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4 août 2015 2 04 /08 /août /2015 06:00
Le bistrot à la française, modèle d’authenticité locale souple et adaptable, est-il en train de disparaître ?

Dans son livre Éloge du bistrot Marc Augé écrit :

 

« Avec le mot bistrot la France a exporté 1 modèle d’authenticité locale souple et adaptable »

 

Mais comme pour notre fameux terroir, nos AOC, ne sommes-nous pas en train de vider de son contenu d’authenticité ce fameux modèle à la française ?

 

Répondre à cette interrogation n’est pas simple car les évolutions ne sont pas les mêmes sur l’ensemble du territoire.

 

Dans une chronique du 27 juillet 2010 « Non, le bistrot du coin n’est pas condamné ! » la réponse d’un professionnel, Pascal Gayrard, Aveyronnais, né dans le milieu puisque ses parents tenaient un café, et aujourd’hui directeur général en France de Metro Cash &Carry France, grossiste au service des professionnels (dont les cafés, bars) la tête de Turc du gros Poussah de Barcelone, réagissait à l’éloge funèbre du bistrot.

 

Il écrivait dans une tribune publiée dans le Monde du 27 juillet 2010 :

 

« … de grâce, ne nous trompons pas de diagnostic, au risque de préconiser les mauvais remèdes! »

 

« En fait, pour cette profession, si ancrée dans le paysage culturel français et pourtant aujourd’hui menacée de disparition, il s’agit bien d’une crise d’identité doublée d’une crise de son savoir-faire. Certes, les Français restent majoritairement très attachés aux cafés traditionnels. En effet, selon une étude que nous venons de mener avec BVA, 82% d’entre eux les plébiscitent par rapport aux établissements franchisés. Mais le fameux bistrot du coin se meurt de s’être laisse dessaisir de son indéniable compétence au profit d’autres professionnels mieux organisés – enseignes, chaines…

 

Facteur aggravant: peu de fournisseurs des cafetiers ont anticipé l’aide qu’ils pouvaient leur apporter dans cette conjoncture difficile, et certains ont préféré se tourner vers les chaines, privant ainsi les cafés-bars de l’organisation et de la logistique nécessaire pour rebondir. Dans cette période d’adversité, certains cafés ≪à la française≫ ont aussi perdu leur âme. Décor ≪BCBG≫, ambiance pub, lumière tamisée ou psychédélique et profonds canapés club ne remplaceront jamais pour les consommateurs de tous âges, la qualité d’un ≪plat du jour≫ bon marché, le goût d’un bon café noir, la saveur d’un sandwich de pain frais ou d’une vraie pression servie ≪sans faux col≫.

 

Ce métier s’est fait voler la qualité d’un expresso par des fabricants de machines ou celle d’un ≪ jambon beurre ≫ par les rayons produits frais des grandes surfaces. Quant au traditionnel≪plat du jour≫, blanquette de veau ou petit salé aux lentilles, le voilà qui disparait au profit des formules proposées par les fast-foods! »

 

 

Où en est-on en 2015 ?

 

Sur France Inter l'émission Service Public de Guillaume Erner du vendredi 22 mai 2015 s’interrogeait :

 

« Le bistrot est-il en rade? Trop chers, pas toujours plaisants, de plus en plus de cafés ferment. Le bistrot français a-t-il encore un avenir? Comment peut-il lutter contre les fast-foods et autres lieux où l’on peut se restaurer à moins cher ? »

 

Les cafés-bar trinquent… ils disparaissent. Vous pouvez vous informer ICI.

 

Tout fout le camp ma bonne dame !

 

Alors avec Marc Augé, intellectuel adepte du bistrot, qui avec pertinence, cherche à démêler les fils de cette appellation, faisons un petit peu de sociologie du bistrot.

 

« Bistrot ou non bistrot ? Le « troquet » est un petit « caboulot » dans lequel on boit. On ne va pas dans un troquet ou un « bistroquet » pour prendre une coupe de champagne, plutôt un coup de rouge ou de blanc, ou une bière. On ne s’y attarde pas pour le plaisir. On s’y assied rarement.

 

Le « café » est une institution qui a ses lettres de noblesse et parfois ses lettres de noblesse et parfois ses spécialités. Un parfum de distinction européenne s’attache au mot lui-même ; les cafés littéraires se sont fait une réputation historique ; d’autres parfois les mêmes, ont été des lieux de vie politique. Les bistrots se situeraient ainsi quelque part entre les troquets les plus élémentaires et les cafés les plus élaborés. »

 

« Ce qui fait le bistrot, le vrai bistrot, c’est sa disponibilité dans le temps : il est ouvert du matin au soir, plus ou moins tôt, plus ou moins tard, mais sans interruption. »

 

« Le fait que le mot « bistrot » traduit chez ceux qui l’emploient une forme de sympathie immédiate… »

 

Pour lui c’est comme si l’emploi de ce mot, à lui seul, garantissait le caractère fraternel, aimable et vivifiant d’une sortie en ville à proximité du lieu de vie ou de travail.

 

Vision très urbaine, civilisée, plutôt soft, celle d’un intellectuel qui n’y fait que passer, par choix, sans pour autant s’y impliquer, y traîner, y laisser son salaire et sa santé.

 

Le bistrot, comme le café du coin, en tout lieu, grande ou petite ville, patelin, c’était le peuple qui y allait, le populo, les classes dangereuses, les poivrots, les traîne-lattes, les vas-de-la-gueule, les petits vieux et les mémés solitaires, les poinçonneurs de tickets de tiercé, le facteur, le boulanger, le boucher, les étudiants fauchés, les filles émancipées, les bidasses en goguette…

 

Sans tomber dans la nostalgie, s’il en reste encore des traces çà et là, le Paris populaire, comme celui des grandes métropoles, ayant rétréci comme une peau de chagrin, les bistrots, comme les cafés du coin, ont par contrecoup subi le même sort. Le phénomène est bien pire dans la campagne profonde où les cafés comme les bistrots ont souvent disparus. Et que dire des grands ensembles, de ces banlieues « dangereuses ». Et pour les villes moyennes, les bistrots et les cafés sont devenus des couches-tôt.

 

De nouveaux formats, comme on dit, émergent, surtout autour des jeunes qui éprouvent le besoin de se retrouver au dehors : bar à vins, bar à café par exemple… Mais tel n’était pas mon propos d’aujourd’hui.

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