Jean-Claude Pinson, poète et essayiste, dit être « né dans un pays de Cocagne. Ou quasi : à l’orée… »
C’est Gracq qui l’écrit dans Les formes d’une ville.
Les « rivages de Saint-Sébastien… lisières d’un pays de Cocagne ».
« Avant-poste des campagnes vendéennes implanté au bord de la Loire »
« Un jour que des gabarres défilaient sur la Loire. J'ai voulu les conserver sur une toile. Au loin le pont de la Vendée à Saint Sébastien. Sur la droite les roselières. Nous tournons le dos à Nantes, toute proche. » http://yvette-richard-lequeau.over-blog.com/article-32838582.html
« Village solaire » où la Loire scintille sous « une lumière de vacances »
Déjà s’y annonce cette « joie de vivre » qui habite « les territoires vineux qui s’entre-gardent » à l’horizon. »
Nous allions souvent nous mesurer au basket aux équipes de cet avant-poste du Nord de la Vendée, au-dessus du Lac de Grandlieu cher à Gaston Chaissac qui, lorsqu’il habitait à Boulogne-en-Vendée, écrivait qu’il vivait « au bord de la Boulogne qui est la Volga du lac de Grandlieu... » mais je ne suis jamais allé jouer à Saint-Sébastien-sur-Loire ; de Saint-Sébastien je ne garde que le souvenir du grand tableau chromo, accroché au-dessus du confessionnal de l’église de la paroisse Saint-Jacques le Majeur, là où je venais avouer et expier mes péchés véniels et parfois mortels, sur lequel le saint criblé de flèches, me faisait grand peine à voir.
Donc Jean-Claude Pinson est né et a grandi « entre Loire et vignoble »
Sa maison familiale, « à mi-chemin de la ferme et de la datcha de banlieue, villa en quasi pays de Cocagne » était pourvu « d’un grand jardin et d’annexes diverses (cave, poulailler, atelier, remises et appentis…) »
« La table abondait en produits variés du jardin, asperges et abricots, poissons pêchés en Loire… » et « offrait midi et soir, pour les jours ordinaires comme les jours de fête, ses propres vins, ceux que mon grand-père paternel tirait des quelques arpents de vigne qu’il cultivait dans les environs immédiats. »
J’y vois un cousinage évident avec la table du Bourg-Pailler, sauf que nous mangions du poisson de mer et que la piquette du pépé Louis, ancêtre des vins nus, régalait les hommes les jours ordinaires alors que pour les jours de fête on se tournait vers les vins bouchés venus d’ailleurs.
Mais, l’objet de cette chronique, c’est de reconnaître la « joie de vivre » de mes ancêtres vendéens du bord de mer.
« En 1793, aux portes de Nantes qu’ils assiègent, les Paydraits de Charette font la fête et « scandalisent, écrit Gracq, les dévots angevins des Mauges par leur paillardise, leur goût de la danse et de la ribote. »
« C’est qu’il y a Vendée et Vendée. Tandis que dévote, austère, est la haute Vendée, la Vendée intérieure, nettement plus riante est la Vendée maritime. Ouverte aux vents du large, elle aime faire la noce. Dans l’armée de Charrette, on « dansait toutes les nuits », note de son côté Michelet, et « le combat, le bal, la messe et l’égorgement, tout allait ensemble ». Dionysos, plus que Mars ou Jésus, est le roi de ce « carnaval » maraîchin. Et l’on peut présumer que le vin de chaudière* coule à flots, tandis que circulent les fioles de tord-boyaux. »
Le grand-père paternel de Jean-Claude, Louis Pinson, natif de la Garnache, où Charrette avait son manoir, était « un maraîchin noiraud au pied leste, ne crachant ni sur le vin, ni sur la fête, ne craignant pas le feu… » qui « aurait très probablement, un siècle et demi plutôt, fait partie de ces « moutons noirs » du général vendéen qui étaient aux dires de Michelet, de « joyeux danseurs » autant que d’enragés « bravi ».
Moi aussi je suis un noiraud, avec du sang Maure des frères de la Côte dans les veines, un vrai mauricaut qui en a ras-le-bol de se voir assimilé aux culs pincés de la haute-Vendée, celle des grenouilles de bénitier chères à Philippe de Villiers.
Que ça fait du bien de casser les idées reçues !
De faire un bras d’honneur aux faux-dévots, les Lubot and Co…
Source : De l’autre côté du vin