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2 août 2016 2 02 /08 /août /2016 06:00
De la séduction : le je ne sais quoi et le dégagement… à l’attention de tous ceux qui veulent enfermer notre goût dans un faux esprit de géométrie

« Un je ne sais quel charme encore vers vous m’emporte… » Polyeucte de Corneille.

 

Le charme, la grâce, le plus souvent l’amour est déclenché par la beauté mais ce charme, cette grâce « plus belle encore que la beauté, comme le dit La Fontaine, voilà le pur je ne sais quoi.

 

« Il y a quelquefois, dans des personnes ou dans les choses, un charme invisible, une grâce naturelle, qu’on n’a pu définir, et qu’on est forcé d’appeler, le JE NE SAIS QUOI.»

Montesquieu dans l’Essai sur le Goût

 

« Qui voudra connaître à plein la vanité de l’homme n’a qu’à considérer les causes et les effets de l’amour. La cause en est un JE NE SAIS QUOI (Corneille), et les effets en sont effroyables. Ce JE NE SAIS QUOI, si peu de choses qu’on ne peut le reconnaître, remue toute la terre, les princes, les armes, le monde entier. Le nez de Cléopâtre : s’il eut été plus court, toute la face de la terre aurait été changée. »

Pascal, fragment 162 des Pensées.

 

« Cependant, le je ne sais quoi n’appartient pas au seul vocabulaire de la psychologie amoureuse : il appartient aussi à celui de l’esthétique. »

 

Cette « beauté quasi toute nue et solitaire. », ces « certaines choses ineffables, ces grâces secrètes, ces charmes imperceptibles. »

 

Baltasar Gracian le rattachait à la perfection « Le je ne sais quoi, dit-il, est l’âme de toutes les qualités, la vie de toutes les perfections, la vigueur des actions, la bonne grâce du langage et le charme de tout ce qu’il y a de bon goût. Il amuse agréablement l’idée et l’imagination, mais il est inexplicable. C’est quelque chose qui rehausse l’éclat de toutes les beautés, c’est une beauté formelle ; les autre perfections ornent la Nature, mais le JE NE SAIS QUOI orne les ornements eux-mêmes. De sorte que c’est la perfection de la perfection même, accompagnée d’une beauté transcendante et d’une grâce universelle. »

 

L’esprit de finesse cher à Pascal, « différent de l’esprit de géométrie par sa forme et son objet, il n’est pas en dehors de la raison ; il n’est pas une intuition pure, car il a ses procédés et son ordre ; il est une certaine façon de juger les choses dont « les principes sont dans l’usage commun et devant les yeux de tout le monde « , principes « si déliés et en si grands nombres qu’il est presqu’impossible qu’il n’en échappe (…). On les voit à peine, on les sent plutôt qu’on ne les voit ; on a des peines infinies à les faire sentir à ceux qui ne les sentent pas. Ce sont des choses tellement délicates et si nombreuses, qu’il faut un sens bien délicat et bien net pour les sentir, et juger droit et juste selon ce sentiment, sans pouvoir les démontrer par ordre, comme en géométrie. »

Dans son livre « Le je ne sais quoi et le Presque-Rien » Wladimir Jankélévitch écrit « Le je ne sais quoi est pour l’intellectualisme un sujet inépuisable d’inquiétude et de perplexité : il entretient en nous cette espèce d’inconfort intellectuel et de mauvaise conscience, ce malaise né de l’incomplétude que Platon appelait aporia, et qui est bien, à sa manière, un mal d’amour, une nostalgie érotique, une amoureuse insuffisance. »

 

Baltasar Graciàn (né en 1601 meurt en 1658 prêtre au sein de la Compagnie de Jésus en délicatesse permanente avec sa hiérarchie il sera destitué de sa charge pour manquement au devoir d'obéissance) in Le Héros éditeur Le Promeneur le cabinet des lettres

 

Le dégagement, c'est l'âme de toute qualité, c'est la vie de toute perfection, c'est l'élégance en action, c'est la grâce en paroles, c'est ce qui enchante le goût, c'est ce qui flatte l'intelligence - c'est ce qui ne s'explique pas.

 

C'est la touche finale apportée à l'ouvrage - c'est une beauté formelle. Les autres qualités embellissent la nature, mais le dégagement les rehausse encore. Il est la perfection des perfections, une beauté qui les transcende toutes avec une grâce universelle.

 

Il tient à je ne sais quoi d'aérien d'indiciblement élégant dans le dire et le faire, et même dans la façon de penser.

 

Il est en grande partie inné ; le reste, il le tient de l'observation. Et jusqu'à présent, personne ne l'a vu obéir à une quelconque autorité. Il est même supérieur à l'art.

 

On l'apparente au charme pour sa séduction ; à l'allure pour son caractère insaisissable ; au brio pour la fierté qui l'accompagne ; au dégagement, donc, pour son caractère affable ; à l'aplomb, pour ce qu'il révèle de facilité. Mais tous ces mots ne traduisent que l'impossible tentation de le définir.

 

Ce serait lui faire injure que de le confondre avec la facilité : il se tient bien au-delà, au-delà même de la hardiesse. Bien qu'il suppose la légèreté, c'est une valeur ajoutée à la perfection... »

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commentaires

P
Il en est de la séduction comme du charisme ! Attention , si celui dont c'est l'apanage, le sait et en joue, vaut mieux changer de trottoir.
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