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4 décembre 2008 4 04 /12 /décembre /2008 00:00

 

C’est un peu l’histoire de l’arroseur arrosé. Il y a quelques mois, autour d’un verre de vin, vous m’avez demandé de vous mettre sur le gril des « trois questions à », comme vous le faites avec les invités de votre blog. J’ai accepté avec enthousiasme, puis j’ai reculé, car finalement, la tâche n’est pas si facile. Quand je vous ai rencontré, j’étais journaliste, correspondante des quotidiens Libération et La Tribune en Languedoc-Roussillon, vous étiez commis de l’Etat, assigné aux tâches de pompier du vignoble. J’ai brossé votre portrait – ce qui m’a permis de mieux vous connaître et de nous découvrir des valeurs partagées – quand vous avez rédigé un rapport sur les exportations de vin français, mieux connu sous le nom de rapport Berthomeau. Ce rapport vous a valu les honneurs des medias –c’est la formule consacrée-, des amitiés et des inimitiés solides dans le petit monde du vin et, au bout du compte, une mise au placard.

Néanmoins, depuis ce placard, sans doute parce que grandi dans la culture du travail qui fait se lever le matin avec quelque chose de productif à faire de la sainte journée, vous faites entendre votre voix à travers un blog. Depuis le 23 mai 2005, le rendez-vous est quotidien, fidèle, libre, tonitruant, exploratif (je trouve cet épithète non répertorié plus adapté à ce que vous faites qu’explorateur), touffu, alternant coups de gueule contre ceux que du temps où j’étais journaliste et vous commis de l’Etat appeliez les « grands mamamouchis » (je traduis : les institutionnels) et coups de cœurs, pour des vins, des hommes et des femmes. Comme on le dit familièrement, vous ne mâchez pas vos mots et on sent que vous y prenez un réel plaisir, c’est-à-dire égoïste à son origine et souvent partagé à l’arrivée.

Jacques Berthomeau et Antoine Aréna by Catherine Bernard au Paul Bert

Question n°1 : Comment expliquez-vous que votre employeur, Vinifhlor, c’est-à-dire l’Etat, vous tolère à vitupérer comme vous le faites ? Je pense en particulier à toutes ces gentillesses adressées à l’Inao, du genre, je vous cite : « M, comme médiocratie », « Objet juridique non identifié : o comme inao ».

 

Réponse de JB: Mon employeur n’a rien à tolérer, le blog est un espace privé. Philippe Bilger, avocat-général près de la Cour d’appel de Paris, donc fonctionnaire et magistrat du siège, donc soumis à ce qu’on appelle le devoir de réserve, tient un blog www.philippebilger.com et je trouve que sa plume est bien plus acérée, plus vacharde que la mienne. Pour en revenir à moi, qui ne suis même pas soumis à ce fameux devoir n’étant pas fonctionnaire, j’applique l’adage « qui aime bien, châtie bien… » Pour revenir à votre exemple de l’INAO, des AOC en général, j’ai beaucoup mouillé le maillot pour les défendre au temps où j’étais le bras droit du Ministre – comme on disait dans le Languedoc – alors j’estime légitime de mettre le doigt là où ça fait mal, de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Ce verbe clair, parfois un peu virulent, me vaut certes de solides inimitiés, mais Yves Bénard, le président du Comité Vins et Eaux-de-vie de l’INAO a été l’un des premiers à répondre à mes 3 questions, comme récemment Olivier Nasles, vice-président du CAC, que j’avais un peu rudoyé à propos de la typicité et, preuve que mon espace de liberté est un endroit fréquentable, Michel Barnier, le Ministre de l’Agriculture, s’est soumis lui aussi à l’exercice. Vous savez Catherine, je m’en prends rarement aux personnes, j’ironise parfois, j’ai des têtes de turc comme le « bougon des cépages », mais je préfère m’attaquer aux citadelles. C’est plus excitant !

 

Question n°2 : Vous lisant, j’ai le sentiment que vous avez paradoxalement rencontré le vin, le goût de le boire, de l’apprécier dans sa diversité, d’écouter ce qu’il dit dans le verre, depuis que vous n’êtes plus justement dans l’exercice obligé de la fonction et que cette rencontre a humanisé votre analyse. Est-ce que je me trompe ?

 

Réponse  de JB : Vous avez tout à fait raison Catherine cependant, ceux qui me connaissent depuis longtemps savent que j’ai toujours eu le goût de la conversation, de l’écoute, mais c’était ma sphère privée que je préservais des ingérences de ceux qui gravitent ou sévissent dans la sphère du politique. Lorsqu’on occupe des fonctions d’autorité politique le blindage, la distance, une certaine forme d’arrogance aussi, permettent de survivre, d’avaler des couleuvres, de prendre des décisions qui ne vous font pas forcément plaisir. Vous savez il faut bien comprendre que dans ce type de fonctions on ne choisit pas ses partenaires, ses interlocuteurs, alors on se compose un personnage pour s’éviter de se laisser-aller à livrer le fond de sa pensée. Ce qui m’a le plus humanisé ce sont, bien sûr, mes missions de « pompier » sur le terrain. Là, j’ai vraiment appris l’humilité. J’ai aussi pris conscience des pesanteurs administratives, de l’indigence de certains élus, de l’inertie et du conservatisme de ceux qui se disent représenter la base. Moi qui n’aime rien tant que de convaincre je me suis ramassé de belles gamelles qui font du bien à l’égo. Mais vous vous doutez bien, que ce qui m’a encore plus libéré de mon vernis un peu glacé c’est le traitement que l’on m’a fait subir à la suite de mon rapport et de l’expérience du Groupe Stratégique. Je pourrais rédiger un annuaire des faux-culs et des hypocrites mais je ne le ferai pas car dans cette affaire j’ai gagné de vrais amis, fidèles et c’est l’essentiel. Après ce type de thérapie « à la française » tout me semble possible et, de plus, comme les faits m’ont plutôt donné raison, je ne vis pas cela comme une revanche mais l’accession à la sérénité. Plus je vais et plus je sais dire aux gens que j’aime que je les aime. Quant aux autres, je les ignore.

 

Question n°3 : Je sais l’exercice réducteur, donc un peu bête, mais comme le questionnaire de Proust, il en ressort toujours quelque chose, au moins en creux. Donc je vous propose de vous y livrer. Si votre employeur vous donnait carte blanche, comment, où et quel pompier seriez-vous aujourd’hui ?

 

Réponse de JB : Je vais être très prétentieux Catherine : je lui demanderais sans aucune hésitation et avec mon incommensurable orgueil de me confier, pendant un CDD de 3 ans, le pilotage économique de la part du vignoble capable de relever le défi que nous avions explicité avec mes collègues de Cap 2010. Le plan de vol étant connu alors nul besoin de se perdre dans des discussions pour les bassins et les bassines, les interprofessions d’ici ou de là, uniques ou multiples, les chefs et les seconds couteaux, l’important serait d’aider à créer les conditions pour que nos rares entreprises de taille nationale et celles des entreprises régionales de mise en marché qui tiennent notre vignoble, le redynamise pour élaborer une source vin adaptée, lui fasse gagner de l’argent pour qu’il puisse le réinvestir dans de vraies politiques commerciales et des réseaux de distribution. Á l’heure où la régulation revient sur le devant de la scène, la Vigne France, celle des vins sans IG et d’une partie des vins IGP, a besoin qu’on la pilote. Il ne s’agit pas d’ingérence, de création d’un zinzin national budgétivore mais de faire ce que seule une autorité extérieure peut faire : arbitrer entre les penchants féodaux de certains, décider avec les entreprises d’une stratégie et la mettre en oeuvre. Je suis disponible. La méthode existe. Le terrain est déjà déblayé. Bien des hommes qui sont aux manettes d’entreprises sont demandeurs de ce pilotage. Reste à choisir de changer d’époque, de bien vouloir dépasser les clivages et les oppositions anciennes, à décider de passer du verbe à l’action. Honnêtement, Catherine, je peux tenir, sans prendre beaucoup de risques, le pari que je vais continuer à me contenter de faire progresser ma petite entreprise Vin&Cie et je ne m’en porterai pas plus mal.

Si ça vous intéresse vous pouvez soit cliquer sur ce lien   Pesticides ? Même pas peur !, soit vous rendre sur la rubrique PAGES (en haut à droite du blog) et cliquer sur le N°34 : Pesticides ? Même pas peur ! 20 pages de lecture en provenance de la Mission d'animation des Agrobiosciences cofinancée par la Région Midi-Pyrénées et le Ministère de l'Agriculture.

 

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commentaires

A
pas terrible,le commentaire!Simplement pour dire qu'on ne peut pas télécharger "Pesticides,même pas peur"...
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