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19 décembre 2018 3 19 /12 /décembre /2018 06:00
Et plus dure sera la chute : les ventes des foires au vin d’automne dégringolent, Bordeaux en tête…

Le titre de Vitisphère du mardi 18 décembre 2018 est un peu trompeur : Dégringolade des ventes en GD sur la période des foires au vin.

 

En effet, en volume, si « Globalement, les ventes de vins d'appellations en GD françaises entre le 20 août et le 15 octobre passent de 849 000 hl en 2017, à 757 000 hl cette année, soit l'équivalent de 12,2 millions de bouteilles de moins vendues sur la période.

 

Le gros de cette baisse est à mettre sur le compte du vignoble de Bordeaux, qui représente traditionnellement le gros de l'activité. 215 000 hl, soit 28,6 millions de cols, ont été écoulés en 2018, contre 265 000 hl (35,35 millions cols) en 2017, soit une perte de 50 350 hl (6,7 millions de bouteilles) et -19%. »

 

En revanche, en valeur, les baisses sont moindres ou proches de zéro. Globalement, elles ont généré une activité de 569 millions d'euros, contre 612 millions, soit 42,7 millions d'euros de moins. (*Sorties de caisses hyper et supermarchés français hors HD et supérettes enregistrées du 20 août à mi-octobre 2018)

 

La suite ICI 

 

En cliquant vous pourrez visionner deux infographies très parlantes.

 

  • Evolution des ventes volume et valeur- sur 3 campagnes (période 20 août-15 octobre), par vignoble, volume et valeur.

 

  • Evolution des volumes par vignoble et par couleur sur 3 campagnes

 

Les chutes les plus spectaculaires sont celles de Bordeaux et de la Provence, en volume et en valeur.

 

Est-ce une tendance lourde ?

 

Il est trop tôt pour le conclure, mais une analyse plus fine, que ne manqueront pas de faire les acheteurs de la GD, devrait amplifier la recherche de valeur à la fois lors des foires aux vins mais aussi dans les rayons du jour le jour. Le rapport : encombrement/rotation du produit m’a toujours surpris, pourquoi accorder autant de place au vin surtout dans des surfaces qui rabougrissent dans les villes où la GD joue le commerce de proximité.

 

Affaire à suivre, surtout du côté de Bordeaux mais aussi de la Provence rose…

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18 décembre 2018 2 18 /12 /décembre /2018 07:40
La GD pille les océans 86 % des poissons présents sur ses étals sont pêchés selon des méthodes non durables ou dans des stocks surexploités. Intermarché décroche la palme, talonné par Système U et Leclerc qui totalisent respectivement 76 % et 67 % d’étiquetage non conformes !

Né à la Mothe-Achard proche de deux ports de pêche importants : les Sables d’Olonne (la Chaume) et Saint-Gilles-Croix-de-Vie, j’ai bénéficié d’une alimentation très riche en poissons de petit bateau, bien plus que d’une alimentation carnée. Dans le bourg, sur la place des Halles y’avait la poissonnerie Mousseau, bien achalandée en poissons de toute première fraîcheur puisque les Mousseau s’approvisionnait à la criée auprès de mareyeurs ; y’avait aussi au-dessus de chez moi une poissonnière, je crois qu’elle se prénommait Eglantine Tesson, qui poussait sa charrette où les poissons gisaient sur de la fougère, je me souviens de ses appels à la sardine fraîche en milieu d’après-midi et de ses pochetaux pas toujours de la première fraîcheur.

 

Sur internet je vois que les Mousseau ont été remplacé par les Gauducheau filles toujours sur la place des Halles mais je suis persuadé que la poissonnerie la plus fréquentée est celle du système U du Pavillon. Et bien sûr tout le monde fait ses courses en bagnole.

 

Ha, les parkings de la GD qui, avec les ronds-points, sont les lieux favoris des gilets jaunes !

 

Je me dis que nous avons perdu la boule, plus grand monde se pose les vrais questions : silence on pousse le caddie !

 

L’avenir de la planète « on s’en branle ! »

 

L’important c’est de dépenser le moins possible pour bouffer.

 

Crime de lèse-pauvreté me rétorquera-t-on ?

 

Ma réponse est non, les arpenteurs de rayons de la GD ne sont pas des pauvres, ce sont des gens comme dit Mélenchon, des gens qui vivent pas très bien, lire ci-dessous une approche très argumentée : la France médiane pris en étau

 

 

Revenons à nos poissons :

 

L’UFC-Que Choisir a mené l’enquête auprès de 1134 poissonneries de grandes surfaces, s’agissant de trois poissons de consommation courante menacés par la surpêche (le cabillaud, la sole et le bar) avec un double objectif : vérifier le respect des mentions obligatoires sur les méthodes de pêche et les zones de capture ; analyser les résultats sur la durabilité des ressources exploitées, tant en termes de méthodes de pêche que de zones de captures. Le résultat est malheureusement tristement sans appel : la grande distribution n’a aucune politique d’approvisionnement durable pour les trois espèces étudiées.

 

Des étiquetages manquants, fantaisistes ou trop vagues pour 2 poissons sur 3

 

 

 

Dans deux tiers des cas, les mentions obligatoires sont absentes, fantaisistes ou trop vagues. Avec plus de trois poissons sur quatre mal étiquetés, Intermarché décroche la palme, talonné par Système U et Leclerc qui totalisent respectivement 76 % et 67 % d’étiquetage non conformes !

 

S’agissant des zones de capture, on relève des mentions particulièrement vagues du type « Atlantique » ou « Méditerranée ». Or, en l’absence de zone maritime précise, on ne peut pas identifier les poissons provenant de stocks surexploités.

 

Quant à l’information sur les méthodes de pêches, elle est absente pour un poisson sur quatre ! Alors que les consommateurs sont conscients des dégâts occasionnés par certains engins de pêche comme les chaluts de fonds, il est inadmissible qu’en étant privés de cette information, ils puissent acheter à leur insu des poissons pêchés de manière dévastatrice pour l’environnement.

 

86 % de poissons non-durables au rayon poissonnerie !

 

Seuls les poissons pêchés avec des méthodes respectueuses de la ressource et dans des zones où les stocks sont abondants peuvent être considérés comme durables. Mais en croisant les données sur les méthodes de pêche avec les zones de capture, il apparaît qu’au rayon poissonnerie de la grande distribution, 86 % des poissons examinés sont « non-durables » !

 

Le cabillaud est le poisson qui affiche le pire résultat (88 % de poissons non durables), suivi par la sole et le bar (respectivement 86 % et 80 % de poissons non durables).

 

 

Les méthodes de pêche, très majoritairement non durables, expliquent en partie ces résultats. Le chalut, de loin la méthode de pêche la plus utilisée, est ainsi relevé pour les trois quarts des cabillauds et pour plus de la moitié des soles et des bars. A l’inverse, les méthodes de pêche les plus respectueuses telles que les lignes et les hameçons, ne sont relevées quant à elles que pour un quart des bars et 14 % du cabillaud.

 

Aucune des grandes enseignes ne propose une pêche durable !

 

L’analyse de la durabilité pour les sept grandes enseignes étudiées réserve une surprise : les taux très élevés de poisson non durables sont à peu près identiques chez tous les distributeurs. Système U, l’enseigne la plus mal notée, propose 89 % de poissons non durables, alors que Cora qui est le moins mal classé, en propose 81 %, soit une proportion à peine moins élevée. Ces chiffres démontrent qu’aucune enseigne n’a mis en place une politique d’approvisionnement durable pour les trois poissons étudiés.

 

 

Enquête sur la durabilité des méthodes et des zones de pêche pour le cabillaud, la sole et le bar cliquer sur le lien ICI et aller en bas de la page

 

 

Pêche durable Manger des poissons en bonne conscience

Publié le : 17/12/2018

 

Acheter un poisson issu d’une pêche durable ? Ce n’est pas évident. D’après une enquête menée en grandes surfaces par l’UFC-Que Choisir pour trois espèces (cabillaud, sole, bar/loup), les étiquettes sur la méthode et la zone de pêche ne sont pas pas conformes dans deux tiers des cas : pas lisibles, mentions absentes... De plus, 86 % des poissons sur les étals sont pêchés selon des méthodes non durables ou dans des stocks surexploités. Mais comment, alors, identifier les espèces de poissons à manger en toute bonne conscience ?

 

ICI 

 

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16 décembre 2018 7 16 /12 /décembre /2018 07:00
Au temps des cépages nazis le Zweigelt en Autriche, le « Dr. Wagnerrebe» dans le IIIe Reich l’ancienne «Cuvée des Dames hospitalières» 51 ares 10 centiares au lieudit les Teurons à Beaune devient «Clos du maréchal Pétain».

Commençons dans l’ordre historique :

 

  • Un cépage appelé «Dr. Wagnerrebe» sous le Troisième Reich en hommage à un dirigeant agricole nazi fut débaptisé après la Seconde Guerre mondiale. Renommé «Scheurebe» en Allemagne, d'après le nom de son inventeur, il est aujourd'hui encore produit et commercialisé en Autriche sous le nom de «Sämling 88» (Semis 88). Mais cette appellation, qui se réfère au numéro du croisement qui a produit le cépage, est sujette à controverse, le chiffre 88 étant un code employé dans les milieux néonazis pour signifier «Heil Hitler».

 

  • En Autriche le cépage «Zweigelt», créé à partir d'un croisement entre le SaintLaurent et le Blaufränkisch, qui porte le nom de son créateur, le botaniste autrichien Fritz Zweigelt (1888-1964), un nazi membre de la première heure du parti NSDAP et un antisémite convaincu, crée une certaine polémique. Au point qu'une campagne est lancée pour le rebaptiser.

 

Le cépage «Zweigelt» est très populaire en Autriche. (photo: DPA/Sebastian Willnow)

 

C’est le vin star des tables locales, ce cépage produit le vin rouge le plus consommé en Autriche.

 

 

L'organisme Österreich Wein Marketing, chargé de la promotion du vin autrichien, s'est dit ouvert à la discussion, tout en soulignant que le dossier devait être davantage étayé. Un point de vue partagé par l'historien Robert Streibel, qui a toutefois estimé «qu'une fois que tout sera prouvé et inattaquable, il sera difficile de cautionner le nom Zweigelt».

 

  • Dans l’État françaisla terre ne mentait pas les notables bourguignons, le maire  de Beaune Roger Duchet en tête s’illustrèrent en mai 1942 où le préfet du département de la Côted’Or demanda officiellement qu’une des vignes des Hospices de Beaune soit vendue au département, avant d’en faire don au maréchal Pétain. La municipalité de Beaune et les notables de la région répondirent avec une allégeance totale aux sollicitations préfectorales. Le maréchal ayant accepté ce cadeau, qui s’inscrit dans la très longue liste des cadeaux qui lui sont faits quotidiennement, une délégation officielle se rendit à Vichy pour lui remettre son titre de propriété. Le maréchal devient ainsi propriétaire d’un clos qui fait partie de la « Cuvée des Dames Hospitalières », un des fleurons du vignoble bourguignon. Un an plus tard, une cérémonie a lieu à l’occasion du bornage du clos. La Libération venue, le clos perd son bornage, ses grilles et son nom, et la mémoire locale s’empresse d’oublier l’événement tandis que les notables se rallient avec empressement au régime républicain restauré. »

 

 

Dans « La terre ne ment pas » : le terroir viticole à l’épreuve de la Révolution nationale de Vichy

La matérialité d’un discours : l’épisode des Clos du maréchal Pétain

Jean Vigreux écrit :

 

Professeur d’histoire contemporaine à l’université de Bourgogne, auteur d’une thèse de doctorat d’État consacrée au dirigeant communiste Waldeck Rochet (Waldeck Rochet, une biographie politique, La Dispute, 2000, avec un préface de Serge Berstein qui fut son directeur de thèse), et d’un récent « Que sais-je ? » sur le Front populaire (N°3932), spécialiste de l’histoire du communisme rural en France et de l’histoire de la Résistance (il est directeur du Musée de la Résistance en Morvan), Jean Vigreux publie aux PUF la version remaniée et augmentée d’un ouvrage publié en 2005 aux Éditions universitaires de Dijon, sous le titre La vigne du maréchal Pétain.

 

 

« En premier lieu, il faut évoquer le Clos du maréchal Pétain à Beaune. Plusieurs moments caractérisent cet épisode ; celui du don, puis celui de la cérémonie du bornage et enfin ceux des vendanges et de la mise en bouteille. Au printemps 1942, le département de Côte-d’Or, via le préfet régional, Charles Donati, demande aux Hospices de Beaune de lui céder une vigne de renommée afin de l’offrir au chef de l’État. La commission administrative des Hospices accepte cette initiative. Ce cadeau rejoint la longue liste des offrandes des provinces françaises au chef de l’État. C’est une portion de 51 ares et 10 centiares située au lieudit les Teurons à Beaune : l’ancienne « Cuvée des Dames hospitalières » devient « Clos du maréchal ». Une délégation des notables beaunois, conduite par le préfet régional Donati se rend à Vichy pour offrir ce cadeau au maréchal Pétain le 29 mai 1942. Roger Duchet, de retour à Beaune, s’empresse de raconter cette entrevue dans le journal local :

 

« Arrivés à l’Hôtel du Parc, nous avons été introduits près du maréchal par le Docteur Ménétrel, chef de son secrétariat particulier, et avons été présentés par M. le préfet régional Donati auquel revient l’heureuse idée d’offrir au Chef de l’État une vigne de Bourgogne. Le Maréchal s’est réjoui de posséder une parcelle du célèbre domaine des Hospices de Beaune. C’est avec intérêt qu’il a reçu de nos mains l’acte de vente, le plan de sa nouvelle propriété et l’originale clef de la vigne qui porte désormais le nom de Clos du Maréchal. […] Nous avons admiré l’étonnante vigueur physique du Maréchal. Il s’est entretenu avec nous d’une façon simple et familière qui nous a tous profondément touchés. C’est avec joie que nous lui avons présenté l’hommage de notre Bourgogne. Nous sommes heureux et fiers de posséder maintenant sur notre "Montagne" de Beaune le "Clos du Maréchal" » (Journal de Beaune, 3 juin 1942).

 

Les louanges de Duchet contrastent avec l’état général de l’opinion, mais soulignent les enjeux de la mystique pétainiste. L’acte notarial qui est établi par Me Nourrissat à Dijon, qui fait plusieurs voyages entre la Côte-d’Or et Vichy, invite aussi à mesurer l’emprise idéologique du régime sur une portion de terroir. D’ailleurs, pour que le don puisse se faire, un fonctionnaire de la Préfecture, travaillant pour les hypothèques, établit un document où l’identité du chef de l’État est déclinée avec cette mention lapidaire et quasi programmatique : « N’appartient pas à la race juive. N’a pas d’ascendance juive ». Le zèle poussé à son extrême offre alors un lieu inattendu de « contrôle d’origine ». (Vigreux 2016) On retrouve le même type de transcription dans l’acte remis à la conservation des hypothèques de Beaune, le 18 juin 1942 : « le maréchal Pétain est né à Cauchy-la-Tour (Pas-de-Calais), le 24 avril 1856, qu’il est de nationalité française et non israélite (…) ».

 

Ainsi commençait l’histoire du clos du maréchal Pétain. Un an après l’offrande, en 1943, la vigne, activité économique, sociale et culturelle de la Côte-d’Or sert de support au pouvoir politique, tant sur les imaginaires qu’elle mobilise et les registres variés qui l’entourent ; une mise en scène médiévale et religieuse au moment où la ville de Beaune commémore avec faste le 500e anniversaire de ses Hospices, une valorisation du travail de la terre. Tout le registre de l’idéologie traditionaliste et passéiste de Vichy peut alors être mobilisé dans cette petite sous-préfecture de la côte bourguignonne.

 

On prépare avec minutie et respect de la tradition le bornage sous la responsabilité du préfet régional assisté par un ingénieur géomètre à Dijon, Marcel Mourgeon. Véritable cheville ouvrière de la cérémonie, ce dernier est chargé de préparer le bornage dans le moindre détail. Premièrement, il investit le terrain à Beaune et prévoit l’emplacement précis des bornes. Il conçoit également les cartons d’invitation ; usant de ses talents artistiques et de calligraphe, il fait le dessin original mettant en scène le bornage dans un cadre médiéval. Les canons en sont simples : il s’agit de marier « le culte des insignes maréchalistes », comme la francisque et les attributs traditionnels d’un bornage viticole, tout en usant d’une rhétorique folkloriste. Il revient au centre rural de Corgoloin (ancien chantier de jeunesse) de tailler et de sculpter les bornes du Clos. Trois bornes ont été réalisées mesurant 1,20 mètre de hauteur sur 0,60 mètre de large, pour un poids d’une tonne chacune. Ces trois bornes s’inscrivent dans la symbolique du régime en portant la francisque et l’inscription « Ph. P. 1942 », une borne miniature a été également envoyée à Vichy…

 

Le 25 mai 1943, l’inauguration publique est organisée en présence des notables et des jeunes du centre de Corgoloin qui prennent place autour du clos et reçoivent une véritable leçon pétainiste. N’oublions pas également que le « Service Civique Rural » rassemble plus de cent mille jeunes âgés de dix-sept à vingt et un an qui participent activement aux travaux des moissons et des vendanges remplaçant en partie les centaines de milliers d’agriculteurs prisonniers en Allemagne.

 

Le préfet régional Charles Donati représente officiellement le régime de Vichy et le maréchal Pétain. Il est accueilli sur place par son chef de cabinet M. Beydou, le maire de Beaune Roger Duchet, le géomètre expert Marcel Mourgeon et le notaire dijonnais Me Émile Nourissat (membre du Conseil départemental depuis mars 1943), ces derniers assurant le caractère solennel de la cérémonie.

 

Le délégué régional à la jeunesse, M. Thiébaut, est le premier à prendre la parole. Il est fier et heureux de faire don de trois bornes au nom du centre de Corgoloin. Comme le rappelle Max Cappe, le journaliste poète du Progrès de la Côte-d’Or, journal collaborateur, M. Thiébaut « offre ce travail exécuté avec tant d’amour et de soin par des jeunes, comme un témoignage de leur fidélité à la personne du chef de l’État ».

 

L’ensemble des discours prononcés lors de la cérémonie du bornage, insiste sur l’agrarisme, le respect, le travail manuel et la hiérarchie. Il est aussi intéressant de voir que l’héritage de la délimitation du clos par un mur en pierres faisant référence à la « tradition » renoue avec la chaîne du temps comme le promeut l’idéologie du régime de Vichy. Au cours de son allocution, le préfet régional mentionne longuement le maréchal Pétain qui aurait été heureux d’être présent, évoquant son amour pour « la terre, la jeunesse, le respect, l’amour du travail bien fait »10. Le registre des valeurs de la Révolution nationale est à nouveau décliné.

 

© Joël Drogland écrit

ICI 

 

Jean Vigreux montre que les notables locaux ont joué un rôle important « dans l’entreprise de refoulement et d’oubli, voire d’occultation » qui a touché cet événement après la Libération. Comme le maire de Beaune, la plupart d’entre eux retrouvent très vite leur position dominante dans la vie locale après 1945, parfois après une courte période d’indignité nationale. Les Hospices de Beaune étant redevenus propriétaires du clos et ayant été dédommagés (ce qui conforte la thèse d’une spoliation par l’État français en 1942), ce sont les mêmes notables, accompagnés des négociants en vins de la place de Beaune, qui proposent d’offrir ce clos au général de Gaulle. « Si cette proposition n’a pas été suivie d’effet, elle invite à penser les ressorts du rapport à l’autorité, mais aussi de l’opportunisme permanent. »

 

La carrière politique de Roger Duchet est loin d’être finie ! Sénateur maire de Beaune, il réussit « un retournement remarquable » et crée en 1949 le Centre national des indépendants, devenu peu après le Centre national des indépendants et paysans, le parti d’Antoine Pinay. Roger Duchet est plusieurs fois ministre entre 1951 et 1956 et son parti devient l’une des forces les plus importantes de la droite française. En avril 1959 il reçoit le général de Gaulle dans sa bonne ville de Beaune. Les notables locaux sont toujours en place et le clos du maréchal totalement oublié.

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11 décembre 2018 2 11 /12 /décembre /2018 06:00
Un témoignage de Simone Weil et son dialogue avec Auguste DETŒUF sur la condition ouvrière en 1937 « Elle était persuadée de l'ignorance des « bourgeois intelligents » sur la réalité de la condition ouvrière »

En 1934, trois ans après son agrégation de philosophie, la normalienne Simone Weil prend un congé de l’Éducation Nationale pour travailler à l’usine. Cette démarche reflète sa volonté de s’échapper « d’un monde d’abstractions et de [se] trouver parmi des hommes réels», celle-là même qui la conduira peu après à s’engager auprès des anarchistes espagnols. Simone Weil était parvenue à la conviction qu'elle ne pouvait continuer à militer en faveur d'une révolution sociale sans avoir vécu la vie des ouvriers. Ne pouvant se satisfaire des solutions totalitaires de type soviétique que revendiquait la majorité syndicale, elle voulait connaître la réalité de la condition ouvrière.

 

De cette année comme ouvrière, il nous reste des lettres et un «journal d’usine», où la jeune femme consigne le détail de ses tâches ainsi que ses souffrances et humiliations quotidiennes.

 

Elle se fit recommander par Boris Souvarine à Auguste Detœuf (X 1902) qui accepta de l'embaucher à Alsthom. Elle avait postulé pour un emploi d'ouvrière, qu'elle exerça d'abord à Alsthom, puis dans d'autres entreprises et finalement chez Renault où elle travailla jusqu'aux grèves de 1936.

 

C’est donc dans l’une des usines de gros matériel de la Société Alsthom dont Auguste Detœuf fut l’initiateur et l’animateur que, d’accord avec lui, elle fit ses débuts dans la condition ouvrière. L’expérience les intéressait, lui, comme elle. N’avaient-ils pas en commun, comme il le lui écrit plus loin, une tendance naturelle « à enseigner aux hommes à se mesurer à leur juste valeur »

 

 

De santé fragile, Simone Weil souffre terriblement de la dureté des conditions de travail : températures extrêmes, flammes qui «lèchent les mains et les bras», blessures, cadences d’autant plus rapides que les ouvriers sont payés à la pièce – à certains postes, le rythme de production a doublé en quatre ans ! De plus, la « manœuvre sur la machine » a beaucoup de mal à réussir les tâches d’usinage qu’on lui confie, d’autant que les machines sont souvent mal réglées. Elle y met pourtant toute sa bonne volonté – on trouve dans son journal une «liste des bêtises commises à éviter dorénavant (relire cette liste 2 fois par jour)»…

 

En partageant le quotidien des ouvriers, la philosophe découvre aussi leur misère tragique, leur faim et leur désespoir. «Je ne vois pas comment ceux qui ne sont pas costauds peuvent éviter de tomber dans une forme quelconque de désespoir – soûlerie ou vagabondage, ou crime ou débauche, ou simplement, et bien plus souvent, abrutissement – (et la religion ?).» Plus loin, elle rapporte ces propos entendus chez les ouvrières qu’elle côtoie. «Vous avez des gosses ? – Non, heureusement. C’est-à-dire, j’en avais un, mais il est mort.» Et Simone Weil de commenter : «C’est beau les sentiments, mais la vie est trop dure…». Rappelons qu’en ces années trente, la crise économique a diminué les salaires et aggravé la précarité.

 

Cette immersion dans le monde ouvrier est aussi une expérience intime de l’inhumanité du taylorisme. Comme on le voit dans l’extrait, la jeune femme juge cette organisation du travail profondément contraire à toute dignité humaine. «(…) Le tragique de cette situation, c’est que le travail est trop machinal pour offrir matière à la pensée, et que néanmoins il interdit toute autre pensée. Penser, c’est aller moins vite (…).» Et, plus loin : «On est comme les chevaux qui se blessent eux-mêmes dès qu’ils tirent sur le mors – et on se courbe. On perd même conscience de cette situation, on la subit, c’est tout. Tout réveil de la pensée est alors douloureux». Le travail à la chaîne aboutit en même temps à l’abêtissement des ouvriers : «L’ouvrier ignore l’usage de chaque pièce. (…) Le rapport des causes et des effets dans le travail même n’est pas saisi».

 

Quel sens donnait-elle à cet engagement ?

 

Peu de temps après sa première embauche, elle écrit à Boris Souvarine : « Vous devez vous demander ce qui me permet de résister à la tentation de m'évader, puisque aucune nécessité ne me soumet à ces souffrances... C'est que même aux moments où véritablement je n'en peux plus, je n'éprouve à peu près pas de pareille tentation. Car ces souffrances, je ne les ressens pas comme miennes, je les ressens en tant que souffrances des ouvriers, et que moi personnellement, je les subisse ou non, cela m'apparaît comme un détail presque indifférent. Ainsi le désir de connaître et de comprendre n'a pas de peine à l'emporter. »

 

En 1937 elle fait une conférence devant un auditoire d'ouvriers pour leur expliquer qui est Taylor et comment il a conçu les systèmes d'organisation du travail auxquels ils sont soumis. « L'ouvrier ne souffre pas seulement de l'insuffisance de la paie. Il souffre parce qu'il est relégué par la société actuelle à un rang inférieur, parce qu'il est réduit à une espèce de servitude... C'est le véritable problème, le problème le plus grave qui se pose à la classe ouvrière : trouver une méthode d'organisation du travail qui soit acceptable pour la production, pour le travail et pour la consommation. »

 

Elle était persuadée de l'ignorance des « bourgeois intelligents » sur la réalité de la condition ouvrière, d'où ses contacts avec Auguste Detœuf auquel elle écrit : « Si mon projet doit se réaliser un jour - le projet de rentrer chez vous comme ouvrière, pour une durée indéterminée, afin de collaborer avec vous de cette place à des tentatives de réforme - il faudra qu'une pleine compréhension soit établie auparavant. » Elle lui recommande d'aller voir le film de Chaplin, Les temps modernes : « La machine à manger, voilà le plus beau et le plus vrai symbole de la situation des ouvriers dans l'usine. »

 

Auguste Detœuf entre dans le jeu et jusqu'à la guerre, il échange avec elle une correspondance régulière. Dans une lettre de 1937 où elle l'appelle « cher ami », elle critique sur un ton acerbe une conversation entendue dans le train entre deux patrons de PME qui s'insurgent contre la perspective d'un contrôle de l'embauche et de la débauche. Auguste Detœuf lui répond longuement en lui expliquant pourquoi ils pensent ainsi. « Ma chère amie, ajoute-t-il, s'il est relativement aisé de remplacer le dirigeant d'une grande entreprise par un fonctionnaire, le petit patron ne peut être remplacé que par un patron. Fonctionnarisée, son entreprise s'arrêterait très vite. », et il poursuit en soulignant la nécessité de législations qui soient compréhensibles pour les petits patrons. « Il faut accepter, conclut-il, qu'il y ait des hommes qui ne raisonnent pas toujours très juste, pour qu'au lieu de quelques chômeurs à peu près secourus, il n'y ait pas un peuple entier crevant de faim et exposé à toutes les aventures. »

 

Source ICI  

EXTRAIT

 

«Pour moi, personnellement, voici ce que ça a voulu dire, travailler en usine. Ça a voulu dire que toutes les raisons extérieures (je les avais crues intérieures, auparavant) sur lesquelles s’appuyaient pour moi le sentiment de ma dignité, le respect de moi-même ont été en deux ou trois semaines radicalement brisées sous le coup d’une contrainte brutale et quotidienne.

 

Et ne crois pas qu’il en soit résulté en moi des mouvements de révolte. Non, mais au contraire la chose au monde que j’attendais le moins de moi-même – la docilité.

 

Une docilité de bête de somme résignée. Il me semblait que j’étais née pour attendre, pour recevoir, pour exécuter des ordres – que je n’avais jamais fait que ça – que je ne ferais jamais que ça. Je ne suis pas fière d’avouer ça. C’est le genre de souffrances dont aucun ouvrier ne parle : ça fait trop mal même d’y penser. (…)

 

Il y a deux facteurs dans cet esclavage : la vitesse et  les ordres. La vitesse : pour “y arriver”, il faut répéter mouvement après mouvement une cadence qui, étant plus rapide que la pensée, interdit de laisser cours non seulement à la réflexion, mais même à la rêverie. Il faut, en se mettant devant sa machine, tuer son âme pour huit heures par jour, sa pensée, ses sentiments, tout. Est-on irrité, triste ou dégoûté, il faut ravaler, refouler tout au fond de soi, irritation, tristesse ou dégoût : ils ralentiraient la cadence. Et la joie de même. Les ordres : depuis qu’on pointe en entrant jusqu’à ce qu’on pointe en sortant, on peut à chaque moment recevoir n’importe quel ordre. Et toujours il faut se taire ou obéir.

 

L’ordre peut être pénible ou dangereux à exécuter, ou même inexécutable ; ou bien deux chefs donner des ordres contradictoires ; ça ne fait rien : se taire et plier. »

 

 

Simone Weil, La Condition ouvrière, Gallimard, 1951, pages 58-59

 

 

 

2018-74. De Simone Weil ; du témoignage que lui a rendu Gustave Thibon ; et de son baptême in articulo mortis.

1943 – 24 août – 2018

75ème anniversaire de la mort  de Simone Weil ICI  

 

IDÉES & DÉBATS  Auguste Detœuf, patron atypique

MARC MOUSLI

01/07/2011

ALTERNATIVES ECONOMIQUES N°304 ICI 

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9 décembre 2018 7 09 /12 /décembre /2018 08:50
Jim Harrison « Le whisky est un célibataire endurci, alors que le vin a une maîtresse, la bouffe. » dédié à Julien Boscus chef au restaurant Les Climats.

Quand j’étais petit ma sainte mère, excellente cuisinière par ailleurs, m’a appris à être poli, à dire « merci » à celles et ceux qui me gâtaient, et Dieu sait qu’avec ma bouille d’angelot à qui l’on donnait le bon Dieu sans confession c’était fréquent, et autres aussi pour marquer ma gratitude.

 

« Quand elles disaient: «Ce petit enfant est si mignon!...» il leur offrait d'en faire à chacune un plus mignon encore. − Grand merci! répondaient-elles en riant » Anatole France, Puits Sainte Claire,1895, p.117).

 

Alors en ce dimanche je me suis dit que le mieux que je puisse faire pour dire à Julien Boscus, jeune et talentueux chef du restaurant Les Climats, tout le plaisir que j’ai pris à me régaler de sa cuisine, pendant ces dernières années, c’est de lui dédier une chronique pour un grand merci.

 

Comme Julien m’a fait découvrir la grouse ICI c’est tout naturellement que je me suis retourné vers ce diable de Jim Harrison :

 

« Le vin nous guide vers la nourriture qui deviendra notre préférée. Il serait impensable pour un Français de manger sa bécasse sans l’accompagner d’un bon vin, disons du Clos de la Roche, même si cet excellent Bourgogne est surtout accessible aux nababs qui, contrairement à moi, n’ont pas le temps de chasser la bécasse, la grouse, la caille et la perdrix de Hongrie. Moi qui aime à la folie le gibier et le vin, ces addictions me permettent d’exercer maintes activités de plein air. Je patauge des heures parmi les broussailles pour tuer ce qui ce soir garnira nos assiettes, même si les bécasses sont meilleures après avoir été suspendues pendant quelques jours. En cas de forte chaleur, un réfrigérateur réglé à cinq degrés fera l’affaire, mais il faut prendre garde à faire pivoter les oiseaux. Je n’ai jamais laissé une bécasse devenir trop faisandée, mais il faut se montrer plus vigilant avec la grouse au poitrail blanc. J’ai souvent dégusté sur un toast les viscères d’une bécasse, sans le gésier, une tradition française qui répugne à certains de mes amis américains. Je répète que la meilleure façon de cuire la bécasse consiste tout simplement à la faire griller sur un feu de bois jusqu’à ce que l’intérieur de l’aile soit rouge rosé. Comme pour les colombes et les malards, une bécasse trop cuite est un  crime. »

 

Bécasse des bois

Scolopax rusticola - Eurasian Woodcock

 

Les Scolopacidés constituent, avec les Charadriidés, un groupe d'oiseaux appelés limicoles, c'est à dire littéralement "oiseaux de rivages". Les Scolopacidés sont majoritairement des oiseaux migrateurs de l'hémisphère nord, mais seul le continent antarctique en est dépourvu. Ce sont des oiseaux de taille petite à moyenne, avec souvent, mais pas toujours, un long bec et de longues pattes. Le bec peut être droit, ou alors incurvé vers le haut ou vers le bas.

 

Ils occupent les milieux humides, côtiers ou de l'intérieur (marais, zones humides, toundra, etc.). La plupart des espèces affectionnent les espaces ouverts, mais certaines comme les bécasses préfèrent les milieux fermés.

 

Limicole ventru de taille moyenne de la famille des bécassins (anciennement limnodromes). Oiseau forestier au beau plumage brun-rouge rappelant la couleur des feuilles mortes. Dessous jaunâtre finement barré. Tête ronde au long bec droit.

 

Biométrie

Taille : 35 cm

Envergure : 56 à 60 cm.

Poids : 250 à 420 g

Longévité 21 ans

 

Elle fréquente les régions boisées entrecoupées de champs et de clairières, surtout avec des fourrés humides et des massifs de conifères. Lors de la reproduction, fréquente les terrains marécageux, les marais, les prairies humides et les rivages.

 

Comportement traits de caractère

 

Elle s'active surtout au crépuscule. Son vol rapide, aux changements brusques de direction, est très caractéristique. C'est un oiseau discret. Les meilleures chances de la voir sont au printemps entre avril et juin, au crépuscule, quand elle traverse une clairière ou longe un layon, en vol nuptial (la croule). Quand on la dérange, elle s'envole dans un vrombissement d'ailes sonore en se faufilant entre les arbres.

 

Le vol : Vol plus lent que celui de la bécassine. Surprise, la Bécasse des bois s'envole dans un bruissement d'ailes en zigzaguant entre les arbres.

 

Alimentation mode et régime

La Bécasse des bois se nourrit surtout de vers, d'insectes, de larves diverses et de petits mollusques.

 

Reproduction nidification

 

L’espèce est polygame. La femelle est mature à l’âge d’un an.

 

Les premières manifestations de la période de reproduction sont le fait des mâles qui, soir et matin, effectuent des vols accompagnés de cris : la croule. Ces vols en solitaire peuvent être observés de février (en France) à juillet-août, avec une intensité maximale en mai-juin. Les mâles sont fidèles d’une année à l’autre à leurs sites de croule.

 

Nid : petite cuvette dans le sol forestier garnie de feuilles mortes. La couveuse étant sur le sol, la protection des prédateurs est essentiellement assurée par son camouflage. Ponte : la femelle pond de mi-mars à mai 4 œufs brun grisâtre, tachés de roux et maculés de gris. L'incubation dure 3 semaines. La femelle surveille les jeunes qui quittent le nid à quelques heures. Ils se nourrissent seuls deux à trois semaines après.

 

Rythme d’activité

 

La bécasse est, pour l’essentiel de ses populations, une espèce migratrice. La migration se déroule de nuit par petits groupes de 5-6 individus. La migration post-nuptiale s’amorce en septembre en Russie et bat son plein en novembre en France. Elle se déroule sur un large front. Au cours de ce déplacement les familles se dispersent. Les juvéniles sont les premiers à se mettre en mouvement. La migration pré-nuptiale débute fin février en France, l’essentiel du passage a lieu en mars. Les territoires de reproduction les plus éloignés ne sont atteint qu’en mai. Les mâles partent les premiers.

 

Pendant la période de reproduction, la bécasse est essentiellement active en journée et aux heures crépusculaires. La recherche alimentaire et l’élevage des jeunes (pour la femelle) et les vols de croule (pour les mâles) en constituent l’essentiel. Les bécasses restent en permanence en milieu forestier.

 

En hivernage, les oiseaux occupent les milieux forestiers (ou les haies) en journée et gagnent en vol (la passée) les milieux découverts (prairies) la nuit. Le rythme d’activité suit généralement le schéma suivant : activité crépusculaire et nocturne/repos diurne. Toutefois certains individus présentent un schéma inversé, d’autres changent de rythme en cours d’hivernage. En période de froid plus intense, les bécasses sont plus actives en journée et ne quittent pas la forêt la nuit. Elles sont fidèles d’une année à l’autre à leur site d’hivernage.

 

Distribution de l’espèce en France

 

En France, l’aire de reproduction concerne essentiellement le Bassin parisien au sens large, le quart Nord-Est et les régions montagneuses : Massif central, Pyrénées, Alpes, Jura. La bécasse peut être observé partout en période de migration. En revanche, en hivernage la majorité des effectifs se rencontrent dans les régions littorales Manche-Atlantique et sur le pourtour de la Méditerranée.

 

Clos-de-la-Roche

 

L’AOC Clos-de-la-Roche est un vin rouge Grand Cru de la Côte de Nuits, produit sur la zone d’appellation Morey-Saint-Denis. Le vignoble de 16 hectares 90 ares 27 centiares occupe le bas du coteau, et se compose de trois lieux-dits : Les Monchamps, Monts-Luisants Bas et Clos-de-la-Roche. Les sols y sont caillouteux et de faible profondeur, supportés par d’importants blocs rocheux et recouverts par endroits d’une mince terre végétale. Dans la partie la plus basse, les sols sont bruns calcaires, dépourvus de cailloutis et contiennent de nombreux éléments assimilables par la vigne. Le terroir du Clos-de-la-Roche confère aux vins un caractère puissant et charpenté, avec un bouquet aromatique complexe de fruits rouges et noirs, mêlés à des notes de café grillé, de caramel, voire de truffe en vieillissant. Le cépage unique utilisé dans l’élaboration de ces rouges est le pinot noir, qui trouve sur ces terroirs ses meilleures expressions. La production de ce Grand Cru consistant, riche et corsé, s’élève à 589 hectolitres par année. Celui-ci a sans aucun doute le meilleur potentiel de garde de Morey-Saint-Denis.

Jim Harrison « Le whisky est un célibataire endurci, alors que le vin a une maîtresse, la bouffe. » dédié à Julien Boscus chef au restaurant Les Climats.
Jim Harrison « Le whisky est un célibataire endurci, alors que le vin a une maîtresse, la bouffe. » dédié à Julien Boscus chef au restaurant Les Climats.
Jim Harrison « Le whisky est un célibataire endurci, alors que le vin a une maîtresse, la bouffe. » dédié à Julien Boscus chef au restaurant Les Climats.
Jim Harrison « Le whisky est un célibataire endurci, alors que le vin a une maîtresse, la bouffe. » dédié à Julien Boscus chef au restaurant Les Climats.
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7 décembre 2018 5 07 /12 /décembre /2018 06:00
Sous Paris est 1 fête d’Hemingway se niche 1 terrible appétit de vivre, de manger qui caractérise la «Génération perdue» d’après la Grande Guerre. « D’où le solide coup de fourchette de Papa Hemingway, qui levait le coude pour ce terriblement bon vin de Bourgogne français ».

À la différence de Pudlowski, qui pond des twittes, à jet continu, comme des saucisses de Francfort, Jean-Claude Ribaut, lui ne twitte pas, son patrimoine de chroniques vit sur la Toile, il est devenu viral alors que les scories de Pudlowski durent le temps que durent les bulles de savon.

 

La jeune génération de critiques gastronomiques ne vaut guère mieux que ce dinosaure, elle est acculturée, suiviste, surfant sur la fameuse tendance, banale, chichiteuse, copinage et attachée de presse des chefs étoilés ou bistronomisés.

 

J’évite d’ironiser sur les ragoteurs qui vendent leur soupe bien cher, désolant, insignifiant, minable…

 

Bref, le Jean-Claude sait conter, raconter des histoires qui ne sont pas du storytelling formaté, elles font sens, instruisent : oh, le gros mot !, remettent certaines pendules à l’heure pour une génération qui a tendance à considérer que le monde a commencé  avec elle.

 

Extrait des cahiers de la Gastronomie hiver 2012 : quelques passages d’Hemingway Montparnasse est une fête !

 

« Si vous avez la chance d’avoir habité Paris lorsque vous étiez jeune, alors partout où vous irez pendant le reste de votre vie, cela restera en vous, car Paris est une fête mobile » (Lettre à un ami, 1950)

 

Hemingway s’installe à Paris en décembre 1920.

 

« Hemingway, journaliste, correspondant étranger du Toronto Star, et sa femme Hadley habitaient rue du Cardinal Lemoine. Ils fréquentent les cafés, déjeunent chez eux, ou bien soupent chez Gertrude Stein, établie rue de Fleurus dans un hôtel particulier de grande allure. D’elle on disait qu’elle avait pour la peinture « un flair oraculaire » Des toiles de Cézanne, Matisse, Picasso ornent ses murs. Scott Fitzgerald, qui venait d’épouser l’excentrique Zelda retrouvait Hemingway à la Closerie des Lilas, où il lui fit lire le manuscrit de son premier grand livre Gatsby le Magnifique. Hemingway publie Le soleil se lève aussi en 1926. Le livre de cuisine d’Alice Toklas, compagne de Gertrude Stein, fait alterner recettes et récits des manières de table d’une maison qui vit se constituer autour d’Hemingway, le cercle américain le plus illustre de Montparnasse, écrivains et peintres mêlés.. Une table ouverte et une cuisine fort bien achalandée, dont l’apparente monotonie était rompue par quelques excentricités. Sa recette la plus loufoque, émanant de son ami écrivain Brion Gysin était le haschisch fudge, un mélange de fruits secs, d’épices et de « canibus sativa » (sic), d’où l’appellation de certaines préparations à base de cannabis et de chocolat : Alice B. Toklas brownies. Pour l’ordinaire, c’est la fréquentation assidue et quotidienne des cafés et brasseries du quartier, selon l’image classique que perpétue la Balzar ou encore Lipp – citadelle auvergnate et brasserie – avec sa légende tissée par Hemingway, Léon-Paul Fargue, puis Maurice Fombeure et beaucoup d’autres : bière, plats copieux, choucroute, cervelas, hareng baltique, thon à l’huile et salade de museau, avec un service permanent assuré très tard par d’efficace tribus arvernes, venues de Gergovie, de Luzech ou de Capdenac.

 

[…]

 

La princesse russe à côté des peintres pouilleux mais célèbres, Pascin, Modigliani le bel italien, Chagall au charme slave, Soutine le tragique. Le rapin besogneux regarde avec envie l’incroyable Picasso qui a fait fortune déjà avec les célèbres Demoiselles d’Avignon. Grisettes, femmes du monde, les premières intellectuelles ou écrivains anglo-saxonnes croisent le demi-castor, femme affichée comme la célèbre Kiki de Montparnasse. Tous se divertissent. L’Europe, celle de Paul Morand, s’est civilisée à Montparnasse, et qui côtoient une population ouvrière pauvre, très bien décrite par Charles Louis-Philippe et Marguerite Audoux ? De la vache enragée, mais avec cette différence que les peintres inconnus avaient la chance, avec une œuvre consistante réalisée, qu’aussitôt admirée, ils étaient également prestement achetés. La cuisine était celle de tout le monde, issue elle-même d’une origine paysanne et provinciale, qui, par mutation urbaine, devient parisienne : « Du prêt à manger, consommé réchauffé chez soi. Plus les WC dans la cour en cabane, ou bien le confort des commodités à la Turque, au bout du couloir communautaire » confirme Hemingway dans Paris est une fête. C’est primitif, invivable en plein été, sinistre en hiver. D’où la fuite frénétique aux bonnes époques de la IIIe République des artistes fortunés tel Caillebotte déjà, hors de Paris, pour le grand air, pour la beauté des bords de Seine, pour une nourriture de légumes et de fruits du jardin.

 

Le sens caché de Paris est une fête d’Hemingway, dont à la fin de leur amitié, Gertrude Stein se plaignait qu’il n’y était question que du sexe viril et de la mort, masquait ce terrible appétit de vivre et donc de manger qui caractérise la période de la « Génération perdue » après la Grande Guerre. D’où le solide coup de fourchette de Papa Hemingway, qui levait le coude pour ce terriblement bon vin de Bourgogne français ». Paris peut alors se décliner comme une véritable géographie de la libido liée aux plaisirs essentiels, ceux raffinés et vulgaires de l’errance érotique, inextinguibles comme se succèdent le flux des marées et des cycles lunaires, ceux essentiels aussi de la faim physiologique et corporelle. Du Polidor, rue Monsieur-le-Prince, aux salons du Ritz…

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4 décembre 2018 2 04 /12 /décembre /2018 06:00
En 1697, John Locke posait la question « Que faire des pauvres ? » en 2016 dans « Que faire des classes moyennes ? » Nathalie Quintane, nous dit que le véritable problème des sociétés modernes, ce sont les classes moyennes

Jacques Julliard: ancien de la 2e gauche écrit dans le Figaro à propos du mouvement des gilets jaunes «Le Mai 68 des classes moyennes»

 

Gilets jaunes : Macron promet «une réponse claire» aux «classes moyennes et laborieuses» ICI  

 

Je suis un acheteur compulsif de livres en librairie et il y a plus d’un mois j’ai acheté un petit livre « Que faire des classes moyennes ? » de Nathalie Quintane publié chez P.O.L en novembre 2016

 

 

Je l’ai lu et, avant qu’il ne rejoigne la pile des livres lus, je me suis dit que je pondrais une chronique ; ce que je n’ai pas fait mais l’actualité me l’a remis en mémoire.

 

Comme je n’allais pas le relire pour me le remettre en mémoire je vous propose des extraits de critiques :

 

  • « Que faire des classes moyennes ? »

 

« Est un livre terrible et hilarant, qui pose toutes les questions que « nous », classes moyennes, évitons soigneusement, mais que les élections (celle de Trump, par exemple) résolvent dans la colère. »

Eric Loret, Le monde des livres, 2 décembre 2016

 

  • « Nathalie Quintane publie chez P.O.L. un savoureux petit livre mi-essai, mi-pamphlet - intitulé Que faire des classes moyennes?. Elle en profite pour rappeler que la valeur travail pose cette équivalence «que je suis mon métier, et que sans mon métier je suis rien. Je travaille à Roquefort dans une boîte et je dis nous quand je parle de moi; je suis entrepreneur, agent de surface, comptable, secrétaire, juriste, magasinier, et je dis nous quand je parle de moi. Mais ce nous, ce n’est pas moi et ce n’est pas nous. Ce "nous", c’est la boîte».

Corina Ciocarli, Le jeudi, 30 novembre 2016

 

  • « Le Brexit, I’élection de Trump, la montée de I’extrême droite en Europe... Et si tout était de la faute des classes moyennes ? Mais alors, qu’en faire ? C’est I’une des questions que pose Nathalie Quintane dans un drôle de petit livre qui comme tous ses textes précédents (dès Chaussure en 1997), s’annonce comme une tentative d’épuisement d’un sujet... épuisant, puisqu’il s’agit de la classe moyenne, que seul peutêtre un Michel Houellebecq a si bien su mettre en scène dans ses romans. Une classe aux contours parfois flous mais une classe aujourd’hui majoritaire souvent issue du milieu ouvrier, et qui aurait eu I’illusion d’avoir évolué socialement grâce à la possibilité d’acquérir certains objets de consommation - "A partir du milieu du XIXe siècle l’achat de l’armoire à glace signe I ’entrée dans la classe moyenne c’est-à-dire qu’on achète une armoire à glace pour entrer dans la classe moyenne."

Nelly Kaprielian, les Inrockuptibles, 29 novembre 2016

 

  • « Ponctué d’autobiographie, bourré de colère, de questions et de drôlerie, avec sa manière méthodique de tout mélanger, «Que faire des classes moyennes?» est un essai excitant et excité, véritable antidote à l’avalanche actuelle de livres politiques tiédasses. Et si elle précise que la visée de son texte n’est pas de rigoler, difficile de résister à ce numéro de professeur Foldingue, ou elle déploie les modèles en bouteille, en sablier ou en montgolfière, les salaires médians, Guy Debord, Barbara Cartland et les pavillons de banlieue. »

 

Marguerite Baux, ELLE, 25 novembre 2016

  • « Le livre est une débonnaire et agressive petite symphonie de musique concrète. Il accueille et mélange les tonalités et registres du bovarysme social, ses illusions, ses déceptions, ses ressentiments, son arsenic. Ce n’est ni un essai ni un pamphlet : sa mayonnaise est huilée par l’autobiographie, une soudaine et familière brutalité pour bien marquer qu’ici, on ne nous la fait pas, l’argent c’est d’abord du pognon. L’auteure a bien de la colère. Cette colère passe par l’oreille et par le jeu.

Le résultat est finalement une preuve de la générosité, volontaire ou pas, des classes moyennes : elles ont engendré de beaux ingrats, de subtils meurtriers comme Quintane, qui le sait et le dit : «Par tout ce qui précède, je pense appartenir à la classe moyenne, et par conséquent ce texte est, d’une certaine manière, un produit de la classe moyenne. Il a d’ailleurs quelque chose de plastronnant - un mot qui conviendrait pour en décrire la majeure partie, jusqu’ici, est qu’il plastronne, au sens où il gonfle un peu le torse, peut-être pour se protéger la poitrine.» Bref, il est d’extrême gauche. Les moments où elle nous permet de l’oublier, par exemple lorsqu’elle parle d’une grand-mère, sont les plus sensibles. »

Philippe Lançon Libération Next, 2 novembre 2016

 

Quand «ce qu’il faut de courage» ne marche plus, c’est «ça suffit» qui s’installe :

 

«Ça suffit le travail, ça suffit les grèves, ça suffit les syndicats, ça suffit les politiques et ça suffit la politique, ça suffit les curés, ça suffit les plombiers, ça suffit les Polonais, ça suffit les Bulgares, ça suffit les Biélorusses, ça suffit les Roumains et puis ça suffit les Roms, ça suffit les Arabes, ah oui alors ça suffit les Arabes, ça suffit les Arabes nés en Arabie et ça suffit encore plus les Arabes nés en France, qu’ils aillent naître ailleurs, ou mieux : qu’ils ne naissent pas du tout

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30 novembre 2018 5 30 /11 /novembre /2018 06:00
« Ce chacun pour soi, je l’observe aujourd’hui, où l’on peut avoir les pires conflits avec des gens dont on était proche dix ans plus tôt. Et cela ne peut qu’être aggravé par les réseaux sociaux qui sont, pour les intellectuels, la communauté de la peur. » Elisabeth Badinter.

Je tiens le coup.

 

Je continue d’observer les réseaux sociaux, twitter, face de bouc, sans me livrer aux outrances des commentaires de certains de mes « amis ».

 

De la violence, de l’invective, du parti pris, des œillères, le cul sur leur chaise, face à leur écran certains déversent le trop-plein de leur aigreur, de leur vie riquiqui, grand bien leur fasse mais ça a pour moi un effet bénéfique : je ne les fréquente plus physiquement, n’ayant nulle envie de mettre un mouchoir hypocrite sur ce que je pense d’eux.

 

L’irruption du mouvement des gilets jaunes, via les réseaux sociaux, est la traduction de cette violence d’abord verbalisée puis déversée dans la rue.  Il suffit d’écouter ce que ceux qui s’expriment disent, c’est très souvent radical (j’exclue bien sûr les professionnels de la violence situés aux deux extrêmes). Des victimes me rétorquera-t-on ! Peut-être, mais ce sont eux qui le disent, qui est en capacité de le vérifier ?

 

Malheureusement pas les journalistes qui leur tendent leur micro, leurs boss leur demandent du sang et des larmes pour doper l’audience.

 

Les politiques ?

 

Eux, ça apporte de l’eau à leur moulin, si le petit peuple souffre, descend dans le rue, ce qu’ils n’arrivent plus à faire faire, ça alimente leur rêve de contraindre le pouvoir en place à leur laisser la place. Pourquoi pas ! Mais, à qui fera-t-on croire que leur arrivée aux responsabilités va, comme par magie, changer la vie des gens.

 

C’est une escroquerie intellectuelle, un cartel des non, hétéroclite, bourré de contradictions, débouche soit comme en 1981 à un reniement ou comme chez nos voisins italiens à une politique d’exclusion, de fanfaronnade, qui débouchera sur rien de bon pour le peuple.

 

Reste les intellectuels, ceux que l’on considérait comme tel, pas les usurpateurs qui s’autoproclament pour faire prospérer leur fonds de commerce.

 

Étant abonné au journal Le Monde je vous livre la salutaire réflexion d’Elisabeth Badinter.

 

Je le fais comme autrefois je passais mon journal papier à des amis pour qu’ils lisent un article qui avait retenu mon attention. Foin du copyright, j’ai payé et je dispose de ce que j’ai acheté.

 

Elisabeth Badinter : « Je ne pense pas qu’on puisse parler librement sur Internet »

 

La philosophe, dont « Les Passions intellectuelles » paraissent en un volume, évoque la violence des réseaux sociaux, qui contraste avec l’idéal de rationalité des Lumières.

Propos recueillis par Jean Birnbaum

 

Les Passions intellectuelles, d’Elisabeth Badinter, Robert Laffont, « Bouquins », 1 216 p., 32 €.

 

Sous le titre Les Passions intellectuelles, les éditions Robert Laffont font paraître un volume de la collection « Bouquins » qui regroupe les trois beaux essais consacrés par Elisabeth Badinter à l’effervescence du XVIIIe siècle et des Lumières. C’est l’occasion d’interroger la philosophe sur la vie des idées et son évolution.

 

  • Voilà plus de quinze ans qu’est paru le premier tome de votre trilogie. Que vous inspire cette réédition dans le contexte actuel ?

 

Cela me fait plaisir car je pense, peut-être naïvement, que nous avons un besoin fou de rationalité. Le combat des philosophes du XVIIIe siècle, c’était quand même celui de la rationalité ­contre les superstitions. A une époque où l’irrationnel prend une place immense dans notre vie sociale et intellectuelle, revenir à ce combat me semble un geste opportun, peut-être beaucoup plus encore qu’au moment où j’ai publié ces textes pour la première fois.

 

  • « Les intellectuels ont changé de maître, mais pas d’esclavage », écriviez-vous à la fin du troisième tome des « Passions », pour expliquer que les clercs obéissaient de moins en moins au roi et de plus en plus à l’opinion. A qui obéissent les intellectuels aujourd’hui ?

 

Aux réseaux sociaux ! Tout le monde en a peur. Moi je n’y suis pas, je tiens à ma tranquillité et je crains de me prendre au jeu, mais j’entends ce qu’on dit et je lis ce qu’en raconte la presse. Il y a des sujets qu’on aborde à peine, sur la pointe des pieds. En ce qui concerne #metoo et #balancetonporc, j’ai été impressionnée par le silence de féministes historiques, parfois fondatrices du MLF, qui n’étaient pas d’accord avec la façon dont la parole se ­libérait, interdisant toute nuance, toute objection… mais qui avaient si peur ­qu’elles se sont tues. Les réseaux sociaux ont doublé le pouvoir d’une opinion publique qui est libre de dire ce qu’elle veut, mais qui est souvent peu nuancée, peu avertie et d’une violence inouïe. Jamais la presse ou les médias en général n’ont eu une telle puissance d’intimidation.

 

On peut critiquer autant qu’on veut la tribune parue dans Le Monde sur #metoo signée, notamment, par Catherine Deneuve. Il reste que ce qui s’est passé est incroyable : elle est devenue une cible mondiale. L’opinion publique du XVIIIe siècle, la doxa, respectait les savants, les philosophes, et elle était limitée. C’était déjà une menace indirecte pour la pensée, la critique, mais ce n’était rien du tout à côté de ce qui se passe au­jour­d’hui : personne n’a envie de se faire écraser sous les insultes de millions de gens. Ce pouvoir des réseaux sociaux, je le ressens paradoxalement comme une censure !

 

  • « On est bien seul : j’ai un tel besoin de “communauté” », écrivait Mauriac dans une lettre à Jacques Maritain. Les intellectuels ne sontils pas d’autant plus intimidés par les réseaux qu’ils sont travaillés, dans leur solitude, par un désir de « communauté » ?

 

Je crois qu’il faut distinguer entre les ­intellectuels reconnus par l’opinion publique et la jeune classe des intellectuels. Au départ, quand on est Diderot, Rousseau, d’Alembert, et qu’on déjeune chaque semaine à l’Hôtel du Panier fleuri, on forme une amicale communauté. Mais quand les mêmes émergent au regard de l’opinion publique, alors le groupe éclate, parce que les rivalités prennent le dessus. Et là on est seul. Chez les intellectuels, le sentiment communautaire ne dure pas. Ce chacun pour soi, je l’observe aujour­d’hui, où l’on peut avoir les pires conflits avec des gens dont on était proche dix ans plus tôt. Et cela ne peut qu’être aggravé par les réseaux sociaux qui sont, pour les intellectuels, la communauté de la peur.

 

Sur Twitter, au fil des années, les ­choses se sont durcies, au point que chacun semble fuir la discussion loyale et désirer des ennemis plutôt que des contradicteurs. Assiste-t-on, en retour, à une « twitterisation » du débat intellectuel ?

 

Je n’ai pas l’impression que les relations entre intellectuels ont fondamentalement changé depuis vingt ans. Oui, il y a une sorte de distance que l’on met entre soi et les autres, mais je n’ai pas le sentiment qu’on les traite en ennemis. Peut-être même les intellectuels vont-ils retrouver un sentiment communautaire grâce à l’hostilité des réseaux sociaux ? Si nous faisons l’objet de la détestation générale, cela peut remettre un peu de vie entre nous ! Les intellectuels pourraient régresser de six ou sept siècles, et retrouver la vie des clercs qui s’expliquaient ­entre eux dans les couvents, sans que personne d’autre intervienne. On ­continuera de réfléchir, on échangera, on fera des colloques, on s’engueulera, mais on sera entre nous. Je reste donc relativement optimiste : la vie intellectuelle, c’est un choix, un plaisir, une douleur, mais c’est aussi un besoin, et même si cela doit redevenir l’expérience d’un microcosme coupé du monde extérieur, rien ne pourra la faire cesser.

 

Au XVIIIe siècle, le champ intellectuel était déjà un champ de bataille. ­Voltaire évoquait la « guerre des rats et des grenouilles », selon une formule qui parlera sans doute à quiconque fréquente les réseaux sociaux…

 

Mais le facteur important, c’est le nombre. Oui, à l’époque des philosophes, il y avait des clans politiques ennemis, on ­représentait Rousseau à quatre pattes en train de manger des salades, c’était violent, et Twitter représente sans doute la radicalisation de tout cela. Mais à l’époque cela concernait un microcosme. La quantité de haine personnifiée, cela change les choses. Si cette tendance ­twitteuse l’emportait aujourd’hui, ce ­serait la fin de la réflexion et de la ­connaissance hors des couvents ! En même temps, là encore, je reste assez optimiste : ce faux savoir, ces provocations, cette haine… on en a déjà assez, on va se lasser de tout ça, j’espère.

 

  • Les correspondances ont toujours été fondamentales pour la vie ­intellectuelle. Que deviennent-elles à l’ère numérique ?
  •  

C’est une source de savoir qui est aujourd’hui coupée, car on ne s’écrit plus de lettres. Les courriels, on les supprime, ou ils s’effacent, et puis ça va vite. Les lettres de philosophes que je cite dans mes livres pouvaient faire huit, quinze, vingt pages, assez pour exprimer un raisonnement. Si la correspondance est fondamentale pour la vie intellectuelle, c’est que, en général, la censure ne s’y exerce pas, on peut y ­exprimer toutes ses pensées. Et j’ai remarqué quelque chose : dans les correspondances du XVIIIe siècle, même les gens très collet monté, un scientifique comme Réaumur par exemple, finissent toujours par se lâcher, et donc par éclairer quelque chose de leur personnalité.

 

Aussi les correspondances régulières sont-elles la source d’une connaissance approfondie des destinataires, et de ­controverses fécondes. On n’est pas inquiet et même si on a tort parfois, on estime qu’on peut parler librement. Or je ne pense pas qu’on puisse parler librement sur Internet. Moi, je n’ai jamais participé à une polémique intellectuelle par courriel ! D’ailleurs, je n’entretiens aucune correspondance digne de ce nom par courriel. Quand j’écris une lettre, je suis plus confiante. Pas vous ?

 

Rien n’est moins intellectuel que le mot « intellectuel », tel qu’on l’applique aux interventions des écrivains et théoriciens dans la vie publique. Ses usagers sortent rarement d’une mise en scène répétitive de l’affrontement des opinions, avec, à défaut de ­pensée critique, la morale pour arbitre. Comment y échapper, comment traiter de la réalité de l’engagement intellectuel sans devenir le singe plus ou moins savant des « débats de société » qu’on restitue ? En reconnectant justement les positions et les textes à la société dont ils émanent, répond ­Gisèle Sapiro dans tous ses essais, depuis La Guerre des écrivains. 1940-1953 (Fayard, 1999).

 

Cette entreprise de réévaluation sociologique de l’histoire littéraire s’amplifie encore dans Les Ecrivains et la politique en France, qui systématise, à partir des concepts forgés par Pierre Bourdieu (1930-2002), la corrélation entre la place des écrivains dans des « champs » politiques et littéraires structurés par les rapports de « domination », et leurs modes d’intervention – de la fin du XIXe siècle aux débats sur la décolonisation. Avec un art virtuose du changement de focale, qui lui permet de mêler aperçus biographiques, histoire intellectuelle et lecture serrée des œuvres, la sociologue met en question les notions de droite et de gauche littéraires, analyse les évolutions historiques, observe la manière dont les textes construisent des visions du monde. Elle n’échappe pas toujours, à son tour, à une forme de schématisation mais livre une nouvelle fois un stimulant exercice de décrassage de nos idées sur la vie des idées. Florent Georgesco

 

Jean Birnbaum

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27 novembre 2018 2 27 /11 /novembre /2018 06:00
Charles Huard Bouvard et Pécuchet

Charles Huard Bouvard et Pécuchet

Que Basile Tesseron du château Lafont-Rochet déclare haut et fort, pour que ça se sache, à la RVF, qu’il abandonne la culture en bio de son vignoble car il estime que l’utilisation du cuivre est nocive, c’est son droit le plus strict, et pour ma part, comme le disait finement le Grand Jacques « cela m’en touche une sans faire bouger l’autre. »

 

Je n’ai donc pas participé à la foire d’empoigne qui s’en est ensuivie, petite tempête dans un petit verre d’eau sans grand intérêt sauf pour les supplétifs, le menu fretin de la critique, qui y a trouvé l’occasion de monter au créneau pour pourfendre les défenseurs du label Bio officiel déjà bien à la peine avec le renouvellement de l’homologation du cuivre par les instances communautaires.

 

La première charge que j’ai lue est celle hallebardier qui mange à tous les râteliers : Lundi 19 novembre 2018 Basile, le bio et la patrouille  ICI 

 

J’ai adoré ce passage :

 

Panique électronique

 

« Le plus ennuyeux, c’est que la charge est menée par trois vignerons que j’aime beaucoup, autant que leurs vins respectifs, c’est dire. Des garçons intelligents avec des vraies convictions et toute ma considération depuis longtemps. Pour ne pas déclencher une nouvelle panique, je ne mentionnerai pas leurs noms. Il suffit de savoir que l’un est le roi du bordeaux sup’ de haut vol, le second est le king du bio très bon à Pomerol et le troisième, la nouvelle étoile qui brille dans le ciel de Saint-Émilion. Ceux qui savent, savent. Évidemment, leur notoriété et la qualité de leurs productions respectives agrègent autour de leur avis, une foule d’indignés en chewing-gum qui y vont tous de leur aigreur et n’ont pas de mots trop forts pour qualifier les propos de Basile. Je comprends bien que ces garçons défendent leurs convictions, mais Tesseron ne les attaquait pas et ce qu’il dit est mesuré, intelligent, lisible. On peut certainement en débattre, sûrement pas lâcher les chiens. Je connais Lafon-Rochet et Basile depuis plus de dix ans et je l’ai toujours vu se passionner pour plus de propreté dans ses pratiques culturales. »

 

La conclusion de ce bel esprit est à la hauteur de qui se dit journaliste dans le monde du vin « il n’y a pas de quoi fouetter un chat et ceux que le sujet intéresse pour de vrai, comme moi, adorerait lire un vrai débat sur le sujet. Dommage, il n’a pas eu lieu. »

 

Engagez-le donc ce débat camarade ! Qu’est-ce qui vous en empêche ?

 

Et puis le 24 novembre 2018, alors que le gris du ciel et les gilets jaunes me maintenaient cloîtré chez moi je suis tombé sur un monument, que dis-je une pépite, un besogneux exercice d’un plumitif qui fait des phrases boursouflées, bardé d’une culture très Wikipédia. Le titre de ce plaidoyer :

 

De la légèreté des débats – le cas Lafon Rochet

 

Je vous laisse le soin de lire ce plaidoyer qui fleure bon le réquisitoire ICI mais je ne résiste pas au plaisir de citer la chute qui vire à la défense et illustration de l’auteur. On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même. En plus, pour une fois, c’est gratuit.

 

Quelle que soit la cause, l’idée ou la rengaine, n’est-il plus possible dans notre mondovino de dire les choses sans être conspué par la politique de la pensée, la Stasi vinaire, la bien-pensance oenophilie ? D’autant que les commissaires sont souvent les défenseurs d’une cause commerciale que la sainteté dans laquelle les ont drapés leurs thuriféraires aveugle bien des consommateurs plutôt sincères.

 

Que l’on soit pour le bio, ce qui semble être un mouvement de fond et totalement dans l’esprit du temps, ou contre le bio, ce qui en soit est respectable, peu importe. Le seul élément de discussion que nous devrions avoir est la qualité du vin, sa force, son impression, sa beauté. En se conspuant ainsi, les acteurs du monde du vin jouent le jeu des abstèmes de l’ANPAA qui doivent rire à gorge déployée et attendre sagement que les consommateurs, dégoutés par tant d’engeances, se tournent vers d’autres cultures vivantes.

 

J’ose à nouveau en guise de conclusion, mettre en avant les mots du poète romantique Heinrich Heine. À son ami qui lui demandait pourquoi l’on ne bâtissait plus d’édifices comme la cathédrale d’Amiens, il répondit : « dans ces temps-là, les gens avaient des convictions. Nous, les modernes, avons des opinions. Il faut plus que des opinions pour construire une cathédrale ».

 

En s’écharpant sur la toile, en dénaturant le propos d’autrui, en conspuant le camp adverse, en accusant qui de collusions, qui d’infatués publicitaires, nous nous apercevons que le mondovino est mu par des opinions de pensées aussi futiles et éphémères. Guidé par la pensée, par les opinions par nature éphémères, le débat est un encéphalogramme plat. C’est bien dommage. Alors que nous avons besoin de profondeur, nous nous satisfaisons de légèreté.

 

 

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26 novembre 2018 1 26 /11 /novembre /2018 06:00
« La 1er fois que j'ai entendu Maupassant interrompu par la sonnerie de Las Ketchup – et ouais, ça a été un jour à la mode, cette daube –, ça m'en a foutu un coup »

Jugez par vous-même 

Le français, notre belle langue, que le monde nous envie, surtout nos amis anglais, au même titre que nos beaux vins, lorsqu’elle s’encanaille, argot, verlan, sabir du neuf trois, langue du populo, s’aère, prend l’air de la rue, et permet de dire crument ce qui est cru, loin de l’aseptisation hypocrite du parler sous cellophane.

 

Des expressions comme « avoir bu l’eau des nouilles » ou « avoir les bonbons qui collent au papier » ou « je m’en beurre les noisettes »,  sont les dignes héritières d’un Boudard, d’un Audiard, d’un Dard, d’un Lebreton, d’un Simonin ou d’un Coluche. Je n’en use qu’avec parcimonie même si mes doigts sur le clavier de ma bécane à puces me démangent souvent. Je me réfrène mais de temps en temps je me laisse aller à être très bord-cadre.

 

L'ancien français "dauber" signifiait au sens propre "frapper", et au sens figuré : "se moquer, railler, dénigrer"

 

« Je les dauberai tant en toutes rencontres, qu'à la fin ils se rendront sages. » Molière, Critique de l'école des femmes

 

Revenons à cette pauvre daube qui depuis plus d’un siècle, ce nom a quitté les fourneaux pour désigner aussi de la camelote et que, depuis quelques années, il traîne aussi dans les cités pour stigmatiser des substances illicites, coupées, donc de très mauvaise qualité.

 

Daube : du chevalier au souper

 

« La cuisine catalane connut un vif succès dans l’Italie du XVIe siècle et influença plus particulièrement l’Italie du Sud. Les premières attestations de daube, en français, proviennent au XVIe siècle des Pays-Bas espagnols. On trouve, dès 1571, à la dobe dans un Menu d’un souper de noces lillois, puis, en 1599, en adobbe, sous la plume du Flamand Marnix de Sainte-Aldegonde, et en 1604, en adobe dans l’Ouverture de cuisine du cuisinier des princes-évêques de Liège, Lancelot de Casteau. En 1640, le dictionnaire italien-français d’Oudin glose dobba « sorte de viande, peut estre ce que nous disons, à la dobe ou daube. » C’est à Paris que le bœuf en daube est devenu l’un des plats les plus populaires.

 

C’est en catalan, dans la Blaquerna de Raymond Lulle, qu’apparaît pour la première fois le verbe adobar avec le sens de « préparer un aliment » ; il s’agit d’une extension au domaine culinaire de la « préparation » du chevalier : cet adoubement consistait en un coup de plat d’épée (francique dubban « frapper »)

 

En Catalogne et en Espagne, adob a désigné la marinade, et le mot s’est répandu en Italie au XVIe siècle : dobba, viande marinée apparaît en italien au milieu au milieu du siècle, et y demeure jusqu’au XVIIIe avant de devenir un régionalisme sicilien. On estime généralement que c’est l’Italie, plutôt que directement depuis l’Espagne, que le mot est passé en français. Sa trajectoire, depuis le domaine germanique du nord de l’Europe, au sens général de « préparation », avec son emploi dans la chevalerie, manifeste la circulation imprévisible des mots culturels. »

Marie-Josée Brochard Dictionnaire culturel en langue française Le Robert

 

Dans une chronique La daube de bœuf dite ‘de la Saint-André’ … et les autres

Blandine Vié pose la question :

 

Pourquoi « C’est de la daube ! » est-elle une expression argotique péjorative et méprisante ?

 

Une bonne daube, c’est pourtant chaleureux et régalant. Eh bien, eh bien, dans son « Dictionnaire des argots », Gaston Esnault explique que « daube » serait un mot d’origine lyonnaise pour dire gâté, appliqué à des fruits et à de la viande. Autrement dit, on faisait mariner la viande qui était un peu limite au niveau fraîcheur, histoire d’atténuer son côté sauvage voire faisandé.

 

Or, si l’on pousse plus loin, on apprend que le mot « daube » s’est d’abord orthographié « dobe » et qu’en italien, « dobba » signifie marinade. Tiens ! Tiens !

Comme quoi la cuisine est une alchimie parfois un peu trouble, ce que confirme le mot « marmite » dont le sens initial (il était alors adjectif) est… « hypocrite » ! C’est au XIVe siècle que l’adjectif est devenu nom et a pris une connotation culinaire, par allusion au fait qu’on peut faire mijoter bien des choses suspectes dans un chaudron muni d’un couvercle.

 

Bas-morceaux, morceaux choisis

 

« On peut braiser une pièce dans son entier (culotte par exemple ou épaule pour un agneau ou un gibier) ou la couper en gros cubes, le fin du fin étant de mélanger plusieurs morceaux — dits bas-morceaux (ce qu’on appelait les morceaux de 3ème catégorie dans les manuels de cuisine de nos grands-mères), c’est-à-dire situés dans la partie arrière de l’animal : culotte, tranche, gîte à la noix, jumeau, macreuse, paleron, basse-côte, galinette (très gélatineux) — pour avoir des textures différentes et une saveur finale plus riche, à la fois de la viande et de la sauce. Des morceaux nécessitant tous une cuisson longue pour être tendres. On peut même leur adjoindre des morceaux du cinquième quartier (on nomme ainsi tout ce qui dépasse de la carcasse et ce qui se trouve dans les entrailles), à savoir, dans le cas présent, joue et queue. »

 

La suite ICI 

 

 

Yves-Marie Le Bourdonnec : "Le black Angus, c'est de la daube !" ICI 
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