« … une fois par an, on allait en montagne pour honorer le saint patron du lieu et visiter Ascruthia et Coraci, deux villages de montagne abandonnés après l’inondation qui avait tout balayé au temps où les grands parents étaient jeunes mariés. Après les visites aux villages et la messe dans l’église dédiée au saint, on s’arrêtait dans la pinède, on mangeait et on buvait pendant des heures […]
« J’étais impatient que le déjeuner finisse : les poivrons rôtis à la braise du feu de yeuse ; les pommes de terre et les œufs enfouis à cuire sous la cendre brûlante ; les tripes des chèvres enroulées autour du gras et des frites, noyées dans un bain d’huile, oignon et poivre ; et puis les macaronis cuits à la maison , assaisonnés de sauce de chèvre blanche ou rouge ; le capocollo, les lardons, les salamis piquants, les fromages doux de brebis et de vache et piquants de chèvre ; les tartes à la mûre des ronces et à la mûre de mûrier, à la cerise de montagne… »
Si les Calabrais de l’Aspromonte peuvent apparaître comme un «peuple de mâles», une race maudite qui n’a pour horizon que la guerre, leurs femmes, à l’opposé, «trament depuis toujours pour la paix».
« La ‘ndrangheta est comme la nature infecte d’une très belle femme ; les amants inexperts la pénètrent, brûlants de désir, et au lieu de l’apaisement des sens, ils trouvent l’anéantissement de l’âme. »
« Dans les livres comme dans la vie, il n’y a pas d’un côté «les bons» et de l’autre «les méchants». Une troisième catégorie d’individus existe: les «assassins par nécessité historique». Inclassables en termes moraux. Echappant à toute forme de jugement. Des êtres qui sont le siège d’une culture ancestrale et qu’il est impensable de vouloir étiqueter. Encore moins condamner. Et qui résident prioritairement en Calabre, terre de grande tradition grecque et de grande désespérance économique.
Tel est le thème du thriller calabrais à succès, «la Soie et le fusil», signé Gioacchino Criaco. Où il est démontré qu’«un homme et un peuple qui ne sont pas en mesure de défendre leur propre territoire cessent d’être un homme et un peuple».

Tout ici remonte à la nuit des temps, à la mythologie des «Aigles» (la famille Therrime) et des «Loups» (la famille Dominici). Deux clans qui s'affrontent et se disputent des terres. L’auteur affiche nettement une préférence pour les Dominici. Dans leur guerre, ils ont toujours refusé, même aux pires moments, de s’allier avec la mafia locale, la célèbre 'Ndrangheta, le bras armé des puissants. »
Lire ICI la critique de Marcelle Padovani le 06 avril 2018 : Avec "la Soie et le fusil", l'écrivain calabrais Gioacchino Criaco signe un romanzo criminale aux accents mythologiques. Epique.
Résumé :
De part et d’autre d’une vallée de l’Aspromonte, deux familles s’affrontent dans une guerre sans âge et font le décompte de leurs morts : les Therrime contre les Dominici, les Aigles contre les Loups. Leur inimitié est balayée un jour par l’inondation qui emporte toute la vallée fertile jusqu’au bord de la mer et les deux peuples migrent sur la côte dans les « Jardins », où parmi les vergers les enfants font des courses à cloche-pied. C’est là que Julien, dit le Gecko, et Agnese, la Nymphe, deux descendants des lignées ennemies, tombent amoureux pour la vie, sous le regard jaloux du frère jumeau d’Agnese, Alberto, le Chiot, et avec la complicité des vieilles tisseuses de soie.
Mais dans l’Aspromonte les trêves ne durent jamais bien longtemps, et lorsque le père de Julien Dominici est tué, la vendetta reprend et la peste noire s’abat sur la vallée : Julien devient un monstre, un tueur. Alors qu’il sort de prison, vingt ans plus tard, il découvre qu’il est mêlé contre son gré à une sombre histoire de trafic de drogue avec les triades chinoises. Le combat reprend.
Souffle épique et antique, sentiment de la nature, affrontement des mythologies (épopées calabraises, mais aussi légendes de la Chine), thriller ultra contemporain, ce roman fait magnifiquement la fusion entre le polar et les batailles mythologiques qui se poursuivent aujourd’hui, sous le poids d’un implacable destin.

CANESTRATO D'ASPROMONTE
Sur le massif montagneux d'Aspromonte (Calabre), au pied du quel ce fromage est élaboré, paissent de nombreux troupeaux de brebis, de chèvres et de vaches. Aussi, utilise-t-on toujours au moins deux laits, en fonction des saisons de mise bas des animaux. Les meilleures origines, les plus caractéristiques du cru, sont sur le versant tyrrhénien, les communes de Scilla, San Syefano d'Aspromonte, Sinopoli, Scido. C'est un fromage caillé divisé et à égouttage acceléré sous presse. Il se présente sous la forme d'une petite roue à talon convexe de 1,5 à 4 kg. On le consomme après 2 mois de cave, soit en dessert, soit en hors d'oeuvre, lorsqu'il est conservé dans l'huile d'olive à la mode locale.

« Bordé par la mer Tyrrhénienne à l’ouest et la mer Ionienne à l’est, le territoire de la Calabre jouit d’une géographie très diversifiée composée d’un vaste littoral, de hauts plateaux et de montagnes luxuriantes. Séparée de la Sicile par le détroit de Messine, la région forme la pointe de la botte italienne dans l’extrême sud de la péninsule. Bien qu’on y cultive la vigne depuis le 7e siècle avant notre ère, la Calabre figure aujourd’hui parmi les régions d’Italie où il se produit le moins de vin. Optant longtemps pour une production de vin en vrac exporté vers le nord, la Calabre mise depuis les années 1970 sur la commercialisation de ses vins d’origine. Bien qu’elle accuse un certain retard par rapport aux autres régions du Mezzogiorno en termes d’investissement, la Calabre a entamé depuis peu la modernisation de son vignoble avec des résultats forts encourageants.
La Calabre demeure une région essentiellement agricole. Dans l’ensemble, la vigne reste toutefois secondaire par rapport aux autres formes de cultures telles les agrumes et les olives. Deux principaux cépages d’origine grecque, le Gaglioppo, pour les rouges, et le Greco, pour les blancs, dominent aujourd’hui le paysage viticole calabrais. L’écrasante majorité des vins de la région sont rouges avec 90 % de la production totale.
Surnommée Enotria (terre de vins) pendant l’antiquité, la Calabre produit sans doute l’un des plus anciens vins d’Italie, le vin Cirò DOC, cultivé dans les environs de la ville de Cirò Marina près de Crotone. De loin l’appellation la plus réputée de la région, ses collines ensoleillées situées sur la côte ionienne sont particulièrement propices à la viticulture.
Le vin de Cirò découlerait du vin de Kremissa, le nom de la colonie grecque qui occupait initialement l’emplacement de Cirò Marina à l’époque de la Magna Graecia (la Grande-Grèce). On raconte que c’est le vin que buvaient les athlètes calabrais pour célébrer leurs victoires lors des premières olympiades.
Confituré, puissant et acidulé, le Cirò est un rouge typique des chauds climats du sud de l’Italie et l’incarnation même du cépage Gaglioppo. Sa forte personnalité exprime un charme rustique intimement associé à son terroir d’origine. Contrairement à d’autres cépages du Mezzogiorno reconnus pour leurs robes denses et opaques, les vins de Cirò possèdent une teinte plus pâle et des nuances orangées. Les Riserva se conservent aisément pendant une bonne décennie. La récente modernisation du vignoble et des techniques de production tend à donner des vins moins alcoolisés, plus ronds et moins susceptibles à l’oxydation. De récentes expérimentations avec le cépage Magliocco et d’autres cépages internationaux comme le Cabernet Sauvignon assemblé au Gaglioppo livrent dernièrement d’assez bons résultats qui contribuent au rayonnement des vins de la région. Mais, le récent boom commercial vécu dans les Pouilles et la Sicile tarde encore à venir et la Calabre demeure toujours marginale dans le circuit des œnophiles.
Le vin de Cirò représente à lui seul près de 85% de la production du vin DOC calabrais. Les DOC de Lamezia, Scavigna et Savuto, sur la côte tyrrhénienne, constituent le second pôle viticole significatif de la région. Les autres DOC de la Calabre telles que Melissa, Donnici, Bivongi ou Pollino perdent de plus en plus de terrain et sont rarement exportées. Produit dans la ville de Bianco au sud de Reggio Calabria, le Greco di Bianco figure parmi les meilleurs vins doux d’Italie. Rare, il s’agit d’une curiosité gastronomique à ne pas manquer lors d’un séjour dans la région. »