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29 janvier 2013 2 29 /01 /janvier /2013 00:09

Si vous m’accordez un sou de confiance lisez cette belle chronique dont l’essentiel n’est pas de moi mais d’un ethnologue amateur de ma Vendée engloutie.


La locution du français familier « Ça durera moins longtemps que les contributions directes » est ici annexée pour signifier, dans la bouche des gens de mon pays, quand j’étais petit, que les foires de la Mothe-Achard, étaient aussi indestructibles que les fameuses contributions. Et pourtant, elles ont presque disparues tant elles sont réduites à la portion congrue comme l’écrit Henri-Pierre Troussicot « Utopie, espoirs déçus ?... La foire de La Mothe a toujours lieu le 1er jeudi du mois mais qu'en reste-t-il au regard des objectifs de 1967 ! Je ne vais pas tenter d'expliquer les causes de cette mutation. Elles sont multiples, c'était sans doute inéluctable et ce n'est pas l'important de ce texte témoignage. »


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Le texte témoignage dont il parle est celui de son père Alfred qui, en 1967, tentait de sauver les foires de Mothe. Mon annexion des contributions directes je l’ai faite à dessein car le grand Alfred qui s’enflammait pour la défense de la foire de la Mothe travaillait au Trésor Public, pour le Percepteur donc.


C’est donc un fragment de mon enfance de sauvageon du bocage qu’évoque Alfred Troussicot, conseiller municipal, tout comme mon père Arsène. Détail piquant, mon père, des années avant avait été l’un des rares élus sur la liste du maire inamovible (plus de 30 ans) Antoine Morrison de la Bassetière battu par Marthe Regnault (la sage-femme qui avait accouchée ma mère de ma pomme) alors qu’Alfred lui était sur la liste des opposants au châtelain du Plessis. Souvenir que le père Arsène avait fait, lors de cette élection, l’un des plus beau score individuel ce qui fit qu’il intégra de suite la nouvelle équipe pour s’occuper des travaux.


Enfin, sachez que mon père, est mort quelques heures après la clôture d’une foire de Mothe ou d’un marché car il y avait marché tous les vendredis, assis sur une botte de paille au bout du champ où l’une de ses moissonneuses-batteuses tournait. Le matin il avait promis à ma sainte mère de faire une halte chez le médecin mais, comme papa n’aimait guère attendre, et que son goût pour la médecine était proche du mien, il n’en fit rien. Belle et paisible mort, sourire aux lèvres mon père avec qui j’aimais tant discuter politique. J’étais le petit gars du père Arsène et j’en étais fier.

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LA MOTHE -ACHARD


« Vers la renaissance de ses foires »


Ainsi titrait une pleine page du quotidien « PRESSE-OCEAN » le 7 décembre 1967, il y a 45 ans...

 

Je vais m'en tenir à présenter les protagonistes de l'époque qui apparaissent dans cet article.

En premier lieu, bien sûr Albert Brianceau, maire de La Mothe-Achard qui rend hommage à la commune de Chauvigny, dans la Vienne qui avait reçu une délégation Mothaise pour exposer sa démarche de relance des foires qui semblait efficace. Il en profitait pour faire part des projets municipaux concernant l'implantation de pavillon H L M, la réserve d'une zone industrielle, la construction d'une nouvelle mairie, etc.


Bernard Mousseau, président du syndicat des commerçants se montrait volontariste pour faire revivre les foires et marchés de même que André Bernard président du syndicat local des exploitants agricoles.


Deux figures apparaissent en photo, celle du garde-champêtre, Raymond Mérieau qui ces jours-là avait un travail de mise en place souvent bien difficile à accomplir pour arriver à «contenter tout le monde». Aussi celle de Mme Deniot, placière au marché aux volailles, que l'on voit en photo en compagnie de Marie-Louise Bironneau de Villeneuve.


Vous me pardonnerez de faire une remarque personnelle à propos de celui que j'ai le mieux connu puisqu'il s'agit de mon père...


Je n'ai jamais compris pourquoi Alfred Troussicot, certes conseiller municipal, prit tellement à cœur et se soit pareillement investi dans cette relance des foires et marchés de La Mothe ? Une chose est certain, il n'y trouvait aucun « intérêt personnel ».

 

Il en était même tellement enthousiaste voire excité qu'il a été écrit à son propos : « cet animal, il ferait même vendre le coq de l'église « ...


Je crois malgré tout que son engagement avait un fond de nostalgie. L'article de presse consacre d'ailleurs un tiers de sa page au texte qu'il a écrit et qui s'intitule :


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« SI LES FOIRES D'ANTAN M'ETAIENT CONTEES »


En voici l'intégralité qui « balaie » près d'un siècle de foires de La Mothe.


63 DEBITS DE BOISSON


La Boule d'Or, Le Lion d'Or, Les amis réunis, à la descente des voyageurs, Le Bon Laboureur, Le bistrot du père la France, Le café du Commerce, puis chez le père Vallet, le père Fouquet, le père Cougnaud, toutes portes et devantures garnies d'une branche de houx ou de gui fleuri, ou bien au temps des vendanges, d'un pampre de vigne annonciateur du vin nouveau et puis l'hôtel du Commerce, l'hôtel de la Gare, le restaurant des passagers, tout cela vous accueillait à votre descente du train. Telle était l'arrivée d'un jour de foire de La Mothe au lendemain de la guerre 1914-1918.


Vous rendant ensuite sur la place de la mairie, mise à part celle-ci, et l'école, vous trouviez un café à toutes les portes. Il y en avait 17 autour du foirail. Chez certain, deux barriques ne suffisaient pas pour la journée et chez tel autre la moitié d'un veau donnait tout juste satisfaction aux affamés, sans parler des pâtés et autres charcuteries du cru.


Voilà, il y a 40 ans et quelques années, la physionomie d'une foire mensuelle dont beaucoup d'anciens se souviennent et encore et qu'on voudrait voir revivre.


Il y avait donc 63 débits et tous y trouvaient leur compte, car si l'on voyait le bétail sur le foirail, la discussion se faisait toujours dans un café. Bien sûr, à l'époque, la fiscalité, les charges n'étaient pas les mêmes, c'était le temps du petit profit et du gain de vieillesse amassé durant une existence. Les foires, les noces, étaient les grands jours de commerce pour les uns, de distraction pour les autres. On se rappelle encore d'un boucher bien connu, ami de tous, qui, le lendemain de son mariage, fit le tour des 63 établissements. C'était aussi la période où la viande de boucherie commençait à devenir plus courante sur les tables de milieux ruraux.


VOITURES à CHEVAUX, CHARRETTES à BŒUFS


Revenons à la gare au petit matin de cette foire. Les ballots des forains, les cages des volaillers et coquetiers, les balles des marchands de poissons venus de la côte, tout cela sortait des wagons. Rappelez-vous de Niace, de la Richer courant à patte (pieds nus), du père Meugnoune qui couchait dans le four à Busard, de Léon Bonnaud, tous ceux-là ne rechignaient pas à l'ouvrage pour ce travail de transbordement et la coutume voulait que le lendemain, ils viennent vider quelques verres mis de côté pour eux dans les débits proches.


Dans le même temps, convergeaient vers la ville les voitures à chevaux, les charrettes à bœufs chargées de volailles, de porcs, de paniers d'œufs et de beurre. Attachés  à l'attelage, vaches et veaux suivaient facilement. A moins que l'animal, « borgné », c'est-à-dire aveuglé par un sac ne se trouve dans le véhicule. Cahin-caha, ce cortège pénétrait dans le bourg, les femmes en coiffe, les hommes en gilet serré à manches de satinette, les enfants, à la culotte sous le genou, portant les paniers tressés garnis de « coins » de beurre ou tirant les cages aux quatre petites roulettes, dernier asile des poulets et canards. Tout cela avait quitté fermes, métairies et borderie à des heures très matinales et ne rentrerait qu'au soir.


Des troupeaux de bovins, robes rouges et hauts en cornes, faisant partie des « touches » d'Adrien Chaigne de Grosbreuil ou de Chusseau, complétaient encore cet encombrement pittoresque.


Il arrivait que le pont des Essais se révélât trop étroit sur la route de Nantes, à l'entrée du bourg, quand s'y présentaient les lots d'animaux amenés par les Goulpeau ou Troger du Précanteau ou, plus tard, par les Jourdain, Charrier, Thibaudeau, « Sicot » des Moulières et ce n'était pas rare qu'un animal épouvanté saute dans la « praille » en contrebas.


BLOUSES BLEUES ? FEUTRES NOIRS


Peu à peu, la cohue sur le foirail se faisait indescriptible. Blouses bleues, feutres noirs devenaient marée parmi le bétail meuglant.


On répartissait les animaux sur cette place en pente douce. Les laitières ici, près desquelles on appelait les « tireuses », femmes du pays qui assumaient la traite car la vache n'avait pas été « tirée » depuis la veille. Près de la mairie, c'étaient les grosses bêtes : les taureaux dans la partie ouest et les bœufs liés au joug sur la partie basse de l'esplanade. Des rassemblements plus importants se faisaient autour de bêtes splendides amenées par des exploitants réputés ; Ravon ou Berthomeau, par exemple qui poussaient la coquetterie au-delà des soins à leurs animaux, mais sur leur personne, avec la blouse plissée et repassée et la moustache fraîche taillée et lissée. (Note du Taulier il s’agissait de mon grand-père paternel Louis Berthomeau, dit pépé Louis époux de ma mémé Marie)

 

Cris perçants à la foire aux cochons où les hommes en déplaçant les porcelets sur le dos, dans un sac, évitaient rarement « la pissée » incongrue.


Un grouillement humain déferlait autour des halles. Les étals étaient souvent à même le sol, sur des toiles de jute. Quelques bouchers lançaient des appels pour le « bia morcia » et les Sablaises, marchande de poisson, utilisaient sans vergogne un vocabulaire haut en couleur. Parmi elles, on désignait plus spécialement Maria Baud, Dormette, Blondine et la Beurtoune avec des qualificatifs que l'on échangeait à voix basse à cause des enfants.


DIX VEAUX SACRIFIÉS


Mais vers midi, toute cette foule avait faim et les transactions comme les emplettes n'étaient pas terminées. Si quelques-uns mangeaient sur le pouce un casse-croûte ramené de la maison, beaucoup prenait « la portion ». C'était partout semblable menu: soupe, ragoût, côtelette, haricots. D'autres, au gousset mieux garni ou en mal de politesse, prenaient la table d'hôte, soit chez Arthur à la Boule d'Or ou Niort, au Lion d'Or, ou chez Cent Bon Diou au bon laboureur; à moins que l'on se retrouve chez la mère Craipeau ou la mère Danieau, dont le fils Prosper est toujours très actif à ce jour.


Pour cette foire à la Gargantua, la mère Pondevie, bouchère, allait jusqu'aux Moutiers, le lundi précédent, pour ramener ses veaux, à pied, pour les tuer, les dépecer et les vendre ensuite. Le rude ouvrage ne tue personne puisque a 94 ans cette année, la mère Pondevie, grand'mère du négociant en bestiaux et actif promoteur de la relance, Yves Hermouet, est parmi les doyens encore alertes de la commune. On estime que pour ce jour, il fallait sacrifier une dizaine de veaux plus deux ou trois « broutards » pour la veille, journée des préparatifs.


Dans l'après-midi, un petit renouvellement de clientèle se faisait. Certains patrons rentraient assez vite pour permettre aux valets et servantes, restés à la ferme, de venir à leur tour à la foire.


DANSE ET PARTIES DE CARTES


L'embarquement,  provoquait le même tohu-bohu que le matin, dans la cour de la gare et sur les routes les cortèges s'étiraient avec, toutefois, moins de hâte et …avec parfois des comportements instables…


Pour certains, commençait la danse, les parties de cartes et cela se continuait fort tard dans la nuit tandis que les meuglements ou bêlements de quelques  bêtes négligemment délaissées, désemparées se calmait un peu !


C'était cela une foire de La Mothe, le grand événement du mois pour toute une région. Echanges, affaires, contacts, amitiés, tout y trouvait son compte.


Et c'est cela, adapté, bien sûr, aux moyens modernes, que nous voudrions voir reprendre. Il y a les transports nouveaux, les transactions à l'étable puisque les enclaves sont abolies et, pour certains, c'était une grave affaire. Mais, puisque tous se connaissent et s'estiment, il faudrait qu'ils s'y retrouvent, les Ferré et Richard de St Mathurin, les Giraudeau, les Mornet de Vairé et de St Julien, les Chaigne, Bouron, Guiochet, Chaillot de St Georges et Ste Flaive.


Nous les attendons avec confiance pour faire revivre nos foires de La Mothe.

Tel est mon but. Merci à tous.


 

                         Alfred Troussicot


Utopie, espoirs déçus ?...La foire de La Mothe a toujours lieu le 1er jeudi du mois mais qu'en reste-t-il au regard des objectifs de 1967 ! Je ne vais pas tenter d'expliquer les causes de cette mutation. Elles sont multiples, c'était sans doute inéluctable et ce n'est pas l'important de ce texte témoignage.

 

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Henri-Pierre Troussicot est peintre si vous en avez l’occasion allez voir son Exposition ENTRE MER ET MARAIS Office de Tourisme Place Gaston Pateau 85270 Saint-Hilaire-de-Riez jusqu'au mercredi 13 février 2013 link

 

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