« Je suis bobo et vous emmerde ! » j’achète mes poireaux à des retraités à casquette Place des Fêtes
Avant de me tomber dessus à bras raccourcis merci de tenir compte des guillemets, cette profession de foi n’est pas de moi mais d’une charmante jeune fille : « Solange Te Parle »
Le bobo voilà la cause de tous les maux de notre vieux pays gaulois perclus de rhumatismes. Mot valise par excellence il est devenu l’insulte par excellence de la France rance…
Philippe Vandel dans La « bobo » parisienne… Même pas mal ! dresse une liste non limitative des griefs « De tout bord on leur tombe dessus. « Ce n’est pas moi qui ai fait le lit du FN en 2002. Les coupables sont ceux qui se sont détournés des ouvriers, ceux qui s’occupent des bobos et ont laissé tomber le populo », Jean-Pierre Chevènement. « Le mariage homosexuel est un caprice de bobos », Philippe Monnier, député UMP. « Ferme ta gueule ! Moi je parle à tout le monde. Tu n’y connais rien. Tu ne connais que les bobos », Nicolas Sarkozy à Chantal Jouanno, cité par L’Express (30/10/2012). « Les bobos typiques célèbrent le métissage et vivent dans des forteresses », Alain Finkielkraut.
Ces scuds proviennent du livre de Laure Watrin et Thomas Legrand : La République bobo chez Stock dont le Taulier vous a déjà causé link
Il existe même un blog : www.bobodemerde.com
La suite de la chronique de Philippe Vandel ICI link
Revenons à « Solange Te Parle » qui, comme toute jeune fille d'aujourd'hui qui se respecte, poste sur les réseaux sociaux avec la légèreté d’un petit oiseau :
- elle blogue link
- elle fait des entrechats sur face de bouc bien sûr link,
- Twitte sur Twitter link
- et cause sur YouTube link
Dans la vidéo ci-dessous elle égrène avec humour les grands thèmes de la République BOBO de Laure Watrin et Thomas Legrand.
Les auteurs, se revendiquant eux-mêmes Bobos, s’essaient, avec un certain bonheur, à mieux cerner la nébuleuse bobo et la boboïtude.
« Dans certains cas, le bobo gentrifie les quartiers dans lesquels il s’installe. Dans d’autres, il participe à la mixité sociale et même la renforce. »
En simplifiant le bobo gentrifieur est plus bourgeois que bohème, et le bobo mixeur est plus bohème que bourgeois…
J’ai sélectionné un exemple que je connais : la Place des Fêtes, au sommet de la Butte de Belleville, dans le 19e arrondissement de Paris, qui offre selon les auteurs « un patchwork (sinon le mélange) social et ethnique » se tisse.
« La place des Fêtes est un vaste carré, une dalle entourée de deux côtés formés de barres de logements sociaux et de deux côtés de petits immeubles typiques du haut Belleville. D’un côté de la pente, au-delà du carré, la rue de Belleville et le parc des Buttes-Chaumont ; de l’autre, le versant qui mène porte du Pré-Saint-Gervais, avec le quartier de la Mouzaïa, foyer bobo historique constitué d’anciennes maisons ouvrières individuelles. Des pavés, des lampadaires, des fontaines Wallace… Le décor des poulbots peints à Montmartre. Les ancêtres des bobos ont racheté à bas prix, dès les années 1970, ces bicoques ringardes tout en meulière, brique, ferronneries et marquises tarabiscotées, pour en faire de mini-hôtels particuliers, maisons de ville, petits temple de l’esthétique parigote, du « bon goût » et de la récup […]
Mais revenons place des Fêtes au centre de cette multitude. À côté des commerçants traditionnels des marchés « bien de chez nous », volaillers, charcutiers, poissonniers, maraîchers – « elle est belle, ma salade, elle est beeelle ! » –, et autres fleuristes, on trouve des bouchers hallal, les vendeurs d’épices, de produits orientaux, et les étals des marchands de produits bios. Les poireaux des retraités à casquette et fichu dépassent de leurs cabas à carreaux. Les poussettes des bobos sont pleines de légumes « oubliés » ou d’œufs « plein air ». Ils apprennent les saveurs du marché à leurs enfants. Ils passent devant le boucher hallal sans s’arrêter mais n’oublie pas de prendre des olives fraîches, du taboulé libanais et du tarama chez le Tunisien du bout de l’allée, qu’ils appelleront tout en bas en rigolent entre eux le « salafiste » parce que son visage est masqué par une épaisse et inquiétante barbe noire. Ici, différents groupes sociaux se côtoient, vivent non pas ensemble mais sur un même territoire. La mixité n’est pas privée, elle est publique mais c’est déjà ça. Elle est à l’évidence un facteur d’équilibre social et de cohésion, de reconnaissance mutuelle dans ces quartiers et villes investis par les bobos… »
C’est une réalité qui dépasse les clichés et il serait imbécile de se contenter de la railler car elle existe. Elle n’est ni une image d’Epinal pour sanctifier les bobos, ni une exception mise en avant pour masquer la dureté sociale d’autres lieux ghettoïsés…