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16 août 2016 2 16 /08 /août /2016 06:00
Le Gustave Flaubert n’y allait pas avec le dos de la cuillère « il y a le téton du boulevard, lassé mollasse et tiède, ballotant dans la crinoline… qui apparaît entre le noir du satin sur lequel on frotte sa pine. »

« Sur le sein des mères, le moutard à la broquette pointue éprouve des érections précoces ».

 

Lettre à Louis Bouilhet, 10 février 1851

 

« Après des études de droit inutiles, et avant de s’enfermer à Croisset pour devenir le premier martyr de la littérature, Flaubert part en Orient avec son ami Maxime du Camp. Voyage initiatique et décisif, il en reviendra transformé. La fréquentation des lupanars orientaux, où il copule avec des corps indistinctement féminins et masculins, donne lieu à cette lettre sidérante et troublante à son ami resté en Normandie. »

 

- 29 octobre 1849, départ de Paris.

 

- Novembre-décembre 1849 - Juillet 1850, l’Egypte.

 

- Juillet-novembre 1850, la Palestine, la Syrie, le Liban et l’Asie Mineure où il apprend avec tristesse la mort de Balzac.

 

- 12 vovembre-15 décembre 1850, Constantinople.

 

- 18 décembre 1850, arrivée à Athènes.

 

- Janvier-février 1851, la Grèce.

 

- 11 février-début juin 1851, l’Italie (Naples, Rome, Florence, Venise, Milan.)

 

Louis Hyacinthe Bouilhet, né à Cany (Seine-Maritime, arrondissement de Dieppe), le 27 mai 1822 et mort à Rouen le 18 juillet 1869, est un poète français. Il est le condisciple de Flaubert au collège de Rouen, puis un ami intime. Après l'abandon de ses études de médecine1, Louis Bouilhet exerce les métiers de professeur de littérature et de conservateur de la Bibliothèque de Rouen. Il a appartenu aux mouvements littéraires romantique et parnassien.

 

 

« Parmi les morceaux de sculpture que l'on a trouvés dans l'Acropole, j'ai surtout remarqué un petit bas-relief représentant une femme qui rattache sa chaussure et un tronçon de torse. Il ne reste plus que les deux seins depuis la naissance du cou jusqu'au-dessus du nombril. L'un des seins est voilé, l'autre découvert.

 

Quels tétons ! Nom de Dieu quel téton ! Il est rond-pomme, plein, abondant, détaché de l'autre et pesant dans la main. Il y a là des maternités fécondes et des douceurs d'amour à faire mourir. La pluie et le soleil ont rendu jaune blond ce marbre blanc. C'est d'un ton fauve qui le fait ressembler presque à de la chair. C'est si tranquille et si noble. On dirait qu'il va se gonfler et que les poumons qu’il y a dessous vont s'emplir et respirer. Comme il portait bien sa draperie fine à plis serrés, comme on se serait roulé là-dessus en pleurant, comme on serait tombé devant, à genoux, en croisant les mains ! J'ai senti là devant la beauté de l'expression « stupet aeris ». Un peu plus j'aurais prié.

 

Et c’est qu’il y a, monsieur, tant d’espèces de tétons différents. Il y a le téton pomme, le téton poire, le téton lubrique, – le téton pudique, que sais-je encore ? Il y a celui qui est créé pour les conducteurs de diligence, le gros et le franc téton rond que l’on retire de dedans un tricot gris, où il se tient là bien chaudement gaillard et dur. Il y a le téton du boulevard, lassé mollasse et tiède, ballotant dans la crinoline, téton que l’on montre aux bougies, qui apparaît entre le noir du satin, sur lequel on frotte sa pine, et qui disparaît bientôt. Il y a les deux tiers de tétons vus à la clarté des lustres au bord des loges de théâtre, tétons blancs et dont l’arc semble démesuré comme le désir qu’ils vous envoient. Ils sentent bon, ceux-là ; ils chauffent la joue et font battre le cœur. Sur la splendeur de leur peau reluit l’orgueil, ils sont riches et semblent vous dire avec dédain : « branle-toi, pauvre bougre, branle-toi, branle-toi. » Il y a encore le téton mamelle, pointu, orgiaque, canaille, fait comme une gourde de jardinier à mettre des graines, mince de base, allongé, gros du bout. C’est celui de la femme que l’on baise en levrette, toute nue, devant une vieille psyché en acajou plaqué.

 

Il y a le téton desséché de la négresse qui pend comme un sac. Il est sec comme le désert et vide comme lui. Il y a le téton de la jeune fille qui arrive de son pays, ni pomme, ni poire, mais gentil, convenable, fait pour inspirer des désirs et comme un téton doit être. Il y aussi le téton dame, considéré seulement comme partie sensible, celui-là reçoit des coups de coude dans les bagarres, et les poutres, en plein, au milieu des rues. Il contribue uniquement à l’embellissement de la personne et constate le sexe.

 

Il y a le bon téton de la nourrice, où s’enfoncent les mains des enfants qui s’écorent dessus, pour pomper plus à l’aise. Sur lui s’entrecroisent des veines bleues. On le respecte dans les familles.

 

Il y a enfin le téton citrouille, le téton formidable et salopier, qui donne envie de chier dessus. C’est celui que désire l’homme, lorsqu’il dit à la maquerelle : « donnez-moi une femme qui a de gros tétons. » C’est celui-là qui plaît à un cochon comme moi, et j’ose dire, comme nous. »

 

Et selon chacune de ces espèces différentes, il a, de tout faits d'avance : des tissus, des ornements et des phrases. Les fourrures d'hermine rehaussent de blancheur la poitrine des femmes du Nord. La batiste a été inventée pour les peaux transparentes comme les dentelles frissonnantes pour les seins agités. Blanche comme de la terre de pipe, la toile de Hollande couvre de ses plis le coeur honnête des Flamandes, ménagères à l'oeil bleu qui portent au front des plaques d'argent et qui, sur des bateaux lents, suivent leurs maris en Chine.

 

Là, pour des femmes jaunes, le ver à soie, au soleil, se traîne sur les mûriers. Sans le spencer de velours noir, que serait la joueuse de guitare des rues ? Chaque coeur a son rêve et sa breloque ; la croix d'or à ruban noir est pour la villageoise, la rivière de diamants pour la duchesse, le collier de piastres sonnantes pour les femmes du Nil.

 

Et on les convoite de cent manières, on les embrasse de mille façons, on les appelle dé toutes sortes de mots. »

 

Lettre à Louis Bouilhet, le 10 février 1851

 

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15 août 2016 1 15 /08 /août /2016 06:00
Qui sont les bars de la Côte des Bars, des loups voraces, des barbeaux… qu’en pense Olivier Horiot des Riceys en l’Aube champenoise ?
Qui sont les bars de la Côte des Bars, des loups voraces, des barbeaux… qu’en pense Olivier Horiot des Riceys en l’Aube champenoise ?
Qui sont les bars de la Côte des Bars, des loups voraces, des barbeaux… qu’en pense Olivier Horiot des Riceys en l’Aube champenoise ?

Le bar, qui est une unité de mesure de pression, pourrait faire accroire aux ignorants que l’extrême-sud de la Champagne viticole, longtemps méprisé par les gens du Nord, se dénomme côte des bars pour cette raison. Ça semble lui aller comme un gant.

 

Que nenni !

 

Mais alors de quel bar s’agit-il ?

 

Si on se réfère à l’origine du mot, c’est en référence à la langue gauloise : barr signifiant « sommet ».

 

Mais, ce qui est étrange c’est que les armories, les blasons de villes avec le préfixe bar : Bar-le-Duc en Lorraine, Bar-sur-Aube, Bar-sur-Seine en Champagne, et Montbard en Bourgogne sont ornées de poissons dénommés bars en héraldique.

 

 

 

 

Mais ces poissons sont-ils des bars ?

 

Ces villes sont fort éloignées de la mer ou de l’océan. En réalité il est tout à fait possible que le nom de bar soit utilisé ici dans un sens élargi, pour désigner une perche de rivière et non pas la perche de mer qu’est le bar.

 

Mais là où l’appellation se complique c’est qu’il y a déjà deux noms pour le même poisson. En effet ce poisson est abondant dans l’Atlantique et dans la Méditerranée, c’est donc bar au nord et loup au sud.

 

J’aime bien cette dernière dénomination car le nom du bar en grec ancien est labrax, dérivé de l’adjectif, labros « vorace »

 

N’y voyez aucune malice de ma part à l’égard de mes amis vignerons champenois, je ne fais qu’éclairer la lanterne des jeunes générations qui n’aiment rien tant que twitter.

 

Mais ce n’est pas tout dans ma patiente quête des mots, en effet il faut que vous sachiez que chez moi, sur la côte vendéenne, le bar est aussi désigné par d’anciens noms dérivés du latin lupus, comme lubin, lubine, loubine… qui ont des équivalents en espagnol lubina et en catalan llobina.

 

Dans ma jeunesse, oui je sais vous bassine avec mes souvenirs, lorsque ma mère voulait faire plaisir à mon père elle lui cuisinait de la loubine. C’était son poisson roi, alors que maman était très sole. Dans son livre D’Yeu que c’est bon ! Bruno Verjus, qui n’aime rien tant que les îles et tout particulièrement l’insula Oya son anti-ville, jamais vile, de cœur et de pied à terre, parle de la loubine du plateau de Rochebonne.

 

La loubine fait partie intégrante de ma jeunesse : les adeptes de la pêche à la ligne, en mer, la plaçait tout en haut de leur hit-parade des prises et, les braconniers, ceux qui la nuit allaient « senner » au Marais Girard, se vantaient d'en ramener de pleins sacs de jute... Normal, la loubine est un petit bar et le bar, le loup en Méditerranée, est l'un des poissons les plus appréciés des amateurs.

 

À la maison nous n'en mangions que très rarement, sauf lorsque mon frère Alain se laissait entraîner par la bande de malandrins pour tirer nuitamment la senne (ou seine, filet disposé en nappe et formant un demi-cercle, en l'occurrence tirés à main d'hommes qui s'immergeaient jusqu'au cou dans l'océan à partir de la grève).

 

Alors, nous les mangions fricassées au beurre salé. Par, je ne sais quel décret interne, chez nous, seule la sardine avait droit, et à la fricassée si elle était petite, et à la grillade si elle était grosse.

 

Confidence d’un pêcheur :

 

« Il m'est arrivé, sur des fonds connus de m'avancer en péchant jusqu'au moment du retournement du jusant : presqu'immédiatement les touches reprennent et dans les petits fonds on aperçoit les hordes de loubines comme chevauchant la vague en direction du rivage... Tout juste si elles ne cognent pas mes bottes ... »

 

Le plateau de Rochebonne « se situe à plus de trois heures de mer des côtes d’Yeu. Vaste comme deux fois la surface de l’île, il offre un site rocheux unique pour la pêche au homard, langouste, thon germon et loubine.

 

En juillet, la loubine se pêche à la canne avec des lançons. En août elle musarde et modifie son régime alimentaire. Elle ne résiste pas aux ballardes, lignes de fond garnies de chancres-ballants, petits crabes blancs. »

 

Avec vos petites loubines vous levez des filets que vous faites cuire sur peau dans une grande poêle avec un peu de gros sel au fond pendant 5 à 6 minutes. Lorsque le dessus de la chair est encore translucide couper le feu.

 

1 jet de citron ou des pépites de beurre salé suffisent à vos petites loubines que vous pouvez accompagner d’une ratatouille tiède…

 

Ratatouille, comme à Mougins… ICI 

 

« Et tout d'abord la liste des courses. Aubergines et courgettes, « de petite taille et bien fermes », oignon blanc, poivron doux « bien épais de chair », tomates bien mûres, une pincée de thym, de l'ail, du basilic frais, un peu de persil, de l'huile d'olive, sel et poivre. Les aubergines doivent être entièrement épluchées, et les courgettes en laissant des bandes de peau, de façon à obtenir un zébrage vert et blanc. Les tomates sont coupées en gros dés, les oignons en fines rondelles, et les poivrons en petites lamelles. Tous les légumes sont sautés séparément dans l'huile d'olive, les tomates avec le thym, puis mélangés au dernier moment pour être réchauffés avec l'ail, le basilic, le persil hachés. Roger Vergé précise : « Habituellement, la ratatouille se compose en cuisant doucement et longuement pendant 2 à 3 heures. Mais la recette que je vous donne a l'avantage de préserver la fraîcheur et la texture des légumes. »

 

Et avec ça vous servez au choix les Coteaux Champenois du milieu :

 

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14 août 2016 7 14 /08 /août /2016 08:00
CHAP.17 extrait sec, Jacques Anquetil à Raymond Poulidor avant de décéder « Je pars le premier tu vas devoir encore te contenter de la deuxième place. »

Avec elle tout arrive à qui sait attendre, c’est ce qui fait son charme. Elle est venue alors que je ne l’attendais plus, aérienne, belle comme au premier jour. Tout au long de ce temps à nous, rien qu’à nous, nous savons, l’un comme l’autre, qu’il est précieux, unique. Nul besoin pour nous deux de revenir sur le bloc incompressible qui nous sépare depuis le premier instant. De ce temps partagé, léger, intense, rieur, je sors à nouveau vivant.

 

« Avant qu’elle ne meure, Leonard Cohen a fait parvenir à sa muse, Marianne Ihlen, une lettre d’adieu magnifique. Elle avait notamment inspiré “So long, Marianne”, et “Bird on the Wire”.

 

La muse de Leonard Cohen, Marianne Ihlen, qui a inspiré Bird on the Wire et So Long, Marianne, est décédée le 29 juillet en Norvège, à l’âge de 81 ans. Ils s’étaient rencontrés dans une épicerie de l’île d’Hydra, en Grèce, dans les années 1960, et étaient devenus amants. Pendant des années, Marianne Ihlen et son fils Axel Junior ont partagé la vie de Leonard Cohen en Grèce et au Canada. »

 

Maintenant, avant que je disparaisse, écrire pour elle, mon Émilie, ma muse.

 

Le « Tu peux monter vos affaires dans ta chambre... » fut le sésame de maman. Après le dîner nous prîmes le frais dans le jardin. Comme je l'avais prévu, mon mendésiste de père, prit un malin plaisir à mettre Marie sur le grill en la prenant à témoin de la légèreté et de l'inconsistance du mouvement de mai. Pratiquant à merveille le billard à bandes en fait c'est moi qu'il visait. Pour lui, avec ce qu'il me reconnaissait de talent, j'avais joué au révolutionnaire par pur plaisir esthétique et romantique. Mes petits camarades gauchistes et moi, avec le soutien branche pourrie des communistes de la CGT, en nous contentant de psalmodier notre vulgate révolutionnaire, nous venions de priver la gauche réformiste, celle de PMF, la seule capable de tenir ferme le gouvernail et de moderniser la France, d'une éclatante victoire dans les urnes. En ressoudant aux gaullistes, la droite rentière des Indépendants, et celle encore bien planquée, sans leader, mais toujours chevillée à une part de la France xénophobe, nous avions fait le lit de Mitterrand. L'ambiguë de Jarnac saurait lui, le Florentin, s'asseoir sur le PCF pour mieux l'étouffer. Marie bichait. Elle virevoltait pour le plus grand plaisir de mon séducteur de père.

 

Avoir Marie à mes côtés dans mon lit d'enfant ravivait les souvenirs de mes soirées passées, sous la tente de mon drap, à ériger mes cathédrales, à imaginer tout ce qu'allait m'apporter mon bel avenir. Dans l'obscurité, Marie, me chuchotait « Je suis bien mon amour. Ici je me sens toi. Toute à toi. Je t'aime... » Comme nous ne galvaudions pas les je t'aime, ceux de ce soir-là, mêlés à nos caresses, à notre osmose, nous haussaient en des espaces qui donnent à l'amour un goût d'éternité. Amour sensuel, accord parfait, nous ne nous sommes même pas aperçu que ce n'est qu'aux premières lueurs de l'aurore que nous nous sommes endormis. La maisonnée s'était donné le mot pour que notre grasse matinée ne soit pas troublée par la préparation du déjeuner. À notre éveil, vers dix heures, ils étaient tous partis à la grand-messe. Dans la cuisine, où notre petit déjeuner nous attendait, la logistique du repas de midi impressionnait Marie. Tout était en place, le clan des femmes, mobilisé et efficace, avait donné le meilleur de lui-même. La brioche de Jean-François était mousseuse à souhait. Maman nous avait préparé un cacao ; plus exactement le cacao qu'elle préparait chaque matin pour son écolier de fils.

 

Le service fut assuré par la femme du cousin Neau lui-même préposé aux vins. Alida, la laveuse de linge, assurait la plonge. Maman, qui avait fait la cuisine, orchestrait l'ensemble avec autorité et doigté. A l'apéritif, Banyuls pour tout le monde, on disait vin cuit en cette Vendée ignare. Le menu : vol au vent financier, colin au beurre blanc, salade, de la chicorée – mon père avait droit à une préparation personnelle avec croutons aïllés – fromages : du Brie de Meaux et du Gruyère, et en dessert : un savarin crème Chantilly, évitait à mon cordon bleu de mère de passer trop de temps devant ses fourneaux. Le seul moment grave, bien sûr, avait consisté à monter le beurre blanc. En l'absence de maman, son époux facétieux informa Marie que sa Madeleine de femme avait des doigts de fée. Du côté des vins, du Muscadet sur lie, un Gevrey-Chambertin et du Monbazillac. Je haïssais le Monbazillac qui m'empâtait la langue. Tout atteignait l'excellence, même le café que maman passait dans une cafetière à boule de verre qu'elle ne sortait que pour les grandes occasions. Papa nous empesta avec ses affreux petits cigares de la Régie. Les yeux de Marie brillaient. Nous étions heureux. »

 

 

Ce texte qui suit est à la fois pertinent mais conforte mon analyse sur l’énorme responsabilité politique de François Mitterrand dans l’effondrement moral et électoral de la gauche non communiste. « François Mitterrand était un conquérant monstrueux » oui certes « mais nous en payons lourdement et sèchement les conséquences aujourd’hui.

 

Celui des deux qui avait le plus réfléchi à ce que pouvait être, pour la gauche, l’art d’un changement véritable qui ne soit pas l’accumulation de promesses verbales, n’a jamais été en mesure de mettre son projet en pratique. Michel Rocard était plus fait pour l’action gouvernementale qu’aucun autre de ses camarades socialistes. Comme Pierre Mendés-France avant lui, il avait pour cela une culture, un talent et une morale personnelle qui le plaçait, sans conteste, au-dessus du panier. »

 

« Ce pouvoir, François Mitterrand l’a conquis avant de l’exercer, sur la durée, comme Michel Rocard craignait qu’il ne le fit, jusqu’à échapper à la morale de son camp. C’est par cette liberté qu’il a rejoint la France, sous le regard médusé des Français. »

 

Oui les Français, Bazin, mais de grâce ne vous joignez pas à eux pour vous plaindre de l’état de la France et des Français ; ils n’ont que la classe politique qu’ils méritent, celle qui les subjugue par de belles promesses pour mieux les leurrer par une politique de clans sans morale. Bien fait pour eux, qu’ils morflent un max, tant mieux. Je ne tirerai pas mon mouchoir car leur situation ne me tire aucune larme.

 

 

12 juillet, 2016

 

La vie rêvée de Rocard par François Bazin

 

Même à l’heure des hommages posthumes, il faut aussi parler vrai puisque l’expression coule de source, s’agissant du défunt. La différence entre François Mitterrand et Michel Rocard est qu’à la mort du premier, personne n’avait songé à le comparer au second alors qu’aujourd’hui, l’inverse s’impose d’évidence. Le nom de l’ancien président de la République s’invite dans la biographie de celui qui fut son Premier ministre comme il n’a cessé de le faire durant l’essentiel de sa vie politique. François Mitterrand explique et éclaire Michel Rocard. Il le résume par contraste. C’est à partir de lui qu’on mesure l’originalité de son parcours mais aussi la force de ses échecs et, du même coup, la faiblesse relative de sa trace au regard de l’Histoire.

 

Jusqu’à son dernier souffle, Michel Rocard n’a eu de cesse que de faire le procès de François Mitterrand comme s’il n’était jamais parvenu à échapper à cette figure honnie, quasi-paternelle. «C’était un homme de droite», confiait-il encore au Point dans un entretien-fleuve, il y a à peine deux semaines. Par ce jugement lapidaire et sans doute un peu sot au regard de l’œuvre de son ancien adversaire, Michel Rocard entendait surtout signaler qu’il était, lui, l’incarnation de la gauche et que sa boussole politique n’avait jamais varié. Il fut un temps où François Mitterrand portait des jugements aussi peu dignes de son intelligence à l’encontre de quiconque osait contester son autorité à la tête du PS. Et puis, il est passé à autre chose. Si Michel Rocard n’y est pas parvenu, c’est d’abord que dans cette rivalité, il portait l’habit du vaincu.

 

Pour le dire autrement, François Mitterrand appartient désormais à l’Histoire de la France alors que Michel Rocard s’inscrit dans celle de sa famille politique. Il laisse derrière lui une pensée suffisamment singulière pour que sa marque ne soit pas seulement celle d’un petit maître, à la manière d’un Pierre Mauroy, d’un Lionel Jospin ou d’un Laurent Fabius. Mais en même temps, dans cette génération qui est celle des enfants de l’après-guerre, il est passé trop loin du pouvoir et de son exercice véritable pour qu’on puisse le ranger dans la catégorie des très Grands. C’est là qu’on en revient à François Mitterrand. À deux reprises, en 1981 puis en 1988, c’est lui qui a imposé sa loi et sa puissance. À deux reprises, Michel Rocard s’est écarté parce qu’il n’avait pas les ressources nécessaires pour agir différemment.

 

François Mitterrand était un conquérant monstrueux. Son règne fut de quatorze ans. Michel Rocard, au sommet de sa gloire, n’est resté que trois ans à Matignon. Sa carrière ministérielle, au Plan ou à l’Agriculture, avait été auparavant sans relief véritable et l’Elysée d’alors avait veillé à ce qu’il en soit ainsi. Cette comptabilité un peu sèche dit une hiérarchie de destin. Celui des deux qui avait le plus réfléchi à ce que pouvait être, pour la gauche, l’art d’un changement véritable qui ne soit pas l’accumulation de promesses verbales, n’a jamais été en mesure de mettre son projet en pratique. Michel Rocard était plus fait pour l’action gouvernementale qu’aucun autre de ses camarades socialistes. Comme Pierre Mendés-France avant lui, il avait pour cela une culture, un talent et une morale personnelle qui le plaçait, sans conteste, au-dessus du panier. À l’heure du bilan, c’est ce qui rend d’autant plus curieux ce parcours inabouti au regard de ses propres critères. Sauf à en trouver la cause dans la malignité d’un seul homme – François Mitterrand, en l’occurrence –.

 

Michel Rocard a fini par se résigner à cette explication ressassée qui est d’ailleurs celle à laquelle se raccrochent aujourd’hui commentateurs et historiens. Quand il disait que François Mitterrand était «de droite», il signalait une forme de mystification – ou de trahison – dont il aurait été la première victime. Il fut pourtant un temps où ses arguments furent plus sophistiqués. Au-delà de deux caractères et de deux conceptions de l’action, il pointait alors deux cultures, bref deux gauches. Ce qui n’était pas tout à fait la même chose et donnait, du même coup, à l’affrontement de deux hommes un tour essentiellement idéologique. Cette distinction, Michel Rocard l’avait bâtie à l’heure des premières escarmouches alors que la domination mitterrandiste n’était pas encore telle qu’on l’a connue par la suite. C’était l’expression d’un défi. Congrès de Nantes, 1977, diront les spécialistes.

 

Deux gauches, donc. La première et la seconde. Dans cette formulation passée depuis dans le langage courant, il y avait déjà, soit dit en passant, l’esquisse d’une hiérarchie. La vraie et la fausse ? L’ancienne et la nouvelle ? Sans aller jusqu’à le dire à voix haute – quoi que… – Michel Rocard faisait de ce clivage une histoire de famille qu’il suffisait de raconter pour en trouver l’origine. D’un côté, une gauche républicaine plus que socialiste, adepte du changement par le haut et l’Etat, celle que Proudhon appelait «la gauche des blagueurs» pour mieux dire qu’elle était celle du verbe et des ruptures sans lendemain. De l’autre, une gauche du mouvement, venue d’en bas et portée par le mouvement social dans un radicalisme ignoré des élus et de leurs comités. Nationalisation contre autogestion, pour faire court.

 

À partir de là, tout se déclinait comme dans un de ces tests estivaux dont raffolent les hebdomadaires en mal d’imagination. Socialistes, vos papiers ! Cochez les cases du questionnaire et découvrez votre identité véritable ! Première gauche pour les uns, seconde gauche pour les autres. Mitterrandistes ou rocardiens puisqu’il faut bien personnaliser. Sur le papier, ça fonctionnait d’autant mieux que tout n’était pas faux dans cette taxologie nourrie par l’expérience de l’Histoire et que les protagonistes n’étaient d’ailleurs pas loin d’accepter comme une vérité d’évidence dans l’éternel débat entre la conquête et l’exercice du pouvoir.

 

Ce pouvoir, François Mitterrand l’a conquis avant de l’exercer, sur la durée, comme Michel Rocard craignait qu’il ne le fit, jusqu’à échapper à la morale de son camp. C’est par cette liberté qu’il a rejoint la France, sous le regard médusé des Français. Le drame de Michel Rocard est que dans cet exercice de haute voltige, il n’avait pas sa place. Son erreur fut d’essayer d’en trouver une en cessant d’être lui-même, c’est-à-dire vraiment rocardien. Dans son opposition affichée au mitterrandisme triomphant, il s’est progressivement soumis à la loi du vainqueur. Il a cru qu’après être l’opposant principal, à l’intérieur de la famille socialiste, il allait pouvoir en être l’héritier naturel. C’est toute l’histoire de son bref mandat à Matignon marqué par davantage de patience résignée que par un élan réformateur assumé.

 

À force de vouloir être «un briseur de rêves», à force aussi de théoriser à son poste «un devoir de grisaille», le héraut de la seconde gauche s’est désarmé. Ce faisant, il s’est normalisé, au sens hollandais du terme. Le rocardisme des origines, celui du PSU, était une critique du modérantisme réel d’un projet mitterrandiste trop classiquement étatique pour être vraiment révolutionnaire. Il reposait sur des analyses qu’on a peine à relire aujourd’hui tant elles étaient pleines de ces délires abscons nourris par la pensée soixante-huitarde. Le rocardisme des années Mitterrand, inauguré en 1979 dans la bataille du congrès de Metz et réaffirmé une fois passée l’alternance de 1981, est devenu, à l’inverse, un réformisme conforme à l’air du temps et aux exigences d’un monde nouveau. Il ne manquait pas de rigueur. Il signait les noces d’une social-démocratie à la française et d’un réalisme un peu court, dans une version technocratique propre à la Cinquième République.

 

François Mitterrand, en ce sens, n’a pas piégé Michel Rocard. Il l’a dominé et, à ce jeu, il l’a laissé tomber là où il jugeait qu’il penchait. Ailleurs, c’est-à-dire nul part, à ses yeux. C’est pour cela qu’il confiait volontiers que son passage à Matignon serait le révélateur de sa nature ordinaire et qu’il a pu le licencier en lui faisant le reproche d’une trop grande timidité dans la gestion des dossiers de l’Etat. Un comble ! De même, il n’est pas indifférent que la fin véritable de la carrière politique de Michel Rocard, avant la présidentielle de 1995, ait été le fruit d’une double concurrence à gauche, incarnée par Bernard Tapie d’un côté et de Jacques Delors, de l’autre. Pour vider le rocardisme de sa dernière substance, il suffisait donc de lui opposer un modernisme dévoyé, un brin populiste, et un réformisme recentré de pur affichage. Les électeurs et ces sondages qui font la réputation médiatique ont fait le reste, détruisant ainsi ce qu’ils avaient promu.

 

Si Michel Rocard n’a pas su résister à cet assaut croisé au moment décisif, si une fois encore il a préféré jeter l’éponge, c’est qu’il n’était plus alors qu’une ambition sans objet. C’est en tous cas ainsi que l’a compris François Mitterrand avec ce réalisme glacial dont il était coutumier et que l’approche de la mort n’avait fait que durcir. Il a fallu du temps à Michel Rocard pour surmonter son échec et surtout pour en analyser les ressorts. Les vingt dernières années de sa vie ont été celles d’une reconstruction nourrie d’un anti-mitterrandisme viscéral dont l’unique fonction était d’expliquer ce qui ne pouvait l’être autrement que dans la relecture douloureuse de tant de rendez-vous manqués.

 

Cette détestation sans cesse réaffirmée fut une manière d’antidépresseur qu’il lui fallait consommer chaque jour afin de ne pas s’effondrer. Mais on retiendra surtout – parce que c’est plus honorable et que l’homme savait tenir son rang quand bien même ce n’était plus le premier – que, dans cette ultime épreuve, Michel Rocard a su retrouver à gauche, sa vraie famille, le rôle qui, au fond, n’appartenait qu’à lui. Celui de vigie et d’agitateur d’idées à la fois, fidèle aux siens, ouvert aux autres dans une tension créatrice qui lui a permis, malgré le poids des ans, de rester jusqu’au bout ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être. Rocardien, pleinement rocardien.

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14 août 2016 7 14 /08 /août /2016 06:00
Pascale Robert-Diard c’est presque du Frédéric Dard… les attendus des juges sur les histoires de cul valent les saillies du beau San-Antonio…

Commençons par l’histoire d’un inconnu, dont le membre, indument badigeonné, à l’hôpital, d’acide acétique pur au lieu de sa formule diluée, avait dû être mis en jachère sexuelle pendant 2 mois et demi.

 

La faute reconnue par le médecin, il revenait au juge du tribunal de Saintes (Charente-Maritime) d’évaluer le préjudice subi par son patient.

 

Le plaignant demandait 12 000 francs de dommages et intérêts.

 

Le juge s’est livré au calcul suivant :

 

« La moyenne relevée en général dans les couples français étant d’un rapport par semaine, il [le plaignant] peut légitimement se plaindre d’avoir été privé de dix rapports conjugaux, ce qui fixe la valeur du rapport à 1 200 francs [183 euros]. » Le juge a trouvé que c’était beaucoup trop cher payé et a considéré que 3 000 francs (457 euros) suffiraient à réparer le préjudice « réellement » subi par le propriétaire du précieux outil endommagé.

 

« Pas de semaine sans Brigitte », titrait Paris-Match à l’automne 1961.

 

« Sa moue, ses lèvres, ses seins, ses cuisses dénudées et son insupportable liberté exposés à tous les regards scandalisent la hiérarchie de l’Eglise catholique qui voit en elle une « créature du diable ».

 

Le Vatican avait d’ailleurs choisi une photo de Bardot en transe dansant le mambo dans Et Dieu créa la femme pour incarner le mal et la luxure dans son pavillon à l’Exposition universelle de Bruxelles, en 1958. »

 

L’affiche de La Bride sur le cou, sur laquelle l’actrice apparaît en bikini jaune, les bras repliés en croix sur ses seins, est apposée sur les murs d’un cinéma de Cambrai (Nord). Cette fois, c’en est trop pour les puissantes associations familiales du département, qui assignent aussitôt le propriétaire de l’établissement devant le tribunal de police pour «outrage à la décence ».

 

 

Cette affiche n’existe plus, dans sa version française, sur la Toile : la faute aux attendus du juge Faugeroux.

 

 

Deux mois plus tard, le juge Faugeroux rend son jugement. Il s’ouvre par une inspection minutieuse de l’anatomie de la belle insolente :

 

« Attendu que le visage de l’actrice n’exprime pas la confusion, mais, sous deux yeux effrontés, une moue qui, pour être enfantine, ne laisse pas d’être équivoque. Attendu encore qu’à l’exception du côté droit, où la trame plus serrée du cliché accuse les contours extérieurs et le déhanchement suggestif, le corps est traité en très légère demi-teinte, le cache-sexe qui dissimule la région pubienne se distingue à peine du ventre délicatement modelé sur lequel l’ombilic se dessine avec la précision d’une planche anatomique et le fini d’un bijou. »

 

Le juge poursuit :

 

« Attendu qu’une femme dévêtue sur la plage ou dans une piscine n’est pas indécente, mais que, si elle se promène dans la rue dans la même tenue elle est indécente. Or l’affiche a été apposée dans la rue et par suite, il suffit d’imaginer qu’à sa place il y a le personnage réel… »

 

Attendu qu’à n’en pas douter, le juge Faugeroux s’est lui-même livré à cet effort d’imagination, il en a conclu que tout cela était bel et bien un outrage à la décence et a condamné le propriétaire du cinéma à 200 francs d’amende. »

 

Les petites annonces de Libé : « le représentant de l’accusation énonce gravement les objets du délit : « scorpion, larbin, sucettes, grand gars, cul très ouvert, gros pafs, mecs super-virils » et dénonce cette « volonté de provocation, la revendication d’une liberté absolue, sans limites, sans frontière, ce qui est impossible ».

 

L’avocat de Libération, Me Henri Leclerc, tonne :

 

« C’est donc ça, Messieurs, qui vous choque. Ce n’est pas le fait d’attirer l’attention sur la débauche, c’est qu’on parle de cul ! Est-il encore possible que l’on soit si loin de la réalité, si loin du monde où l’on a sa place de juge ? Vous ne pouvez pas continuer à rendre vos jugements enfermés dans vos salles d’audience, sans savoir que le monde change ! Mais comme il est difficile à la vie d’arriver jusqu’à vous ! »

 

L’exhortation de l’avocat est vaine, le tribunal correctionnel condamne Libération à 3 500 francs d’amende en relevant que « l’infraction est d’autant plus grave qu’elle est commise dans un journal quotidien d’information générale ».

 

La liaison présumée Valérie Trierweiler-Patrick Devedjian dans une bio de la dame.

 

Plainte du monsieur devant la 17e Chambre du TGI de Paris (que j’ai fréquenté par les bons soins d’Hubert).

 

Est-ce une diffamation ?

 

« Une diffamation, rappelle d’abord le tribunal, est « l’allégation ou l’imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération ». Celle-ci, précise-t-il, doit être appréciée « indépendamment de la sensibilité de la personne visée » au seul regard de « considérations objectives d’où s’évincerait une réprobation générale ».

 

Suit ce morceau d’anthologie dans la décision, rendue en juin 2013 :

 

« Attendu que l’adultère a été dépénalisé depuis près de quarante ans et que l’évolution des mœurs ne permet plus de considérer que l’infidélité conjugale serait contraire à la représentation commune de la morale, les propos incriminés, même si le demandeur a pu les juger désagréables, ne portent pas atteinte à son honneur ou à sa considération. »

 

Patrick Devedjian est condamné à verser 1 000 euros à chacun des auteurs au titre des frais de justice qu’ils ont été contraints d’engager.

 

Le député fait appel, mais la cour approuve la motivation du tribunal et la reprend entièrement à son compte. Patrick Devedjian se pourvoit devant la Cour de cassation. Et là, consécration suprême pour la juge Anne-Marie Sauteraud, qui a rédigé le jugement : dans un arrêt rendu en décembre 2015, la plus haute juridiction française confirme. C’est « à bon droit », observe l’arrêt, que les juges ont retenu que « l’évolution des mœurs et celle des conceptions morales ne permettent plus de considérer que l’imputation d’une infidélité conjugale serait à elle seule de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération »

 

En janvier 2012 La Le Pen qui selon Rivarol, qui, dans un long article particulièrement polémique sur son mode de vie, cite ce propos rapporté : « C’est une fille qui aime manger, boire et baiser comme son père. » poursuit à la fois pour « diffamation » et « injures publiques » ce journal d’extrême droite.

 

« Le tribunal rend sa décision un mois plus tard : il écarte la diffamation en relevant que « le fait d’aimer boire, même de façon importante », n’est pas contraire à l’honneur ou à la considération. Il ne partage pas non plus l’avis de Marine Le Pen sur « l’injure » que représente, selon elle, l’usage du verbe « baiser ». « Le choix d’un terme vulgaire pour évoquer de tels goûts, qui n’ont en eux-mêmes rien de répréhensible ni de contraire à la morale communément admise » ne suffit pas à donner « un caractère outrageant » aux propos, dit le jugement.

 

Rivarol est relaxé. La cour d’appel confirme. Mais la Cour de cassation ne partage pas l’avis des juges sur les plaisirs de la vie. En février 2014, elle casse la décision. Sous la plume d’un conseiller de la Cour, l’expression « aimer boire, manger et baiser » devient une « imputation de mœurs dissolues et d’un penchant pour la débauche » que la plaignante peut à juste titre considérer comme injurieuse. »

 

L’affaire du Carlton à propos de DSK et de ses besoins et pratiques sexuelles «hors norme»

 

Le procureur, dans son réquisitoire avait observé : « Chacun est libre de vivre sa sexualité comme il l’entend. Cela relève de la sphère privée. Ni le procureur ni le juge n’ont le droit de s’ériger en gardien de l’ordre moral. Ce que la morale doit parfois réprouver doit rester en dehors du débat judiciaire, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une infraction pénale. Nous travaillons avec le code pénal, pas avec le code moral. »

 

La chronique dans son intégralité si vous êtes abonnés ICI De Brigitte Bardot à DSK, le juge, l’arbitre des bonnes mœurs 

 

LE MONDE Par Pascale Robert-Diard

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13 août 2016 6 13 /08 /août /2016 06:00
Les illusions de « la cavalcade du grand vin » par Louis Latour « … l’affirmation naïve d’une supériorité de principe accordée à nos vins, par un providentiel décret de la nature. »

Ce que j’aime dans ce texte, hors le fond, c’est le ton, une liberté de ton emprunte d’une grande érudition, d’une langue maîtrisée et d’un humour sans férocité.

 

Ce n’est pas faire injure à Louis Latour que de penser qu’il aurait été, s’il en avait eu le loisir et la volonté, un grand chroniqueur sur la Toile.

 

Admiration !

 

Texte dédié au nouveau directeur du BIVB Christian Vanier tout droit venu de notre beau Ministère de l’Agriculture ICI 

 

Bonne lecture…

 

« Une certaine vision de l’histoire du vignoble a depuis longtemps pris racine en Bourgogne. Elle se singularise par un panégyrique répétitif à la gloire des grands vins de la Côte. Selon cette conception, l’analyse des causes de la qualité conduit automatiquement à l’accumulation de bonnes notes décernées rétrospectivement par l’historien au « terroir » du grand vin, décliné en ses divers grands crus. Pour faire court, nous appellerons « cavalcade du grand vin » le récit coloré de sa destinée historique, telle qu’elle est perçue en Bourgogne par les divers protagonistes qui participent à sa promotion et lui manifestent, sans aucune réserve, une admiration indéfectible.

 

Les récits consacrés à la gloire des grands crus n’admettent en conséquence aucun faux pas dans un parcours de près de vingt siècles. Ils n’ont que faire de la recherche des paramètres œnologiques d’une qualité présumée absolue et définitive. Selon eux, la supériorité de nos grands vins s’impose toujours et en tout lieu. Il est donc sacrilège de la soumettre au moindre questionnement. La Côte apparaît alors comme une sorte de mine d’or, dont on a su à toute époque exploiter avec succès l’inépuisable filon. Le bruit de fond qui accompagne cette présentation simpliste est le cuivre des trompettes de la renommée, embouchées par tout ce que la Bourgogne compte de propagandistes convaincus et acharnés. Cette « réclame », comme on disait autrefois ne s’embarrasse pas de nuances et inspire encore aujourd’hui d’auteurs, dont l’unique ambition est d’entretenir une sorte d’exaltation collective. Cette appréciation, sans doute excessive de la qualité des vins de la Côte, bien qu’elle soit fondée sur des informations historiques parfaitement exactes, soigneusement choisies et mises en valeur.

 

La critique qu’on peut adresser à cette conception exaltée d’une qualité « historique », ne porte pas sur l’insuffisance de preuves qui existent, bien réelles et parfaitement convergentes, mais sur l’affirmation naïve d’une supériorité de principe accordée à nos vins, par un providentiel décret de la nature. Cette présentation est contraire à toute réalité, car seule l’œnologie, c’est-à-dire la mise en valeur patiente et obstinée du terroir bourguignon par des vignerons compétents et expérimentés, explique la qualité et donc le succès des vins de la Côte. Leur suprématie fut toujours contestée par les prétentions concurrentes d’autres genres, qui lui ont de tout temps disputé le champ étroit de la notoriété suprême. Elle fut aussi menacée par les faiblesses d’une pratique œnologique qui n’a pu constamment se situer au plus haut niveau, car l’œnologie est œuvre humaine et ne peut manquer d’être entachée d’erreur, ce qui veut dire que certains vins ne furent pas à la hauteur de la réputation européenne des vins de Bourgogne.

 

La faveur accordée par de grands personnages aux crus d’un vignoble connu, était autrefois par définition le ressort qui permettait d’étendre la notoriété et d’augmenter leur prix, comme plus tard pour le « vin de Nuys », remède miracle qui aurait permis la guérison de Louis XIV après l’opération de la fistule. L’usage du bourgogne en cette occasion exceptionnelle, imposait le respect et témoignait de la qualité hors du commun des vins consommés par ces personnages illustres, mais on ne peut résumer à ce seul trait l’activité viticole d’une province entière. »

 

[…]

 

« … l’orgueil bourguigno ne peut manquer d’être tempéré par la présence en Avignon du vin de Saint-Pourçain, qui eut, lui aussi, son heure de gloire au Moyen Âge avant d’être englouti dans une décadence irrésistible, dans des circonstances mal élucidées. À l’égal des vins de Beaune et malgré un parcours par voie de terre immensément coûteux, le vin de saint-Pourçain a participé, aux côtés de la Bourgogne, à l’approvisionnement des caves pontificales. Son prix d’achat était égal à celui des vins de Beaune, ce qui signifie qu’à cette époque il surclassait lui aussi, les abondantes productions provençales dont le niveau de qualité n’était pas jugé suffisant, au goût des princes de l’Église. Ces remarques seraient évidemment sans portée aucune, si les vins de Beaune envoyés au pape, auraient été des tonneaux de vinaigre. »

 

Les illusions de « la cavalcade du grand vin » par Louis Latour « … l’affirmation naïve d’une supériorité de principe accordée à nos vins, par un providentiel décret de la nature. »
Les illusions de « la cavalcade du grand vin » par Louis Latour « … l’affirmation naïve d’une supériorité de principe accordée à nos vins, par un providentiel décret de la nature. »
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12 août 2016 5 12 /08 /août /2016 06:00
En 1593, hors le Ghetto de Venise le cimetière de San Nicoló di Mira était cultivé en jardin potager et en vignoble.

Le 29 mars 1516, La Sérénissime impose aux Juifs de Venise de se regrouper dans le lieu-dit « Geto », à l’extrémité nord de la ville, sur une île encerclée par des canaux. Deux portes, ouvertes le matin et refermées le soir à minuit, donneront désormais accès à ce lieu. Les habitants pourront le quitter dans la journée pour exercer leur profession, mais la nuit seuls les médecins seront autorisés à sortir pour soigner les Chrétiens hors les murs…

 

Plaque du mémorial de l'Holocauste

 

Bien avant l’institution du Ghetto, le 25 septembre 1386, deux Juifs influents, sont venus demander à la Seigneurie que leur soit attribué agricole en friche sur la rive de San Nicoló, pour y ensevelir leurs morts.

 

Terrain accordé, sans aucun loyer, mais dont les limites sont fixées : soixante-dix pas le long de la mer et soixante-dix de long de la lagune, une largeur de trente pas en direction de Venise et de Malamocco. Soit un demi-hectare situé à une extrémité non construite de l’île du Lido, couverte de vignes et de potagers, à proximité du monastère bénédictin de San Nicoló di Mira.

 

Ce terrain était par ailleurs le seul bien immeuble dont les Juifs pouvaient être concessionnaires à titre individuel. À noter qu’alors que les sépultures chrétiennes étaient souvent situées intra-muros, celles des Juifs devaient se trouver hors des limites de la ville, dans des terres incultes et non clôturées.

 

Les terres des Bénédictins – le couvent est le plus grand propriétaire terrien du Lido – sont louées à des paysans qui peuvent les cultiver pendant de longues périodes et transmettre l’utilisation de ce bien-fonds à leurs descendants.

 

Avec le loyer, les concessionnaires apporteront une contribution en nature : 2 chapons, un cierge pesant quelques livres, ou une somme d’argent destinée à l’église du couvent.

 

En 1593, le cimetière cultivé en jardin potager et en vignoble, comme les terrains des Bénédictins, est loué par un paysan pour 25 ducats à la Fraterna della Misericordia… Pendant longtemps les deux fonctions – la sépulture et les cultures – se côtoieront, plus encore, elles se trouveront physiquement superposées.

 

« Le contrat du 20 septembre 1609 établit que le maraîcher Francesco Zampieri, fils de feu Pasqualin, loue la vigne et la maison en brique à proximité du cimetière et devra la conserver en bon état. Avec un loyer annuel de 5 ducats, il doit livrer à la Fraterna 3 melons et un panier de pêches ; mais surtout il doit obligatoirement « bien tenir », « diriger », « améliorer » et ne pas « laisser se détériorer » le terrain, dont il doit conserver les limites et les fruits (figues, pêches, poires, pommes, prunes, laurier, saules et un berceau de vignes.) »

 

« Au milieu du XVIIe siècle, l’extension du cimetière – en dépit de sa forte valeur locative et de la riche production de ses « herbes exquises » pour le marché de la ville – à presque doublé : la surface a atteint un hectare et le nombre des arbres fruitiers à beaucoup augmenté, ce qui, une fois de plus, pourraient confirmer que les Juifs sont définitivement acceptés à Venise. »

 

Source : Ghetto de Venise 500 ans Donatella Calabi éditions Liana Levi

 

Lire 

29 mars 2016

Le ghetto de Venise a 500 ans...ICI

 

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11 août 2016 4 11 /08 /août /2016 06:00
1907-1910 en Champagne : des vignerons quittaient leurs maisons, laissaient leurs terres aux friches. Mais le négoce se sucrait sur cette misère.

Pour les petits louves et les petits qui croient qu’en Champagne la vie des vignerons fut un long fleuve tranquille un tout petit rappel historique.

 

« Révolution dans le secteur, oui. Détonations, chant de refus, les vieux airs de carmagnoles paysannes. Pas compliqué à comprendre : le vigneron crevait de faim. La fin du siècle avait été atroce. La maladie gagnait, une lèpre. Le phylloxéra qui prenait la vigne à la racine, jusqu'à la mort du cep. Il avait fallu arracher les souches, défoncer à la pioche les terrains sinistrés, replanter. Travail de fossoyeur, de forçat, non rémunéré. Les vignes restaient sans rapport. Et pour finir, pendant quatre ans, pas une seule récolte pour se mettre le moral d'aplomb.

 

1907 : le raisin ne valait rien. 1908 : vendanges de nains. 1909 : la pourriture partout, des fumées grises, infectes, planaient sur les plateaux des pressoirs. 1910 : rien ne manqua, orages, gel, grêle, mildiou. On n'aurait pas fait une tarte avec tous les raisins de Champagne, tant la vendange était transparente. Il suffisait que la maladie entre dans un ménage pour que la ruine soit complète. Des terres qu'on se disputait autrefois comme on se dispute la vie ne trouvaient plus d'acquéreurs. Des vignerons quittaient leurs maisons, laissaient leurs terres aux friches. Mais le négoce se sucrait sur cette misère. »

 

« Les fraudeurs fabriquaient du Champagne avec n'importe quoi, des rebuts d'Anjou ou de Meuse, des piquettes achetées au comptant sur le quai des gares à des intermédiaires sans visage, et avec du cidre s'il le fallait. L'argent rentrait.

 

Les vignerons doutaient de tout, et même du ciel. Qu'est-ce qui leur restait ? Le front bas, la hargne, les hymnes provisoires, les drapeaux rouges qu'ils pendaient aux frontons des mairies. La fraude leur donnait le tournis. L'agitation seule arrivait à calmer leur souffrance du travail nié et insulté... »

 

C'est extrait d'un beau roman de Daniel RONDEAU « Dans la marche du temps » pages 126-127 chez Grasset.

 

 

21 janvier 1911 ; Champagne : la coupe est pleine

 

Publié le 20 janvier 2011 par Olivier Le Tigre 

 

Le champagne coule à flot mais dans la rue. Les verres s’entrechoquent mais jetés contre le mur. La révolte des vignerons en Champagne mousse et fait de drôles de bulles. Coalition des mécontents : les vignerons de la Marne souhaitent que le champagne soit véritablement une appellation contrôlée et que les négociants cessent d’importer des récoltes du Midi voire d’Algérie ou de l’étranger.

 

Les vignerons de l’Aube craignent que leur département ne puisse plus produire le précieux breuvage et que leurs revenus -déjà faibles – s’effondrent.

 

En quelques mois, la tension est montée de façon spectaculaire. En fin d’année 1910, un rassemblement de 10 000 vignerons s’était déroulé dans le calme à Epernay. En ce début d’année 1911, les choses prennent une autre tournure.

 

Récoltes répandues sur la chaussée, drapeau rouge hissé sur les mairies, maisons de négociants incendiées : la violence du mouvement commence à inquiéter le gouvernement qui organise une réunion de crise ce jour.

 

Il faut absolument éviter un embrasement généralisé semblable à celui de 1907 dans le Languedoc où la troupe – le fameux 17ème régiment d’infanterie – avait en partie fraternisé avec les émeutiers et où la vie locale avait frôlé la paralysie totale (grève de l’impôt et arrêt de toute activité économique).

 

Le plan que je propose aux ministres est adopté :

 

Partie «carotte», nous faisons accélérer les débats à la Chambre pour qu’une loi sorte dès février prochain pour lutter efficacement contre la fraude vis à vis de l’origine des récoltes et l’interdiction des transports de vins étrangers. L’appellation Champagne doit être définitivement protégée.

 

Partie «bâton», nous envoyons le 31ème régiment de dragons stationné à Epernay et réputé pour sa loyauté.

 

Le préfet reçoit des instructions précises pour mener des pourparlers de sortie de conflit avec les négociants et les vignerons.

 

Quand la réunion se termine, Briand commente : « Il va être aussi difficile de ramener le calme que de reboucher une bouteille de champagne !»

 

 

« En Champagne en 1911 : protestant contre l’importation de raisin à bas prix venant d’autres régions, les vignerons incendient les maisons des négociants et mettent leurs caves à sac. Les bouteilles finissent fracassées par dizaines de milliers sur la chaussée, et les tonneaux sont crevés. À chaque fois, on commence par s’attaquer au piano, souvent détruit à coup de massue : plus que tout autre, il constitue un signe extérieur de richesses. L’automobile aussi, mais le piano encore plus. »

Anne Steiner.

 

LES REVOLTES POPULAIRES DES VIGNERONS MARNAIS 1894-1911

ICI

 

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10 août 2016 3 10 /08 /août /2016 06:00
Pacser le vin avec n’importe qui n’apporte rien à la mixologie : le Green Cadet c’est le citron qui suffit à créer la différence

Y’ a quelques années, les petits génies du CIVB sont venus à Paris pour séduire la jeunesse dorée qui préfère le Cuba Libre au petit blanc de l’Entre-deux-Mers.

 

J’ai le souvenir d’une soirée à l’Olympia où la mixologie bordelaise avait des allures de bouillie sans atteindre la notoriété de celle-ci.

 

Dégueulasse !

 

Contrairement au tout rond bas de plafond de Barcelone je n’ai rien contre la transgression, libre à chacun, à Cahors comme ailleurs, de faire ce que bon lui semble et l’honneur du vin n’en sera en rien outragé.

 

Certes braire fait de l’audience auprès de la petite poignée des adorateurs qui attendent l’érection du maître mais tout ça ce n’est que du vent !

 

Plus intéressant le foutage de gueule des petits génies du marketing : Emmanuelle Bossard, directrice du pôle vin et pétillant chez Rothschild France Distribution en charge de Mouton Cadet, explique que « pour créer ce long drink à base de Mouton Cadet Sauvignon Blanc, nous avons travaillé pendant un an et demi avec des bartenders parisiens pour trouver une recette qui permette de sublimer le vin sans le dénaturer. »

 

Pensez-donc 1 an et demi pour arriver à la conclusion qu’ « Un trait de sirop de sucre de canne – « qui vient tenir la dilution du vin et garder un équilibre dans le cocktail », un zeste de citron – « qu’on exprime et qui rappelle les arômes d’agrumes du Mouton Cadet Sauvignon Blanc », et c’est tout ! Nul besoin d’autres ingrédients pour ce long drink surprenant. Car c’est le citron qui suffit à créer la différence.

 

Pour en rajouter une louche de franche poilade Emmanuelle Bossard « Même si le fait est simple, le coup du zeste du citron vert rajoute ce petit quelque chose. J’aime aussi utiliser parfois le bec verseur "arrosoir" pour animer la confection du Green Cadet ! Une manière originale de théâtraliser ce cocktail pour créer une ambiance estivale sur table. »

 

Confidence pour confidence très chère madame je me dois de conseiller aux braves consommateurs ou même aux barmans de s’approvisionner en sauvignon hors votre marque fort onéreuse. Le résultat sera le même, sauf que bien sûr les barmans du : Le Comptoir de l’Arc (Paris 8ème), Le Californie (Cannes), La Terrasse du Plaza (Nice), La Bastide de Venelles (Aix en Provence) ou encore La Rascasse (Monaco) ne seront plus sponsorisés par vous.

 

Pas sûr d’ailleurs qu’il y ai beaucoup d’amateurs pour cette savante mixture qui vous a mobilisée un an et demi tout de même.

 

Si vous souhaiter lire l’ensemble de l’œuvre de Diane Ziegler du Figaro-vins c’est ICI son beau et bon publi-reportage pour Rothschild France Distribution.

 

Z’avez dit journaliste ?

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9 août 2016 2 09 /08 /août /2016 06:00
La bataille de la vraie tomate goûteuse de saison cultivée en pleine terre va-t-elle être gagnée par nous consommateurs-citoyens ?

Depuis des années j’étais fâché avec la tomate Daniela, apparue au début des années 1990, issue de sélections génétiques, qui pouvait rester ferme et rouge pendant trois semaines, mais sans goût.

 

Tout était faux dans la tomate : les tomates grappes, les tomates dits anciennes, la cœur de bœuf, tout au long de l’année, partout sur les étals y compris chez les petits marchands de fruits et légumes. Même les bio étaient inodores et sans saveur.

 

Pourquoi le goût de la tomate a-t-il quasiment disparu ?

 

« En France, on vend 900 000 tonnes de tomates par an, dont 85 % en grande distribution, et le pays en produit plus de 500 000. Pour répondre aux contraintes de la distribution, les semenciers ont sorti des graines d'hybrides dites « long life », faites pour l'exportation et supporter de longs voyages en bateau. Au début des années 1990, la tomate Daniela, issue de ces sélections génétiques, pouvait rester ferme et rouge pendant trois semaines, mais sans goût.

 

Deuxième facteur néfaste : en Espagne, au Maroc ou aux Pays-Bas, on récolte les tomates à des stades de maturité très clairs. Sur un code de coloration qui va de 1 à 10, on les cueille souvent à 2, alors qu'il faudrait être à 6 ou 7 en lumière naturelle.

 

Troisième facteur : en conservant les tomates en chambre froide ou en réfrigérateur, le distributeur ou le consommateur tue le développement des arômes et des parfums et casse le processus de maturité. La tomate ne supporte pas les températures inférieures à 12 degrés, or toute la logistique alimentaire en France se fait en dessous de 8 degrés ! »

 

Le vent vient de tourner, sous l’impulsion d’une poignée de résistants à « la tomate mondialisée », il est à nouveau possible de consommer en saison des tomates de plein champ goûteuses et savoureuses.

 

Dans sa préface à l’opus Tomate publié par les éditions de l’Épure, Isabelle Larignon, donne deux dates :

 

 

2005 – Porte de Versailles – Hors-sol : c’est parti pour le Salon le plus vachard. Ça ne rigole plus à la manut’. Noud voilà au cul du camion à transporter des plants de tomates s’étirant comme des lianes. Moi exposant, moi gêne. Moi tout savoir ou presque sur la culture hors-sol et expliquer pourquoi toi ne plus avoir de goût : rock and roll.

 

2010 – Paris – Rouge : ronde, oblongue, verte, safranée, noire, zébrée, elle s’épanouit arlequine dans le semis d’un potager où elle reçoit les rouges baisers d’un jardinier qui lui demande en secret « Me dire-vous un jour la saveur de vos lèvres ? Me direz-vous un jour le goût de vos baisers ? »

 

« Une tomate en serre, c'est bien pour avoir de la tomate en décembre et des fruits bon marché. Mais une tomate en pleine terre de plein champ, c'est 100 fois mieux. C'est comme un steak sous vide, à un moment c'est pas pareil », juge Clotilde Jacoulot, primeur à Morteau (Doubs) auréolée du titre de meilleure ouvrière de France (Mof).

 

La plus belle alliée de la tomate goûteuse de saison cultivée en pleine terre est la mozzarella di bufala DOP

 

 

Au-delà de la haute-gastronomie, la bataille du goût dépasse largement le petit cercle des fines gueules, elle est emblématique d’une vraie reconquête par les consommateurs de leur pouvoir d’influer sur le cours implacable et normalisateur de ce monde mondialisé.

 

Certes, le coût du panier dit de la ménagère, de son caddie, est un point important mais sa composition l’est aussi. L’excès de produits transformés, emballés, normalisés, à coût au kilo très élevé, peut largement laisser la place à un retour à des produits bruts de bonne qualité à transformer soi-même.

 

La question du temps est un faux argument cachant nos choix et nos renoncements.

 

La réduction de l’emprunte carbone des tomates, des fraises allant et venant sur les autoroutes d’Europe, le choix d’une agriculture moins intensive, plus respectueuse de l’environnement, de la santé, passent par nos choix de consommateurs-citoyens.

 

Cessons de toujours rejeter sur les autres la dégradation de notre nourriture, de notre environnement, commençons par nous prendre en main, par balayer devant notre porte, par donner des signaux, même faibles, aux hydres qui nous entraînent dans un monde qui broie notre mode de vie.

 

Bien sûr, il ne faut pas rêver la haute-technologie, telle que décrite ci-dessous, exploitera ce flux montant, mais à force de grappiller il est possible de tailler des croupières aux monstres, prenons exemple sur « Les paludiers de Guérande ou la volonté d’une poignée d’hommes peut inverser l’histoire d’un produit millénaire » lire ICI 

 

Retour au goût de la tomate :

La bataille de la vraie tomate goûteuse de saison cultivée en pleine terre va-t-elle être gagnée par nous consommateurs-citoyens ?
La bataille de la vraie tomate goûteuse de saison cultivée en pleine terre va-t-elle être gagnée par nous consommateurs-citoyens ?

Lire Bretagne contre Sud-Est : la guerre de la tomate fait rage 

 

« On est loin de la « serre à pépé »

 

Désormais, les Bretons, bien organisés dans leurs groupements de producteurs, sont devenus les champions des rendements. Il n'y a qu'à voir la serre expérimentale de Savéol, leader de la tomate en France (80 000 tonnes/an), pour mesurer combien on est loin, aujourd'hui, de la « serre à pépé ».

 

Située à Guipavas, près de Brest, cette serre de 5 000 m2 est entièrement pilotée par informatique (température, humidité, arrosage…). Quelque 260 variétés différentes de tomates y sont testées. Et 99 % des plants sont cultivés en hydroponie, où la terre est remplacée par un substrat stérile : ici de la fibre de noix de coco du Sri Lanka.

 

En 30 ans, la coopérative a développé 30 variétés. « Le marché est très concurrentiel en France et nous, depuis le temps qu'on cultive la tomate, on sait que la meilleure solution pour répondre aux attentes du marché c'est de proposer des choses nouvelles », explique Pierre-Yves Jestin, président de Savéol.

 

La palette s'est incroyablement élargie. « Nous étions tombés au fond du trou il y a une quinzaine d'années, avec la Daniela en Bretagne. Elle était rouge, ronde et ferme, mais n'avait aucun goût. Depuis, nous avons fait beaucoup de chemin pour la diversification et le goût », veut croire Gérard Roche, vice-président du syndicat Légumes de France.

La bataille de la vraie tomate goûteuse de saison cultivée en pleine terre va-t-elle être gagnée par nous consommateurs-citoyens ?
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8 août 2016 1 08 /08 /août /2016 06:00
Yeu à la bouche John Paul Carmona le Joe Louis de la cuisine enchante patagos&mogettes avec l’huile d’immortelles  d’Insula Oya

Juin 68 :

 

« Aussi bizarre que ça puisse paraître, moi qui suis né à quelques kilomètres de la mer je n'avais jamais quitté la terre ferme sur un quelconque bateau. L'avion, n'en parlons pas, en ces années-là voyager était un luxe. À l'embarcadère de Fromentine, face à l'île de Noirmoutier, je découvrais notre navire propret, tout blanc, « la Vendée ». Les marins y embarquaient victuailles et fournitures entassées sur des palettes. Ils chargeaient aussi quelques voitures. Sur la jetée de bois, tout un petit monde de vacanciers, d'îliens, de passagers d'un jour se pressaient.

 

Mon arrivée à Port-Joinville, sous un ciel si bleu, un air si tendre empli de bouffées de senteurs de poiscaille, restera pour moi l'un des moments forts de ma vie. Jean Neveu-Derotrie, mon boss, était le sosie de Jacques Tati sans l'imperméable. Sa garde-robe se résumait en trois pantalons de tergal gris, deux chemises nylon blanches et une paire de sandales de plastic blanc. Mèche sur les yeux, pipe éteinte au bec, flanqué de son chien Achille, appuyé aux ridelles d'une camionnette C4 il me tendait une main ferme et chaleureuse.

 

L'homme était merveilleusement loufoque, cultivé. Au bar de la marine il me comptait son histoire de rejeton d'une famille où l'on était médecin ou dentiste. Lui s'était fait visiteur médical. Il sillonnait la France en fourgonnette J7 pour placer des matelas anti-escarres dans les hôpitaux et chiner toutes les vieilleries qui lui tombait sous la main. Militant au PSU, pacifiste, son sens des affaires consistaient à savoir acheter. L'argent ne représentait rien pour lui. Un vieux Rouen, une commode Régence ou un homme debout marqueté, ça lui parlait, ça le faisait bander. Capable des pires manœuvres pour acquérir le meuble ou l'objet sur lequel il avait jeté son dévolu il se fichait pas mal ensuite de revendre. Jean n'aimait rien tant que de voir son magasin empli de belles choses. C'était un esthète, un pur esprit, notre accord fut instinctif, immédiat. Sans parole.

 

Les marins l'appelaient le « marchand de vermoulu » et se faisaient un devoir de lui faire prendre, à chacune de ses sorties, une mufflée. Mon baptême du feu se révéla redoutable. Après les bières nous étions passés au pastis et, sans nous avoir mis une quelconque nourriture sous la dent, l'heure du Cognac sonnait. Je pratiquais, autant que je le pouvais, la politique du verre plein sans toutefois pouvoir éviter d'en descendre quelques-uns. Jean semblait imperturbable. Droit, rallumant ostensiblement sa pipe toujours éteinte, dans le brouhaha, il me narrait sa « guerre d'Algérie » comme infirmier. Achille, le chien, me fixait de ses yeux tendres. Tous les deux nous allions aussi former une belle paire d'amis. On m'observait. Soumis au rite initiatique d'admission dans le cercle restreint des gus capables de marcher droit après une poignée d'heures passées à écluser sec je me devais de triompher de l’épreuve. Aux alentours de minuit, avec la raideur hésitante de ceux qui sont pleins comme des huîtres mais qui veulent encore porter beau, Jean et moi, côte à côte, sans nous porter secours mutuel, quittions le bar en saluant les derniers piliers de bistrot. La C4 nous mena sans encombre jusqu'à la Ferme des 3 Moulins. »

 

 

Telle fut mon arrivé à l’Ile d’Yeu.

 

Mon job d’été consistait à tenir les comptes, faire les courses à Port-Joinville, la cuisine, assurer en gros l'intendance générale du magasin de brocante de la Ferme des 3 Moulins.

 

Vous comprendrez ainsi aisément que je partage l’enthousiasme de John Paul Carmona « De tous les endroits que j’ai eu la chance de découvrir à travers le monde, l’île d’Yeu est l’un des plus beaux, et certainement l’un de mes préférés. J’y suis arrivé pour y travailler un été sans avoir la moindre idée d’où je mettais les pieds. J’en suis tombé instantanément amoureux.

 

Depuis mes premiers pas sur le marché, mes premières balades sur la plage, j’ai été fasciné. En tant que Chef, j’y ai trouvé des produits qui rivalisent avec ce que j’ai vu de meilleur dans les restaurants autour du monde. La fraîcheur des poissons, les incroyables légumes bio, les fromages de chèvre ou les herbes sauvages, tout m’enchante. »

 

Mais qui est donc John Paul Carmona ?

 

 

Bruno Verjus autre fondu de l’Île d’Yeu le compare au boxeur Joe Louis désigné comme le champion du siècle en 1981.

 

« Une identique déambulation de boxeur puncheur – la grâce d’un corps massif, mue d’une légèreté dansante. L’œil félin, le sourire esquissé aux lèvres, une présence de tout instant ; voilà pour le menu.

 

En cuisine, John Paul Carmona rythme ses ingrédients et ses mets à l’égal d’un boxeur. Au palais, les saveurs des plats se lancent dans une savante hypnose, frappent et vous laissent KO à la première bouchée. Le style, la puissance et l’élégance, quelques mots égrainés comme des condiments. Ils valent pour nos enthousiasmes devant une cuisine limpide, franche et sincère. »

 

 

Yeu à la bouche de John Paul Carmona est une production des éditions de l’Épure.

 

Choisir parmi les recettes n’est pas aisé mais puisque j’ai découvert et cuisiné des patagos à l’Ile d’Yeu je n’ai pas hésité une seule seconde. 

Yeu à la bouche John Paul Carmona le Joe Louis de la cuisine enchante patagos&mogettes avec l’huile d’immortelles  d’Insula Oya

Pour le vin qui va avec je me suis adressé à Laure Pradel qui veille, avec un soin d’une nounou suisse, sur les vins des Fiefs Vendéens de Jérémie Mourat.

Yeu à la bouche John Paul Carmona le Joe Louis de la cuisine enchante patagos&mogettes avec l’huile d’immortelles  d’Insula Oya
Yeu à la bouche John Paul Carmona le Joe Louis de la cuisine enchante patagos&mogettes avec l’huile d’immortelles  d’Insula Oya
Yeu à la bouche John Paul Carmona le Joe Louis de la cuisine enchante patagos&mogettes avec l’huile d’immortelles  d’Insula Oya
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