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30 juin 2016 4 30 /06 /juin /2016 06:00
Lorsqu’1 Bourguignon, conseiller au parlement de Dijon, revenu de Neustrie, se plante en géographie il reçoit 5 charrettes de fromage

Même si Aristote considérait que le fromage de chamelle était le plus délicat juste devant celui de la jument et de l’ânesse, je suis de ceux qui aime les fromages de vaches onctueux et plus gras.

 

Et comme la Normandie est le garde-manger de Paris avec ses vertes prairies et ses vaches normandes aux yeux tendres, je peux acheter les meilleurs Neufchâtel de la place de Lutèce.

 

Dans Le Livre de la Phagotechnie universelle où l’art de manger chez tous les peuples, Hippolyte Étiennez (1813-1871) écrit :

 

« Parmi les fromages les plus estimés, il faut compter, de nos jours, le fromage de Parmesan, introduit pour la première fois en France par Charles VIII, qui en envoya de Plaisance deux en présent à la reine et au duc de Bourbon, et le fromage de Neufchâtel… »

 

Bien évidemment je ne vais pas m’appesantir sur le Parmesan cher au cœur d’Alessandra mais vous conter le Neufchâtel en commençant par une anecdote savoureuse relatée par notre Hippolyte.

 

M. B*** de Saint-Edme, conseiller au parlement de Dijon, voulant connaître la moderne Neustrie, était venu jusqu’à Rouen, où quelques parlementaires le reçurent avec les prévenances, les égards et les cérémonies qu’on se prodigue entre confrères pour se témoigner une considération réelle ou simulée. Au repas qu’on lui donna, Saint-Edme distingua de petits fromages en bondons, qui lui parurent, crémeux et d’une pâte très fine,

 

- De quel pays les tirez-vous ? dit-il à son amphitryon.

 

- De Neufchâtel.

 

- Parbleu ! j’en suis charmé… J’ai précisément dans cet endroit un correspondant ; je lui écrirai de m’en envoyer à Dijon.

 

Le conseiller écrit en effet et demande quinze douzaines de fromages.

 

- C’est assez pour une fois, pensa-t-il… Je les ferai connaître à mes amis, et si j’en désire davantage, je serai toujours à même d’en demander.

 

Quelques jours après il retourne en Bourgogne, où les fonctions de sa charge le rappelaient.

 

Un jour qu’il recevait les membres de la chambre dans laquelle il siégeait, son maître d’hôtel, pâle, presque tremblant, l’œil effaré, vient au milieu du dîner lui dire à l’oreille:

 

- Monsieur ! monsieur ! voilà les fromages de Neufchâtel qui arrivent !

 

- Ah ! tant mieux ! j’aurai le plaisir d’en offrir à mes chers collègues ; faites-en servir six sur la table.

 

- Comment ! monsieur, six !

 

- Oui… six ou huit sur une assiette ; les autres, vous les mettrez dans l’armoire de l’office.

 

- Monsieur plaisante ; cela est impossible.

 

- Et pourquoi, s’il vous plaît ?

 

- Monsieur, c’est qu’un seul fromage, grand comme une meule de moulin, ne peut tenir dans une assiette, et qu’on ne saurait mettre dans une armoire les cinq grandes charrettes qui sont dans la cour de l’hôtel.

 

- Qu’est-ce à dire ? cinq charrettes !

 

- Voyez plutôt, monsieur, reprend le maître d’hôtel en lui donnant la lettre de voiture, qui monte à une somme considérable.

 

Saint-Edme demeura stupéfait.

 

Ceci vous prouve qu’il y a deux villes de Neufchâtel, l’une en Suisse et l’autre en Normandie, où l’ont fait également des fromages ; ceux qu’avait reçus le malheureux conseiller étaient du premier pays.

 

Comme vous en vous en douter pour le Neufchâtel suisse il s’agissait de Gruyère.

 

Rappel de la bataille dite du Gruyère

 

Pour le profane retrouver ses petits dans le dédale international des AOC. Ainsi, dans la bataille dite du Gruyère le gruyère suisse a remporté en 2010 une victoire importante contre son homonyme français en obtenant l'exclusivité de l'appellation d'origine contrôlée (AOC).

 

Les hostilités ont été déclenchées par la France qui a voulu, en 2007, faire reconnaître l'AOC accordée à son gruyère au niveau européen. Retoquée la demande Bruxelles a jugé trop léger le dossier français et a recommandé à la France de se contenter de l'indication géographique protégée (IGP). Pour autant, rien ne change vraiment puisqu’il existe depuis les années 1930 un accord entre la France et la Suisse accordant le droit aux deux pays d'utiliser le même nom pour les deux fromages très différents.

 

« Le gruyère et l'emmental ont en commun d'être des fromages à pâte pressée cuite fabriqués en France et en Suisse. Pour le reste, les deux fromages n'ont pas grand-chose à voir l'un avec l'autre.

 

La meule d'emmental française pèse entre 80 et 100 kilos et a de gros trous, alors que ceux du gruyère français sont petits et que le suisse n'a pas de trous.

 

Les noms des deux fromages ont une origine suisse : Emmental vient du nom de la rivière Emme, qui coule dans le canton de Berne, et du mot "tal" (vallée, en allemand). Gruyère est le nom d'une bourgade du canton de Fribourg, dans l'ouest du pays.

 

Le gruyère, dont la recette comprend 20 pages, est un fromage au lait cru provenant de deux traites (matin et soir), tandis que l'emmental est surtout fabriqué avec du lait chauffé à 60-65 degrés. Mais les deux sont concurrentiels car faisant appel à une fabrication artisanale. Plus de 60 % de la production d'emmental en France est consommé sous forme râpée.

 

En Suisse, où il est fabriqué partout, l'emmental bénéficie d'une appellation d'origine contrôlée (AOC). En revanche, il n'a pas d'AOP (appellation d'origine protégée, l'équivalent de l'AOC mais au niveau européen). »

 

Comme le hasard est mon plus fidèle allié, voilà déjà plusieurs jours que je souhaitais vous faire le coup des petits trous dans le gruyère, vous y aurez droit cette semaine.

 

 

Le Neufchâtel est un fromage au lait de vache, essentiellement cru, à pâte molle et à croûte fleurie d’un duvet blanc. Sa teneur en matière grasse est de 45 %. Généralement vendu sous forme de cœur de 200 g, il se décline aussi sous d’autres aspects : carré, briquette et bonde, pesant 100 g ; double-bonde (200 g) ; et gros cœur (600 g). D’origine fermière, le Neufchâtel est présenté nu sur paillon ou emballé tandis qu’il est conditionné dans une boîte ou du papier lorsqu’il s’agit d’un fromage laitier.

 

Né au coeur des bocages du Pays de Bray, cette pâte molle lactique, au lait de vache et à croûte fleurie est un fromage très ancien (1050 ou 1543), sans doute le plus ancien des fromages normands, même si rien ne l'atteste. La légende veut qu’au court de la guerre de Cent Ans, pour les fêtes de fin d'année, les jeunes filles offraient aux soldats anglais des fromages en forme de cœur pour témoigner de leur amour. Les religieux préféraient y voir les ailes d'un ange.

 

Il en est déjà fait mention dans des écrits datant de 1035 ! Les paysans brayons perpétuèrent la tradition des « bondons » et des « angelots » notamment (autre appellation des cœurs) tout au long de ce millénaire. Lait crémeux et caves exceptionnelles où fleurissait naturellement une souche particulière de moisissures, un Pénicillium qui donne sa couverture veloutée au fromage et contribue à son goût spécifique.

 

Les Anglais qui aimaient traverser souvent la mer apprirent à apprécier ce fromage de Normandie au cours de leurs nombreuses incursions guerrières, qui les opposèrent aux Normands durant le Moyen-Age.

 

Vers 1543-1544, pour la première fois, le fromage de Neufchâtel est cité nommément, dans les comptes de l'abbaye de Saint-Amand, à Rouen. Sous Louis XIV, l'assèchement de nombreux marécages de la région permet une forte augmentation du nombre de bovins. Ceci, associé à l'introduction de la race normande, donne à la production laitière et par là même, fromagère un essor important. Dès cette époque, il est présent sur les marchés parisiens.

 

Au XVIIe siècle, il était expédié à Paris et Rouen, et exporté en Grande-Bretagne. Au XVIIIe siècle, l'abbé de Marolles le classe en bonne position dans sa liste des fromages de France les plus célèbres.

 

Le XIXe siècle représente l’âge d’or du Neufchâtel, notamment grâce à l’essor des moyens de communication. Guillaumin, Husson, Morrière témoignent de sa notoriété dans leurs écrits en évoquant ses différentes formes et en vantant ses qualités de conservation. Vers 1870, la production s'intensifie. Un fermier, Isidore Lefebvre, qui n'arrivait pas à satisfaire la demande, eu l'idée de collecter les pâtes prêtes à être moulées et de les affiner dans les caves de sa fromagerie de Nesle-Hodeng.

 

En 1877, 3 millions de bondons de Neufchâtel sont vendus ! Napoléon III reçoit même un panier de fromages normands dans lequel le Neufchâtel figurait en très bonne place, il se retrouve aussi sur les marchés parisiens et gagne doucement l’Angleterre. Parmi ses distributeurs figurèrent ensuite les grands magasins Harrods de Londres.

 

Après la seconde guerre mondiale, le Neufchâtel perd sa renommée, la production fermière est délaissée au profit de la production industrielle, qui fabrique des fromages similaires

 

À la suite de ces herbagers-collecteurs-affineurs apparaissent, au début du XXème siècle, des collecteurs-affineurs, telle la fromagerie Lhernault qui fabrique encore aujourd'hui à Neufchâtel. Le savoir-faire des fermiers ne s'est pas perdu pour autant. Ils sont encore plusieurs dizaines à transformer eux-mêmes leur lait. Après la seconde guerre mondiale, le Neufchâtel perd sa renommée, la production fermière est délaissée au profit de la production industrielle, qui fabrique des fromages similaires. Nombre d'éleveurs laitiers ont en effet préféré livrer leur lait aux laiteries (Gervais, Coopérative Beurrière d'Aumale, Picault).

 

En 1949 un label de qualité fut accordé au fromage mais il fut annulé en 1953. Afin de protéger la spécificité du neufchâtel, le comice agricole de l'arrondissement de Neufchâtel créa en 1957 le syndicat de défense du label de qualité du fromage de Neufchâtel. Ce syndicat obtint l'Appellation d'Origine Contrôlée par le décret du 3 mai 1969, ébauche de celui du 11 janvier 1977, modifié ensuite par celui du 29 décembre 1986, protégeant ainsi le neufchâtel de toute imitation.

 

 

Fabrication

 

Le lait aussitôt trait est déposé dans des bassines normandes aux alentours de 20 degrés Celsius. L'emprésurage est immédiat. On ajoute parfois aussi quelques ferments lactiques.

 

La phase de caillage dure de 24 à 36 heures.

 

On égoutte ensuite le caillé dans des sacs de toile suspendus qui laissent s'évacuer le lactosérum pendant environ 12 heures.

 

On met ensuite sous presse les mêmes sacs pendant aussi une douzaine d'heures.

 

La "pâte" obtenue est malaxée et ensemencée au penicillium candidum (Soit par ensemencement de spores, soit par émiettement d'un ancien fromage).

 

La pâte est pressée dans la gaulle (le moule).

 

Mise au repos sur des claies.

 

Salage manuel.

 

Affinage dans une cave de 12 à 14 degrés Celsius (95% d'hygrométrie), pendant une dizaine de jour.

 

Ils peuvent être alors consommés "jeunes" ou on peut poursuivre l'affinage pour obtenir un produit plus typique.

 

Cahier des charges

 

- L’essentiel de l’alimentation du cheptel bovin provient de la zone AOC. La ration d’ensilage (maïs et herbe) est de 50 % maximum.

- Les vaches doivent pâturer au moins 6 mois par an.

- La durée minimum d’affinage est fixée à 12 jours et ne doit pas excéder 3 mois.

- Le lait est cru dans 90 % des cas. Il est pasteurisé en cas d’exportation.

- Le lait provient de vache de race essentiellement Normande.

- Le lait est conservé à 4°C et doit être transformé dans les 48 h maximum suivant sa traite et dans les 12 h maximum pour la production fermière.

- Zones de production : une trentaine de kilomètres autour de Neufchâtel-en-Bray, soit 135 communes.

 

1 014 tonnes en 2003

1 660 tonnes en 2014 dont 490 fermières

- 6 fabricants (industriels et coopératifs)

- 23 producteurs fermiers

 

Accueil à la ferme : Produits laitiers : Fromage neufchâtel 

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