Fait maison, décret bidon décrète JP Géné dans le Monde link
« En voilà une idée qu'elle était bonne : distinguer les restaurants qui cuisinent chez eux des produits frais de ceux qui assemblent des plats en kit fournis par l'industrie agroalimentaire. »
L’idée était bonne mais la méthode inadéquate.
Pourquoi passer par la force publique ?
Pourquoi un décret ?
Quand arrêterons-nous de penser qu’on change la société par décret ?
Michel Crozier 1979 On ne change pas la société par décret, Paris, Fayard, 1979 *
Paresse, refus de prendre ses responsabilités, est-ce vraiment d’intérêt général ?
Le fait maison ne relève pas de la protection de la santé publique ou de la répression de fraudes sauf si le restaurateur trompe ses clients en affichant des informations inexactes.
C’est une question de nature contractuelle entre le restaurateur et son client.
J’ai du mal à comprendre que l’on puisse à la fois demander plus de liberté par rapport au système des AOC, géré par les professionnels au sein de l’INAO, et revendiquer auprès de l’État la mise en œuvre d’une réglementation générale sur le fait maison ?
Pourquoi s’étonner que le bébé soit mal formé ?
Comment en aurait-il pu être autrement, pourquoi demander à l’État de règlementer sur un sujet qui relève de la liberté des intéressés.
On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même.
Pourquoi les restaurateurs qui n’utilisent que des produits frais ne sont-ils pas pris par la main pour élaborer une charte, leur charte du fait maison ?
Ça ne relève pas de la mission impossible vu le nombre d’établissements en cause.
Sauf que dans notre pays tout le monde clame haut et fort qu’il veut moins d’État, moins d'impôts mais à la première occasion on revient quémander dans son giron et appeler à la rescousse ses fonctionnaires.
Pourquoi ?
Parce que ça évite les confrontations d’intérêts contradictoires, les conflits et ça permet de bénéficier à l’œil du bras armé de l’État pour faire respecter le décret.
Au risque de choquer certains j’estime que les fonctionnaires de la Répression des Fraudes ont mieux à faire.
Il faut arrêter dans ce pays de vouloir tout et son contraire, moins de règlementation appliquée par de fonctionnaires tatillons et plus de protection de confort.
Le « fait maison » en est une, en tant que consommateur je suis en droit d’exiger, en fonction de la hauteur de l’addition, du restaurateur qu’il s’engage lui-même sur ce qu’il met dans mon assiette.
C’est un contrat de confiance entre lui et moi, entre lui et ses clients.
Pas besoin pour cela d’un décret dont la rédaction est soumise au poids des lobbies et des intérêts contradictoires des organisations professionnelles dites représentatives.
C’est prendre un marteau-pilon pour écraser une mouche.
J’avoue que j’en ai soupé de cet assistanat, de cette forme de sécurité sociale pour professionnels majeurs et soi-disant responsables.
Quant aux clients, il faudrait aussi qu’ils se bougent le cul, qu’ils assument leur responsabilité de consommateur en étant exigeant. Mais est-ce possible pour une majorité d’entre-eux qui chez eux choisisse la bouffe déjà préparée ?
Enfin un petit mot pour les grands chefs et leurs affidés qui se pavanent sur les estrades du SHIRA de Lyon pour vanter la haute gastronomie française alors que ce salon est la plus grande manifestation de promotion de la bouffe industrielle. Qu’ils aillent donc se promener, comme je l’ai fait, dans le hall des Charal, Bonduelle and Co pour constater de visu ce que l’on nous concocte dans leurs laboratoires. C’est édifiant.
Nous sommes devenus des pleurnichards, des assistés pour qui il faut vérifier la becquée, notre responsabilité citoyenne est au abonné absent, nous râlons, nous revendiquons, nous sommes incapables de nous prendre en mains, nous demandons tout et le contraire de tout à un État impotent.
Pas la peine d’afficher au Baccalauréat un taux de réussite record à 87,9% si c’est pour un tel résultat, une telle démission.
Y’a des jours où je ne regrette pas d’être vieux, même un vieux con car « la différence essentielle entre un jeune con et un vieux con réside dans le temps qu’il leur reste à vivre. » Jean Dion chroniqueur québécois
* « Nous vivons dans une crise d’affolement devant la complexité d’un système que nous ne maîtrisons plus ». Ainsi, comme le citoyen n’a jamais été aussi libre de ses choix dans une société ou le nombre d’interrelations entre les Hommes a augmenté, les individus, qui ne supportent plus la contrainte, sont dépassés par un système qui ne paraît plus maîtrisable. Les systèmes ne reposent plus sur une forme d’autorité hiérarchique: tout le monde est dépendant de tout le monde, personne ne commande et tout le monde obéit. En outre, le nombre de participants à une décision augmente, d’où la complexification de la société et le ralentissement actuel de l’action. C’est pour cela que l’ « on ne change pas la société par décret » car le changement est long et se butte à la rigueur administrative ainsi qu’à l’immense jeu de réseaux autonomes ou les individus expriment leur liberté. L’innovation, l’initiative doivent donc se mettre en place sur le long terme afin de ne pas scléroser la société. »