« Sous le soleil exactement... » il cognait enfin comme un Vulcain frustré ce diable de fils adultérin de Zeus. Quoi de plus fortifiant que la montée du soleil au zénith, réécriture du mythe égyptien du cycle du jour, le combat Rê chaque nuit contre « les forces du chaos », celle du rampant le serpent Apophis, pour le soleil réapparaisse, tiré de la gangue de la nuit. Triomphe du monde d’en haut, de la lumière sans qui la photosynthèse n’existerait pas. Poussée de vie, de vert, la vigne sur les coteaux d’Issy-les-Moulineaux s’éclatait, et moi après un bon repas à la Guinguette du Chemin des Vignes en compagnie d’Yves Legrand sous ma chemise de coton mercerisé je suais en cherchant les meilleurs angles pour mon petit vigneron bien pâlichon.
Le pauvre, toute une vie passée debout, certes au milieu de plantes vertes, au 9ième étage d’un immeuble sis boulevard St Jacques, il s’ennuie parfois de cette réclusion. Bien sûr, il ne se plains jamais vu que dans sa jeunesse éternelle il trônait au beau milieu de ses petits camarades dans une vitrine des Grands Boulevards. Imaginez sa frustration de voir défiler tout au long des jours que Dieu fait plein de belles filles court vêtue, rieuses, enjôleuses, sans jamais pouvoir sauter le pas pour les inviter au cinéma. Vous me connaissez, je suis bon prince, je m’étais donc promis, dès que la vigne retrouverait ses couleurs vert tendre, de lui offrir une expédition au Chemin des Vignes dans la commune du fumeur de Havane. Mais le soleil niaisait, la chape des nuages nous enserrait dans le gris et mai filait dans l’ennui. Et puis, juin venu, me fiant aux météorologues, je prenais rendez-vous ce mercredi pour le repas de midi avec l’ami Yves.
Le jeunot allait donc se payer une belle séance photo dans les vignes des coteaux d’Issy-les-Moulineaux. Je le vêtais en vigneron du dimanche, le plaçais sur la banquette arrière de ma petite auto, fallait voir le regard ébahi de mes voisins dans le parking de l’immeuble : « barjot ce Berthomeau... », Cap sur la Petite Ceinture. Déjeuner dehors sous les charmilles, de bons plats, de bons vins, une conversation qui roule : que du bonheur ! Le temps était venu de me glisser dans la peau de Robert Doisneau. La lumière était belle. Tout en haut du coteau, à espace régulier, passait ce drôle de métro baptisé RER : express régional qui en général se paye des pannes, des grèves et qui pue. Je grimpe. Je le place. Sous son impavidité de façade le jeune vigneron s’anime. Il existe. Le voilà.
Si vous n’êtes pas au conclave du Grenache, et si vous avez une minute à perdre, guidez mon choix du futur bandeau qui orne le frontispice de mon blog en désignant le cliché qui a votre préférence.(de 1 à 11)
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