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4 mars 2018 7 04 /03 /mars /2018 11:15
«J'ai lu Entre deux mondes d’Olivier Norek avec rage et parfois des pleurs. C'est un roman magistral. Je suis à terre, je n'arrête pas d'y penser». Joann Sfar

J’ai lu hier Entre deux mondes d’Olivier Norek, je suis sous le choc et pas très matinal car je me suis couché tard.

 

Je ne vais pas faire des phrases mais vous proposer ce que j’ai trouvé sur la Toile à son propos.

 

 

« Il faut dire que l'on reçoit tel un puissant direct dans le bide le quatrième roman du policier et écrivain aubinois déjà auréolé de prix littéraires pour sa trilogie policière quasi sociologique braquant ses projecteurs sur les banlieues du 93 : Prix classé premier pour Code 93; Prix sang pour sang polar pour Territoires ; Grand Prix des lectrices de Elle policier 2017 et Prix Le Point du polar européen 2016 pour Surtensions. »

 

  • Comment est venue l'idée d'une intrigue policière dans la jungle de Calais ? Vos expériences dans l'humanitaire et de lieutenant de police ?

 

Si vous posez la question au flic, il y avait ce défi de raconter une enquête de police dans le seul endroit en France où, justement, on ne peut pas enquêter : un camp de réfugiés. Les témoins ne parlent pas à la police, les ADN et empreintes digitales ne sont pas répertoriés, pas de réseaux sociaux, et toutes les lignes de téléphones sont ouvertes sans identité... et comme tous ces points sont les piliers d'une enquête, cela s'annonçait acrobatique. Mais si vous posez la question au petit-fils de migrant, il y avait une histoire que j'avais envie de raconter parce que quelque part, c'est aussi la mienne.

 

Lire ICI

 

 

« Entre deux mondes est un roman noir, profond, terriblement inhumain mais faisant aussi preuve d’humanité. Car, finalement, quel que soit l’Enfer sur Terre, il y a toujours des hommes bons et généreux pour venir en aide aux autres. Il faut juste qu’ils aient le cran de regarder la réalité en face et de l’affronter. »

 

Extraits

 

– J’aimerais savoir ce qui s’est passé. Comment on peut crever dans un pays en paix sans que personne n’en ait rien à faire.

 

– Ce n’est pas le premier. La violence est partout puisque la pauvreté est immense. Tu ne peux pas mettre ensemble près de dix mille hommes, venant des pays les plus dangereux de la Terre, quasiment enfermés, tributaires de la générosité des Calaisiens et des humanitaires, sans autre espoir qu’une traversée illégale, et croire que tout va bien se passer. Des morts il y en a toutes les semaines. Les No Border les trainent aux limites de la Jungle, devant les CRS, mais parfois ils sont simplement enterrés entre les dunes et la foret. Si un jour ils rasent la Jungle, il ne faudra pas creuser trop profond.

 

« A la fin, il faudra regarder tout ce qu’on a accepté de faire. Et ce jour-là, je refuse d’avoir honte. »

 

 

Calais. La Jungle. « Un bidonville de toile, de tôles et de bâches plastiques. Des êtres humains coincés là pour de multiples raisons, entre un futur inaccessible et un passé qu'ils ont fui. Ils sont Soudanais, Afghans, Syriens, Français, réfugiés ou flics, bloqués sur ce bout de terre. Un espace entre ciel, mer et forêt, nauséabond, putride, une zone de non-droits si ce n’est celui du plus fort. Si la loi définit une nation, alors ce n’est pas un morceau de France, ni d’aucun autre pays, le droit ne s’y applique pas. On constat à l'extérieur, on n’y enquête pas. S’il y a assassinat, les No borders - activistes altermondialistes militant pour la liberté totale de circulation - traînent les corps dès l’aube à l’orée du camp, les services idoines les ramassent et l’affaire est entendue.

 

Ajoutez des humanitaires débordés faisant ce qu’ils peuvent pour organiser ce bordel infernal, quelques islamistes, des agences de renseignements, plus une population locale exaspérée par la baisse de la valeur de leurs biens immobiliers et la fermeture des commerces due à la fuite des touristes. Les Anglais sont toujours prompts à déléguer la gestion de la misère aux autres, mais pas à venir la contempler sur place. Depuis les accords du Touquet, ils font un gros chèque à la France pour déplacer la frontière de leur île de Douvres à Calais, le reste, ils s’en lavent les mains.

 

 

Le jour, tout se passe apparemment dans le calme, quelques petits commerces sont apparus, chacun vaque à ses trafics, prépare son passage clandestin et s’occupe de se nourrir. La nuit est un rituel bien huilé. Les réfugiés tentent de créer des barrages pour bloquer les camions, s’introduire dans les cargaisons et passer en Angleterre, les policiers, les douaniers et la DDE essaient de les en empêcher par tous les moyens. Pas d'interpellation, pas de mise en examen, l’administration a amputé sa police de toutes ses prérogatives. Seuls les CRS peuvent de temps en temps pénétrer en force, casser et gazer, pas chercher à savoir, surtout pas. Le cirque potentiellement mortel se termine avec l'aube, chacun rentre chez soi jusqu’au crépuscule suivant. Sans rancune. Suffit de ramasser encore une fois ceux qui n’ont pas su éviter les roues d’un poids lourds. Quelques corps de plus à la fosse commune. Show must go on. »

 

La suite ICI

 

 

La « jungle », point de non-retour

LE MONDE | 09.11.2017 à 08h00 | Par Macha Séry

 

Encore faut-il parvenir jusqu’à Calais. Encore faut-il y survivre. Démantelée il y a tout juste un an, la « jungle » de Calais fut à tout point de vue une zone de non-droit. Pénurie de toilettes, manque d’hygiène, infections (malaria, gale, teigne), arrêtés préfectoraux interdisant les échoppes et l’eau chaude, violences en tout genre, non-intervention de la police… « Tu ne peux pas mettre ensemble dix mille hommes, quasiment enfermés, tributaires de la générosité des Calaisiens et des humanitaires, sans autre espoir qu’une traversée illégale, et croire que tout va bien se passer, lit-on dans Entre deux mondes, d’Olivier Norek. Des morts, il y en a toutes les semaines. Les no border [collectif d’activistes antifrontières] les traînent aux limites de la Jungle, devant les CRS, mais parfois ils sont simplement enterrés entre les dunes et la forêt. Si un jour ils rasent la Jungle, il ne faudra pas creuser trop profond. »

 

Passer en « Yuké »

 

Lieutenant en Seine-Saint-Denis aujourd’hui en disponibilité, auteur d’une formidable trilogie policière située dans le « 9-3 », Olivier Norek a relevé cette gageure insensée : écrire un polar, mieux, un très bon polar, sur le camp de la Lande en s’inspirant de drames réels. Pour cela, il a séjourné à Calais auprès des migrants chassés sans trêve ni humanité, qui lui ont parlé de leur parcours et du kit indispensable pour passer outre-Manche : une lame de rasoir pour trancher une bâche, une couverture de survie destinée à déjouer les caméras thermiques, un sac-poubelle à enfiler sur la tête contre les détecteurs de gaz carbonique et un préservatif pour faire ses besoins.

 

 

Norek a également interrogé des humanitaires, des journalistes locaux et des collègues de la BAC (brigade anticriminalité) de manière à bâtir un récit à la fois réaliste et kaléidoscopique. Au-delà de sa dimension documentaire, Entre deux mondes tresse subtilement plusieurs odyssées personnelles jusqu’à un point de non-retour.

 

Echoué dans ce campement, comme tant d’autres réfugiés désireux de passer en « Yuké », Adam, un ex-policier syrien, y attend sa femme et leur fillette. Il ignore qu’elles ont été jetées par-dessus bord durant leur traversée… Pour avoir protégé un jeune Soudanais de la communauté qui l’asservissait et enquêté officieusement sur deux meurtres survenus dans la « jungle », il s’expose à des représailles. Bientôt, il fait la connaissance de Bastien, lui aussi nouvellement arrivé à Calais, côté forces de l’ordre cette fois. L’homme est curieux à double titre. Pour raisons familiales, il s’est porté candidat à un poste si ingrat qu’à Calais les policiers en place n’ont pas le droit d’être mutés. Ensuite, il n’a pas peur de se renseigner afin de saisir toutes les facettes de la situation : la mafia afghane contrôlant les aires de repos, les barrages montés par les passeurs, les agressions de chauffeurs de poids lourd toujours plus à cran. « Ajoutée au danger et à la violence des assauts, la pression financière mise sur ces routiers venait de tuer. Un homme qui, sans identité ni nationalité, finirait dans une fosse commune, là où les allées arborées des cimetières ne mènent pas. » Au commissariat de Calais, les bombes lacrymogènes arrivent par palettes chaque semaine, afin d’éloigner des hommes, des enfants, qui risqueront leur vie encore et encore.

 

Absurdité et désespoir.

 

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