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27 juillet 2016 3 27 /07 /juillet /2016 06:00
Ils nous refont le coup du premier verre « 1 sur-risque dès le premier verre, au vu de cette nouvelle étude, la recommandation de santé « consommer de l'alcool avec modération » ne tient plus.

C’est reparti pour un tour !

 

Hier Doctissimo santé :

 

« En période estivale, cette étude publiée dans la revue Addiction risque de faire grand bruit auprès des adeptes du petit vin blanc sous la tonnelle. En effet, ces travaux épidémiologiques révèlent des liens de causalité étroits entre consommation d'alcool et cancers. Même les petits consommateurs sont concernés. »

 

Selon Jennie Connor, de l'université d'Otago, en Nouvelle-Zélande, auteure principale de ces travaux, il y a des preuves solides que l'alcool provoque 7 types de cancers, de l'oropharynx, du larynx, de l'œsophage, du foie, du côlon, du rectum et du sein.

 

La mauvaise nouvelle est qu'il y aurait, selon la chercheuse, un lien direct de cause à effet. Autrement dit, plus on boit d'alcool, plus le risque est important. Les buveurs légers à modérés seraient donc concernés par ces risques.

 

Une des études a suivi une cohorte de 1 million de femmes britanniques pendant 7 ans. Elle a montré que les femmes qui ont bu entre 70 et 140 g d'alcool par semaine affichaient une augmentation de 5% de cancer comparé à celles qui avaient consommé moins de 20 g par semaine - soit 2 verres de vin de 12 cl ou 2 bières de 25cl - et une augmentation de 13% du cancer du sein.

 

5,8% des cancers sont liés à l'alcool

 

Selon les estimations de l'étude, ces cancers liés à l'alcool représentent 5,8% du total des décès dus au cancer dans le monde.

 

Ces résultats sont le fruit d'une méta-analyse d'études épidémiologiques menées ces dix dernières années par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), l'agence de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Fonds mondial de recherche sur le cancer.

 

Alcool, tabac... Il est toujours temps d'arrêter

 

Dans une moindre mesure et sans en comprendre les raisons, les observations semblent indiquer que l'alcool est également à l'origine de certains cancers de la peau, de la prostate et du pancréas. Les fumeurs et buveurs multiplient par deux leurs risques, tout type de cancers confondus.

 

En revanche, il est possible d'inverser le risque d'un cancer du foie, du larynx ou du pharynx si le buveur est prêt à s'arrêter, et ce risque est réduit pour toute la durée d'abstinence, selon l'étude. Il équivaudrait même à une consommation nulle après 20 ans d'arrêt.

 

AFP/Relaxnews

 

Je ne vis ni dans le déni des facteurs de risques, ni dans la hantise de porter atteinte à ma santé et je ne souhaite en rien abréger ma vie.

 

Cependant je me refuse à tomber la tête la première dans le panneau simpliste des liens de cause à effet établis par des chiffres statistiques tirés de soi-disant méta-analyses

 

Dans une chronique du 9 janvier 2008 j’écrivais :

 

« Les morts des « suites d’une longue maladie » peuplent notre quotidien. Le cancer, les cancers de tout acabit emportent nos proches, nos amis, nos enfants et l’odieux chancre fait peur. La lutte contre le cancer est donc, à juste raison, une grande cause nationale mais, à trop vouloir agiter des épouvantails, formes modernes des spectres, à trop vouloir prouver, les scientifiques, toujours à la recherche de liens de causalité pour prévenir le mal, se coupent du corps social, lui donnent le sentiment de le priver des plaisirs de la vie, de l’assimiler aux souris de leurs laboratoires, de le réduire à des séries statistiques aussi froides que les murs de leurs hôpitaux.

 

La complexité de la vie, la diversité de nos modes de vie, les écarts qui se creusent à chaque extrémité de l’échelle sociale, l’extrême hétérogénéité des situations économiques et sociales nées de la mondialisation, font que les méta-analyses, chères à nos chercheurs, sont à manier avec bien des précautions. La mise en ligne du rapport « Alcool et risques de cancers » : état des lieux des données scientifiques et recommandations de santé publique est caractéristique de l’effet « tour d’ivoire » caractéristique de ces expertises scientifiques qui font subir au mot risque des glissements sémantiques qui n’ont rien de scientifiques. »

 

Le 23 février 2009 une autre chronique

 

« Quand on veut tuer son chien on dit qu’il a la rage : premier verre et cancer » ICI 

 

La part de risque, celui que tout individu se doit d’assumer aussi bien en tant que personne exerçant sa responsabilité individuelle et en tant que citoyen enserré dans un corps de règles de vie en commun, est toujours difficile à quantifier. L’excès, même s’il prête à interprétation, est assez facile à identifier : l’abus de consommation alcoolique est chiffrable. En revanche, la plage entre l’abstinence et la consommation modérée a des contours difficiles à délimiter. En ce domaine, comme dans tous les autres, le mieux est l’ennemi du bien : prôner, comme le Pr Houssin, la prohibition, relève d’une conception infantilisante de la société. Le n’y touchez jamais est l’équivalent du « cachez-moi ce sein que je ne saurais voir », pure hypocrisie et méconnaissance dramatique des ressorts profonds de l’être humain. Nos politiques de santé publique, si elles ne veulent pas se réduire à de piètres campagnes de communication, doivent se frotter à la société telle quelle est et non, continuer de véhiculer des présupposés idéologiques. L’entre-soi, qui vaut aussi bien pour les hygiénistes que pour ceux d’entre nous qui font semblant d’ignorer les méfaits de l’alcoolisme, n’est plus de mise dans une société démocratique. Même si ça choque les beaux esprits pudibonds, je préfère le modèle politique à l’ancienne, bon vivant, soucieux des libertés publiques, aux tenants d’une société pure et dure, liberticide où le risque de mourir n’est plus assumé.

 

Pour ne pas être en butte aux critiques des « scientifiques » j’ai lu les 60 pages de l’expertise collective et je vous en livre quelques morceaux choisis.

 

Lire la suite ICI

 

Je n’ai rien à ajouter ni à retrancher à mes propos de l’époque.

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26 juillet 2016 2 26 /07 /juillet /2016 06:00
Non messieurs les « dégustateurs patentés » vous ne pouvez juger du niveau global d’une appellation !

Arrêtez de nous faire prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages, messieurs !

 

Y’a peu de dames.

 

Quel part volumique de la production d’une appellation dégustez-vous lorsque vous vous rendez à l’invitation de son interprofession ?

 

Je n’ai pas de % mais je défie quiconque d’entre vous de me démontrer que celui-ci est représentatif du gros de la troupe.

 

Vous ne dégustez que ce qu’on vous propose, une minorité de vins, et je suppose que les interprofessions ne mettent pas en avant la sauce.

 

Alors, comment donc l’un de vos confères, qui gigote dans tous les sens pour se faire reconnaître, quitte à affirmer sur Face de Bouc qu’il est tricard dans certaines appellations pour cause de critique non-conforme à la ligne de communication de leur maison (tout le monde rigole), qui cherche à corps perdu des piges pour exercer son don pour le « journalisme libre » (ça l’empêche pas de dîner dans les châteaux de Bordeaux), peut-il écrire ceci :

 

« À Sancerre, comme dans toutes les appellations françaises, il y a les viticulteurs consciencieux et les autres. Certains réalisent des vins de très grands niveaux, ils sont connus et majoritaires, et d’autres profitent d’une demande élevée pour afficher des prix encore plus élevés. Or, déguster des sancerres c’est aussi s’apercevoir que les vins ne sont pas toujours au niveau qualitatif exigé par de tels prix. Et cette vérité n’est pas toujours bonne à dire. Dès lors, s’attaquer à la sacro-sainte appellation, c’est aussi, un peu, s’attaquer à la poule aux œufs d’or. »

 

C’est clair comme du jus de boudin et surtout ça n’est étayé sur aucun chiffre, aucun pourcentage permettant de juger de la représentativité de l’échantillon que ce grand homme en devenir a dégusté.

 

Que cette part soit ultra-minoritaire c’est consubstantiel au métier de «dégustateur qui fait payer l’accès ses prestations» : notes et commentaires. Il ne va se commettre à déguster des jus qu’achètera madame Michu chez Lidl.

 

Il est donc normal qu’on lui dise camembert lorsqu’il vient du haut de sa haute expertise nous délivrer des bons et des mauvais points sur la qualité générale des sancerres ou des vins de l’IGP Val de Loire.

 

Le monde des amateurs de vin est fort étroit, élitiste, et je comprends parfaitement que la compétition fasse rage pour tenter de gagner leurs faveurs, leur faire ouvrir leur porte-monnaie.

 

Ce que je conteste c’est, qu’au nom d’un accès privilégié à la dégustation, certains s’érigent en journaliste défenseur des consommateurs alors qu’ils ne s’en donnent pas les moyens ou qu’ils ne soient en capacité de se les donner.

 

À chacun son job, et je préfère la relation du journaliste du Berry-Républicain de l’affaire des arrachages des vignes IGP, imprégnée de l’esprit du lieu, modeste, factuelle, à l’analyse d’un soi-disant spécialiste qui ne voit pas plus loin que le bout de son verre.

 

L’entame était pourtant alléchante : « Comme Xavier de Maistre en son temps, tout porte à croire que certains ont surtout voyagé dans leur chambre et n’ont pas eu plus de soucis du monde réel qu’un enfant dans un bac à sable. Le monde pour certains de la presse vinique se résume aux dépêches de l’AFP. Ainsi, de l’affaire des plants arrachés à Sancerre, une grande majorité de médias viniques reprennent les écrits de l’agence française sans se soucier d’un quelconque intérêt du réel.

 

Réduisant les frais de piges et l’activité journalistique à son degré le plus faible, il aurait été intéressant de mener un peu l’enquête. Car finalement, derrière ce vandalisme primaire il se cache des choses bien plus complexes. »

 

La complexité du réel : oui je plussoie mais j’avoue que cet esprit supérieur n’a guère éclairé ma lanterne. Sans doute suis-je imperméable à la pertinence de sa pensée.

 

Rester dans le flou, l’ambiguïté, la généralité, sur la base d’une affirmation péremptoire non étayée, ce n’est pas du journalisme mais simplement l’expression d’un point-de-vue, qui peut avoir une certaine valeur mais qui ne peut se prévaloir d’un travail exhaustif d’enquête et de mise en perspective.

 

Bon prince je comprends tout à fait la prudence de ce dégustateur patenté qui fait payer par abonnement ses prestations : il ne va pas risquer de se faire mettre à l’index du côté de sancerre en levant trop haut le voile qui, selon lui, cache plus ou moins bien la réalité.

 

Retournez à vos chères notes, épargnez-nous vos postures de sachant, contentez-vous de votre biseness, vous n’êtes et vous ne serez jamais un vrai journaliste mais bien sûr libre à vous d’exprimer votre point de vue sur le Mondovino mais ce ne sera qu’un point de vue parmi d’autres. Rien de plus, rien de moins.

 

« Sans la liberté de blâmer, il n'est pas d'éloge flatteur. »

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25 juillet 2016 1 25 /07 /juillet /2016 06:00
La fille de la belle-mère de Denis Saverot qui ne boit que du Bordeaux a rendu visite à Robert Parker dans son bourg natal de Monktown Maryland.

« Avant de prendre l’avion, un négociant bordelais nous a prévenus : « Parker a fait trembler pendant plus de trente ans les plus grands châteaux, et de riches propriétaires s’abîmaient en génuflexions comme s’il était le représentant de Dieu sur terre. Mais vous verrez, aux Etats-Unis, le pape des vignobles vit dans un trou paumé. Tout près de la maison de son enfance »

 

D’entrée de jeu ce nous m’interroge * : l’envoyée spéciale du Monde à Monktown Maryland n’est donc pas allé seule jusque dans ce trou paumé du Maryland, a-t-elle été accompagné par sa moitié notre Denis de la RVF ?

 

* Si le nous est ici de modestie il est donc masculin singulier et s’utilise pour un seul locuteur à la place du je pour gommer le côté trop individualiste du je, tout en maintenant un accord sylleptique au singulier. en conséquence prévenu devrait être au singulier. Idem pour le nous de majesté.

 

Je comprends aisément que le grand Bob vaille le déplacement et qu’un journal de référence comme le Monde, que je soutiens financièrement par mon abonnement, ouvre sa tirelire pour que Raphaëlle Bacqué, plutôt branchée politique, aille l’ausculter.

 

Mais il est où ce trou de Monktown Maryland ?

 

 

« Maintenant que l’on traverse les forêts du Maryland et de vastes étendues herbeuses où trônent de grandes laiteries, on comprend mieux. L’autoroute entre Washington et Baltimore est embouteillée, mais Monkton (Maryland), le bourg natal de Robert Parker, à trente minutes de Baltimore, a gardé cette allure de campagne américaine un peu terne. Six mille habitants, une poste, des commerces en bord de route, pas de centre. Une sorte d’opposé esthétique aux beaux villages de Saint-Emilion ou de Châteauneuf-du-Pape, dont Parker aime tant les vins. »

 

Pas de doute ils ont fait le déplacement et Robert Parker leur a donné « rendez-vous pour le déjeuner au Vito’s Café, un restaurant italien posé au bord d’une route, où il a ses habitudes. Il est là, installé tout au fond, près des cuisines. Très grand même assis, massif et bien carré à sa table, le visage barré d’un grand sourire : un genre d’Orson Welles dans Falstaff.

 

Derrière lui, on devine à peine deux béquilles avec lesquelles celui qui arpentait autrefois les vignes se déplace désormais, handicapé par un mal de dos chronique que les années – il court sur ses 70 ans – et l’embonpoint n’ont pas arrangé.

 

Posées sur la nappe blanche, deux bouteilles. L’une de blanc, l’autre de rouge. « Ils font partie de mes préférés », dit négligemment Robert Parker, et les serveurs du restaurant sont venus discrètement examiner les deux élus. »

 

« … Le vin blanc qu’il a apporté vient d’Amérique. « C’est un chardonnay du nord de la Californie, un Aubert », explique-t-il en le faisant servir pendant qu’on apporte du jambon italien. Le rouge, un Saint-Préfert, « un châteauneuf-du-pape racheté par une Parisienne, Isabel Ferrando, une ancienne financière qui s’est reconvertie dans la vigne et fait ce vin superbe ».

 

On le boira en dégustant ces petits crabes à la carapace molle que l’on ramasse à la fin du printemps dans la baie de Chesapeake. Le serveur a eu droit de goûter les breuvages. Aux tables voisines, la plupart des convives déjeunent en buvant des sodas.

 

« Je bois du vin tous les jours. C’est mon plaisir, reconnaît le dégustateur. Même lorsque je dois tester 150 ou 200 vins dans la journée. Jamais je ne m’en suis lassé.»

 

Fort bien me dis-je tout en pensant dans ma petite Ford d’intérieur que les époux n’ont pas fait le déplacement que pour licher deux belles bouteilles choisies par le Robert ?

 

Puisque la cave du Robert est, dit-on, l’une des plus belles des Etats-Unis et qu’il ne la fait que très rarement visiter, notre Raphaëlle Bacqué aurait pu tenter d’obtenir ce privilège au lieu d’interroger au téléphone, son ami Jeffrey Davies, un négociant américain installé à Bordeaux, pour qu’il lui confie : « Je crois qu’il en a deux, protégées comme des abris antiatomiques, contenant près de 40 000 bouteilles… ». Un trésor donc, « Tout juste avoue-t-il conserver « 90 % de vins français, surtout des bordeaux, des vins du Rhône et des alsaces, de grands californiens, des nebbiolo du Piémont, des sangiovese de Toscane, de magnifiques espagnols, des grands vins blancs allemands, des australiens et quelques sud-américains ».

 

Sans être taxé de mauvaise langue je suis en droit de me demander pourquoi l’envoyée spéciale du Monde et son accompagnateur – rappelez-vous le nous initial – a fait ce long déplacement pour rencontrer le grand Bob car, hormis ce que je viens de citer, tout le reste de l’article aurait pu être écrit depuis Paris sur la base de la documentation existante.

 

De même, les 2 photos illustrant l’article sont des photos d’archives, pourquoi ne pas avoir saisi notre cher Parker à la table du Vito’s café avec ses deux bouteilles ? Peut-être que notre Bob ne l’a pas souhaité ? Je ne sais.

 

Ce que je sais en revanche, en tant lecteur abonné du Monde, c’est que je paie pour avoir des nouvelles fraîches, pas du réchauffé : la énième évocation du fameux millésime 1982, du jugement de Paris, sa rencontre avec les époux Rolland, la saga de Valandraud…

 

Que cette histoire constitua la toile de fond du reportage, pourquoi pas, les lecteurs du Monde pour leur plus grande part ne font pas partis du Mondovino, mais tout de même ce déjeuner au Vito’s café aurait dû être l’occasion d’un portrait du Robert Parker en semi-retraite, d’une vraie interview le poussant un peu dans ses retranchements à propos de ceux qui prétendent lui succéder ou du devenir de sa méthode. Bref, faire le job de journaliste.

 

Nos grands médias papier souffrent nous dit-on, leur lectorat payant s’effrite, ils sont en quête d’un nouveau modèle économique pour répondre au défi d’INTERNET, mais ce n’est pas très étonnant au vu de ce cas précis : rien de neuf dans votre papier madame Bacqué !

 

À quoi rime ce déjeuner au Vito’s café de Monktown Maryland ?

 

Simplement à déguster avec Bob deux de ses beaux flacons, tirés de sa fantastique cave, en mangeant des petits crabes à la carapace molle ramassés à la fin du printemps dans la baie de Chesapeake ?

 

Ça fait cher l’emprunte carbone !

 

Mon dernier espoir c’est que le Denis, qui aime tant les déjeuners people, nous ponde un édito flamboyant dans la prochaine RVF où, avec son sens aigu des trémolos, il nous contera par le menu ce déjeuner avec Robert Parker au Vito’s café.

 

J’attends.

 

Je vous donne le lien pour accéder, si vous êtes abonnés, à l’intégralité de l’article de madame Bacqué : ICI 

 

Cet article a aussi été publié dans le numéro papier du samedi 23 Juillet page 20 L’été du Monde, dans la rubrique : ils ont façonné le goût, sous le titre : Robert Parker, palais royal.

 

Là nous avons droit à une photo de Bob, datée du 12 juillet, dans sa fabuleuse cave. Donc madame Bacqué n’a pas tout à fait « fait le voyage pour rien » à Monktown Maryland…

La fille de la belle-mère de Denis Saverot qui ne boit que du Bordeaux a rendu visite à Robert Parker dans son bourg natal de Monktown Maryland.
La fille de la belle-mère de Denis Saverot qui ne boit que du Bordeaux a rendu visite à Robert Parker dans son bourg natal de Monktown Maryland.
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22 juillet 2016 5 22 /07 /juillet /2016 06:00
Supplique pour sauver le soldat Thierry Desseauve de l’anonymat... il faut que les mouches changent d'âne…

Fut un temps où pour accéder au faîte de la notoriété il fallait avoir sa marionnette aux Guignols de l’info.

 

Dans le Vinoland, de nos jours, l’irruption de Gros Vins de France qui semble avoir cessé d’émettre, du Glourafi sur Twitter et tout récemment Terre de Vinasse, secoue le convenu qui sied à nos grands, ou ceux qui aspirent à l’être (oui, oui, j’en connais) critiques notateurs commentateurs en mots fleuris et payants.

 

Ce matin, avant que la touffeur de cette fin de juillet ne m’oblige à sucer de la glace, je prends la plume pour réparer l’injustice faites à Thierry Desseauve.

 

Dans un couple, il y a toujours un dominant, voyez par exemple chez Pernod-Ricard c’est le père Paul qui a tenu le manche avant de le céder à un autre Ricard. Qui connaît les Hémard ? Moi bien sûr car je sais tout ou presque…

 

Chez Bettane&Desseauve y’en a que pour le premier.

 

Pour preuve Terre de Vinasse qui le met à nouveau à sa Une :

 

« Suite à un énième article volontairement polémique sur l’éternel sujet du vin bio (passé dans un premier temps de la rédemption à l’imposture, puis à l’avenir du vin, tout ça en moins de 3 ans) et du vin naturel (une « tromperie« , dont de plus en plus de spécimens sont cependant « quite good » ), publié cette fois en anglais, Terre de vinasse est allé à la rencontre de Michel Bettane, le critique francophone le plus anglophone de la planète wine, véritable dégustateur extraterrestre planant à des années-lumière au-dessus de ses contemporains. »

 

La suite ICI 

 

Et pourtant ces derniers temps le Thierry il est sorti de l’ombre pour monter au front sabre au clair et proclamer que le bio était l’avenir du vin.

 

Vent debout plein gaz : On ne peut plus dire aux consommateurs « buvez notre vin cher » tout en le cultivant comme un champ de patates ! » Thierry Desseauve 

 

« Comme toujours, il y a des gens en avance, reconnaît Thierry Desseauve. Mais au début des années 90, il n'y avait pas grand-chose ». Et puis une nouvelle génération de viticulteurs est arrivée, consciente que l'on ne peut plus polluer les sols impunément, soutenu par des cavistes et des bars à vin avant-gardistes. »

 

Pourquoi cet ostracisme à l’égard de ce bon Thierry ?

 

Moi je l’aime bien le Thierry, il fait du vélo comme Sarko…

 

 

Mon Ventoux de la journée ! notait-il le 14 juillet.

 

C’est tout de même lui qui tient les rênes de la boutique même si N de R ne lui coûte pas très cher en notes de frais vu qu’il se fait rincer au château en permanence.

 

Thierry il est encore jeune et beau même s’il a pris quelques kilos. Certes il a un côté gendre idéal qui sans doute le dessert mais que diable il mérite mieux que ce dédain.

 

Je lance donc un appel, suis même prêt à financer un publi-reportage dans la RVF afin que justice lui soit rendue.

 

Alors en parodiant Jean-Michel Larqué à propos de Thierry Rolland nous pourrons, vous pourrez affirmer « Tout à fait Thierry… » et celui-ci pourra répondre « J'ai bien l'impression que les mouches ont changé d'âne ».

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21 juillet 2016 4 21 /07 /juillet /2016 06:00
Facile comme le bien manger et le bien boire : la preuve par l’image… le manifeste de ceux qui ignorent la GD

Il fait trop chaud pour travailler mais ça ne m’empêche pas de pédaler, sur mon fier destrier, pour aller faire mon marché, mes courses comme dirait madame Michu. C’est meilleur pour la santé que de pousser son caddie dans les allées de la GD pour acheter des légumes frigorifiés, des fruits anesthésiés, du pain congelé, de la viande operculée…

 

Bien évidemment les grincheux vont m’objecter que j’ai le temps, tout mon temps, puisque je me tourne les pouces aux frais des caisses de retraite. Certes, mais combien de retraités dans nos belles provinces, dans leur grosse ou leur petite auto, vont pousser le chariot en des centres commerciaux sis aux lisières de la ville.

 

Le temps je l’ai toujours pris et je ne vais pas entonner mon couplet sur celui passé, par les je n’en ai pas, devant leur télé ou leur écran d’ordinateur.

 

Au petit matin je bâte mon vélo (pour les ignorants : je muni ses flancs de sacoches) et je fonce ventre à terre vers un Terroir d’avenir sis rue du Nil. En un petit quart d’heure je suis à pied d’œuvre. D’abord les légumes et les fruits de saison puis la crèmerie-fromagerie, je laisse mon cabas empli pour me rendre à la boucherie-charcuterie où je croise Lily ma bouchère, je choisis, je paye et part vers la boulangerie. Même procédure : je choisis, je paye, et je retourne vers mes premiers achats. L’heure est à emplir mes calebasses. Je le fais avec soin, les patates au fond, les fruits fragiles au-dessus.

 

Je charge mon cheval et repart lourdement lesté.

 

Une fois passé le Pont neuf le parcours est plus tranquille, c’est comme si mon fidèle destrier posait la gomme de ses pneus sur les rails évitant ainsi les fondrières que notre maire ne prend pas la peine de boucher. Elle préfère communiquer sur son amour du vélo.

 

Arrivé au bas de mon château je déleste ma bête, l’attache dans sa stalle et dans un dernier effort je trimballe mes courses jusqu’à l’office.

 

Déballage.

 

Mise en place.

 

Photos.

 

Nature morte sur Face de Bouc.

 

Celles-ci vont de septembre en Corse jusqu’à ce mois de juillet enfin ensoleillé.

 

Vous voyez le bien manger c’est simple.

 

Le bien boire vient par surcroît.

 

Facile comme le bien manger et le bien boire : la preuve par l’image… le manifeste de ceux qui ignorent la GD
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20 juillet 2016 3 20 /07 /juillet /2016 06:00
Ça a l'odeur du sancerre, ça en a la couleur, mais ça n'en est pas. « C’est au pied du pied de vigne qu’on trouve l’arracheur. » la guerre des litrons…

Pour traiter d’un problème local rien ne vaut qu’un journal local sinon c’est l’AFP à tous les étages et ça a l’odeur du journalisme, ça en a la couleur, mais ça n'en est pas. Même dans un journal comme Sud-Ouest, où d’éminents journalistes, tel César Compadre qui, dans une vie antérieure a bourlingué dans tout le vignoble, pas la plus petite trace d’analyse sur ce sujet éminemment sensible : la plantation de vignes IGP dans un territoire d’AOC. Sans doute notre homme est-il en congés ou peut-être préfère-t-il nous servir le énième papier sur un chai futuriste érigé grâce au crayon d’une star parisienne de l’architecture.

 

Bref, comme disait Pépin (de raisin dixit Pierre Dac) revenons au Berry RépublicainRémy Beurion entre dans le sujet en détournant un célèbre proverbe :

 

« C’est au pied du pied de vigne qu’on trouve l’arracheur. Et pas deux ou trois plants, comme ça, en passant, comme on se débarrasse d’une mauvaise herbe. Non, 5.600 pieds de sauvignon en un temps record, la semaine dernière, probablement de bon matin.

 

Le viticulteur de Bué victime de cet arrachage sauvage et illégal ne découvre le pot aux roses que samedi matin, sur l’une de ses parcelles, non classées, situées à Saint-Satur».

 

« Ce ne sont pas n’importe quels pieds de vigne qui subissent les assauts d’arracheurs que la brigade de gendarmerie de Sancerre doit maintenant identifier. Ils sont issus d’une parcelle destinée à la production de vins d’identification géographique protégée (IGP), c’est-à-dire l’antithèse de l’AOC sancerre, garant de sa qualité depuis exactement quatre-vingts ans cette année en ce qui concerne le blanc depuis 1959 pour le rouge.

 

L’homme du cru, seul en capacité de restituer l’ambiance régnant dans le vignoble sancerrois, note que la tension est palpable, comparaison n’étant pas raison ça sent un chouïa la guerre des boutons, chère à du petit Gibus « Si j'aurais su, j'aurais po v'nu », où les gamins de Longeverne se querellent avec ceux de Velrans.

 

Alors le camarade Beurion y va encore avec la formule choc :

 

Tant que les antagonismes restent sous les bouchons, pas de problème. Sauf qu’à quelques arrachages symboliques, par-ci, par-là, se greffe aujourd’hui un arrachage de grande ampleur. Le viticulteur a déposé une plainte auprès de la gendarmerie de Sancerre, pour un préjudice estimé, à la louche, à 12.000 euros. La première récolte, issue de cette plantation effectuée il y a deux mois, devait être mûre dans trois ans. Ce ne sera pas le cas.

 

Pour le viticulteur, une chose est sûre : il fallait marquer le coup. Et la poignée d’hectares de vignes IGP arrachées, sur le sol sancerrois, est un marqueur symbolique. Mais qu’elle est cette indication géographique protégée qui fait tant hurler les viticulteurs enracinés dans l’AOC Sancerre?

 

La réponse est ICI 

 

Voilà pour le contexte, les faits, mais le sujet de la cohabitation, de la mixité à l’intérieur du périmètre d’une AOC, d’un vignoble dédié à l’IGP pose sans aucun doute des problèmes qu’on ne peut balayer d’un revers de la main.

 

Je ne vais pas ici entrer dans les subtilités de la règlementation française qui adore empiler des textes pour soi-disant protéger l’esprit de nos beaux terroirs pour ensuite s’en accommoder au gré des intérêts économiques d’une appellation.

 

En l’espèce tout part de l’œuvre magistrale, que nos grands chefs du vin ont érigé, la gestion à la française des autorisations de plantation. « Père, gardez-vous à droite; père, gardez-vous à gauche. » (Philippe le Hardi), érigeons des barrières, fabriquons des interdictions, bridons les initiatives au nom de la régulation pour ensuite pleurer sur notre incapacité à répondre aux attentes de ces fameux marchés.

 

Mais au bout du bout, lorsque le vin est tiré et qu’il faut le boire, l’argument qui se veut décisif de la directrice de l’Union viticole sancerroise, Nathalie Prieur, risque de se retourner vers l’envoyeur :

 

« Ça en a l’odeur du sancerre, ça en a la couleur, le message auprès du consommateur est donc moins évident, la classification devient floue pour lui. C’est un préjudice à moyen terme mais certains ne le voient pas arriver. »

 

D’autant que la différence de prix est significative.

 

Et si dans cette affaire, une grande part des vins de sancerre, vendue à bon prix du fait de la notoriété de cette appellation, n’était de par leur mode d’élaboration des parents très proches de l’IGP ?

 

Battre le tambour du terroir c’est bon pour le commerce mais nous les consommateurs qu’on appelle en renfort pour défendre une classification qui, rappelons-le, se voulait dès l’origine protectrice de l’origine (façon de parler) et qui par le biais des nouvelles ODG, cahier des charges, dégustations d’agrément, s’est muée en machine à égaliser, à normaliser, à nous proposer un breuvage blanc sans grande originalité.

 

Allez donc faire le tour des bistrots parisiens alimentés par la poignée de gros distributeurs du CHR et commandez un verre de sancerre !

 

C’est au mieux un petit blanc, au pire un truc insignifiant et c’est cher par-dessus le marché ; en clair ça équivaut à une brave IGP au prix d’une AOP renommée.

 

Arrachez tout ce que vous voulez mais sachez que la vérité est dans le verre non dans l’illusion de l’étiquette !

 

Avoir le beurre et l’argent du beurre c’est bien mais ça ne dure qu’un temps, alors au lieu de faire un sort à des ceps de vigne, d’avancer des arguments qui ne tiennent pas la route, tel «Si les gens veulent planter, qu’ils plantent autre chose que du sauvignon ou du pinot noir. Il est trop facile de mettre un vin de pays et un vin AOC dans une même cave. », de nous faire prendre des vins d’AOC pour des vins de terroir alors qu’ils ne sont que des enfants de l’œnologie moderne, les « concombres masqués de Bué » feraient mieux de se préoccuper de l’évolution des attentes des consommateurs. Vivre son stock de vieux buveurs c’est bien, anticiper les évolutions c’est mieux.

 

Et, entre nous, ce ne sont pas quelques arpents de vignes IGP nichés dans l’AOC sancerre qui vont faire de gros accrocs dans la notoriété de cette appellation. Avant de crier à l’incendiaire mieux vaut se préoccuper du feu qui couve dans la maison.

« J'ai gardé en mémoire le bruit des galoches cloutées qui résonnaient sur le chemin gelé d'école. J'ai fait mes humanités à la communale. Les bandes et les bagarres, je connais. La lutte des classes, la lutte pour la différence, la lutte pour une vieille et sombre histoire du passé. Il y a toujours eu ça, et il y a encore ça, pas seulement de village en village, mais de trottoir à trottoir... J'ai bien peur qu'aujourd'hui, dans certaines banlieues, la guerre des boutons soit plus violente. C'est peut-être là la vraie différence. Avec l'auteur de ce chef d'œuvre sur l'enfance, Louis Pergaud, je me sens chez moi, je suis un des enfants de cette guerre et je crois bien que tout le monde s'y retrouve en voyant le film. Pour moi, La Guerre des boutons, c'est la République des enfants... »

— Yves Robert

 

La célèbre phrase du petit Gibus « Si j'aurais su, j'aurais po v'nu » n'appartient pas au roman original. C’est en fait une reprise de la phrase « Si j’aurais su, j’aurais pas venu », figurant dans la rubrique « Une heure dix avec... » de L'Os à moelle (no 61, du vendredi 7 juillet 1939)

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18 juillet 2016 1 18 /07 /juillet /2016 06:00
Vous aimez ce vin nature : justifiez-vous !

Dans le cadre des nombreuses et brillantes cérémonies organisées pour fêter mon passage au millésime 68, j’ai eu à subir un étrange et arrogant questionnement.

 

Les faits : je dînais à l’une de mes tables favorites et, alors que je m’apprêtais à quitter le lieu, le chef me proposa de partager une belle bouteille avec des clients assemblés autour de la table d’hôte. Parmi eux des personnes de connaissance, lecteurs, amis sur Face de Bouc, j’acceptais.

 

Le chef me proposa une bouteille de vin de macération naturiste en diable.

 

J’opinais sans réserve.

 

Quand le vin est tiré il faut le boire.

 

Nous trinquâmes dans les règles.

 

Dans le tour de table, face à moi, une matrone, au visage guère avenant, me laissa à peine le temps de tremper mes lèvres dans le breuvage, me fusillant du regard, elle lâchait avec une moue méprisante :

 

- Vous aimez ça ?

 

Surpris mais peu enclin à me laisser agresser par quelqu’un que je ne connaissais ni d’Ève ni d’Adam, je contentai d’un : oui sec !

 

Le revers fut tout aussi rageur et cinglant :

 

- Développez !

 

Autour de la table, dans un silence gêné, les convives attendaient mon retour à deux mains mais comme je n’avais aucune envie d’en découdre, de me justifier face à une adversité fielleuse je me contentai d’un : j’aime et ça suffit à mon bonheur !

 

La mégère non apprivoisée ne lâchait pas prise : «c’est un peu court comme réponse !»

 

J’étalais un sourire narquois qui multipliait la fureur intérieure de l’aigre.

 

À ma gauche une jeune femme, mezzo voce, me disait : moi j’aime ce vin.

 

Moi je consommais.

 

En face, la madame fulminait avec des mots choisis que je vous épargne mais qui se résumaient en « si vous n’avez rien à dire sur ce vin c’est qu’il n’y a rien à en dire.

 

Je reposai mon verre pour stopper sa logorrhée vinaigrée : « madame je n’ai nul besoin de mettre des mots sur mes émotions… c’est vrai aussi bien pour le vin, que pour la musique… la peinture. »

 

Autour de la table on respirait, la passe d’armes aussi déplacée que virulente laissait la place à une conversation normale.

 

Pour la bonne compréhension du contexte cette petite escarmouche s’est déroulée dans un restaurant dont la carte des vins est exclusivement nature. Quant à la désagréable je sais par la magie de Face de Bouc qu’elle était là par la grâce d’une invitation du chef.

 

Alors pourquoi tant de haine face à ce vin de macération ?

 

Je ne sais mais ce que je sais c’est que ce type de comportement est le lot de ceux qui voient dans les vins nus, comme le dirait mieux que moi l’Apollon de Barcelone, des vins d’évier, des vins de bobos parisiens snobs, des friqués qui se la pètent.

 

Libre à eux de ne pas aimer, c’est leur droit le plus strict, mais qu’ils arrêtent de nous faire chier !

 

Au-delà de cette anecdote, plus largement je ne supporte plus l’engeance dégustative qui, à propos de tout et de rien, transforme le plaisir du vin en une forme de contrôle des connaissances : je n’en ai rien à péter d’identifier le cépage ou d’étaler une science du vin que je ne possède pas.

 

Bref, le vin de macération était bon, j’étais là pour fêter mon anniversaire non pour subir un interrogatoire musclé de la part de quelqu’un qui ne s’est même pas présenté : les bonnes manières se perdent ma bonne dame.

 

L’invitation du chef et ma présentation à la tablée par lui, trop aimable, trop élogieuse, est sans doute aussi pour une part dans l’ire de la revêche.

 

Sur le chemin du retour, Élisa Berthomeau me confiait qu’elle avait eu très envie de river le clou à cette malpolie. Elle trouvait, à juste raison, que ça ne faisait pas de tomber sur le râble de quelqu’un avec autant de véhémence à propos d’un simple verre de vin. Je lui répondais qu’avec ce genre de personnage il faut être économe de ses mots et qu’engager le fer ne sert à rien.

 

Et puis le lendemain dans ma revue de presse j’ai noté ceci :

 

«Ne pas trouver les mots pour décrire ce que l'on ressent en matière de goût, d'odeur et de texture est tout à fait naturel. Tout simplement parce que les mots et les sensations ne se forment pas dans les mêmes zones du cerveau.»

 

«J'irais jusqu'à dire que certaines sensations sont indicibles. Quand vous êtes bouleversé par une belle musique, vous ne parvenez pas à en expliquer la raison. C'est pareil. C'est pourquoi il est important de ne pas trop intellectualiser la dégustation, qui est plus un exercice sensuel qu'intellectuel».

Denis Dubourdieu

 

Merci pour ce moment de partage chère madame que Face de Bouc me demande avec insistance depuis d’intégrer à mes amis.

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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 06:00
68 ans l’âge de déraison...

J’ai eu 20 ans en 68 et je n’ai pu voter aux législatives qui virent le parti gaulliste ramasser la mise.

 

Et pourtant, ici, à Nantes, les spasmes des étudiants trouvaient un écho favorable chez les mecs qui se lèvent tôt le matin. Aux chantiers de Penhoët, à Nord-Aviation de Bouguenais, chez Say à la raffinerie de Chantenay, chez Saunier-Duval, et dans plein d'entreprises les salariés bougeaient. Ils se méfiaient de nous, de notre loghorée, de notre extrémisme gratuit. Dans les appareils syndicaux, des figures s'affrontaient : Hébert l'anarcho-syndicaliste de FO, son collègue Rocton trotskyste de Nord-Aviation, Louis Morice de la CFDT des employés des chantiers de l'Atlantique, un catho de gauche, Andrieu le Cégétiste hors appareil, un PSU... Ce bouillonnement touchait aussi, hors la ville, les paysans. Autour de Bernard Lambert, le tribun aux gitanes maïs, tombeur d'André Morice le maire de Nantes aux législatives de 58, le jeune Bernard Thareau, au regard bleu, visage d'ascète, empli d'une volonté farouche, et des moins connus tel Joseph Potiron de la Chapelle-sur-Erdre. Eux travaillaient sur les deux fronts. Ils étaient unitaires pour deux.

 

Qui peut imaginer aujourd'hui que le Joseph s'était trimballé dans le patelin avec un drapeau rouge flottant sur son tracteur ? On l'avait traité de communiste, ce qu'il n'était pas. Comme dans l'Espagne de la guerre civile les bonnes âmes lui ont taillé un costard de quasi-violeur de bonnes sœurs.

 

Pour la grande manif du 24 mai où les paysans, allant au-devant du mouvement populaire, investiraient la Centre-ville pour poser un acte symbolique, rebaptiser la place Royale : place du Peuple. Nous étions inquiets, le Général privé de ses godillots, pour tenter de reprendre la main sur la chienlit, allait jouer le soir à la télé le énième remake de moi ou le chaos. Coincé entre le couillemollisme de ses barons et l'intransigeance de la rue, le héros du 18 juin ne comprenait rien au film. Exaspéré par la lâcheté de ceux qui lui devaient tout, et incapable de comprendre nos ressorts profonds, il allait ressortir de son képi le coup du référendum.

 

La CGT et les alliés du Kremlin freinaient à mort, la vieille gauche agonisante, Mitterrand en tête, étaient à côté des pompes du mouvement, restait Mendès, qui faisait du Mendès, se méfiant des humeurs de la rue.

 

Le 25 mai, rue de Grenelle Pompidou veut reprendre la main, être de nouveau le maître du jeu. Il joue son va-tout. L'important pour lui c'est de lâcher du lest sur les salaires pour neutraliser la CGT de Séguy. Le falot Huvelin, patron d'un CNPF aux ordres suivra en geignant. Les progressistes de la CFDT, bardés de dossiers, assistent à un marchandage de foirail. Comme un maquignon sur le marché de St Flour, baissant les paupières sous ses broussailleux sourcils, tirant sur sa cigarette, roublard, tendu vers l'immédiat, le Premier Ministre ferraille, main sur le coeur en appelle à la raison, pour lâcher en quelques heures sur tout ce qui avait été vainement demandé depuis des mois, le SMIG et l'ensemble des salaires. Le lundi, chez Renault, à Billancourt, Frachon et Séguy, se feront huer. Chez Citroën, Berliet, à Rodhiaceta, à Sud-Aviation et dans d'autres entreprises, même hostilité, même insatisfaction. Le « cinéma » des responsables de l'appareil cégétistes à Billancourt n'a pas d'autre but que de blanchir les négociateurs, de mettre en scène le désaveu de la base.

 

Le 28 mai sous les ors de l'hôtel Continental Mitterrand, avec sa FGDS, se pose en recours.

 

Charléty

 

Dans la foule : Mendès-France. Le PC et la CGT ont refusé leur soutien. Dès la mise en place du cortège, au carrefour des Gobelins, il est évident pour les organisateurs que la manifestation rencontre un vrai succès populaire. Des drapeaux rouges et noirs flottent au-dessus de la foule. Le service d'ordre de l'UNEF nous encadre. A Charléty, nous nous installons dans les gradins. « Séguy démission ». André Barjonet, en rupture de ban avec la centrale lance « La révolution est possible » Geismar annonce qu'il va donner sa démission du SNESUP pour se consacrer à ses tâches politiques. Pierre Mendès-France n'a pas pris la parole. Aux accents de l'Internationale nous quittons calmement le stade. La manif est un succès mais elle nous laisse sur notre faim. Le mouvement est frappé d'impuissance et ce n'est pas la prestation de Mitterrand le lendemain qui va nous ouvrir des perspectives. A sa conférence de presse, l'un des nôtres, lui a demandé s'il trouvait « exaltante la perspective de remplacer une équipe qui n'a plus d'autorité depuis dix jours, par une équipe qui n'a plus d'autorité depuis dix ans... » Le député de la Nièvre, pincé, répliquera « je me réserve de vous montrer que vous avez peut-être parlé bien tôt et avec quelque injustice... » La suite allait prouver que le vieux matou avait vendu la peau de l'ours avant de l'avoir tué.

 

Le soir du mardi 28 mai, coup de théâtre, tel un grand fou rire, la nouvelle se propageait sur les ondes : Cohn-Bendit, en dépit de l'interdiction qui lui a été notifiée de rentrer en France, réapparaissait à la Sorbonne. Tout le monde riait, jaune pour certains, le pouvoir connaissait quelque chose de pire que l'impuissance, le ridicule. Christian Fouchet, car les télévisions des chaînes internationales sont là, est la risée du monde entier.

 

De Gaulle supportait mal c'était de voir beaucoup des Excellences du gouvernement - la saillie est de Bernard Tricot - se « décomposer biologiquement ». Seuls quelques originaux, du style Sanguinetti, ne cédaient pas à la panique. Le Vieux, ne pouvait camper sur cette position désabusée. Son goût du poker politique, qui l'avait vu affronter des pointures comme Churchill et Roosevelt, allait le pousser à un dernier coup de bluff.

 

La spontanéité de la marée des Champs-Elysées, et des foules des grandes villes de province, s'appuyait sur l'art consommé de la vieille garde du Général à mobiliser ses réseaux de la France libre. Mobilisation amplifiée par l'adhésion d'une partie du petit peuple laborieux excédé par le désordre et de tous ceux qui voulaient voir l'essence réapparaître aux pompes pour profiter du week-end de la Pentecôte. La majorité silencieuse, mélange improbable de la France des beaux quartiers et du magma versatile de la classe moyenne, trouvait ce jeudi 30 mai sa pleine expression.

 

 

La journée plana, d'abord suspendue à l'attente du discours du voyageur de Baden-Baden avant de prendre son envol avec le bras-dessus, bras-dessous des Excellences soulagées sur les Champs-Elysées, elle s'acheva, telle une feuille morte se détachant de sa branche, dans un mélange de soulagement et de résignation. Mai était mort et tout le monde voulait tourner la page, l’oublier. L'allocution du Général fut prononcé sur un ton dur, autoritaire, menaçant. L'heure de la normalisation avait sonnée. De Gaulle ne sait pas encore, qu'en fait, c'est une victoire à la Pyrrhus, une droite réunifiée et les veaux français ne tarderont pas à le renvoyer à Colombey pour élire Pompidou le maquignon de Montboudif.

 

Assis dans les tribunes du vieux Stade Marcel Saupin, au bord de la Loire, tout près de l'usine LU pour assister au match de solidarité en faveur des grévistes, entre le FC Nantes et le Stade Rennais. En ce temps-là, les footeux, parties intégrantes de la vie des couches populaires venant les supporter match après match, osaient mouiller le maillot, prendre parti pour eux. José Arribas, l'entraîneur des Canaris, républicain espagnol émigré, à lui tout seul personnifiait cette éthique.

 

Le stade semblait abasourdi, comme si on venait de lui faire le coup du lapin. Les Gondet, Blanchet, Budzinsky, Le Chénadec, Suaudeau, Simon, Boukhalfa, Robin, Eon, conscients de la gravité du moment, nous offraient un récital de jeu bien léché, à la nantaise comme le dirait bien plus tard, un Thierry Rolland revenu de ses déboires de mai. Il fera partie de la charrette de l'ORTF. Comme quoi, mai, ne fut pas, contrairement à ce nous serine l'iconographie officielle, seulement un mouvement de chevelus surpolitisés. Marie, ignare des subtilités de la balle ronde, applaudissait à tout rompre. A la mi-temps, en croquant notre hot-dog, dans la chaleur de la foule, sans avoir besoin de nous le dire, nous savions que ce temps suspendu que nous venions de vivre marquerait notre vie. Nous ne serions plus comme avant. Lorsque l'arbitre siffla la fin du match, l'ovation des spectateurs, surtout ceux des populaires, sembla ne jamais vouloir s'éteindre. C'était poignant. La fête était finie, personne n'avait envie de retrouver la routine du quotidien. 

 

 

 

 

Mineur je n’avais le droit que d’aller à la guerre mais comme il n’y en avait plus je n’ai jamais porté l’uniforme mais j’ai fait mon service national au titre de la coopération.

C’est dans l’autorail Nantes-La Roche s/Yon en lisant une interview de Michel Rocard que j’ai décidé de mettre mes pas dans les siens.

Jacques Julliard son compagnon de route explique très bien la trajectoire qui fut la sienne et, bien sûr, à un étage moins élevé la mienne.

« Du jeune inspecteur des finances contestataire à l'homme d'Etat social-démocrate, la carrière de Michel Rocard a été une évolution plutôt qu'une continuité. Mais elle montre aussi une constance dans la personnalité morale. »

 

Michel Rocard fut un moment de notre conscience politique

 

Ceux qui voient dans la carrière politique de Michel Rocard une continuité parfaite ont bien de la chance. Une amitié de soixante ans - j'ai fait sa connaissance en 1956 - m'amène à la conclusion inverse : je suis frappé de son évolution. Il y a bien loin en effet du jeune inspecteur des finances des années 60, qui défile le poing levé et l'œil allumé à la tête des maigres cortèges du PSU, en proférant des slogans révolutionnaires, au vieil homme d'Etat, la paupière tombante et le visage marqué par la maladie, qui médite avec une lucidité aiguisée par l'expérience sur l'incompatibilité entre le devoir de vérité et les outrances de la démocratie d'opinion.

 

Oui, si continuité il y a, elle relève de ce que Pierre Bourdieu appelait l'illusion biographique. C'est bien du même homme qu'il s'agit, mais qu'est-ce que l'identité d'un homme ? En apparence au moins, une convention intellectuelle fondée sur une continuité biologique.

La suite ICI 

 

Pour ceux qui n’auraient pas lu ma chronique : La fidélité est une valeur sûre parole d’un vieux grognard de Michel Rocard… Joxe, Julliard, Cavada, Chavagneux parlent vrai lire ICI 

 

Par bonheur l'année 1948 était bissextile... le fabuleux destin du 12 juillet... 

 

« Au bord de la nationale des vacances, au Bourg-Pailler, participant au baby-boom, sa mère, qui se prénommait Berthe (4 juillet), son futur parrain Alain (16juillet), la sage-femme qui devait l'accoucher Marthe (29 juillet) et son futur saint patron se fêtait le 25 juillet, l'attendaient. Par bonheur l'année 1948 était bissextile sinon il eut pu, horreur absolue en cette Vendée si peu républicaine, naître le 14 juillet.

 

Sa sainte mère étant une bonne chrétienne, et comme en ce temps là le dimanche était sacré, alors il préféra le lundi 12 pour faire son apparition. Une date bien anonyme, et qui le resta fort longtemps, jusqu'à ses 50 ans. Ce jour-là, en une chaude fin de soirée, le front de Zidane se propulsa par 2 fois à bon escient contre ce que les reporters de ses jeunes années qualifiaient de cuir. La France exulta et 1 et 2 et 3... et même si plus personne ne se souvint de ce brave Guivarc'h préposé officiel à l'engraissement du score le 12 juillet 1998 s'inscrivit en lettres d'or au fronton de l'orgueil national. Bref, alors que le lundi 12 juillet 1948, aux alentours de midi, la paroisse Saint Jacques le Majeur s'enrichissait d'un futur enfant de chœur, et la Vaillante Mothaise voyait éclore l'un de ses plus valeureux capitaine, personne ne se doutait qu'un jour cette date serait à marquer d'une pierre blanche ou plutôt d'une étoile sur les maillots des Bleus. »

 

La suite ICI

 

Pour la photo-titre : 

 

Rocard, ce jour-là, a tombé la veste et bu un coup. En l’état, il évoque les acteurs secs et sérieux comme Charles Denner ou Maurice Ronet dans un film Nouvelle Vague. Mais la position est évocatrice aussi parce qu’elle fait directement penser à Charlot assis sur le pas d’une porte avec le Kid à ses côtés, les bras croisés, le regard triste.

 

Une photo en 1985, l’homme politique paraît plongé dans un abîme de mélancolie pensive, une minute d’asthénie dans un océan de sur-activisme volontariste, recroquevillé contre la balustrade (le garde-fou ?), le vin consolateur posé à ses côtés...

 

Lire ICI

 

 

 

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10 juillet 2016 7 10 /07 /juillet /2016 06:00
Hommage aux bacheliers qui ont eu plus de 20/20 La Cause du Peuple, le grand organe révolutionnaire, osera écrire « Lagarde meurt mais ne se rend pas »

Ceux qui n’ont pas vécu l’effervescence échevelée du mois de mai 68 ne peuvent pas comprendre l’étrange état, mélange de frustration, de manque, d’envie de repasser les plats, dans lequel se sont retrouvés certains lycéens qui avaient dû se contenter, dans leur bahut de province, du rôle de spectateur de la chienlit chère au vieux général. Beaucoup d’entre eux avaient bien sûr organisé des répliques, des poussées d’acné juvénile, de la contestation contre la machine à ingurgiter, mais ce n’était que des ersatz. Alors, ceux d’entre eux qui étaient monté à Paris pour entrer en Prépa, avaient élevé les évènements au rang d’un mythe fondateur. Ils ne touchaient plus terre. Ils ne voulaient pas descendre de leur petit nuage. Ce coitus interruptus, fin prématurée de la grande fête de printemps, les plongeaient dans une forme avancée de fouteurs de merde professionnels. L’ordre régnait à nouveau mais la sève vive de ces jeunes pousses, à la tête bien faite, ne demandait qu’à gicler. Et elle giclait : du règlement intérieur tatillon, avec ses contrôles, ses justifications d’absence, du cérémonial des mandarins, du folklore poussiéreux de Louis-le-Grand, ils font table rase. Le tout est possible est autoproclamé. C’est le règne du bon vouloir d’une poignée de trublions. La hiérarchie s’écrase. S’incline. Se couche. La spirale du bordel s’installait.

 

Je débarquais dans ce happening permanent, où ce pauvre Lagarde, le coéquipier de Michard, connu de tous les potaches de France et de Navarre pour ses manuels de littérature, tête de turc n°1, harcelé, bousculé lors d’un concours blanc, débordé, s’écroule victime d’une crise cardiaque dans l’indifférence générale. La Cause du Peuple, le grand organe révolutionnaire, osera écrire « Lagarde meurt mais ne se rend pas ; en l’occurrence l’imbécile réactionnaire pique sa crise cardiaque. Et, alors que l’administration, les réformistes et les révisos s’empressent autour de la sommité académique à terre, le camp antiautoritaire continue son action ; pourquoi s’arrêter pour une autorité académique ? Peu nous importe le sort d’un pauvre type, du moment qu’il cesse de répandre ses insanités ! » Ce n’est pas du karcher mais du lance-flammes. Féroces les tigres de papier, adeptes de l’eugénisme « intellectuel », ils règnent sans partage sur « Base Grand ». Tout le monde s’écrase, le proviseur et le censeur sont aux abonnés absents, les surgés ne voient et n’entendent rien, alors les insurgés s’enhardissent, libèrent le « jardin privé » du proviseur, le portrait du Grand Timonier orne le monument aux morts.

 

Le soir de mon rendez-vous avec les chefs du groupe Action de la GP, la cellule « gépéiste » de « Base Grand se réunissait. L’ambiance était électrique car la semaine précédente, à l’issue de la projection de l’Orient rouge, opéra socialiste-réaliste à la sauce aigre-douce chinoise du Grand Timonier, où, bien sûr, les larges masses paysannes triomphaient des affreux contre-révolutionnaires, les « nouveaux enragés » s’étaient payés le luxe d’envahir la salle voisine où se tenait une réunion d’une association de parents d’élèves « réac ». Bombages des visons de ces dames, croix gammées sur les murs, horions divers et variés : pourris, bourgeois décadent, crises de nerfs, en dépit de la position minoritaire des larges masses étudiantes les mâles bourgeois décadents laissaient les gardes rouges humilier leurs dignes épouses. En dépit du caractère minable, honteux, de cette action, les « partisans » de «Base Grand» sont donnés en modèle. Portés au pinacle de la Révolution prolétarienne. En entrant dans le hall du vénérable lycée, avec mon jean et mon perfecto, j’eus l’impression de pénétrer sur la scène d’un théâtre d’avant-garde où les acteurs singent le réalisme en se fagotant de guenilles et sur-jouent pour persuader le public de leur engagement extrême à la cause des masses opprimées. Les larges masses de la cellule « gépéiste » de « Base Grand », comme me l’avait dit cette ordure de Gustave, n’étaient qu’un ramassis de petits frelons : des impuissants dangereux.

 

L’essaim bourdonnait. Je croisais dans le hall de Louis le Grand l’un des meneurs de la GP des khâgneux, Guy Lardreau, drapé dans son long manteau de cuir noir battant les talons de ses lourdes bottes. Le louangeur de Beria, se la jouait Guépéou avec un zeste de dandysme canaille en se trimballant en permanence avec une cane gourdin : son instrument de travail pour casser du facho, tout particulièrement les fafs d’Occident. Mon allergie viscérale pour les apprentis bolchevicks, ceux qui n’avaient pas mouftés lorsque les chenilles des chars des pays frères écrasaient le printemps de Prague, me poussait à aller lui taper sur l’épaule pour lui montrer mes mains bousillées par la tôle Citroën et le traiter de petit branleur. Bien sûr, je m’abstins, mais tout en grillant une cigarette, car j’étais en avance, je ne pouvais m’empêcher de penser à Pierre Clémenti. Le Pierre Clémenti de Belle de Jour, avec sa gueule cassée, ses ratiches d’acier, ses chaussettes trouées et sa dégaine de petite frappe. Lui, au moins, dans la chambre minable du HBM, où Catherine Deneuve, grande bourgeoise en mal de souillure, venait faire des passes, il collait bien à son personnage. L’habitait.

 

Comme l’écrivait d’une main, avec gourmandise, ce vieux pédéraste de Mao, en fouinant de l’autre dans la petite culotte des petites filles en fleurs : « Feu sur le quartier général » : pào sīlìngbù zhāng. Dans le nid de frelons ma tête grésillait, une envie cataclysmique de me vautrer dans le lit d’une grande bourgeoise me consumait. Tout ce gris sur gris de l’atelier 86 rythmé par le lancinant déroulé de la chaîne s’ajoutant au plomb de mes reins cassés, au gras de la tambouille de la cantine, aux brimades des petits chefs, à l’infinie résignation de mes compagnons de galère, sortait par tous les pores de ma peau. Suintait. Puait. Feu sur le quartier général ! Il me fallait reprendre l’initiative. Sortir de la nasse. En clair, devenir un agent double. Trahir tout le monde. M’installer à mon compte. Tirer parti de la situation. Jouir sans entrave comme les murs de la Sorbonne le proclamaient. Comme l’actionnaire majoritaire de ma petite entreprise était ce paranoïaque de Marcellin, j’allais le gaver de dividendes. Lui servir la soupe qu’il espérait : la main du KGB via Georges Habache et le FPLP, celle vérolée du Mossad pour les attaques de banque et, bien sûr, cerise sur le gâteau, celle tentaculaire et omniprésente de la CIA qui, pour l’attentat de la Piazza Fontana à Milan, charge l’extrême-gauche qui à le dos si large. Restait à convaincre les adorateurs des larges masses de marner pour mon compte au moindre coût. La voie s’avérait étroite.

 

Les « nouveaux barbares » étaient en retard ce qui me laissait tout le loisir de contempler quelques beaux spécimens de petits culs des beaux quartiers qui cherchaient des mains prolétariennes, rudes et calleuses, pour connaître le grand frisson que seules les « larges masses », fleurant bon la sueur et le cambouis, pouvaient leur procurer. Je ne raille pas, elles n’attendaient que ça. Les têtes d’œufs de la GP, sinistres, fuyaient le sexe considéré comme la faille suprême où la pureté révolutionnaire risquait de s’engloutir, se diluer, alors ils combattaient et réprimaient les délices de la chair comme l’opium des fils de bourgeois en quête de rédemption des maîtresses de leurs pères et des amants de leurs mères. Cet ascétisme ne pouvait que profiter à ceux qu’ils vénéraient : les prolos. L’érection des damnés de la terre en phares de la Révolution les plaçaient en position de se servir à volonté au grand festin du cul. Mes sources de basse-police brodaient avec délectation sur les parties de jambes en l’air entre les belles héritières et la nouvelle race des élus dans les alcôves des grands appartements du Triangle d’or. On aurait cru qu’ils tenaient la chandelle les balourds des RG.

 

Des amuse-gueules, ces mijaurées en jeans me mèneraient droit au lit de leur mère. J’allais me goinfrer. Avant le festin, il me fallait assurer mes arrières. Un détail vous a sans doute échappé dans mes écrits touffus et confus : à aucun moment je n’ai fait état de mes obligations militaires. Comme dans notre beau pays, en ces années-là, nous vivions encore sous le régime de la conscription obligatoire, lorsque je plaquais mes études mon statut était celui de sursitaire. Ma réussite au concours de la Police Nationale ne me dispensait pas d’être appelé sous les drapeaux et, si j’avais été un tant soit peu plus attentif, j’aurais du m’étonner que la hiérarchie m’offrît une affectation avant que je n’eusse fait le bidasse. Ces enflures m’avait débusqué dès l’origine et m’avait manipulé. À mon tour de leur rendre la monnaie de leur pièce : préserver les avantages de mon statut d’agent infiltré et me débarrasser au plus vite de ma couverture de prolo chez Citroën tout en évitant de me retrouver 2ième pompe au camp de Mourmelon et être soumis aux menus plaisirs de salopards du type de l’adjudant-chef Chanal. Pas simple mais faisable, j’avais ma petite idée sur le mode opératoire. Dans le bordel ambiant et la paranoïa de mes chefs collant aux obsessions de Marcellin, plus ce serait gros mieux ça passerait. Il me fallait leur en donner pour leur argent.

 

Depuis toujours je suis un ramier qui bosse comme un perdu lorsqu’il se retrouve au pied du mur. L’adrénaline est mon seul moteur. Dans les derniers instants, avant d’affronter un truc important, je suis capable d’absorber des tonnes de renseignements, de les trier, de les analyser, de les hiérarchiser et, après une bonne nuit de sommeil, d’en faire mon miel. Avant de venir affronter mes frelons j’avais bouffé tout ce que mes très chers confrères avaient gratté sur l’opération Flins de juin 68 menée de mains de maître par mes révolutionnaires en peau de lapin. Comme le disait Fouché – pas Christian, mais l'autre, le vrai, l’inventeur de la police politique moderne – toute personne à un prix mais pour l’acheter, sans ruiner le Trésor Public, il suffit de la dévaluer. Les fiches sont d'excellents dépresseurs de prix et, tout pur et dur qu’il soit, le gauchiste peut aussi se trimballer des casseroles dont le bruit pourrait importuner ses camarades, surtout les grands guides toujours prompts à condamner et à jeter les déviants dans les ténèbres extérieurs. Je disposais donc d’une relation crédible, vu de l’intérieur du mouvement, qui me permettait d’aborder les chefs militaires de la GP, surtout ceux qui avaient joué un rôle éminent dans l’équipée de Flins, sans me prendre les pieds dans le tapis.

 

Entre autre connerie, il les enfilait comme les saucisses et les petites filles en fleurs, le Grand Timonier variqueux, dans son petit livre rouge, avait déclaré pour stimuler les larges masses : « Mourir, c’est toujours grave ; mais mourir pour le peuple, c’est léger comme une plume… » L'état-major de la GP, au nom du son nécessaire sacrifice pour le peuple, avait besoin de martyrs et ce fut le malheureux Gilles Tautin, noyé accidentellement le 10 juin dans la Seine, alors qu’il tentait d’échapper aux gendarmes mobiles, qui avait eu l'insigne honneur de voir son nom gravé dans le marbre du mausolée de la Révolution prolétarienne, nouveau Panthéon des sacrifiés de la longue marche des partisans de la prise du pouvoir par les damnés de la terre. Vous apprécierez, je l'espère, le poids de ma phrase, lourde, ancrée dans le plomb, parfaite image de la littérature ordinaire des fêlés que je devais infiltrer. Même si la soldatesque de Marcellin, avec son nouvel équipement : visières anti gaz, bouclier en plastique, plus mobile, mieux aguerrie à la guérilla, n’avait pas à proprement parlé poussée Tautin à la baille, on l’accusait de l’avoir sciemment laissé mourir en ne lui portant pas assistance. Ce qui était faux puisque d’autres baigneurs involontaires avaient été tirés de l’eau par les gendarmes. Le cadavre embaumé de Tautin, modeste tireur de portraits pour La Cause du Peuple couvrant la bataille de Flins, va être instrumentalisé par les « maos » dans un exercice dont les français raffolent : la commémoration de la date anniversaire de son "assassinat". Un an après, commémorer « l’assassinat » du martyr permettrait, selon l'état-major de la GP, de raviver la violence insurrectionnelle pour qu’elle explosât à la gueule des chiens de garde du capitalisme.

 

Pour Pierre Victor, le Raïs de la GP, le faux clandestin reclus au fond de Normale Sup, petit brun affublé grosses lunettes d’intello qui donnaient, à son regard « gris et froid comme celui d’un héros de James Hadley Chase » (1), la dureté consubstantielle à sa position de chef suprême, la « guerre civile » ne pourra être menée par la classe ouvrière sans que des flots de sang soient versés. Le gourou fascine son entourage, sa douzaine de zélotes, par son verbe brillant, son goût de la synthèse et l’art qu’il a de déceler chez ses interlocuteurs la faille dans laquelle il s’engouffre sans pitié - l'autocritique étant à la GP la seule thérapie autorisée. Tout passait par lui, il auditionnait ses lieutenants et parfois même de simples hommes de troupes , dépiautait leurs dires, tranchait, approuvait ou désapprouvait, sans appel possible, lançait des ordres du jour délirants. Ses batailles de référence, Flins et Sochaux, ses Austerlitz à lui, loin des bastions tenus par ceux qu’il nomme avec mépris les chiens de garde du PCGT, dans le terreau vierge des prolétaires, fondait sa stratégie militaire. Ceux qui n’ont pas connu cette période de diarrhée verbale putride et délirante ne peuvent comprendre l’ambiance qui régnait dans les hautes sphères de la GP. Pour convaincre les sceptiques je leur propose ce que Benny Levy, alias Pierre Victor, confiait à Michel Foucault en 1972.

 

« Soit le patron d’une boîte moyenne, on peut établir la vérité des faits, a savoir qu’il a exploité les ouvriers abominablement, qu’il est responsable de pas mal d’accidents du travail, va-t-on l’exécuter ?

Supposons qu’on veuille rallier pour les besoins de la révolution cette bourgeoisie moyenne, qu’on dise qu’il ne faut exécuter que la toute petite poignée d’archi-criminels, en établissant pour cela des critères objectifs.

Cela peut constituer une politique tout à fait juste, comme par exemple pendant la révolution chinoise…

Je ne sais pas si cela se passera comme cela ici, je vais te donner un exemple fictif : il est vraisemblable qu’on ne liquidera pas tous les patrons, surtout dans un pays comme la France où il y’a beaucoup de petites et moyennes entreprises, cela fait trop de monde. »

 

Sympa le petit juif pro-palestinien, enfin un politique qui se préoccupait du sort des PME, qui dans les années 80 jettera sa défroque marxiste par-dessus bord pour renouer avec le judaïsme de son enfance, un judaïsme ultra-orthodoxe, deviendra rabbin et affirmera toujours aussi implacable « Le peuple palestinien n’existe pas. Il n’a pas le droit d’exister…»

 

  1. Claude Mauriac dans son journal Le Temps immobile vol 3 l'attribue à Gilles Deleuze...
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9 juillet 2016 6 09 /07 /juillet /2016 06:00
La fidélité est une valeur sûre parole d’un vieux grognard de Michel Rocard… Joxe,  Julliard, Cavada, Chavagneux parlent vrai

Ce jeudi je me suis rendu à vélo jusqu’au Invalides. Le soleil était au rendez-vous alors j’ai pédalé modérato pour ne pas mouiller ma chemise. Je suis entré dans la cour d’honneur à la suite de la Garde Républicaine. Le protocole était simple et bon enfant, à la Rocard.

 

Le premier que j’ai salué fut le grand Louis Le Pensec, un ami de toujours. Et puis, ce fut les retrouvailles des grognards, ceux qu’on ne voit pas dans la lumière, qui œuvraient dans l’ombre, les soutiers fidèles. Des accolades, des ça va un peu triste, de l’émotion mais aussi de la fierté d’avoir servi Michel au long de sa trajectoire au service de ses convictions et de ses engagements.

 

Et puis est arrivé Monsieur Normand, qui connaît monsieur Normand ? Nous qui l’avons côtoyé dans sa fonction de chauffeur. Il en a connu des Ministres et des Premiers Ministres monsieur Normand et après que nous nous fûmes serrés très forts, nous avons évoqué Monsieur Rocard. Le respect oui le respect, maître-mot de notre long compagnonnage. Avec Monsieur Rocard c’était autre chose, et Monsieur Normand n’était jamais avare de conseil dans le huit-clos de la voiture ministérielle.

 

Bien sûr, il avait là aussi des présents sur lesquels je portais un regard ironique mais l’heure n’était pas à l’aigreur ni au règlement de comptes. Notre fierté se teintait d’un peu de charité face à tous ceux qui l’avaient raillé, combattu avec des armes bien misérables, ostracisé avec mépris. Notre petit carré de fidèles, loin des louanges de circonstance, des couronnes de fleurs bien tardives, dans le silence et le recueillement, répondait comme toujours présent.

 

 

Recouvert du drapeau tricolore le catafalque, porté par des gardes républicains, au son de deux tambours, fut déposé à même le sol pavé de la cour, une forme de dénuement et de solitude avant de nous quitter pour reposer en cette Corse chère à mon cœur. J’irai lui rendre visite lors de mon prochain séjour.

 

Le cagnard tapait dur. Dans la garde d’honneur plusieurs militaires ne tenaient pas le choc. Le Gouverneur militaire des Invalides à mes côtés fronçait le sourcil. Le discours d’Edmond Maire sonnait juste, remettait bien des pendules à l’heure et me rappelait mon premier engagement politique au PSU ; celui de François Hollande plus classique, plus politique, fut digne mais teinté d’une forme d’acte manqué.

 

Et puis ce fut les premiers accords de la Symphonie Funèbre et Triomphale d’Hector Berlioz qui, je l’avoue bien simplement, me glace et me transporte là où nous finirons tous.

La Marseillaise et Michel est sorti par la grande porte pour gagner les solitudes infinies suivi de nous tous Grands et petits.

 

 

Ensuite ce fut, devant le porche des Invalides, un petit bain de foule du couple exécutif ce qui permis aux courtisans de courtiser mais aussi aux grognards de sortir de l’ombre pour témoigner qu’ils étaient bien là pour rendre un dernier hommage à Michel Rocard.

 

Pour autant notre Michel n’a jamais souhaité être béatifié, homme public, homme privé, militant jusqu’au dernier souffle. Jacques Julliard l'historien et journaliste, qui fut son ami pendant soixante ans le dit bien mieux que moi :

 

« Je ne pense pas que Michel était un intellectuel, contrairement à ce qu’on dit de lui. C’était avant tout un moraliste. Mais attention, il y a la morale qu’on fait aux autres et la morale qu’on s’impose à soi-même. La sienne relevait évidemment de cette seconde catégorie.

 

La critique interne de la gauche faisait partie de l’ADN rocardien. C’est même ce qui l’a beaucoup opposé à Mitterrand, qui le considérait comme un enfant de chœur, alors que lui le considérait comme un aventurier. Ce rôle de référence morale, autrefois rempli par Mendès France, Blum ou Jaurès, disparaît aujourd’hui avec Rocard. Il ne subsiste que Badinter.

 

Ces derniers temps, le grand problème de Michel était de savoir si on pouvait encore faire une politique honnête à l’époque de la communication. Cette question revenait continuellement. Avec la communication, la pub et vous autres journalistes, le "parler vrai" est-il encore possible ? »

 

Lire ICI Jacques Julliard : « Rocard plaisait à tous les gens qui n'aimaient pas la politique » 

 

Mais c’est Pierre Joxe vieux bretteur du mitterrandisme, le seul qui pouvait dire son fait à Tonton, qui met en exergue le Rocard qu’on a oublié, celui qui a motivé mon engagement politique :

 

Évocation de l’« audacieux militant anticolonialiste » et du « talentueux serviteur de l'Etat » que fut Rocard, ce texte sobre et grave est aussi une critique de ceux qui, aujourd'hui, «encensent sa statue mais tournent le dos à son exemple en détruisant des conquêtes sociales pour s’assurer d’incertaines « victoires » politiciennes, contre leur camp, contre notre histoire, contre un peuple qui n’a jamais aimé être trahi ».

 

Michel Rocard, in memoriam

 

A l’annonce de la mort de Michel Rocard, la plupart des réactions exprimées par les hommes politiques au pouvoir - et par ceux qui espèrent les remplacer bientôt - ont été assez souvent purement politiques ou politiciennes.

 

A gauche, l’éloge est de règle. A droite, l’estime est générale.

 

Mais deux aspects de la personnalité de Michel Rocard semblent s’être volatilisés : avant de réussir une grande carrière politique, il a été un audacieux militant anticolonialiste et un talentueux serviteur de l’Etat.

 

Il lui fallut de l’audace, en 1959 pour rédiger son Rapport sur les camps de regroupement en Algérie.

 

Il fallait du talent en 1965, pour être nommé secrétaire général de la Commission des comptes et des budgets économiques de la Nation .

 

Je peux en témoigner.

 

Pour la Paix en Algérie

 

Quand je suis arrivé en Algérie en 1959, jeune militant anticolonialiste d’une UNEF mobilisée contre la sale guerre coloniale, le prestige de Rocard était immense parmi nous. C’était comme un grand frère, dont on était fier.

 

Car il avait rédigé – à la demande de Delouvrier, le délégué du gouvernement à Alger – un rapport impitoyable sur les « camps » dits « de regroupement » que les « pouvoirs spéciaux » de l’époque avaient permis à l’Armée française, hélas, de multiplier à travers l’Algérie, conduisant à la famine plus d’un million de paysans et à la mort des centaines d’enfants chaque jour…

 

Le rapport Rocard « fuita » dans la presse. L’Assemblée nationale s’émut. Le Premier ministre Debré hurla au « complot communiste ». Rocard fut menacé de révocation, mais protégé par plusieurs ministres dont le Garde des sceaux Michelet et mon propre père, Louis Joxe.

 

Quand j’arrivai alors à mon tour à Alger, les officiers dévoyés qui allaient sombrer dans les putschs deux ans plus tard me dirent, avant de m’envoyer au loin, dans le désert : « … Alors vous voulez soutenir les hors la loi, les fellaghas, comme votre ami Rocard…? »

 

Je leur répondis, protégé par mes galons d’officier, par mon statut d’énarque – et assurément par la présence de mon père Louis Joxe au gouvernement : « C’est vous qui vous mettez « hors la loi » en couvrant, en ne dénonçant pas les crimes commis, les tortures, les exécutions sommaires et les mechtas incendiées. » J’ignorais alors que ces futurs putschistes allaient tenter un jour d’abattre l’avion officiel où mon père se trouvait…

 

En Janvier 1960, rappelé à Alger du fond du Sahara après le virage de de Gaulle vers « l’autodétermination » et juste avant la première tentative de putsch – l’ « affaire des barricades » –, j’ai pu mesurer encore davantage le courage et le mérite de Rocard. Il avait reçu mission d’inspecter et décrire ces camps où croupissait 10% des paysans algériens, ne l’oublions jamais !

 

Il lui avait fallu une sacrée dose d’audace pour arpenter l’Algérie en civil – ce jeune inspecteur des finances –, noter tout ce qu’il voyait, rédiger en bonne et due forme et dénoncer froidement, sèchement, ce qui aux garçons de notre génération était une insupportable tache sur l’honneur de la France. Nous qui avions vu dans notre enfance revenir d'Allemagne par milliers les prisonniers et les déportés dans les gares parisiennes, nous étions indignés par ces camps.

 

Car en 1960 encore, étant alors un des officiers de la sécurité militaire chargé d’enquêter à travers l’Algérie, d’Est en Ouest, sur les infractions, sur ceux qui désobéissaient aux ordres d'un de Gaulle enfin converti à l’« autodétermination » qui allait devenir l’indépendance, j’ai pu visiter découvrir et dénoncer à mon tour des camps qu’on ne fermait pas ; des camps que l’on développait ; de nouveaux camps… Quelle honte, quelle colère nous animait, nous surtout, fils de patriotes résistants !

 

Pour le progrès social

 

Aux yeux de beaucoup de politiciens contemporains qui ont choisi la politique comme métier – et qui n’en ont jamais exercé d’autre – Rocard devrait être jugé à leur aune : Élu ou battu ? Ministre ou non ? Président ou même pas ?

 

Mais le service de l’Etat, dans la France des années 60 – enfin débarrassée de ses maladies coloniales –, fut une mission autrement exaltante que le service militaire de trente mois que nous avait imposé la politique de Guy Mollet et de ses séides honnis: Robert Lacoste, Max Lejeune et d’autres, aujourd’hui heureusement oubliés.

 

Le service de l’Etat, dans cette France à peine reconstruite, la définition et l’exécution d’une action économique orientée à la fois vers l’équipement, la croissance et le progrès social, ce fut la mission passionnante et mobilisatrice de plusieurs centaines de hauts fonctionnaires économistes, ingénieurs, statisticiens et bien d’autres, qui orientaient tout le service public et ses milliers de fonctionnaires vers les missions d’intérêt général et le progrès. J’ai eu la chance d’y participer.

 

Les chefs de file, nos maîtres à penser, s’appelaient Pierre Massé, Commissaire au Plan ; Jean Ripert, son adjoint ; Claude Gruson, à la tête de l’INSEE ; François Bloch Lainé à la Caisse des Dépôts ; Jean Saint-Geours, au Trésor – bientôt premier Directeur de la prévision. Il y avait aussi, dans leur sillage quelques jeunes individus prometteurs, comme un certain Michel Rocard. Il fut bientôt chargé de la prestigieuse Commission des comptes et des budgets économiques de la Nation, précieux outil d’action publique.

 

Tous ces serviteurs de l’Etat – aujourd’hui disparus – étaient d’anciens résistants animés par trois idéaux : le bien commun, la justice sociale, le patriotisme. Tous étaient plus ou moins imprégnés des idées du vieux courant du « Christianisme social », né au XIXème siècle face aux inégalités croissantes engendrées par le capitalisme et adeptes du « Planisme » du Front populaire. Tous étaient « mendésistes ». Beaucoup étaient protestants, mais les catholiques comme Bloch-Lainé étaient leurs cousins et les francs-maçons… leurs frères.

 

Parmi tous ceux-là, Michel Rocard fut bientôt enlevé, écarté du service public par une urgence politique majeure : rénover, reconstruire le socialisme déshonoré par les années de compromissions politiciennes et les dérives autoritaires nées des guerres coloniales. Avec Savary et Depreux, il créa le PSA, puis le PSU. On connaît la suite.

 

J’ai vécu ces années avec lui mais aux côtés de Mitterrand dès 1965, animé par les mêmes idéaux. Nous avons longtemps participé ensemble à l’action associative [1], puis parlementaire, puis gouvernementale, en amateurs. Non comme politiciens professionnels – car nous avions nos professions, honorables et satisfaisantes – mais en amateurs, comme jadis au rugby. Non pour gagner notre vie, mais pour la mériter.

 

Pour l’honneur

 

Michel Rocard, et beaucoup d’autres serviteurs de l’Etat, nous avons été conduits à la politique par nécessité civique. Non pour gagner notre pain, mais pour être en accord avec notre conscience, nos idées, nos espoirs.

 

Les exemples contemporains de programmes électoraux trahis, oubliés ou reniés, de politiciens avides de pouvoir, mais non d’action, « pantouflant » au besoin en cas d’échec électoral pour revenir à la chasse aux mandats quand l’occasion se présente, tout cela est à l’opposé de ce qui anima, parmi d’autres, un Rocard dont beaucoup aujourd’hui encensent la statue mais tovictoires » politiciennes, contre leur camp, contre notre histoire, contre un peuple qui n’a jamais aimé être trahi.

 

Pierre Joxe, 7 juillet 2016.urnent le dos à son exemple en détruisant des conquêtes sociales pour s’assurer d’incertaines « victoires » politiciennes, contre leur camp, contre notre histoire, contre un peuple qui n’a jamais aimé être trahi.

 

[1] Notamment dans la pépinière de l’ ADELS (Association pour la démocratie et l’éducation locale et sociale) créée en 1959.

 

Jean-Marie Cavada : « Ce n'est pas parce que Rocard avait 86 ans qu'il était vieux ! »

 

L'ancien présentateur et président de Radio France a régulièrement côtoyé l'ancien Premier ministre. Il avait noué avec Michel Rocard une amitié solide.

 

Lire ICI 

 

Michel Rocard : rebelle et réformateur par PATRICK VIVERET

 

Je connais Michel Rocard depuis 1967 date à laquelle je suis entré au PSU. Mes parents étaient mendésistes et Rocard incarnait le mieux cette exigence de rigueur face à une classe politique adepte de la langue de bois et capable de discours révolutionnaires dans l’opposition et de soumission aux pressions des possédants une fois arrivée au pouvoir.

 

Justice, vérité, responsabilité

 

Dans ma génération, j’avais 19 ans à l’époque, celui qui incarnait l’envers de cette rigueur était Guy Mollet. Le « molletisme » était l’expression de ce double langage. La manière dont, élu pour faire la paix en Algérie en 1956, Mollet avait retourné sa veste pour accentuer la guerre en rappelant le contingent puis en couvrant les actes de torture, signait la déchéance du politique et la faillite morale de « la gauche de gouvernement » de l’époque.

 

Lire la suite ICI 

 

Aux origines de la pensée économique de Michel Rocard par CHRISTIAN CHAVAGNEUX

 

Intellectuel et politique, Michel Rocard a laissé de nombreuses publications sur son parcours qui permettent de suivre son cheminement en matière de réflexion économique. Le travail d’analyse de tous ces textes reste à faire et l’on se contente ici d’un regard sur ses points de vue des années 1960-1970. Ils montrent que l’essentiel de sa pensée économique est en place depuis longtemps.

 

Lire la suite ICI 

 

 

Pour finir votre serviteur en habit de respect... 

La fidélité est une valeur sûre parole d’un vieux grognard de Michel Rocard… Joxe,  Julliard, Cavada, Chavagneux parlent vrai
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