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7 mai 2009 4 07 /05 /mai /2009 00:09

De mon passé lointain – ne ricanez pas – de basketteur à la Vaillante Mothaise – maillot blanc avec numéros bleu cousus par nos mères, short blanc et Hutchinson dépareillées – je garde le goût du jeu. Dans le jargon moderne les coaches traduisent par produire du jeu, en langage courant faire du spectacle. Pour ce faire il faut être deux, c’est-à-dire que les 2 équipes se livrent sans tout sacrifier au seul résultat. Gagner avec la manière quoi de plus gratifiant surtout lorsqu’on mouille le maillot dans un match de division départementale devant une poignée de spectateurs pour la gloire.


Récemment, à la suite de 2 chroniques très consuméristes sur les initiatives marketing de Carrefour et de Monoprix, Catherine Bernard, dans sa brillante et documentée Revue de Presse de Vitisphère, me faisait l’honneur d’un sous-titre : Leçon de déshabillage. Raccourci un peu osé et trop rapide, chère consœur, car autant du côté du Mammouth assoupi j’étrillais le fond pour ce qui concernait Monop je regrettais que ses innovations marketing soient gâchées par une mise en rayon par trop traditionnelle et peu compréhensible pour le consommateur : le trop fameux mur de vins. Donc, comme je m’y attendais, mes banderilles n’ont eu aucun effet sur les « génies de l’organisation » du N°2 mondial de la Distribution qui, tels les bureaucrates du Gosplan, penchés sur leurs graphiques de parts de marché et sourcilleux de leurs seules procédures, n’en ont rien à traire.


En revanche, chez Monop, le retour fut immédiat, beau joueur, et rendez-vous fut pris, avec Jean-François Rovire, sur le terrain du nouveau Monop Store de Bercy Cour St Émilion pour échanger nos points de vue sur « le service rendu à l’acheteur » par le distributeur. Comment capter l’attention du néophyte ? Comment mettre en avant les signatures « Monop » pour les rassurer ? Comment informer les acheteurs des innovations ? Comment les aider dans la jungle induite par les classements croisés : AOC et non AOC, couleurs et prix… Contraintes des lieux, hétérogénéité des magasins, variabilité de la chalandise selon les quartiers, absence de réelles marques nationales… Intéressant et surtout très porteur avec le retour en force en ville des magasins de proximité. Même en période de récession, l’obsession du prix pour le prix, surtout pour un produit comme le vin, ne peut tenir lieu de politique pour une enseigne. Quand les citoyens consommateurs, justement soucieux de la défense de leur emploi, prendront enfin conscience des dégâts causés par le géant de la distribution Wal&Mart à l’économie américaine, peut-être retrouverons-nous de vrais distributeurs et non de simples « tueurs » de prix. Bien plus que la reprise espérée, de nouveaux termes des échanges mondiaux devront être trouvés, tout particulièrement avec la Chine et les grands pays émergeants, par le développement de leurs marchés domestiques. C’est une autre histoire que j’ai déjà abordée dans mes chroniques sur la Chine.

 

Mais revenons à des questions plus réjouissantes, à la suite de notre rencontre en magasin, rendez-vous est pris pour le nouvel exercice orchestré par Michel Bettane et Thierry Desseauve pour labelliser les vins signés Monoprix Gourmet (exit Gault&Millau qui ne sont plus qu’une marque). Ça se passe chez Grains Nobles, 8 rue Boutebrie dans le 5ième www.grainsnobles.fr  à partir de 9 h30. Le temps est beau mais avec une petite touche de fraîcheur. Nous officions – JF Rovire et moi-même en simples observateurs – dans une belle cave voutée. C’est Thierry Desseauve l’ordonnateur de la séance. Autour de lui 5 consommateurs-dégustateurs testés en laboratoire (celui d’Arc sur Argens) et retenus, non pour la pertinence de leurs connaissances, mais parce qu’ils sont cohérents dans la dégustation. Les vins présentés le sont, bien sûr par JF Rovire, et en général ils sont regroupés en 2 séries de 12. Exceptionnellement ce jour-là, la première série en comptait 16 et la seconde 15. Le rituel est très codifié : bouteille sous chaussette numérotée, service 2 à 2 avec l’indication de la provenance et du prix consommateur. Les consommateurs-dégustateurs ont à leur disposition un carnet de dégustation avec une rubrique : mes commentaires et un cadre défini de préconisation « le recommanderiez-vous à un (e) ami (e) ? OUI – PEUT-ÊTRE – NON. Du pain et de l’eau sont à disposition. Thierry Desseauve ou Michel Bettane ne disposent que d’un droit de veto mais pas du pouvoir de décision.

 

Rassurez-vous je ne vais pas vous infliger le compte-rendu de la dégustation des 31 vins mais exprimer mon ressenti après avoir assisté à l’exercice :


-          tout d’abord, l’organisation est impeccable, l’atmosphère studieuse, le lieu : une cave voutée se prête bien à cette forme de rituel ;


-          les dégustateurs, assez jeunes, que des garçons, sont précis, gardent leur quand à soi, argumentent bien leur prise de position chacun dans leur registre ;


-          Thierry Desseauve précis, rassurant, donne du rythme, anime, laisse bien les dégustateurs s’exprimer avant de communiquer son point de vue avec doigté, très convaincant sans être péremptoire ;


-          Sur le vocabulaire de la dégustation je suis toujours assez surpris par certaines expressions : nez d’hydrocarbures, de vernis à ongles, de terre mouillée, vin de mouchoir où l’on retrouve en bouche ce que l’on a identifié au nez, et puis, bien sûr toute la cotriade de fruits mûrs, les sous-bois et les champignons et l’éternelle minéralité… Mais je dois à la vérité que nos consommateurs-dégustateurs restaient dans une norme acceptable pour un consommateur moyen : nez rigolo, bouche franche, agréable, vin droit, bien fait, vin sympa, j’aime bien, un vin qui se tiendra bien à table etc…


-          Sur la distance le consommateur-dégustateur fatigue, perd un peu de sa concentration et de sa lucidité, il est donc préférable de ne pas dépasser la douzaine d’échantillons ;


-          Je suis assez « content » de moi car mes impressions de dégustateur-muet se trouvaient corroborée par celles de Thierry Desseauve ;


-          Un point me semble, non pas faire problème, mais jouer un rôle, c’est l’indication du prix consommateur qui influence le consommateur-dégustateur selon son échelle personnelle de prix par rapport à une appellation. Le c’est trop cher pour… ou à ce prix là on peut lui trouver des excuses… sont sans nul doute des réflexes de consommateurs mais comme ceux qui dégustent ne sont pas représentatifs des classes d’âges, sexes, CSP, il me semble nécessaire de redresser ou de pondérer le rapport qualités reconnues/prix ;


-          Une autre réflexion proche liée à la dégustation à l’aveugle : certaines étiquettes connues ou disons aussi des vins de statut du type GC de Bordeaux sauveraient leur peau si on opérait un mix entre l’opinion des dégustateurs, le prix et leur attractivité auprès des acheteurs de vins chez Monoprix. N’oublions pas que le but final c’est que le vin se vende ;


-          J’ai trouvé que nos consommateurs-dégustateurs ont eu la dent dure avec les vins de la vallée du Rhône, certains méritaient le label ;


-          En revanche leur opinion sur la série rosé de Provence, assez négative, que je partageais devrait faire réfléchir les laudateurs de la tradition et de l’authenticité de certains rosés provençaux : peuvent mieux faire ;


-          Toujours dans le plus pur style content de lui, et ce sera la seule exception à la règle que je m’étais fixé, j’ai reconnu un vin à la dégustation : le Pic St Loup de l’Hortus…

 

Pour les statisticiens ci-dessous les 2 séries de vins et les résultats de l’exercice. Merci à Jean-François Rovire, à son équipe et à Thierry Desseauve pour cette matinée studieuse pour un cancre comme moi…

 

1ière Série : 2 Champagne à 18,90 et 29,95 euros /2 Vins de Loire blancs à 10,90 et 11,90 euros / 2 Alsace à 12,80 euros / 4 Bordeaux à 7,90, 11,50, 12,50 et 16,90 euros / 6 Vallée du Rhône à 4,90, 5,90, 5,95, 8,90, 9,5 et 13,95 euros…


2ième Série : 4 Provence blancs à 6,90, 9,90, 9,95 euros, 1 Vallée de la Loire rosé 5,40 euros / 4 Provence rosé à 7,90, 7,95, 9,90 et 10 euros/ 1 Languedoc rosé 4,50 euros / 2 Vallée du Rhône rosé 4,85 et 5,90 / 1 Languedoc rosé à 5,50 euros /2 Languedoc rouge à 8,50 et 9,50 euros.

 

Dans la 1ière série :

-          5 vins ont été labellisés : 1 Muscadet sur lie 2002, 1 Alsace Riesling 2008,1 Médoc 2006, 1 St Emilion Grand Cru 2004 et 1 Vacqueyras 2007.


-          3 vins seront représentés ultérieurement : 1 Champagne, 1 Côtes de Provence blanc 2008 et 1 St Emilion Grand Cru 2006.


-          7 vins ont été recalés : 1 Champagne, 1 Muscadet sur lie 2004, 1 Alsace Riesling 2007, 1 Alsace Grand Cru 2007, 1 Côtes de Francs 2006, 1 Côtes du Rhône 2007, 1 Costières de Nîmes 2007.

 

Dans la seconde série :


-          1 vin a été labellisé : 1 Pic St Loup 2007.


-          4 vins seront représentés : 1 Côtes de Provence blanc Cru Classé 2008, 2 Côtes du Rhône Villages Visan rouge 2007 et 1 Côtes du Rhône Villages Cairanne rouge 2007.


-          11 ont été recalés : 1 Coteaux d’Aix Blanc 2008, 1 Côtes de Provence blanc 2006, 1 Rosé d’Anjou 2008, 1 Côtes de Provence Ste Victoire rosé 2008, 1 Côtes de Provence rosé St André de Figuière 2008, 1 Côtes de Provence rosé 2008, 1 Bandol rosé 2008, 1 Côtes du Ventoux rosé 2008, 1 Costières de Nîmes rosé 2008, 1 VdP Coteaux de Bessille rouge 2006, 1 Pic St Loup rouge 2007.


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commentaires

Y
Merci pour ce compte-rendu fidèle, et m'avoir à cette occasion donné votre carte qui me permet de lire de temps en temps votre blog.Par ailleurs, je me revois dans certains des commentaires "frais" que vous mentionnez. Effectivement, pour ma part, n'ayant jamais pris de cours d'oenologie, je ne peux que réagir assez directement à un vin et quand je le trouve "rigolo", et bien je le dis... :)Pour tenter d'éclairer les questions des commentaires : certains des membres du panel ont des préférences, le hasard a peut-être fait que les panélistes du rosé ce jour soient "anti-rosé" mais franchement, j'en doute. Par ailleurs, le repêchage existe : il consistera à faire repasser le vin un autre jour.Quant à ce qui "eut été préférable", ne croyez pas que cette organisation est celle qui existe depuis le début et qu'elle soit figée. La méthodologie a évolué depuis les premiers panels, la question des prix restant un point important. L'ordre de dégustation aussi. Le mix de vins dégustés également. Et enfin, la question à laquelle on doit répondre : "conseilleriez-vous ce vin à un ami ?" est en elle-même porteuse de beaucoup de questions. En tant que professionnel du marketing, je sais qu'organiser un panel est compliqué. L'objectif de Monoprix est d'arriver à dire "dans cette gamme de prix, des consommateurs amateurs mais pas pros vous recommandent ce vin". Dans cette optique, la mention du prix est essentielle et je crois que nous arrivons à peu près à répondre au besoin. Pour ma part, j'ai désormais un grand plaisir à retrouver les vins labellisés dans mon Monoprix et surtout découvrir ceux que je n'ai pas labellisés :)Dernier point, pour moi, c'est clair qu'au bout de 10-12 vins, ça devient dur. En y repensant, certains Rhônes étaient quand même pas mal mais sur le coup, je ne les appréciais plus. Certains auront droit à une seconde chance si mes souvenirs sont bons.
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M
Autre chose : les dégustateurs n'avaient-ils pas un certain parti pris contre les rosés ? Cela me semble dommage, à la veille de l'été, d'en voir autant recalés, surtout un rosé d'orfinaire aussi bon que Saint André de Figuière... A moins que ce ne soit leurs prix qui ne jouent contre eux... Si j'étais Thierry, j'exigerai un droit de repêchage ! Et puis pourquoi pas un peu plus de femmes ??? Ce sont elles qui le plus souvent font les courses et décident de ce qu'il faut boire ou manger.
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M
Hé oui, il eut été préférable à mon humble avis de faire connaître le prix public des vins échantillonnés après une première phase de dégustation "sensitive", puis de connaître les réctions après coup, une fois le prix divulgué. Sinon, l'entreprise de Monop me paraît aller dans le sens d'une recherche qualitative.
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