plus que jamais dans l’histoire du pays, en un destin triomphal et à une semaine encore de fêtes et de passion dans les rues, devant les écrans et sur les terrasses.

 

Car c’est le plus grand mérite des Diables rouges : ils ont donné de la joie et de la fierté à tout un pays pendant trois semaines. On a oublié, un moment, les querelles et les soucis pour passer quelques jours d’émotion collective, simple, contagieuse, dont on manque sans doute cruellement.

 

Alors, évidemment, c’est un silence assourdissant qui s’est abattu sur le Royaume sur le coup de 22h.

 

La Belgique ne gagnera pas la Coupe du monde. Elle ne gagnera peut-être jamais la Coupe du monde. Mais la génération en or rentrera de Russie avec le sentiment d’avoir rempli plus que sa mission. Elle a prouvé qu’elle n’était pas seulement un espoir potentiel ou une simple addition de jeunes vedettes sans âme, mais bien une réalité tangible dans le football mondial et elle a passé un cap en s’installant dans le carré final et en alignant cinq succès d’affilée.

 

Évidemment, et c’est sans doute neuf dans l’état d’esprit belge, on en aurait voulu un peu plus et le potentiel était là pour aller jusqu’au bout. Mais il faut garder l’image de ce formidable groupe qui allie le talent, la solidarité, la volonté de briller et qui donne le sourire de Bruges à Arlon.

 

Un but. Un tout petit but. Mais un but qui change le destin. En somme : la définition du foot.

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commentaires

M
Ne regarder que d'un oeil pour comprendre mieux que personne les choses. Bravo.
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M
Ne regardez que d'un oeil pour percevoir les choses mieux que personne. Bravo.
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P
Ben dis donc mon bon Taulier te voila inspiré pour pondre ainsi un telle chronique pendant les 15 minutes d'une mi-temps ! A la fin on comprend que, pris au jeu, tu tire à la ligne avec un entrain que tu sais faire partager. C'est donc, en fait, 105 minutes consacrées à cette rédaction ce qui n'enlève rien à la qualité de ce morceau de bravoure. Encore...
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P
Une fois de plus la mouche du coche lit trop vite et survol ( bzz,bzz ) le texte.Et c'est ainsi qu'on confond demi finale et mi temps. Vite du Flytox !
J
Mon cher Pax je n'ai pas regardé le match : j'ai pris mon temps, préparé mon dîner, dîner, écrit par petits bouts en laissant le temps au temps.

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