Le vocabulaire du vin ne cesse de m’étonner, après avoir découvert le goût de serpillière – comme de bien entendu, il existe des dégustations de jus de serpillière dans les instituts d’œnologie – voilà t’y pas qu’on me sert le goût de souris.
Moi, dans ma candeur, j’ai cru que la souris dont il s’agissait était une souris.
Naze, le gus !
Pas tant que ça les grelus, ben oui, des souris les polars en sont bourrés :
« C'était mauvais de se monter le bourrichon pour une souris, si mignonne fût-elle. »
« Les femelles, en grande majorité, possèdent un coeur entre les cuisses. Tant qu'une souris bande pour son mec, il n'y a rien craindre. »
Mais non, il ne s’agissait que d’ajouter le petit mammifère rongeur au bestiaire ou au potager des flaveurs et des saveurs du vin souvent accolés au foutus vin nu.
Il est en effet très courant que chez les bobos parisiens y’ai un pékin ou une greluche qui s’exclame « Pourquoi il pue, ce vin ? »
Là, je sors de ma manche, Miss Glou-Glou, celle qui sait tout sur le glou :
« Il est temps de passer à table, chéri(e) regarde ce que j’ai pour le dîner, l’autre répond aah !, vous êtes fier/fière comme « un petit banc ». Vous débouchez enfin, versez dans le verre et là « oh…oh! C’est pouah, c’est beurk !! ». Ça sent l’aisselle pas propre, le chou mariné oublié sur un coin de table pendant 3 jours. Mais ça ne sent pas le bouchon, non, ni la souris, ni le vinaigre, ni le dissolvant. Juste le chou dégueu. C’est grave ? Ben non, pas tant que ça. »
Mais au lieu de ramener ma science, bien défaillante, je sors de ma manche la Science, celle des formules chimiques : « En 2002, des Australiens avaient identifié trois pyridines responsables du phénomène : les molécules ATHP (2-acétyl-tétrahydropyridine), ETHP (2-éthyl-tétrahydropyridine) et APY (2-acétyl-1-pyrroline). »
Et sachez donc mes biens chers frères, mes bien chères sœurs :
« Il n'y a pas un mais des goûts de souris », classés en trois catégories sensorielles, en allant du pop-corn au vomi et en passant par des notes d'urine de souris.
« C’est plus une texture, avec un côté gras de cacahuète. Et l’odeur du poil, voire de la pisse de souris »
Et bien sûr, pour la bonne bouche, je sors un grand amateur de la LPV qui se fait un plaisir de le décrire avec gourmandise et un lot de conneries :
« … tout amateur de vins natures a forcément rencontré ce défaut, qui est sans doute le pire que je puisse rencontrer dans un vin.
Ce fameux goût de souris fait allusion à un goût qui, s'il est discret, se contente d'apparaître en fin de bouche voir parfois longtemps (plusieurs secondes) après que le vin ait été avalé ou craché. C'est un gout tenace, difficile à décrire, faisant une subtile synthèse entre le rance et le pourri (miam!!). Ce goût peut arriver rapidement après l'ouverture de la bouteille ; dans ce cas il ne fait qu'empirer rendant le breuvage imbuvable. S'il est très fort on peut même le sentir au nez. Mais heureusement il arrive généralement après quelques heures d'ouverture. Il est rare de le trouver sur des blancs et n'apparaît jamais chez les vignerons maniaques de l'hygiène. Mais ce même goût se retrouve à l'identique quelle que soit la région d'origine du vin. »
Eulala, vous imaginez la tronche de madame Michu, qui a peur des souris, si on déclare devant elle afin de lui éviter la panique : « Ce vin a goût de vomi… »
Attention, ce n’est pas une découverte, le phénomène n’a rien de nouveau : « C’est un défaut répertorié dans les livres, que l’on pensait disparu. »
Ceci étant écrit, selon les pontes de l’œnologie, le goût de souris n'est pas simple à décrire. Car il s'agit d'un défaut olfactif quasi indétectable au nez.
Là, je me trouble, tel un vin nu, en effet je croyais avoir saisi que c’était l’odeur de pisse de souris dont il était question alors que non « Il peut se détecter en bouche, mais aussi sur le doigt : « si vous trempez votre doigt dans un verre, que vous l’agitez ensuite, et qu'en séchant il y a de la souris, vous le sentirez »
Dieu que c’est compliqué la technique !
Je résume, les éminents chercheurs, pour étalonner le goût de souris, ont testés en lapant le contenu de petites fioles : le goût de souris blanche, de souris grise, de souris verte qui courrait dans l’herbe… je l’attrape par la queue… je la donne à ces messieurs…, de mulot, de campagnol, de rat musqué, de loir…
Je plaisante bien sûr, ignorant crasse que je suis !
J’adore le test du petit doigt, en le pratiquant dans les dîners en ville tu fais un tabac…
Revenons au sérieux qui sied dans les chais :
- Blancs ou rouges, tous les vins peuvent être concernés, quelle que soit leur région d'origine. Mais, diton, ce sont les vins nature les plus exposés vu qu’ils ne sont pas soufrés.
- Les molécules à l’origine du goût de souris sont bien connues : il s’agit de lactobacilles, « plutôt favorables habituellement. Mais c’est aussi lié au développement des bretts en présence de sucre, donc pendant la fermentation ».
- Ce goût n’est pas lié à l’hygiène, mais aux méthodes de vinification.
- Il se manifeste « lorsque le pH augmente et que l’acidité diminue »
- La particularité du goût de souris, c’est qu’il s’agit d’un « défaut passager ». Il peut apparaître aussi bien dès l’ouverture de la bouteille que plusieurs heures après, avant de disparaître tout aussi mystérieusement. Comme si le vin le digérait. Ça, on ne sait pas encore l’expliquer.
- Pour compliquer encore la chose, tout le monde n’est pas égal face au goût de souris. Beaucoup détestent, mais certains adorent. Et quelquesuns n'y sont pas sensibles. « Quand les vins sont complexes, ça peut ne pas être un problème ».
Première conclusion utile pour le buveur : une fois que la souris est là il n’y a qu’une seule solution : attendre qu’elle s’en aille.
Reste l’utilisation de l’arme atomique : le SOUFRE
« Évidemment, il suffirait de mettre 6 grammes de soufre et le problème serait résolu » mais « Je ne vois pas l’intérêt d'ajouter du soufre. Tu n’as plus aucun défaut, mais tu n’as plus aucune qualité non plus. »
Là, s’arrête ma capacité de compréhension car, comme vous vous en doutez l’ignare crasse que je suis s’est contenté de pomper la science des autres, tel un Shadocks.
Pour ceux d’entre vous qui aiment la science c’est ICI
Pour finir, j’ai un secret pour détecter à coup sûr le goût de souris.
Lequel me direz-vous ?
Allons, allons, bande de petits canaillous, il est clair – avec aussi un e – qu’un secret ça ne se jette pas sur la Toile, on le garde pour soi.