À la maison, au Bourg-Pailler, le vin rouge de Mareuil et de Rosnay jouissait d’une très belle réputation auprès de mon père. C’était du vin bouché servi pour les grandes occasions. Pour aller de la Mothe-Achard à Mareuil s/Lay nous passions par la Chapelle-Achard patrie de maman, Grosbreuil où nous avions des cousins, Saint Avaugourd des Landes et les Moutiers les Mauxfaits. Le Mareuillais, comme l’écrit Jean Huguet dans Vignes et Vignerons de Vendée est « en partie bocain » et il occupe « un pan du modeste versant occidental hercynien, incliné, depuis les hauteurs de la Mainborgère, vers les sillons de l’Yon, du Graon, du Lay surtout, paraphe hydrographique d’un paysage à la fois sincère et altier. » Plus au sud s’étend la plaine de Luçon (siège de l’évêché le plus crotté de France cher à Richelieu) puis le marais poitevin. Neuf communes pour ce fief : au nord Saint Florent-des-Bois, Chaillé-sous-les-Ormeaux, Château Guibert, Le Tablier, Rosnay ; au sud Mareuil « la capitale du royaume », La Couture, Champ-Saint-Père et Corpe. Cette énumération sonne à mes oreilles comme une leçon de géographie de la Vendée avec le frère Pothain.
Depuis des années je suis de près les vins de la maison Mourat, Jean d’abord et maintenant son fils Jérémie. Lorsque j’étais retourné à Mareuil, voici quelques années, arrivé dans le bourg de Mareuil, j’ai dans mon souvenir, la haute bâtisse au toit recouvert de tuiles nichée tout près du pont qui enjambe le Lay et de la rue du Puy sans Tour qui file le long de la rivière. Ce jour-là j’avais acheté du château Marie du Fou et des flacons du fameux cépage « ragoutant » plus communément connu sous le nom de Négrette. À chaque Salon des Vins de Loire je ne peux les rater vu leur situation géographique et j’ai toujours un grand plaisir à constater l’évolution positive des vins et le remarquable travail de gamme doublé d’un réel souci d’innovation dans le packaging. Respecter son terroir ne rime pas forcément avec ringard. Sur le stand mon chaperon c’est Thierry Libessart qui prend toujours le temps, avec précision et gentillesse, de me présenter toutes les évolutions de la maison Mourat. Après tout je ne suis qu’un petit chroniqueur, certes vendéen, qu’il en soit remercié. Ayant sauté la précédente édition du Salon en 2009, mon passage sur le stand de la maison Mourat s’est révélé plus encore très fructueux.
Avant d’aborder le vif du sujet je cite de nouveau Jean Huguet « Parmi ces grands, Jean Mourat est de ceux qui interrogent avec le plus d’insistance, depuis les hauteurs de Mareuil, l’avenir des Fiefs Vendéens. Le « fermier des Ardilliers » n’est pas un viticulteur comme les autres. Non seulement il a reçu la formation la plus complète à laquelle un professionnel de la viticulture puisse prétendre, celle d’œnologue, diplômé de l’Institut d’œnologie de la Faculté de Bordeaux, mais aussi la formation la plus singulière, son père, Roger Mourat, ayant été l’un des principaux négociants en vins du département. Le négociant est pour le producteur viticole, ce que le mareyeur est pour le patron-pêcheur, un homme que l’on redoute mais dont on ne saurait se passer – du moins jusqu’à ce jour. » Ce texte date de 1992 et depuis beaucoup d’eau a coulé entre les berges du Lay.
Les vins de J.Mourat se déclinent en 4 gammes : Collection, Château Marie du Fou, les Anticonformistes (les OVNI) et Mouratus qui s’étagent de 4,85 euros à 7,95 euros. Pour visionner plus précisément ces gammes allez sur le site de la maison Mourat www.mourat.com. Ce matin, si vous me permettez l’expression, je vais m’intéresser au haut du panier des vins « Made in Mourat » avec l’arrivée du Clos Saint André dans le giron de la maison. C’est le rêve de gosse de Jérémie que ce Clos situé à 500 mètres des chais de Marie du Fou, autrefois propriété de la famille Taittinger, en friche depuis 1968. Belle endormie sous son manteau de ronces et de genêts, c’est une page blanche pour Jérémie, la réhabilitation d’un terroir viticole historique. C’est une aventure que de restructurer ces coteaux dominant le marais poitevin et la plaine de Luçon, en respectant la géopédologie du lieu. Terre vierge donc, lieu unique, indemne de ma chimie, qui tout naturellement se voit destiné à la culture biologique. Les vignes sont donc labourées, chaussées et déchaussées au cheval depuis 2009. Ça me rappelle la Nénette, le pépé Louis et la décavaillonneuse... ICI->
Donc je résume le haut de gamme des Mourat :
- Le Clos Saint André 100% Chenin est en Agriculture Bio, les grappes vendangées à la main, en plusieurs passages, sont pressées entières et le jus fermente soit dans des foudres de chêne de 3hl500, soit dans des grands œufs de béton d’argile reproduisant les « dolia » de l’Antiquité. Mis en bouteille en lune vieille (je sens Bernard souffrir).
- Les Parcellaires eux aussi AB et en 2 couleurs : Terres Quarts c’est du Chenin 1700 bouteilles et Grenouillère c’est de le Négrette vieilles vignes de 85 ans 7500 bouteilles.
- Mouratus blanc et rouge est donc maintenant 100% Pinot Noir.
De la très belle ouvrage que j’ai dégustée sous la houlette bienveillante de Thierry Libessart. Les Mourat portent de plus en plus haut l’étendard des vins Vendéens en redonnant au terroir historique de Mareuil ses lettres de noblesse. Si vos pas vous amène du côté de chez moi, la Loire Méridionale – concept qui met du Sud dans le vin vendéen – mettez vos pas dans les miens et faites une halte chez Mourat père& fils, vous ne serez pas déçu du voyage. Pour clore ce court chapitre vendéen je vous offre les premiers vers de « Vendanges à Mareuil » écrits par un enfant du pays: Gaston Herbreteau dont les parents possédaient sur la colline des Ardilliers un petit vignoble.
Sept heures, chemin des Ardilliers.
Charrette cahotante,
Basses qui s’entrechoquent,
Voix de basse du roulier.
Mi-endormi, mi-réveillé.
Coteau noyé de brume,
Spectre de la vigne.
En haut ciel bleu.
Vallée noyée.
Soleil.
Et tout s’éveille
De cep en cep. [...]