Pendant que votre serviteur s’exhibait fièrement sur la Toile, en son plus simple appareil, non pas sur une lointaine plage de sable chaud, mais pour soutenir le Beaujolais Nouveau d’Alonso, notre Eva de retour des lointaines et glaciales terres jurassiennes, hissait gaillardement l’étendard rouge de la révolte. Qu’est-ce-à-dire ? He bien elle va tout de suite vous le dire et moi, une fois n’est pas coutume, comme j’essuie les verres au fond du café, je reviendrai juste après pour placer un petit couplet.
Le Beaujolais nouveau va bientôt remplir les rayons des cavistes et forcément ceux des supermarchés. Les affiches des hard-discounteurs vantant l'arrivée du Beaujolais Nouveau tapissent les couloirs du métro. Angoisse à la vue du prix de la bouteille, dérisoire. Honteux. Même une bouteille de détartrant coûte plus cher.
Et après, on entend toujours le même refrain à propos du Beaujolais Nouveau : « C'est dégueulasse, immonde. » « J'aime pas la banane. » « Pas envie d'être malade moi ! » « Non, c'est possible, y'a pas de bons Beaujolais Nouveau. » « Mais bon, ce n’est pas cher quoi. » Comment peut-on changer la mauvaise réputation d'un vin en continuant à proposer aux gens de telles merdes, à un prix aussi bas ? Quel vigneron peut proposer un vin de qualité à 3 € ?
Il y en a pourtant qui font de belles choses en Beaujolais Nouveau, il vous suffit simplement de pousser la porte d'un vrai caviste pour les découvrir. Pas d'un Nicolas, un vrai caviste. Il aura forcément un bon Beaujolais nouveau à vous faire découvrir, et même, au-delà du Beaujolais seul, des vins nouveaux qui tiennent la route. Et même l'autoroute.
Retour un an en arrière link. Dégustation de vins nouveaux aux caves Augé, avec notamment le Beaujolais Nouveau de Jean Foillard, l'Olto de Nicolas Carmarans. Et là, une bouteille m'interpelle : Octobre, vin nouveau du domaine des Foulards Rouges. Octobre, inscrit sur une étiquette rouge.
Bordel, c'est trop bon !
C'est bon, mais bon !
C’est comme ça, on ne cherche rien du tout, juste on boit et on aime ça !
C'est un vin vraiment trop bon, en ce troisième jeudi de novembre un peu frileux. Coup de cœur absolu ! La bouteille est vite avalée. C'est un très bon et très torchablement gourmand vin nouveau.
Chapeau bas les Foulards Rouges !
1 mois plus tard, je le regoûte.
2 mois plus tard, je le regoûte.
3 mois plus tard, je le regoûte.
5 mois plus tard, je le regoûte.
Et là, après, bon, y'en a plus.
Mais toutes les fois où je l'ai regoûté ce vin nouveau, il avait conservé sa fraîcheur, son fruit, sa matière, sa gourmandise. Il a bien évolué et le problème, c'est qu'au bout d'un moment, y'en a plus.
Ce vin nouveau a donc très bien vieilli. Pourquoi ne pas essayer de votre côté ?
Votre Taulier vieux briscard du terroir se doit d’éclairer votre lanterne sur le mystère des dates d’arrivée des vins de la nouvelle récolte sur le marché. Pourquoi le Beaujolais Nouveau c’est toujours le troisième jeudi de novembre alors que chouchou de notre belle Eva affiche en rouge Octobre Rouge ?
Tout bêtement parce qu’en France on n’aime pas mélanger les torchons et les serviettes et que la règle est :
- Pour les ex Vins de Pays c’est le 3ème jeudi du mois d’Octobre qui marque la sortie des Vins Primeurs.
- Pour les AOC, c’est le 3ème jeudi du mois de Novembre qui marque la sortie du Bojolo Nouvo mais aussi des autres qualifiés eux tels le Gaillac ou le Touraine de Primeurs…
Comprenne qui pourra, sauf qu’à sa grande époque le Bojolo Nouvo régnait en maître et l’était pas partageux.
Donc, l’OCTOBRE ROUGE de notre EVA est un Primeur 100 % SYRAH des Albèreslink Pour les nuls en géo, c’est dans les PO, le Roussillon quoi et le Domaine des FOULARDS ROUGES est celui de l’emblématique Jean-François Nicq qui fut à partir de 1989 le rénovateur de la coopérative d'Estézargues dans le Gard. « Celui qui a introduit la mise en bouteille à la cave et le passage progressif à l'agriculture bio. Ce garçon, plus proche d'Octobre rouge que du bleu horizon et plus enclin à lire Frédéric Fajardie qu'Eric Zemmour, était profondément imprégné de l'esprit coopé. Dans un premier temps, il a convaincu les coopérateurs de conditionner le vin à la cave et de réduire la vente en vrac tout en commençant une sélection parcellaire permettant de vinifier séparément des cuvées propres à chaque domaine et de mieux refléter l'identité de chacun. Ceux de Pierredon, Perillière et Andezon furent les premiers à se lancer. Sous son impulsion, les vignerons d'Estézargues sont d'abord passés à l'agriculture raisonnée en diminuant engrais et autres pesticides et en signant la charte Terra vitis, qui engage pour une viticulture durable, la défense de la biodiversité et la transparence des interventions et des pratiques. 1997 sera une année clé qui marque la suppression du soufre à la vigne, à la vinification et à la conservation. On se rapproche du vin nature même si l'on vendange mécaniquement. La cave commercialise désormais ses vins en direct et développe un important secteur à l'exportation.
Fin 2001, Jean-François Nicq s'en est allé vivre sa vie à l'extrême sud du Roussillon où il a fondé le Domaine des Foulards rouges… » JP Gené Vins d'honneur M le magazine du Monde | 24.08.2012