À la Bellevilloise, me dit-on, le bel Antonin, qui ne recule devant rien pour porter haut les couleurs du vin nu, a convoqué une star du barreau, j’ai nommé Me Morain, qui râle un peu parce qu’on a exilé son Palais du côté de la porte de Clichy, pourquoi pas dans une banlieue pourrie, pour être l’avocat commis d’office à la défense du vin dénommé nature.
Je ne sais qui fut le juge qui mena l’instruction, ni si ce sont les fins limiers de la PJ qui ont enquêté sur cet épineux dossier, a-t-on placé sur écoutes les plus enragés des vignerons, a-t-on filé la poignée de cavistes alternatifs dealers de cette drogue douce, je ne sais, mais mon petit doigt me dit, que l’Antonin a veillé pour que le dossier à charge soit aussi fin que le papier à cigarettes OCB, sigle de Odet-Cascadec-Bolloré.
Face à ce futur déni de justice, en dépit de ma nullité : j’ignore tout du code de procédure pénale, alors que Me Morain en est le Paganini, j’ai décidé de me draper dans l’hermine du procureur, de me lover dans la peau de Fouquier-Tinville, de me la péter grave comme Philippe Bilger, d’arborer ma belle lignée de décorations, pensez-donc commandeur du Mérite Agricole, et je n’ose citer les autres médailles de peur de me faire vilipender par les groupies du vin nu.
N’écoutant que mon courage, en dépit de mon thorax fracassé, je me dresserai face à cette parodie de procès pour tailler en pièces celles et ceux qui chantent les vertus du vin qui pue.
C’est mon côté minoritaire, rocardien non révisé qui remonte à la surface, ce parler vrai qui a valu à l’hamster jovial de n’être qu’un éternel candidat à la fonction suprême, je monte au front avec mon ridicule chassepot.
Quand allez-vous arrêter de faire chier, avec vos breuvages indignes de la France profonde des terroirs, ces bons gaulois qui s’échinent à pulvériser, à araser, à round-uper, à faire vivre toute une flopée de marchands du temple, à donner une belle typicité à leur jaja en le boostant à coups de poudre de perlimpinpin.
Ce n’est pas en faisant faire trempette à vos gonades poilues, en foulant de vos pieds mal lavés les grappes vendangées par des bobos en manque de nature, que vous tirerez la quintessence du vin.
Rangez vos minables mobylettes bleues, laissez la place aux escadrilles de Rafale qui font tomber un tas de blé dans le trésor public, allègent l’abyssale dette, font triompher sur tous les continents notre nectar national.
On s’en bat les couilles de votre pur jus de raisin fermenté, au nom de la liberté inscrite au fronton des mairies nous revendiquons le droit de nous jeter derrière la cravate de la colle de poisson, de la gélatine, de la poudre de tanins, du tartrate de calcium, du citrate de cuivre, des copeaux de chêne, des bouts de planche, de la résine de pin d’Alep, de l’acide lactique, du bisulfite d’ammonium, j’en passe et des plus crades.
Me Morain ne jetez pas le bébé avec l’eau du Bain, Alexandre bien sûr, l’insurgé de Pouilly fumé, qu’est-ce qu’il fume d’ailleurs, la moquette, certes vous avez terrassé, tel l’archange Gabriel, l’hydre de l’INAO, mais bordayl, ne nous faites pas chier, nous les bons Français, les héritiers du vieux maréchal pour qui la terre ne mentait jamais.
Franchement votre vin d’évier qui pue, qui sent la bouse de vache, la serpillière mal essorée, la souris, les pieds mal lavés, le bouiboui, vous n’allez pas nous en faire tout un fromage qui pue à la manière de ce gros tambour de Périco Légasse.
Vin de France mon cul !
Je sais bien que vous allez me rétorquer, même twitter, Terroirs outragés ! Terroirs brisés ! Terroirs martyrisés ! Mais terroirs libérés par une armée de va-nu-pieds !
À quoi bon m’époumonerais-je lors qu’il fait si beau dehors, que les filles sont belles, que l’amour me tend les bras ?
Comme je n’ai aucune chute à ce réquisitoire sans queue ni tête je vais de ce pas me payer un Pet’nat bien frais de derrière les fagots, dire merde à la reine d’Angleterre et Mélanchon qui fait la fête à Macron, brailler que les bourgeois plus ça devient vieux plus ça devient con…
Acquittez donc le vin nu je n’en ai rien à cirer !
Sitôt bu sitôt pissé, telle est ma devise !
Me Morain votre tâche est aisée, à vaincre sans péril on triomphe sans gloire.
Bons baisers de partout et bonjour chez vous