De l’intérêt d’envelopper ta vaisselle stockée dans des cartons au fond de ta cave avec des feuilles de journal : dans le cas présent Le Monde. En effet, lorsqu’un jour il te prend d’aller y jeter un coup d’œil pour voir si cette vaisselle ne te serait pas d’une quelconque utilité tu te retrouves nez à nez avec l’actualité d’il y a 10 années.
C’est le rouge du dessin qui a attiré mon œil de lynx à lunettes puis le titre barrant toute la page « Bordeaux qui rit, Bordeaux qui pleure ». Vous avez bien lu, ne vous frottez pas les yeux : toute une page consacrée au vin dans un grand journal généraliste.
L’œuvre du sieur Jean-Claude Ribaut.
À propos de Pierre Lurton, nommé le 18 mai 2004 par Bernard Arnault en remplacement d’Alexandre de Lur-Saluces à la tête d’Yquem, qui assurait « Je resterai le jardinier du temple… je ne veux pas changer la signature d’Yquem… » il notait « Ici au moins, le regretté Raymond Dumay a été entendu : « Le vin est d’abord fierté. Seul grand produit inutile de la planète, il ne peut survivre qu’adosser à son orgueil. »
Retour au mercanti : « La campagne des primeurs 2003 s’est achevée dans la frénésie. La vente en primer, à Bordeaux ne concerne que cinq-cents vignobles environ, qui représentent 5% de la production en volume. Les prix de certains châteaux, parmi les plus prestigieux, se sont envolés, tandis que la hausse est de 30% pour un cinquième des vins présentés.
« Dans le même temps, deux-mille vignerons manifestaient, lundi 5 juillet, place des Quinconces, à Bordeaux, contre l’effondrement des cours du tonneau (900 litres) des vins en vrac. La bouteille de Château Cheval Blanc 2003 trouve preneur – en primeur – au prix record de 220€ la bouteille tandis que le tonneau de vin générique en vrac est payé seulement 1,10€ le litre par le négoce. Deux cents fois moins ! »
Jean-Claude Ribaut parle de 500 vignobles pour ceux du haut et de 2000 vignerons pour ceux du bas, c’est tout à fait Bordeaux.
Critique aussi le Jean-Claude :
« Chez beaucoup le manque d’acidité et les premières difficultés de l’élevage ont conseillé la prudence. Les meilleurs vignerons se refusent aux méthodes d’acidification. Le Château Le Pin, minuscule vignoble à Pomerol, ancêtre des « vins de garage » et dont les prix sont toujours élevés, ne produira aucune cuvée en 2003, estimant que les raisins avaient été malmenés par la chaleur estivale. »
Et puis une petite bisbille anglo-américaine qui ne manque pas de sel au vue de la nouvelle gloire de classé A du Château Pavie et de son propriétaire depuis 1997 Gérard Perse :
« Parker ayant, comme à l’habitude, bien noté le millésime 2003. Jancis Robinson (critique anglaise) n’a accordé qu’un médiocre 12/20 à ce vin « ridicule, plus proche d’un zinfandel [cépage américain] de vendanges tardives que d’un bordeaux. »
« Les vins de Gérard Perse, conseillé par l’œnologue Michel Rolland, sont à la pointe de cette évolution (ndlr. extraction-boisé). La main du vinificateur a-t-elle été un peu lourde, au point de dominer et déprécier l’expression du terroir ? »
Bonne question Jean-Claude, je n’ai pas la réponse mais ce que je sais c’est que la main des classificateurs des 1er GC de Saint-Émilion, elle, l’a été.
Mais Jean-Claude Ribaut, en fine gueule qu’il est, n’avait manqué de faire une halte à l’Hostellerie de Plaisance au cœur de Saint-Émilion, à deux pas de l’Envers du Décor de mon ami François des Ligneris.