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13 juillet 2016 3 13 /07 /juillet /2016 06:00
Jean-Yves Bizot vigneron bourguignon « le cahier des charges et le contrôle ont remplacé l’ambition par le grégarisme, la personnalité par le panurgisme, la lucidité par la conduite du groupe. »

Dans ma chronique du 6 juillet « Le tri sélectif selon SIQOCERT ou l’art de la sanction et de l’exclusion en mode bourguignon… » je soulignais que « la machine à éliminer les déchets tourne à plein sur elle-même, dans des conditions qui diffèrent d’une région à l’autre.

 

La bureaucratie comme toujours se nourrit de sa propre substance, il y va de sa survie. Nous avons l’art de nous lester de boulets aux pieds pour mieux rouscailler contre la prolifération des contraintes.

 

Le paradoxe c’est que le système mis en place l’est avec la caution des dirigeants professionnels et que son fonctionnement reçoit une approbation sans faille de leur part.

 

La mécanique est infernale car elle permet à l’ensemble des géniteurs du système le Ministère, l’INAO, le CAC, les ODG… de se retrancher derrière un ponce-pilatisme bien commode.

 

C’est la faute du système chante le chœur sauf qu’ils sont que nous sommes tous le système. »

 

Étrange dérive d’un système de gestion, longtemps vanté, mis en avant, pour sa capacité à générer de l’excellence, à préserver la diversité, à laisser éclore des produits originaux, dans un monde où l’uniformisation, la standardisation, la normalisation devenaient la règle.

 

Les pommes devaient être lisses, fermes, sans défaut… adieu les petites pommes ridées, onctueuses, goûteuses… vive le calibre… la normalisation… sauf que dans les deux hémisphères on produisait des pommes, toutes les mêmes… tout au long de l’année dans les allées de la GD toutes les pommes sont cousines germaines.

 

Triste comme l’ennui qui naquit dit-on de l’uniformité, alors pourquoi diable ce vin français qui revendique haut et fort son origine, son terroir, l’intelligence de la main, se fourvoie-t-il dans un système ubuesque, kafkaïen ?

 

Pour trier le bon grain de l’ivraie me rétorquera-t-on.

 

Pour nous soumettre aux exigences européennes se lamentera-t-on.

 

Pour que les vins d’une même appellation aient tous le même air de famille.

 

De la gueule de qui se fout-on ?

 

Qui pilote la machine infernale ?

 

Plus personne ou plus précisément ceux qui ont intérêt à ce qu’elle continue de fonctionner.

 

Bref, lorsque l’on constate le niveau de médiocrité qualitativement correcte qu’adoube le système on est en droit de se demander « tout ça pour ça… »

 

L’analyse que nous livre Jean-Yves Bizot est à lire avec attention car elle a le mérite de susciter la réflexion sur le devenir de notre système d’AOC.

 

De toute ma vie je n’ai jamais douté de la force de l’intelligence…

 

« Les signes d’intelligence : école buissonnière, indiscipline, grain de folie, distraction, refus d’obéir. »

 

Félix LECLERC chanteur québécois

Jean-Yves Bizot vigneron bourguignon « le cahier des charges et le contrôle ont remplacé l’ambition par le grégarisme, la personnalité par le panurgisme, la lucidité par la conduite du groupe. »

Partant du principe qu’un bon schéma vaut mieux qu’un long discours, mon père accueillait toujours mes idées par cette réflexion : « Dessine-la. Si tu n’y arrives pas, si le dessin est trop compliqué, reformule ! » Je fais de même aujourd’hui avec mes enfants : « représente ton idée. » Car une idée, c’est déjà une forme, un volume. Pas quelque chose d’amorphe. Et bien la construire, bien en saisir la forme, c’est encore le meilleur moyen de la faire partager.

 

Lorsqu’elle est improbable, que le dessin alors devient impossible, aberrant, alors le biais est dans l’idée elle-même, non dans la capacité à la représenter.

 

Ici, la représentation a été tentée, c’est louable : ce qu’elle révèle de l’idée est sa propre monstruosité.

 

Ce qui se cache derrière ce schéma, qui tente vainement de masquer le vide sur lequel il est bâti par ce tricot de flèches et d’accolades, ce n’est rien d’autre que la bienséance. La bienséance ne signifie pas clairvoyance.

 

A-t-elle été un jour suffisante pour savoir ce qui est bon ou mauvais ?

 

À partir du moment où tout le monde suit la même conduite… Je deviens bon parce que je ressemble et je peux juger parce que je ressemble. Beaucoup d’oubli là-dedans. Rappelons-nous, quelqu’un a dit : « que celui qui n’a jamais péché jette la première pierre. »

 

Le cahier des charges et le contrôle ont remplacé l’ambition par le grégarisme, la personnalité par le panurgisme, la lucidité par la conduite du groupe. Tout est sûr : on est tenu par des équerres, des supports. Rien ne bougera. On pédale, les roues tournent, mais c’est du vélo d’appartement. Alors que, Jacques le sait très bien, un vélo tient parce qu’il est en mouvement, pas parce qu’il est fixé.

 

A l’entrée, en haut à gauche, vous avez la « non-conformité ». Tout en découle pour aboutir, en bas à droite, à la « sanction ». En soi même, la non-conformité n’est pas une aberration, mais là, si. Le jugement précède : ce qui est « non- conforme » est une erreur , un biais, ou une aberration voire même un vice, puisqu’on peut « corriger », donc remettre droit. Si le vin est non-conforme, c’est parce qu’il y a eu un « manquement ». Il est donc, par a priori, forcément diminué, amoindri, gauchi. A aucun moment, il n’est supposé que la démarche puisse être inverse, et que la non-conformité existe aussi par excès. Le manquement pourrait-il être collectif ? Non, bien sûr : je suis bon parce que je ressemble. Un système statique sans autre volonté que la fixité

 

Je reviens sur ma conclusion de ma chronique de janvier : « Peut-on être plus ambitieux que son appellation ? ».

 

La réponse est : non, définitivement non.

 

Chacun a sa place et chacun à sa place.

 

 

Jean-Yves Bizot

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commentaires

P
Aoc, originaliité ou typicité, mars 2003 http://www.patrick-baudouin.com/SEVE-LA-REFORME-DES-AOC.html?lang=fr. Relire les textes du Cofradep de 1974, sur la signification de l'arrivée de la dégustation dite "d'agrément" dans les aoc. Nous (Sève) avons réussi à éliminer le mot typicité des textes de l'inao, mais le concept, et ce qui est dans les têtes de la profession et des dégustateurs, c'est autre chose. Comme écrivait Sartre ""Dieu est mort, mais l'homme n'est pas, pour autant, devenu athée"(Situations)
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O
Bonjour à vous,<br /> <br /> La messe est dite ! Cela va bien à Jean-Yves :-)<br /> <br /> Notre échec, que peu constatent vient de notre manque de courage à nous assumer. Le nous est collectif. On accepte au final n'importe quoi.<br /> <br /> C'est un problème de courage qui nous est posé une fois de plus.<br /> <br /> "Celui qui n'a pas le courage de se rebeller n'a pas le droit de se lamenter " je ne donne pas l'auteur, je n'en ai pas le courage...
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