Overblog Tous les blogs Top blogs Économie, Finance & Droit Tous les blogs Économie, Finance & Droit
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
MENU
8 juin 2016 3 08 /06 /juin /2016 06:00
« B… éclata d'un rire énorme et jeta une mie de pain saucée dans la bouche d'A... » L’art de saucer est-il un art brut pour péquenots…

C’est du Zola dans Germinal, 1885, p. 121.

 

Saucée, en ce moment vu l’état du ciel en France, sauf en Bretagne, dès que nous mettons le nez dehors nous sommes violemment saucés.

 

« Elle venait de voir passer Mme Goupil « sans parapluie, avec la robe de soie qu'elle s'est fait faire à Châteaudun. Si elle a loin à aller avant vêpres, elle pourrait bien la faire saucer » Proust, Swann, 1913, p. 101.

 

« Le temps devient abominable (...). Hier nous avons voulu faire une promenade en mer et nous avons été saucés » Flaubert, Correspondance, 1875, p. 223.

 

Dans L’art de saucer, son livre paru aux éditions de l’épure, Malayen Zubillaga nous explique que saucer est « une pulsion primitive, une manière instinctive de goûter le monde… »

 

 

Elle prévient : ça ne se fait pas au nom des codes du savoir-vivre.

 

  • Dans le genre injonction « aussi sèche qu’une hostie dominicale » par Le Petit Larousse du savoir-vivre : Ne saucez pas votre assiette avec du pain.

  • C’est la règle pour le Guide de l’étiquette et du savoir-vivre, avec une exception pour les préparations rustiques de péquenots, même pas en famille car « ces mauvaises habitudes choqueront inévitablement l’entourage et pire, une future belle-mère. »

 

  • Pour La Varende « c’est le commun qui lèche son écuelle »

 

Au Bourg-Pailler, la mémé Marie coupait dans la mie du pain de 4 livres des « petites béchées* » pour que nous puissions saucer.

 

* bouchées en patois vendéen

 

Dans mon petit roman du dimanche, le 24 décembre 2006, j’ai même écrit ça :

 

Elle rit : « et moi tu m'adores comment ?

 

- Comme le beurre de sardines...

 

- J'ai peur...

 

- Quand j'étais petit j'aurais vendu mon âme au diable pour une bouchée de pain qui avait saucé le beurre de sardines...

 

Là, je m’inscris en faux sur la supposition de l’auteur comme quoi « la baguette a été inventée pour saucer. »

 

La baguette c’est un truc de parigots tête de veau et je m’étonne qu’une Marseillaise puisse verser dans un tel parisianisme.

 

Mais il lui sera beaucoup pardonné car elle cite Desproges : « […] il faut être végétarien ou socialiste pour ne pas comprendre l’intense martyre qu’enduraient quotidiennement les malheureux gastronomes de ces temps obscurs. Pour bien imaginer la cruauté d’une telle frustration, essayez vous-même, misérables profiteurs repus de la gastronomie laxiste de ce siècle décadent, de saucer un jus de gigot à la pointe du couteau ou encore les dents d’une fourchette. C’est l’enfer ! C’est atroce ! »

 

Plus encore, je lui accorde les oreilles et la queue pour son humour roboratif : « En Espagne, où saucer se dit mojar (ce qui signifie aussi « mouiller ») (je dis ça je dis rien) »

 

« À Marseille, on ne rigole pas avec les pieds et paquets : si on prépare soi-même les paquets – on en trouve des tout prêts chez la plupart des bouchers –, il est INTERDIT D’UTILISER LA FICELLE pour les fermer. Ce serait comme oser mettre les glaçons avant l’eau dans le Ricard, oublier la rascasse dans la bouillabaisse ou supporter le club de foot de Toulon… »

 

J’adore les Pieds&Paquets et dans une chronique j’écrivais « La première trace des Pieds Paquets – pas mal non – remonte à 1476 au dîner offert par les chanoines de St Trophime d'Arles pour les funérailles de leur confrère Étienne Roberti. Ils sont apparus la première fois dans les recettes du livre de Clément Marius Morard en 1888 et leur réputation grandissante fera écrire à Blancard peu avant les années 1930 qu'ils sont «presque aussi renommés que la Bouillabaisse» marseillaise. »

 

« Du côté de Marseille on galèje grave il se dit qu’un cuisinier dénommé Ginouvès aurait élaboré la recette au XIXe siècle, dans le quartier de « la Pomme », en s’inspirant de la panse farcie écossaise et des tripes à la mode de Caen. Même si cette référence à « la panse de brebis farci » me plaît assez car le sketch succulent de Jacques Bodoin. »

 

Humour certes mais aussi invocation, très je sauce le jus de mes tomates en salade au Flore, de Claude Lévi-Strauss avec son art de donner du goût au pain :

 

« Car il ne suffit pas de manger assez. Il faut, comme le proverbe français le dit excellemment, ne pas perdre le goût du pain, c’est-à-dire de stimuler et de maintenir l’appétence pour un aliment de base, fournisseur d’énergie, mais doté d’une faible saveur […]. La véritable base de la cuisine mondiale, c’est l’hydrate de carbone assaisonné par un condiment. »

 

L’auteur sait aussi admettre ses échecs lorsqu’elle se lance dans la bataille du pain « ma déception a été à la hauteur de mes naïves espérances, un peu comme quand je demande au coiffeur la coupe dégradée Meg Ryan et que je sors en ressemblant à Bernard Thibault. »

 

À ce stade de mon exercice de critique littéraire j’avoue que je suis allergique aux livres de recettes car, comme le note Malayen (un prénom qui ne devrait pas plaire à Zemmour) « Tout le monde peut suivre une recette dans un livre, mais peu de personnes savent spontanément harmoniser une salade composée… »

 

Même si je ne suis pas un alchimiste qui s’ignore, un « toque » en espagnol (prononcé « tôqué), ma ligne de partage est simple : soit je suis capable d’interpréter au feeling un plat, soit je vais au restaurant pour manger ce que je ne sais faire de cette manière.

 

C’est ici que se situe le génie de l’auteur de l’Art de saucer, ses textes donnent envie de se lancer dans l’aventure, ils sont savoureux, baguenaudent dans la vraie vie, s’égarent dans les souvenirs de famille ou de voisinage comme à Martigues (prononcer Martchigues) dans l’immeuble où 5 des 8 appartements étaient loués par une famille de la famille « Yvonne, t’y as des poivrans ? », grésillent dans la poêle, embaument la cuisine…

 

Bref, sans verser dans le dithyrambe, c’est de la belle ouvrage qui donne envie de saucer au nez et à la barbe des coincés du col et des bouches en cul de poule…

 

Mon choix dans cette mine s’est porté sur la Coda alla vaccinara spécialité romaine.

 

Pourquoi ?

 

Avec ma franche mauvaise foi : parce que j’ai un faible pour Virginia Raggi, candidate 5 étoiles aux élections municipales à Rome, arrivée largement en tête avec 37% des voix. Une nouvelle louve pour la ville éternelle ? Par pure diplomatie je ne vous dis rien sur notre maire à nous qui dit aimer le vélo mais nous offre une chaussée pleine de trous…

 

« Elle aurait été créée par les bouchers romains pour utiliser la queue après avoir vendu aux bourgeois les morceaux réputés nobles de l’animal. Classique (après les tripes et les pieds, je te présente la queue). On commence d’ailleurs par un mijotage traditionnel a la tomate et au vin, pendant plusieurs heures pour que la viande se décroche des os et que les ingrédients se fondent en une alchimie onctueuse et parfumée – magie gélatineuse de la queue de bœuf.

 

Mais la coda alla vaccinara est urbaine, insolente, presque sulfureuse : les restaurateurs ont pris l’habitude d’ajouter à cette base du cacao des raisins secs et des pignons. De quoi défriser la moustache du boucher de mon village… »

 

« Les Romains saucent la queue, dégustant la coda alla vaccinara avec du pain plutôt qu’avec des pâtes. Ça me plaît, ce pain qui occupe une place centrale dans le repas : on ne le pose pas avec des pinces dans une petite assiette en guise d’accessoire décoratif ou de coupe-faim bourratif ; on le prend à pleines mains, on l’imbibe, on le tète, on le mâche, on le trempe, on le gobe, ah ça oui, c’est la sauce. »

 

Allez avec Malayen assénons la belle formule du regretté Jacques Villeret, dans Papy fait de la Résistance, trempant une demi-baguette beurrée dans un œuf d’autruche devant des convives atterrés ( ne pas confondre avec les économistes) « L’humour, c’est l’une des choses que je préfère, avec l’infanterie et les pieds  paquets. »

 

L'art de saucer par Desproges : un très grand moment de radio au Tribunal des Flagrants Délires 

Partager cet article
Repost0
7 juin 2016 2 07 /06 /juin /2016 06:00
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.

La tante Valentine, au Bourg-Pailler, ne mettait que très peu la main à la pâte, ses seules fonctions nourricières consistait à tourner chaque matin la manivelle de l’écrémeuse dans la souillarde située au-dessous de ma chambre, à baratter le beurre dans un grand tarrasson, à le mouler dans un moule ovale orné d’une marque imprimant une fleur sur le beurre et enfin à faire du riz au lait nappé de chocolat de ménage. La tante Valentine était une femme des champs où, protégée par sa quichenotte, elle abattait le travail de deux personnes.

 

Je dois avouer que le riz au lait nappé de chocolat de ménage de la tante Valentine fut ma madeleine de Proust. Au retour de l’école j’en mangeais à m’en faire péter la sous-ventrière. C’était l’extase qui virait à l’épectase.

 

Donc tout au long de ma vie déjà longue, j’ai perpétué la tradition riz au lait nappé de chocolat de ménage de la tante Valentine et Anne-Cécile a pu ainsi, elle aussi, atteindre les sommets des plaisirs simples.

 

Jérémie Couston, journaliste à Télérama, me demandait l’autre matin de l’aider à convaincre une de ses copines, naviguant dans la haute-finance, de cesser de manger de la mauvaise bouffe achetée an GD et dans le hard. J’ai argumenté, et dans la réponse qu’elle fit à mon ami, j’ai été frappé par le fait qu’elle se justifiait de donner de la nourriture toute prête à ses enfants en se réconfortant par un « Je crois sincèrement que les aliments pour enfants sont suffisamment contrôlés pour que mon fils ne soit pas malade parce que je lui donne du ficelo. »

 

Les bras m’en sont tombés et j’ai décidé de vous transmettre, photos à l’appui, mon parcours chaotique pour arriver à présenter à cette génération de mères ou de pères un riz au lait nappé de chocolat de ménage présentable pour séduire leurs mouflons.

 

Mon problème c’est que mon riz au lait nappé de chocolat de ménage était excellent, délicieux, succulent, mais présentait l’aspect d’une vague bouse marronnasse. Rédhibitoire face aux packagings affriolants des grands laitiers industriels qui utilisent jusqu’à Vermeer pour faire croire que leur laitière sait encore ce qu’est le lait.

 

1ière Tentative avec le matériel du bord… cata… moche !

 

e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.

2ième Tentative avec un nouveau moule… cata bis… effondrement !

 

Après consultation de mon amie Claire, qui a fait chocolatière chez Jacques Génin, j'ai appris ce qu'était une ganache - ne riez pas -  200g de chocolat pour 200g de crème fraîche, faire chauffer la crème puis incorporer le chocolat hors du feu...

 

Banco !

 

 J'achète aussi un moule à gâteau...

e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.

3ième Tentative avec de la fleurette et du matos pro…

 

Claire a beaucoup ri en voyant mon gâteau de riz et elle m'a dit que je me compliquais la vie : je devais aller du côté des Halles acheter un moule pro en silicone. J'ai opiné et j'y suis allé à vélo mais un truc ma chiffonnait : la tante Valentine allait-elle, du haut du ciel où elle est maintenant logée vu le nombre de rosaires qu'elle a égrené, apprécier cette modernité ?

 

Arrivé chez Bovida, après discussion, j'ai opté pour 2 moules dôme en inox... 

 

Autre précision, la Claire m'a donné le bon conseil pour m'éviter une nouvelle cata : il fallait que j'utilise de la crème fleurette et non de la crème crue beaucoup chargée en matières grasses... Que ferais-je sans Claire !

e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.

Le résultat est perfectible mais je puis vous assurer que ce riz au lait : 2 litres de lait cru, 200 g de riz Aquarello, 2 gousses de vanille Bourbon fendues, sucre Vanillé, sucre roux bio… nappé d’une ganache de chocolat Bonnat 200g et crème fleurette fermière 200g est un délice facile à réaliser si on s’y prend bien.

 

Dès que le riz est dans le moule il faut le placer un temps dans le freezer de votre réfrigérateur pour qu’il refroidisse vite mais sans le glacer. Le mettre ensuite dans un compartiment du frigo. Pour démouler vous passer la pointe d’un couteau fin autour de la couche supérieure puis plonger le cul du moule dans de l’eau bouillante.

 

Ça vous prendra une vingtaine de minutes chrono.

 

Comme moi faites vos courses à vélo : le résultat ci-dessous :

e-cuisine, le parcours chaotique d’un gâte-sauce ganache de + de 65 ans dans sa quête du riz au lait nappé de chocolat pour les mamans qui veulent gâter leurs enfants.
Partager cet article
Repost0
6 juin 2016 1 06 /06 /juin /2016 06:00
À Paris, quand la Cour s’amuse en Appel pour s’échapper du quotidien après 1 dure journée de travail dans 1 ambiance grise, elle crève 1 ballon de rouge de côtes-du-Rhône…

 

Haro sur le sentiment de gaîté et la légèreté, les dignes et, sans doute tristes, conseillers ou conseillères de la Cour d’Appel de Paris en ont décidé ainsi, quand après une dure journée de travail, dans une ambiance grise, tu t’offres un ballon de rouge de côtes-du-rhône, pour rêver, d’échapper du quotidien, pour faire une pause, tu entres de plain-pied dans la confrérie des pochtrons qui se murgent la tronche pour creuser plus encore le trou de la Sécurité Sociale.

 

À ce degré d’interprétation de la loi la jurisprudence se hisse au plus bas niveau d’une argumentation de piliers de café du commerce, verse dans un mauvais scénar du style Zola revisité par Franck Dubosc, participe à l’hygiénisation de la population.

 

La convivialité condamnée, comme si ceux qui ont envie d’oublier leur vie de merde avait besoin d’un visuel alléchant pour se noyer, en général en solitaire, dans l’enfilade de verres d’une boisson alcoolisée...

 

Qu’attends Jacques Dupont pour s’Invigner tout rouge ?

 

Inciter le bon peuple à s’offrir un petit verre à la sortie du boulot c’est le conduire, « en s’échappant ainsi aux difficultés de la vie », je cite, « à une consommation excessive pour atteindre le stade de félicité suggéré par le virtuel, lequel dépasse donc ce qui est nécessaire à la promotion du produit et inhérent à la démarche publicitaire proprement dite. »

 

Belle hypocrisie que celle-ci !

 

Vous me direz, ça n’est pas très grave car « qui regarde les affiches ? », « qui se dit, tiens pour m’envoyer en l’air en sifflant un petit verre ? », je vous assure : pas grand monde !

 

Tout ça c’est le fonds de commerce de l’ANPAA, association de lutte contre l’alcoolisme, addict à la chasse à la communication pour mieux masquer son incapacité à faire régresser le fléau.

 

Le 19 novembre 2014, les « incapables » avaient attaqué devant le TGI de Paris la campagne de publicité des Côtes du Rhône auprès du Tribunal de Grande instance de Paris le 19 novembre 2014 et par une ordonnance du 7 janvier 2015, le juge des référés du tribunal avait autorisé le maintien des visuels tout en demandant un changement du slogan « Au goût de la vie ». Ce qu’Inter Rhône avait fait en reprenant son ancien slogan « Des vins hauts en couleur ».

 

Appel bien sûr, et l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris qui vient de tomber le 27 mai : « ordonne la suppression de tout support publicitaire et notamment sur tout support papier et support de communication en ligne, la mise en scène d’un personnage en costume de ville tenant une sacoche dans la main droite, accroché à un ballon de baudruche rouge par la main gauche et s’élevant dans le ciel au-dessus d’une ville grise associée au slogan Côtes du Rhône ».

 

L’astreinte est de 5000 euros par infraction constatée à compter du 27 mai 2016.

 

Inter Rhône demande donc à tous les opérateurs qui auraient encore des affiches ou documents représentant cette campagne de les retirer.

 

À noter que le deuxième visuel de la campagne (un homme repeignant sa maison en rouge) n’est pas interdit, la Cour d’Appel ayant considéré qu’il n’était « pas de nature à inciter à une consommation abusive et excessive d’alcool ».

 

Allez, pour ne pas sombrer plus encore dans la sinistrose ambiante deux slogans que je propose à Inter Rhône.

 

« Plutôt rouges que mort ! »

 

« Les bêtes à cornes ont peur du rouge… »

 

NB. Le rédachef me signale que le mec à la cravate flottante, avec son beau cartable de cadre propre sur lui, qui s’envoie en l’air, est le portrait-type de l’ex chargé du marketing de la maison Rhône émigré sous d’autres cieux depuis.

Partager cet article
Repost0
5 juin 2016 7 05 /06 /juin /2016 08:00
CHAP.16 code acratopège, Régis Jauffret dans La Ballade de Rikers Island supposait même que DSK prenait des pilules érectiles...

Patrice de Mac Mahon : Que d'eau ! Que d'eau !

 

Le Préfet : Et encore, monsieur le Maréchal, vous ne voyez que le dessus.

 

Il aurait prononcé ces mots le 26 juin 1875, lors des terribles inondations de la Garonne.

 

Mac Mahon Maréchal de France, 3e président de la République française, fonction qu'il a occupée du 24 mai 1873 au 30 janvier 1879.

 

Statue de Georges Diebolt le Zouave du Pont de l’Alma a de la flotte jusqu'à la culotte ; il mesure 5,20 mètres de haut et représente, dans l'imaginaire parisien, l'indicateur le plus fiable du niveau de la Seine.

 

En 1910, lors de la crue du Siècle, il avait eu de l'eau jusqu'aux épaules. En 1970, il a été remonté de 70 centimètres mais a gardé sa superbe, lui qui date de 1856 et représente le courage des soldats de Napoléon III lors de la guerre de Crimée.

CHAP.16 code acratopège, Régis Jauffret dans La Ballade de Rikers Island supposait même que DSK prenait des pilules érectiles...

Il fait un temps à ne pas mettre un cycliste dehors alors je lis en écoutant FIP.

 

« … les rues vides lui offrirent une allée de feux rouges qu’il grilla doucement jusqu’à s’insérer sur la route nationale 3.

 

Quatre voies grises et sans fin s’enfonçant comme une lance dans le cœur de la banlieue. Au fur et à mesure, voir les maisons devenir immeubles et les immeubles devenir des tours. Détourner les yeux devant les camps de Roms. Caravanes à perte de vue, collées les unes aux autres à proximité des lignes du RER. Linge mis à sécher sur les grillages qui contiennent cette partie de la population qu’on ne sait aimer ni détester. Fermer sa vitre en passant devant la déchetterie intermunicipale et ses effluves, à seulement quelques encablures des premières habitations. C’est de cette manière que l’on respecte le 93 et ses citoyens : au point de leur foutre sous le nez des montagnes de poubelles. Une idée que l’on ne devrait proposer à la capitale, en intramuros. Juste pour voir la réaction des Parisiens. À moins que les pauvres et les immigrés n’aient un sens de l’odorat moins développé… Passer les parkings sans fin des entreprises de BTP et saluer les toujours mêmes travailleurs au black qui attendent, en groupe, la camionnette de ramassage. Tenter d’arriver sans déprimer dans cette nouvelle journée qui commence. »

 

Ça c’est le capitaine Coste du SDPJ 93 dans Code93 d’Olivier Norek. À lire absolument, avec un polar qui renouvelle le genre, écrit par un jeune flic lettré, au plus près d’une réalité dérangeante, sans concession, dans ces marges que l’on désigne avec facilité par la banlieue, apartheid territorial non assumé. Bien plus que certaines enquêtes sociologiques illisibles, orientées, ce premier roman plonge dans un univers gris, glauque, où tout ne se résume pas par un affrontement entre les bons et les méchants.

 

La réalité du 93

 

La brigade de répression du banditisme (BRB) a démantelé un cercle de jeux clandestin qui opérait depuis un an à Montreuil (Seine-Saint-Denis), une vingtaine de personnes ont été interpellées depuis début mai, a-t-on appris vendredi de source policière.

 

Des croupiers, des serveurs, des voituriers, des tables de poker: le cercle de jeux clandestin fonctionnait comme un petit casino dans le bas Montreuil, en petite couronne parisienne.

 

Tous les soirs, dans un local commercial loué, des parties de poker étaient organisées avec des "mises très importantes", selon une source policière. "Ces parties pouvaient rapporter à l'organisateur plusieurs milliers d'euros", a précisé à l'AFP cette source.

 

L'organisateur, un homme de 34 ans, était lui-même joueur et connu des services de police notamment pour port d'arme prohibé. Les clients "avaient des profils différents", selon la source policière.

 

Sur cette affaire, la BRB a "effectué une vingtaine d'interpellations depuis le début du mois de mai", selon cette source, "l'organisateur, les croupiers serveurs et voituriers mais aussi des joueurs".

 

Lors des diverses perquisitions, les policiers ont saisi des tables de poker, 40.000 euros, des armes ainsi que 8kg de résine de cannabis.

 

L'enquête a été menée avec l'URSSAF et les Douanes.

 

L’actualité des médias nationaux charrie elle, Benzema, Baupin, le sexe... avec pour le premier, en défense, l’évocation du délit de faciès mis sur le tapis par Cantona. Le galactique accuse ce brave DD d'avoir cédé à « la pression d'une partie raciste de la France ».

 

M. Benzema, bienvenue dans la vraie France du racisme

 

Lire ICI 

 

Du côté du sexe harceleur, DSK, contrairement au zouave du Pont de l’Alma, jeudi dernier, a été épargné par les gouttes, le tribunal correctionnel de Paris lui a donné raison et condamné l'écrivain Régis Jauffret.

 

« Où commence la fiction et le travail d'un romancier ? Jeudi, Dominique Strauss-Kahn a obtenu la condamnation en diffamation de Régis Jauffret, l'auteur de "La Ballade de Rikers Island", un roman sur l'affaire du Sofitel. L'écrivain a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris à une amende de 1.500 euros avec sursis, ainsi qu'à 10.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral pour certains passages de son ouvrage et à 5.000 euros pour des propos tenus à la radio pendant la promotion de son livre. La justice a aussi interdit toute nouvelle édition du roman comportant les passages jugés diffamatoires.

 

Les propos condamnés de Régis Jauffret avaient été exprimés au micro de Pascale Clark sur France Inter: « Ce dont j'avais été persuadé dès le début, j’en suis aujourd’hui aussi persuadé, c'est qu'il ne s'est pas aperçu qu'il l'avait violée, ou qu'il l'avait bousculée. Il ne s’est pas rendu compte. Quand vous voyez les images des caméras de surveillance, vous voyez très bien quand il sort qu'il n'a pas du tout conscience d'avoir commis un délit ». Plus tard, dans la discussion, il assénait à nouveau que, pour lui, DSK a commis un viol. « En effet, il n’y a pas eu de lutte. Ce n’est pas une femme qui était éduquée pour lutter, pour crier. C’est pour ça qu’il n’a pas cru qu’il l’a violée. » « L’enjeu de ce livre était d’arriver à être digne de l’avant-dernière phrase du livre qui n’est pas de moi. «Est-ce que tous les clients ont le droit de faire tout ce qu'ils veulent avec nous?» Aucun écrivain n'aurait pu l’inventer, c’est elle qui l’a dite. C’est là où tout bascule, c’est là que la responsable a dit non. » Régis Jauffret supposait même que DSK prenait des pilules érectiles... »

 

Sur le flanc politique le costar, puis son ISF, de Macron et la moustache de Martinez passionnent les journalistes et les réseaux sociaux.

 

Costard et ISF : la semaine qui a révélé les failles politiques de Macron 

 

« Désormais, Emmanuel Macron prétend à Mitterrand. Face aux attaques et aux rumeurs, le ministre de l’Economie dit à ses visiteurs qu’il se découvre le cuir de l’ancien président. Rien ne l’atteint, rien ne le blesse, rien ne le tue. Et il se sent plus fort encore les épreuves passées. Entre Nietzche et Mitterrand, il continuera d’avancer vers 2017, à la rencontre de son destin, sans désarmer. Quoi qu’il arrive. Quoi qu’il en coûte.

 

Détendu. Serein. Tel se présente ce Macron en campagne qui n’est encore en campagne et qui ne sait encore pas vraiment s’il le sera un jour. Déterminé, oui, mais pas encore décidé. Décidé, oui, mais pas encore déterminé. Ou alors dans des proportions qui demeurent à déterminer. C’est compliqué, mais c’est ainsi. Le phénomène Macron porte sa contradiction, donc sa limite, et la praxis Macron sa part de schizophrénie. En privé, Macron revendique l'indifférence aux attaques, façon Mitterrand. Et en public, il se dit blessé. Comprenne qui pourra. »

 

 

Philippe Martinez, le Lider Maximo de la contestation sociale 

 

« En quelques semaines, ses bacchantes sont devenues presque aussi célèbres que celles d’Astérix. Lider Maximo de la contestation sociale, dernier défenseur d’une lutte des classes à laquelle il croit dur comme fer, Philippe Martinez s’est trouvé propulsé sur l’avant-scène médiatique par son combat jusqu’au-boutiste contre la réforme El Khomri. Avant d’engager cette guerre d’usure, c’était un inconnu qui pouvait déambuler incognito avec ses deux gardes du corps. Mais c’était avant…

 

Depuis trois mois, le secrétaire général de la CGT est de toutes les manifs pour le retrait du projet de loi travail, bras dessus bras dessous avec Jean-Claude Mailly, son ex-frère ennemi de FO. Il est omniprésent sur les chaînes de télévision et les radios. Quand, le 21 mai, il va saluer ses camarades qui bloquent un dépôt pétrolier à Haulchin (Nord) et se fait photographier en train de jeter un pneu dans le brasier du piquet de grève, il est assailli par des militants qui veulent faire des selfies avec lui.

 

A la tête de la CGT depuis février 2015, Philippe Martinez, 55 ans, incarne la résistance à un pouvoir « dit de gauche » qui a trahi ses électeurs en voulant « casser le code du travail ». Nicolas Sarkozy et François Hollande, c’est bonnet blanc et blanc bonnet. S’il a hésité sur le champ de bataille, songeant d’abord à porter le fer sur l’emploi et le pouvoir d’achat, voire sur sa revendication fétiche de la semaine de 32 heures, il a vite opté pour la lutte contre la « loi travail » qui lui a permis d’aborder son congrès confédéral, du 18 au 22 avril à Marseille, dans une posture combative. »

[…]

 

Philippe Martinez est le premier fils d’immigrés, espagnols en l’occurrence, à la tête de la CGT. Sa mère était femme de ménage et son père a combattu comme volontaire dans les Brigades internationales. Il naît le 1er avril 1961 à Suresnes (Hauts-de-Seine) et fréquente l’école Robespierre et le collège Les Bons Raisins, à Rueil-Malmaison. Il en hérite cet accent parigot dont il joue avec délice, l’air bourru et économe en sourires. En 1982, il est embauché comme technicien chez Renault à Billancourt, avant d’être muté au centre de recherche sur les moteurs à Rueil-Malmaison.

 

Délégué du personnel CGT dès 1986, il exerce les fonctions de délégué syndical central du groupe Renault de 1997 à 2004. Il s’engage dans les luttes, notamment contre la fermeture du site de Vilvorde en Belgique, et évite de se compromettre avec ses patrons, ne répondant jamais aux vœux annuels du directeur des relations sociales et refusant d’aller visiter avec « les tauliers » les sites de Nissan au Japon. Mais il fait partie de l’équipe de football de la firme, avec le dossard numéro 10. « Le seul point commun entre Martinez et Valls, s’amuse un proche, c’est leur amour du foot et du Barça [le club de Barcelone]. » Il reste fier de son entreprise et figure toujours dans ses effectifs, au point que le président de la fédération CFTC de la métallurgie, Joseph Crespo, l’a interpellé pour savoir « si on lui retire ses jours de grève »…

 

Elu secrétaire général de la fédération de la métallurgie CGT en mars 2008, il s’oppose à Bernard Thibault au comité confédéral de mai 2012 (où ce dernier sera mis en minorité sur sa succession), votant contre la désignation de la « dauphine » Nadine Prigent. En mars 2013, au congrès de Toulouse, il entre à la commission exécutive confédérale tandis que Thierry Lepaon est élu secrétaire général de la CGT. Commence ensuite une longue histoire qui va conduire Philippe Martinez à la tête de la centrale par effraction. Quand éclate l’affaire Lepaon, mis en cause pour les travaux entrepris dans son logement de fonctions et dans son bureau, il négocie un accord lors d’une réunion secrète le 3 décembre 2014. Sa fédération l’a mandaté pour demander la démission de Thierry Lepaon mais ce dernier obtient son soutien en échange d’une promesse de lui succéder en 2016. Philippe Martinez marche dans la combine avant de le lâcher.

 

Le 13 janvier 2015, lors du comité confédéral qui suit la démission de Thierry Lepaon, Philippe Martinez subit un camouflet. Avec 57,5 % des voix, il ne franchit pas le seuil des deux tiers des votants requis pour être secrétaire général mais il est désigné pour piloter un collectif chargé de préparer une session de rattrapage. Une faveur qu’il obtient grâce à une manœuvre qui conduit l’union départementale du Nord et la fédération de la santé, dont la secrétaire générale, Nathalie Gamiochipi, est sa compagne, à voter pour lui alors qu’elles étaient mandatées pour voter contre.

 

Qu’importe ! Le lendemain, il convoque la presse comme s’il était bien élu. Il s’installe dans le bureau de Thierry Lepaon au huitième étage du siège de Montreuil et se rend – sans cravate comme à son habitude –, aux vœux pour les partenaires sociaux à l’Elysée. Il devra toutefois attendre le 3 février pour être enfin promu avec 93,4 % des suffrages. Seule la fédération de la construction, dont l’ancien patron, Eric Aubin, avait postulé pour succéder à Bernard Thibault, vote contre. Le 27 mars, la fédération de la santé évince purement et simplement Nathalie Gamiochipi.

 

Une ligne d’opposition radicale

 

Peu à peu, Philippe Martinez, surnommé dans la CGT « Tapioca », comme le général de Tintin, ou « Zapata » comme le révolutionnaire mexicain, impose sa marque. Il part en guerre contre la « sur-institutionnalisation » des syndicats, reprochant au patronat de vouloir en faire « un syndicalisme délégataire » ou une « caste d’experts ». Il prône « une démarche permanente de consultation des salariés », présente la CGT comme un syndicat « qui conteste, propose, agit, négocie ». Dans une interview au Monde du 22 septembre 2015, il proclame que « le syndicalisme, par essence, est réformiste ». Mais il incarne vite une ligne d’opposition radicale au gouvernement.

 

Vent debout contre la proclamation de l’état d’urgence après les attentats terroristes du 13 novembre 2015, il se flatte d’avoir « un discours à contre-courant », une preuve de « modernité ». « Il est raide, difficile à cerner, imprévisible », note un dirigeant. « Il est colérique, ajoute un autre, même s’il peut être drôle dans l’intimité. » « Il est sûr de lui et assez fin manœuvrier, souligne Pierre Ferracci, expert du social et président du groupe Alpha, cabinet conseil dans les relations humaines et les conditions de travail. Il a réussi à souder la maison en peu de temps malgré les 30 % qui trouvent qu’il ne va pas assez loin. »

ABATTOIRS : « DANS LA TUERIE, L'OUVRIER EST LA SEULE MACHINE QUI NE FAIT PAS DE BRUIT »

 

Stéphane Geffroy travaille depuis 25 ans à l'abattoir de Liffré, près de Rennes. Avant son audition, la semaine prochaine à l ‘Assemblée nationale, il raconte son quotidien dans un livre. Sans filtre, entre condition animale et condition humaine.

 

D'une voix calme, timide presque gênée, Stéphane Geffroy raconte. Avec des mots souvent crus, il parle de se son quart-de-siècle passé dans l'abattoir de Liffré. Là, derrière l'image policée dépeinte par la grande distribution, il donne à voir, à sentir, à toucher, les conditions de vie et de mort des animaux, mais aussi les conditions de travail des ouvriers.

 

Un "pion qui doit rester à sa place"

 

L'odeur, d’abord. Ce mélange de lait caillé, de bouses, de sang, de peau brûlée... Une odeur acide, âcre, qui s’imprègne.

 

Le bruit, aussi. Les "clic-clic" métalliques, les chaînes et les scies électriques imposent leurs sons, leurs rythmes. "Dans la tuerie, glisse-t-il, l'ouvrier est la seule machine qui ne fait pas de bruit".

 

Les cadences, enfin. En moyenne, une minute et quinze secondes par bête.

 

La suite ICI 

Jean-Emmanuel Ray, Université de Paris I-Sorbonne : « La loi Travail opère un bon équilibre entre droit du travail et droit à l’emploi, mais passe un peu vite sur les effets du tsunami numérique en cours » 

 

« Au-delà de l'opposition à la loi El Khomri, qui constitue « une caricature de notre incapacité à négocier des compromis et à sortir des postures faciles et du tout ou rien », ce spécialiste du droit du travail pointe la nécessaire refonte des grands principes qui régissent le salariat depuis le XIXe siècle. Les nouvelles technologies sont passées par là.

 

C’est un lieu commun de le dire : la réforme du Code du travail, dite Loi Khomri, s’est en grande partie brisée sur les conservatismes. La faute au pouvoir politique qui n’a pas su en dégager le sens profond. La mission n’avait pourtant rien d’impossible, car il est dans la nature même du droit du travail d’être au point d’équilibre entre protection des travailleurs et efficacité économique. Or à l’examen, selon le professeur de droit Jean-Emmanuel Ray, le projet de loi adopté lors du Conseil des ministres du 24 mars entre deux manifestations répond à cette exigence en opérant “un bon équilibre entre droit du travail et droit à l’emploi”. Mais au-delà de la “bouffée d’oxygène” à donner aux outsiders pour leur ouvrir plus facilement les portes des entreprises, notre droit du travail doit aussi intégrer l’impact des nouvelles technologies et des changements de mentalités. Ces évolutions débouchent en effet sur des relations de travail de plus en plus basées sur la “confiance” et non plus sur “l’autorité”. Un vrai défi d’adaptation que le projet de loi aborde “trop vite” au goût de Jean-Emmanuel Ray.

 

Michel Rocard: « Le risque de la fin du PS existe » 

 

L’ancien Premier ministre Michel Rocard, père de la deuxième gauche, s’inquiète pour l’avenir de la France et… de la gauche. Il estime en revanche que Manuel Valls a trop misé sur cette loi travail mais qu’il ne doit pas démissionner.

 

- Cette crispation est-elle la faute du gouvernement, du Medef, des syndicats?

 

C’est d’abord la faute à l’Histoire de France. La France n’a jamais appris à discuter avec elle-même. C’est une très grave fragilité, une terrible faiblesse pour notre pays. La crise actuelle montre aussi que le gouvernement n’a pas su mener les négociations jusqu’au bout. Mais les partenaires étaient-ils prêts? La responsabilité est partagée par tous.

 

- Quel est l’objectif de la CGT?

 

La CGT est la mère des syndicats, elle en est la matrice. C’est une organisation plus que centenaire mais qui ne sait plus se faire respecter, qui n’a plus d’inspiration. Elle est donc en recherche d’identité et de prestige. Et elle ne sait le faire qu’à travers sa grande tradition de hurlement de slogans. Or les intérêts qu’elle défend sont minoritaires. L’opinion doit lui faire sentir que trop c’est trop pour qu’elle réalise que la sortie nécessaire suppose la reprise du dialogue. Mais la CGT n’est pas la seule coupable, elle amplifie juste les conséquences du désaccord dont elle n’est pas à l’origine.

 

- Peut-on réformer la France?

 

Il faut arrêter de penser que toute réforme doit passer par la loi. Le problème de la loi Travail, c’est justement que c’est une loi: ce qui régit la négociation entre les salariés ne devrait pas relever du pouvoir législatif mais de conventions ou d’accords. Pour cela, le patronat doit commencer par changer son comportement. Lui, mais aussi les syndicats ouvriers, doivent faire l’apprentissage de la négociation. C’est une absolue priorité que l’Etat doit encourager. Ce dernier doit également apprendre à se substituer le moins possible aux partenaires sociaux.

 

Et puis une pensée pour nos aïeux dans les tranchées « Nous ne mangeons que d'une dent, ne nous asseyons que d'une fesse... »: Jouvet au front

 

Infirmier de 1914 à 1917, Louis Jouvet ne cessa d'écrire à Jacques Copeau, son « bon patron », depuis l'enfer des tranchées. Extraits.

 

« En 1914, Louis Jouvet a 27 ans. Engagé comme infirmier, promu pharmacien auxiliaire, il fera la bataille de la Somme. Malade, épuisé, il sera évacué et affecté en février 1917 à l'infirmerie régimentaire du 1er groupe d'aviation de l'aérodrome de Saint-Cyr. En octobre, il partira rejoindre Copeau aux Etats-Unis. »

 

Les pages parmi les plus émouvantes sont celles où l'on côtoie le soldat Jouvet au plus sombre des nuits et des jours. Il chasse les rats, traque les poux et les puces.

 

Frigorifié au point de se faire «l'effet d'avoir la matière cérébrale en gelée de veau», il manie «les thermomètres, les urinaux, les bassins, le coton, les pinces, l'eau bouillie - et la teinture d'iode», mais ne rêve que pendillons, lanternes, maquettes, commedia dell'arte. Il écrit même le scénario d'une farce intitulée «le Malade, la Maladie et le Médecin»...

Partager cet article
Repost0
5 juin 2016 7 05 /06 /juin /2016 06:00
Serf d’un grand seigneur impitoyable, le Temps, le vigneron lutte contre les vicissitudes et les infortunes, malgré les découragements et les rancœurs justifiées, tout au long d’une année

Cette chronique a été mise en ligne le 2 août 2011, c'est un extrait du livre d'André Lagrange Moi je suis vigneron.

 

« Le Toine serf d’un grand seigneur impitoyable, le Temps, le vigneron lutte contre les vicissitudes et les infortunes, malgré les découragements et les rancœurs justifiées, tout au long d’une année, c’est-à-dire sans répit d’une récolte jusqu’à l’autre. Fort de l’expérience des aïeux, et de la sienne propre, Le Toine s’enorgueillit de n’être pas un va-t-aux-vignes, mais un vigneron qui œuvre avec sa tête plus encore qu’avec ses bras. »

 

Pour l’auteur, Le Toine se veut la synthèse de tous les vignerons de Bourgogne, et d’ailleurs.

 

La fresque est située dans la Côte chalonnaise.

 

 

Le Toine bricole à son établi, devant la fenêtre du magasin ; il remet des manches à ses pioches. D’un oeil, il regarde son travail, de l’autre, le Mont-Juillet, qui s’empanache de traînées d’un violet sombre. L’inquiétude le ronge : fin juillet, c’est la période la plus redoutable pour les orages, avec les environs du quinze août.

 

- « Pardi ! hier, c’était la Madeleine ; elle a pas fait sa fête ; des fois que nous, on pourrait ben, malgré nous, la faire aujourd’hui ! On a bougrement raison de dire :

 

« La Madeleine

 

Ne passe pas sans son étrenne ! »

 

Hélas ! Elle pourrait donc pas les garder pour elle, ses lugubres cadeaux ? Maudite pécheresse ! Elle sème à tous les vents le malheur de sa honte ; elle fait dégouliner, tout au long du ciel, ses larmes grosses comme des œufs ; un courant d’air, venu on ne sait d’où, les glace, et voici l’étrange couvée de grêlons qui s’abat sur le vignoble, pour le ravager.

 

(...) Il n’a pas le temps d’achever, qu’une espèce de queue rouge, attachée à une boule de feu, fouette tout du long la brume jaune ; ave ça, un craquement, oh ! mais, un de ces craquements ! Comme une charpente qui s’effondre.

 

-« Le tonnerre est tombé à Mercœur ! souffle l’Ugène à mi-voix. Un coup tout seul, comme ça, c’est le signal de ce qu’on sait que trop.

 

- Oui, répond le Toine. Misère de Dieu ! Tout est foutu. Ecoute !... »

 

On entend comme le roulement d’un train lancé à toute vapeur.

 

- « C’est ce que je disais ; c’est plus de la pluie ; v’là la grêle.

 

Les visages se figent ; sur celui de l’Ugène, se creusent les sillons des larmes silencieuses, prélude de la révolte qui gronde intérieurement.

 

Ça a duré au plus dix minutes, une éternité pour les deux hommes. Le bruit s’assourdit, s’estompe, s’éloigne. Le brouillard s’enlève, comme une toile de tente, pour ne rester attaché que d’un côté, là-bas, vers Rosey.

 

A la lumière retrouvée, l’Ugène bondit vers les ceps les plus proches. Le Toine le suit en reniflant et, machinalement, enlève son chapeau, comme on fait devant un mort.

 

-« Regardez-moi ça, hurle l’Ugène, si c’est pas une pitié ! Toutes les grappes par terre, les feuilles aussi ! Hein ! Travaillez donc ! A quoi ça sert ? Vous vous échinez toute une année, et au moment où ça commence à promettre, en cinq minutes, crac ! plus rien ! Ça fait déjà quatre fois que je vois ça, et j’ai guère que trente ans ! Nom de Dieu ! Vous voulez vivre avec ça, vous Toine ?

Partager cet article
Repost0
4 juin 2016 6 04 /06 /juin /2016 06:00
photo La Conque d'Or

photo La Conque d'Or

Sachez que je me soigne, à l’homéopathie certes, pour ne pas succomber à la tentation, mon lourd passif d’enfant de chœur n’y fait rien, à la plus petite occasion je plonge.

 

Et c’est ce diable d’Andrea Camilleri qui aujourd’hui m’a alléché avec les arancini d’Adelina la bonne du commissaire Montalbano.

 

Ça va faire plaisir au grand Philippe, grand pourfendeur des ploutocrates néo-libéraux, qui voue un culte sans limite pour le héros de Camilleri, un commissaire pensez-donc !

 

« Les arancini de Montalbano » est extrait du recueil La Démission de Montalbano, traduit de l’italien par Serge Quadruppani et Catherine Siné et paru chez Fleuve Éditions en septembre 2001. © 1999, Arnoldo Mondadori Editore SpA, Milano. © 2001, Fleuve Éditions, pour la traduction française.

 

« Alors que la nouvelle année approche, le sarcastique commissaire Montalbano ne rêve que d’une chose : passer la Saint-Sylvestre loin du tumulte et de la foule. Aussi cet amateur de bonne chère, qui assaisonne volontiers la langue italienne classique de savoureuses bribes de dialecte sicilien, se fait-il une joie à l’idée de déguster les merveilleux arancini que sa bonne Adelina a promis de lui préparer pour le réveillon.»

 

 

« En rentrant chez lui à Marinella, il trouva sur la table de la cuisine un billet d’Adelina, sa bonne.

 

« Vous m’ascuserez si je me permets de dire vu que demain au soir étant que c’est le jour de l’an et vu que mes deux fis sont tous les deux en libberté, je pripare les arancini qui leur plaisent. Si vosseignerie veut me faire l’onneur de passer à manger la dresse vous le savez. »

 

[…]

 

« Doux Jésus, les arancini d’Adelina ! Il ne les avait goûtés qu’une fois : un souvenir qui lui était certainement passé dans l’ADN, dans le patrimoine génétique.

 

Adelina y mettait bien deux bonnes journées à les préparer. Il en connaissait par cœur la recette. La veille, on fait un aggrassato, mélange de veau et de porc en gelée et en parties égales, qui doit cuire à feu très bas pendant des heures et des heures avec oignon, tomates, cèleri, persil et basilic. Le lendemain, on prépare un risotto, ce ceux qu’on appelle « à la milanaise » (sans safran par pitié !), on le verse sur une planche, on le mélange à l’œuf et on le fait refroidir. Pendant ce temps, on cuit les petits pois, on fait une béchamel, on réduit en petits morceaux quelques tranches de salami et on fait toute une préparation avec la viande en gelée, hachée avec le hachoir demi-lune (pas de mixeur, pour l’amour de Dieu !). La sauce de la viande se mélange au riz. À ce point, on prend un peu de risotto, on l’arrange dans la paume d’une main tenue en forme de conque, on y met dedans l’équivalent d’une cuillère de la préparation et on le recouvre de ce qu’il faut de riz pour former une belle boulette. Chaque boulette est roulée dans la farine, puis on la passe dans le blanc d’œuf et la chapelure. Ensuite, tous les arancini sont glissés dans une cuvette d’huile bouillante et on les fait frire jusqu’à ce qu’ils prennent une couleur vieil or. On les laisse s’égoutter sur le papier. Et, à la fin, ringraraziannu u Signuruzzu, grâces soient rendu au seigneur, on les mange !»

 

 

« Les arancine, qu'apprécie le commissaire Salvo Montalbano et en particulier celles de Adeline sa cuisinière, est un délice de la cuisine traditionnelle sicilienne. A Palerme ou à Catane, on les mange dans les "friggitoria"magasin traiteur où l'on prépare et vend des "cibi di strada" cuisine de rue" en français : ce sont souvent des plats frits (friggitoria vient du verbe friggere: frire ). Mais on les prépare aussi chez soi en particulier le 13 décembre pour Sainte Lucie (tradition très respectée : on ne mange pas de pain ce jour-là mais les arancine ou autres plats délicieux) »

 

Voir la recette ICI du blog La Conque d'Or 

 

 

« En Sicile depuis 20 ans, dans un village près de Palerme, je vis au milieu des oliviers, pas loin de la mer. Je vous fais découvrir la cuisine sicilienne, ses parfums, sa simplicité et à la fois sa richesse à travers des recettes traditionnelles ou pas. »

 

Deux défis pour Alessandra Pierini :

 

- Le vin qui va avec les arancini du commissaire Montalbano: Curva minore IGT Terre Siciliane 2014 en hommage à Salvatore Quasimodo

 

Curva minore
Perdimi, Signore, che non oda
gli anni sommersi taciti spogliarmi,
si che cangi la pene in moto aperto:
curva minore
del vivere m'avanza.

E fammi vento che naviga felice,
o seme d'orzo o lebbra
che sé esprima in pieno divenire.

E sta facile amarti
in erba che accima alla luce,
in piaga che buca la carne.

Io tento una vita:
ognuno si scalza e vacilla
in ricerca.

Ancora mi lasci: son solo
nell'ombra che in sera si spande,
né valico s'apre al dolce
sfociare del sangue.

- Nous préparer des arancini pour nous les proposer dans son échoppe, je n’ai pas osé lui demander d’en faire rien que pour moi.

 

 

Nouvelle rechute de l’italien de cœur que je suis : les arancini d’Andrea Camilleri cuisiné par Adelina la bonne du commissaire Montalbano, ringraraziannu u Signuruzzu
Nouvelle rechute de l’italien de cœur que je suis : les arancini d’Andrea Camilleri cuisiné par Adelina la bonne du commissaire Montalbano, ringraraziannu u Signuruzzu
Partager cet article
Repost0
3 juin 2016 5 03 /06 /juin /2016 06:00
Je préfère la cigarette après l’amour au dernier verre de Denis Saverot avant de passer l’arme à gauche…

« Pour accompagner mon dernier jour, il me semble que je choisirais un vin gai, croquant, un vin rouge naturellement, la couleur du sang, de la vie et de la mort.»

 

À la RVF la séquence mets-vin est sans doute usée jusqu’à la corde pour que notre Denis Saverot, dont la belle-mère ne boit que du Bordeaux, innovât avec le dernier verre pour la route qui mène au ciel ou en enfer avec, éventuellement pour la première destination, l’arrêt à la station purgatoire.

 

Ça part d’une bonne intention, partager un verre avec un ami dont la fin est proche, mais j’avoue que j’ai bien du mal à concevoir qu’un tel sujet fasse matière à l’éditorial du rédacteur-en-chef d’un mensuel comme la RVF.

 

N’y-a-t-il pas d’autres sujets de fond dans le monde de la vigne et du vin plus importants à traiter que de tirer des lignes sur « Boire un verre de vin, comme si c’était le dernier… » ? De faire de la philosophie de comptoir en 3 affirmations qui fleurent bon la dissertation de brave potache en mal de séduction :

 

- « C’est choisir de partager ce que l’on aime en faisant remonter à la surface la mémoire d’un passé chéri.

- « C’est abolir une dernière fois ce temps qui vous est désormais compté. »

 

- ​« C’est aussi conserver la gaîté dans un moment qui pourrait être funèbre… »

 

Pourquoi devrait-on précéder la mort en y allant déjà en deuil de soi-même ? Un grand bourgogne ou une coupe de champagne ne sont-ils pas, au contraire, le meilleur des hommages à une vie réussie ? »

 

Passé chéri, une vie réussie, nous entrons de plain-pied dans l’univers de la Petite Maison dans la Prairie des Ingalls…

 

 

Mais pourquoi diable seulement un dernier verre de vin ? Ma philosophie de la vie est bien plus large. Elle est celle de Ray Charles :

 

« Vous feriez bien de vivre chaque jour de votre vie comme si c’était le dernier, parce qu’un jour ou l’autre, ce sera le cas. »

 

Et comme illustration je vous offre l’une des œuvres impérissables du joyeux Charles Dumont.

 

* Passer l’arme à gauche

 

Mourir

 

L’expression date du Moyen Âge. Lors d’un mariage, les écus des deux familles nobles pouvaient être rassemblés pour former un nouveau blason. Les armes (armoiries) du mari figuraient à droite, celles de la femme à gauche. Lorsque le mari décédait, ses armes étaient placées à gauche du blason. Cela signifiait donc qu’il venait de rendre l’arme… et l’âme.

Partager cet article
Repost0
2 juin 2016 4 02 /06 /juin /2016 06:00
Le pot-au-feu d’Houellebecq dans la carte et le territoire, accompagné de 2 bouteilles de chablis d’Alice&Olivier de Moor et de Thomas Pico…
Le pot-au-feu d’Houellebecq dans la carte et le territoire, accompagné de 2 bouteilles de chablis d’Alice&Olivier de Moor et de Thomas Pico…

Houellebecq à table n’est pas pour moi une fiction, nous avons, l’été dernier, dans le jardin du restaurant Les Climats, partagé, si je puis m’exprimer ainsi, le menu déjeuner. Lui, à une table voisine, en compagnie de son éditeur Gallimard et d’un autre convive, et moi en bonne compagnie.

 

En revanche, je ne l’ai jamais vu aux fourneaux dans sa « grande cuisine, prolongée par une réserve – qui servait également de bûcher et de cave » (La carte et le territoire), alors lorsque j’ai appris la parution de Houellebecq aux fourneaux de Jean-Marc Quaranta, je me suis précipité chez l’un de mes libraires : Compagnie pour l’acheter. Pensez-donc, c’est du sérieux : Jean-Marc Quaranta est maître de conférences en littérature française et création littéraire à l’université d’Aix-Marseille. Il est l’auteur du Génie de Proust (Honoré Champion, 2011).

 

 

« Livre de cuisine et analyse approfondie de l’œuvre de Michel Houellebecq, cet essai d’un genre inédit renouvelle la connaissance de l’auteur de Soumission à partir d’une évidence que personne, jusque-là, n’a remarquée : la nourriture occupe chez lui une place centrale. L’étudier met en lumière la complexité, les nuances de ses livres, loin des caricatures médiatiques qu’ils ne cessent de susciter.

 

Jean-Marc Quaranta explore cette table bien garnie, définit avec rigueur et clarté son rôle romanesque, tout en donnant les recettes qui la composent, mélange de terroir et d’exotisme où l’on trouve aussi bien les poivrons à l’huile, le pot-au-feu ou la tarte aux pommes que le poulet aux écrevisses, les baklavas, le biryani d’agneau… Il nous invite, de toutes les manières possibles, à dévorer les romans de Houellebecq, à entrer dans la bibliothèque en passant par la cuisine, pour devenir les intimes de cette œuvre inépuisable, qui n’a pas fini de nous surprendre. »

 

 

La seule liberté que je me suis permise dans cette chronique se situe dans le titre où, pour amis Alice et Olivier de Moor et Thomas Pico, durement et doublement éprouvés par les fureurs du ciel, je leur ai attribué les deux bouteilles de Chablis bue par le Houellebecq de papier avec Jed lors de son dernier repas.

 

 

La carte et le territoire, « est certainement le roman où l’on mange le plus, et le mieux. »

 

Le roman est le récit de la vie du peintre Jed Martin, « rythmé par les grandes périodes de l’œuvre de l’artiste, par ses repas avec son père et par les péripéties de sa relation avec Olga, qui travaille au service communication du guide Michelin et avec qui il parcourt les relais et Châteaux. »

 

« Houellebecq est capable d’intégrer dans son roman des tendances authentiques de la cuisine des années deux mille, deux mille dix. L’usage de la roquette (aragula) ou celui du turbotin, plus petit que le turbot et dont l’élevage s’est développé à cette époque. »

 

« Tout au long du roman, Houellebecq joue avec la complexe et confuse notion de terroir pour prophétiser un retour à la nature et un exode urbain qui repeuplerait la diagonale du vide et ramènerait les Français à une vie rurale réinventée. »

 

« Pour la première fois, en réalité en France depuis Jean-Jacques Rousseau, la campagne est redevenue tendance »

 

« Ce retour à la terre passe par l’assiette et par les fourneaux, puisqu’il s’accompagne du « succès croissant, sur l’ensemble du territoire français, de cours de cuisine ; [de] l’apparition récente de compétions locales destinées à récompenser les nouvelles créations charcutières et fromagères »

 

« Dans l’enquête marketing que mène Olga pour Michelin, les « animaux bizarres, à connotation non seulement française mais régionale, tels que la palombe, l’escargot ou la lamproie, atteignaient des scores exceptionnels. »

 

« Le phénomène est d’une telle ampleur que même Libération parle de « la magie du terroir.»

 

« … c’est aussi l’occasion d’une satire du discours gastronomique » […] « La cuisine, selon le guide, « sublimait un terroir d’une richesse infinie » ; on était là en présence d’ « un des plus beaux concentrés de France »

 

«Au-delà de cet hymne à une France du terroir, une France mitterrandienne incarnée dans des paysages repris sur les affiches électorales – Vault-en-Lugny se situe dans l’Yonne, plus précisément dans le Morvan, lieu mitterrandien par excellence –, le discours gastronomique du roman port aussi sur la mondialisation et dessine une géopolitique qu’on retrouvera dans Soumission. »

 

« Dans ce livre qui se veut un hymne aux terroirs, les lieux de grande distribution demeurent « les seuls centres d’énergie perceptibles, les seules propositions sociales susceptibles de provoquer le désir, le bonheur, la joie. »

 

« Ce n’est pas un paradoxe houellebecquien mais celui de la société de consommation qui a récupéré la notion de terroir pour rassurer le consommateur et recréer un monde que l’industrialisation de la nourriture et l’évolution des mœurs ont détruit. »

 

Lors de son dernier repas avec Jed c’est un Houellebecq cuisinier qui s’annonce :

 

- On va passer à table. … J’ai préparé un pot-au-feu hier, il va être meilleur. Ça se réchauffe très bien le pot-au-feu

 

« Cette nouvelle incarnation de l’auteur est un Houellebecq aux fourneaux. Il cuisine et reçoit Jed en parfait maître de maison le repas s’ouvre par un apéritif composé d’olives et de saucisson, accompagnés de chablis. Il n’y a pas d’entrée, mais le pot-au-feu qui suit justifie cette entorse, d’autant que c’est l’auteur qui ‘a préparé.

 

En hôte attentionné Houellebecq demande : « Vous prenez un peu plus pot-au-feu ? » mais Jed décline l’offre et le repas se poursuit avec un saint-nectaire et un époisses que Houellebecq sort du réfrigérateur ; il les accompagne de tranches de pain et d’une nouvelle bouteille de chablis. Ensuite, il fait passer son invité dabs la salle de séjour pour servir des macarons et du café, accompagnés d’un alcool de prune. À part le fromage, qui aurait dû être sorti du réfrigérateur au moins une heure avant d’être consommé, le Houellebecq du Loiret connaît son affaire gastronomique et sait recevoir. »

 

« Le choix du pot-au-feu témoigne aussi d’une bonne connaissance de l’histoire de la gastronomie française, puisqu’il est vu comme un « plat national » et s’inscrit dans l’entreprise de définition de la cuisine française qui parcourt tout le XIXe siècle. »

 

« Lorsque Houellebecq se met en scène heureux, réconcilié avec lui-même et ses origines, il est aux fourneaux. Ce n’est pas qu’une question de retour à l’enfance mais une affaire politique, sociale et même socialiste. »

 

« Houellebecq cite à Jed cette conclusion d’une conférence de Morris dont il va chercher le fascicule dans sa bibliothèque : « Voilà en bref notre position d’artistes : nous sommes les derniers représentants de l’artisanat auquel la production marchande a porté un coup fatal »

 

« Il s’agit d’une conférence donnée par Morris le 30 octobre 1889, lors du deuxième congrès de l’Association nationale pour la promotion de l’art et son application à l’industrie, à Edimbourg. »

 

« … il est juste et raisonnable que les que les hommes, à l’instar de la nature, s’efforcent d’embellir ce qu’ils fabriquent, et que ce travail soit lui-même agréable, comme la nature rend agréable le fait de manger. »

 

« En faisant de son double de papier un Houellebecq aux fourneaux, Michel Houellebecq met en œuvre cette partie du programme de William Morris : il situe l’alimentation hors du champ de l’industrie agro-alimentaire, dans la vie de chacun, et en fait une occasion de produire quotidiennement de la beauté – et de la saveur. »

Partager cet article
Repost0
1 juin 2016 3 01 /06 /juin /2016 06:00
Les jours d’après le malheur dans les vignes : et si nous faisions preuve de solidarité par la proximité en achetant en primeur le millésime 2017 aux sinistrés !

L’ami Thomas Pico, vigneron à Chablis, le dit d’une façon crue : « Je vais peut-être être vulgaire, mais là on s'est pris une bonne « branlée »

 

« Abasourdi. Mais pas résigné. C’est l’état d’esprit de Thomas Pico, vigneron à Chablis, au moment de nous donner son témoignage sur le terrible épisode de grêle qui a ravagé le vignoble de l’Yonne, vendredi dernier. Le dernier avatar d’une année 2016 sinistrée.

 

Une campagne blanchie, à perte de vue. Des vignes ravagées, détruites. Des billes de grêle assassines qui jonchent le sol. C’est le spectacle apocalyptique que l’on a pu voir à Chablis vendredi dernier, après l’épisode orageux qui a frappé le vignoble. Après le gel du mois d’avril et le premier épisode de grêle du 13 mai, c’est le troisième coup dur porté au Chablisien en quelques semaines. Thomas Pico, vigneron à Courgis, n’y va pas par quatre chemins : « c’est une cata. Tout l’Auxerrois a été frappé, j’ai même vu des corbeaux morts sous les impacts de grêle. C’est la désolation. Déjà en avril, au moment du gel, il y avait des zones anéanties, comme à Chitry-le-Fort, Irancy, je n’avais jamais vu ça. Puis il y a eu la grêle il y a deux semaines, avec encore Chitry, Saint-Bris… C’est du délire ».

 

Face à un tel désastre, au-delà des témoignages de sympathie, la seule question qui vaille est : comment exercer concrètement sa solidarité ?

 

La solidarité peut-être publique, Thomas la précise dans l’article de Terre de Vins , je n’y reviens pas et ce n’est pas en accusant les élus de tous poils que nous pourrons la faire s’exercer.

 

La solidarité peut-être interprofessionnelle :

 

Sur ce sujet j’ai commis le 6 août 2013 une chronique : Faut-il mutualiser le risque de grêle ? 

 

Le 8 juillet 2014 j’affirmais plus que jamais la réponse est OUI. Mettons sur le chantier la mutualisation de l’assurance grêle en la rendant obligatoire comme l’assurance habitation ou automobile…

 

Je n’y reviens pas.

 

Reste la solidarité personnelle qui pourrait se traduire d’une manière simple, directe : l’achat en primeur du millésime 2017 à des vignerons sinistrés connus de vous.

 

Cet achat, payé rubis sur l’ongle par des cavistes, des restaurateurs et des particuliers, permettrait d’alimenter la trésorerie exsangue des vignerons sinistrés au moment où ils devront, en dépit d’éventuels reports de charges ou d’imposition, à des dépenses obligatoires.

 

C’est simple comme une avance, geste de proximité, de solidarité directe dépourvue de paperasses et de procédures interminables.

 

C’est une forme de financement participatif sans intermédiaires qui prélèvent leur dîme au passage.

 

Bref, mettre la main à notre poche, sous une forme qui n’a rien à voir avec une quelconque charité, me semble être le bon et le plus sûr moyen de partager, de mettre du concret dans les gloses solidaires qui ne restent que des mots.

 

Voilà c’est dit.

 

Je le ferai à ma petite échelle mais si vous souhaitez que nous le fassions ensemble alors faisons-le et surtout n’oublions pas !

 

 

 

Partager cet article
Repost0
31 mai 2016 2 31 /05 /mai /2016 06:00
Illustration Artus de Lavilléon pour M Le magazine du Monde

Illustration Artus de Lavilléon pour M Le magazine du Monde

« Trancher entre l'humour et l'injure, l'information et la diffamation... Telle est la mission de la 17e chambre du tribunal de grande instance de Paris. »

 

La chambre des libertés par Pascale Robert-Diard, l’une des plus fines plumes de la chronique judiciaire dans M le magazine du Monde du 29.11.2013.

 

Oui, votre serviteur, le 9 juin de l’an 2016, va entrer dans « Le plus grand salon de la vie parisienne a des boiseries claires, un vieux parquet qui craque et de hautes croisées lumineuses ouvrant sur la Seine. Ecrivains, philosophes, comédiens, responsables politiques, animateurs de télévision, chanteurs, humoristes, psychanalystes, journalistes ou patrons de presse se succèdent ou s'affrontent sur ses bancs. Au froissement des vanités se mêlent les soubresauts de l'Histoire et le tumulte des passions nationales. L'entrée est libre. Il suffit de franchir le portique du Palais de justice de Paris et de pousser la porte de la 17e chambre. Ici, siège le tribunal des mots. Mots imprimés ou lancés dans un lieu public, mots qui accusent, désignent, blessent ou injurient. Mots qui révèlent, aussi. »

 

J’espère bien y croiser « Le fantôme du procureur impérial Ernest Pinard qui, en 1857, avait requis la condamnation de Flaubert pour "outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs" après la publication de Madame Bovary et obtenu quelques mois plus tard celle de Baudelaire pour Les Fleurs du Mal hantait encore les couloirs du Palais de justice. »

 

Ce sera la seconde fois que je monterai les marches du Palais de Justice de Paris, ma précédente visite date de 1980, où j’étais venu assister le coursier de l’Office du Vin, dont j’étais le secrétaire-général, lors de sa comparution immédiate pour de petits larcins alors qu’il était déjà sous le coup d’un sursis. Une comparution immédiate permet au procureur de faire juger un prévenu immédiatement après sa garde à vue. C’est la justice la plus expéditive, où le prévenu en prend un max sans moufter en général. Ça m’a marqué à tout jamais.

 

Le 9 ce sera une autre paire de manches « Justice de luxe au service du dérisoire », persiflent les uns, raillant les heures passées à soupeser le poids d'un adjectif au regard des misères ordinaires qui s'exposent et se jugent à la va-vite dans les chambres voisines, « coeur nucléaire de la démocratie », affirment les autres, la chambre de la presse et des libertés publiques occupe une place à part dans l'institution judiciaire. « Un îlot d'excellence », soulignent ceux qui, comme Thierry Lévy, Henri Leclerc, Georges Kiejman, Richard Malka ou Jean-Pierre Mignard ont usé leur robe sur ses bancs. »

 

À qui dois-je ce privilège ?

 

À la Jeanne Hachette des petits producteurs plus connue sous le nom de Saporta Isabelle.

 

Le 29 avril 2016, au matin, un huissier, audiencier au TGI de Paris, a carillonné en bas de chez moi pour me porter en mains propres une citation à témoin, dans la procédure en diffamation engagée par Hubert de Boüard de Laforest concernant l’ouvrage «Vino Buiseness» écrit par Isabelle Saporta et paru aux éditions Albin Michel en mars 2014. Coût de l’opération 54,08 euros dont 9,1 de TVA.

 

Mon seul souci à l’heure où j’écris concerne mon « dress code » comme on dit sur les cartons des pinces-fesses chic où se pressent certains et certaines de mes collègues blogueurs ou des « journalistes » stipendiés.

 

J’hésite encore entre l’allure gentleman-farmer sans les bottes blanches et le petit sécateur ou la dégaine 68 hard chic, jean-chemise ouverte-bourgeron Adolphe Laffont. Bien évidemment avant de trancher je consulte mes conseillères en communication. Vous verrez bien mes loulous !

 

En effet, je compte bien que vous viendrez nombreux à cette audience contrebalancer la présence des groupies adoratrices de notre cher Hubert qui ne manqueront pas de venir le soutenir.

 

C’est à 13h 30, comme quoi dans notre vieux pays la justice ne chôme pas elle bosse à l’heure du déjeuner des bons français.

 

Quand à vous dire ce que je vais dire, n’y comptez pas, ma vieille expérience des tribunes de congrès d’agriculteurs en colère m'a enseigné qu’il fallait adapter sa stratégie en fonction de l’atmosphère.

 

Atmosphère, atmosphère, est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère ?

 

Bien évidemment je dirai toute la vérité, rien que la vérité, la mienne bien sûr mais étayée sur ma petite expérience des coulisses de la décision dans notre République un peu secouée dans la crédibilité de ceux qui nous ggouvernent par les temps qui courent.

 

À vous voir donc chers amis le 9 Juin à 13h30, c’est au 10 boulevard du Palais dans le 1er arrondissement.

Partager cet article
Repost0

  • : Le blog de JACQUES BERTHOMEAU
  • : Espace d'échanges sur le monde de la vigne et du vin
  • Contact

www.berthomeau.com

 

Vin & Co ...  en bonne compagnie et en toute Liberté pour l'extension du domaine du vin ... 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

Archives

Articles Récents