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17 février 2007 6 17 /02 /février /2007 00:33

Pour maman j'étais l'expression la plus aboutie de ce qu'une mère peut rêver. Ses amies lui disaient " Madeleine comme vous en avez de la chance, votre Benoît a tout pour lui..." Ce statut d'enfant doué, à qui l'on donnait le bon dieu sans confession, j'en avais joué tout au long de ma prime jeunesse pour préserver mon petit jardin d'intérieur mais aujourd'hui, introduire entre maman et moi, une femme aimée, celle avec qui je voulais partager mes jours et mes nuits, n'était pas chose simple. Jusqu'à ce jour, même si mon goût pour le butinage devait lui causer quelques frayeurs, un accident était si vite arrivé en ces temps obscurs, ma chère maman s'accomodait fort bien de ne voir aucune fille s'installer dans mon coeur d'artichaut. Lors de ma dernière visite je m'étais bien gardé de préparer le terrain.Maman n'avait rien perçu, les mères aimantes sont aussi aveugles que les maris trompés, ou les épouses d'ailleurs. Pas un mot sur Marie, je m'en voulais de ce manque de courage et, chaque matin qui se levait, je me disais que j'allais lui écrire une belle lettre et, chaque soir, en me glissant au plus près du corps de Marie, la mauvaise conscience s'installait. Comment le lui dire ? Lui dire tout simplement.

Dans nos conversations, parlant de mon pays crotté, de mon enfance de sauvageon, de mes ballades dominicales dans les métairies, avec mon père, pour voir ses clients si peu pressés de lui régler son du, je ne cessais de dire à Marie " tu vas lui plaire, il va t'adorer..." ce qui me valait en retour de ma douce et tendre un beau sourire ponctué d'un regard rieur qui me titillait. Moi je traduisais " et ta maman, elle, elle va me détester. Je suis une voleuse, la rivale absolue, celle par qui le cordon invisible se rompt..." Jamais elle n'allait au-delà, Marie attendait. A la veille du 15 août je revins de Port-Joinville avec deux aller-retour pour le continent. " Je vais te présenter à maman Marie..." Son regard se voilait d'un léger nuage et, pour faire diversion, elle voltait pour que sa jupette tournoie " je vais tout faire pour lui plaire mon Benoît..." Achille, lui aussi, esquissait une gigue pataude. Jean, de derrière son journal ouvert, en bon célibataire inoxydable commentait " vous allez monter la première marche qui va vous mener à la salle à manger des petits bourgeois..."

Une petite heure de traversée et pourtant nous quittions l'île d'Yeu tous les deux accoudés au bastingage comme de grands voyageurs rompant les amarres avec leur vie d'avant. Jean, égal à lui-même, la veille au soir, nous avait sorti le grand jeu. Tournée des grands ducs chez nos plus gros clients puis dîner chez Van Strappen un antiquaire très blonde oxygénée avec solitaire au petit doigt. Tout au Krug millésimé pour une conversation très langue de pute. Marie, halée pain d'épices, mangeait des boudoirs de Reims rose qu'elle trempait dans le champagne aux fines bulles. Babaresco, le grand noir homme à tout faire de Van Strappen, flambait des langoustes au Richard Hennesy en un rituel sauvage : sur un billot de bois d'un coup précis de hachoir de boucher il les tranchait en deux, vivantes, sans s'émouvoir de leurs violents et désespérés coups de queue ; puis il les grillaient sur de la braise vive : les chairs exalaient leur puissant parfum de roche iodée. La flambée, haute et incandescente, illuminait la terrasse et Jean, ludion, n'en finissait pas de lever sa coupe en marmonnant " le problème avec la champagne c'est que ça pétille, les bulles mes amis sont des traîtresses, elles amusent la galerie, vous font des ronds de jambes, vous aguichent et pfutt, disparaissent... " 

        

  

  

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16 février 2007 5 16 /02 /février /2007 00:23

Après moults hésitations, toute honte bue, je me lance. Je plonge dans le bassin olympique du haut du grand plongeoir. Si je m'aplatis comme une crèpe, merci aux ricaneurs de ne pas trop se fiche de ma poire. Comme disait le baron olympique : l'important c'est de participer. A ma manière je suis comme un éthiopien qui s'alignerait dans la descente des JO d'hiver à Wengen. Mais, me direz-vous, pourquoi fais-je ça ? Tout bêtement parce que je me suis aperçu que pour les officionados du vin, un blog sur le vin où l'on ne tartine pas sur l'attaque en bouche n'est pas digne d'être admis dans le saint des Saints des blogs pur jus. Entre nous soit dit, ça me fait un peu marrer, prêcher à des convaincus c'est tout de même plus fastoche que de se taper les ligues ou les chantres du risque zéro. Faut ce qui faut, même se regarder le nombril du haut du grand plongeoir. Alors j'y va, sans rouler ma caisse, cool et adviendra qui pourra...

Choix du produit : puisque les Canaris sont dans la mouise, y changent d'entraineur comme de chemise, y filent tout droit vers la D2, faut dire que leur président se nomme Roussillon, je jette mon dévolu sur un Muscadet Sèvre et Maine de Sauvion dans une bouteille de limonade chez un caviste branché de la rue du Bourg Tibourg www.nysa.fr . Que ça s'appela fil de fer ne m'a pas accroché. Donc déjà pas très glorieux comme approche, même si pour faire plaisir à Perrico jsui zalé chez un caviste, mais je ferai mieux la prochaine fois. Le vendeur m'a dit qu'il était vif et fruité pour un Muscadet qu'il faudrait que je le boive frais et ça m'a coûté 4,5 euros.

La dégustation : j'ai bien essuyé un grand verre, puis pas besoin de tire-bouch puisque cétune bouteille de limo. Je verse dru. J'agite gauchement (normal). C'est jaune paille et ya dé tout petits points partout ki sont pas des bulles ça ressemble à des têtes d'épingles. Mon tarrin : j'hume ! Le Sèvre et Maine de Sauvion ne fait ni dans la fleur genre genet, ni dans quoi que ce soit, ça me fait penser à un petit matin frisquet, c'est frais et net. Bon faut que j'y aille. La première gorgée. J'gazouille ski faut. Si j'osais j'écrirais que c'est un vin gai mais ptète qu'on me frais un procès. Bon jfais pas des bonds c'est plutôt gentillet, c'est pas vraiment Muscadet mais c'est peut-être ski plaît au palais des bobos du quartier. Jsuis totalement sec sur le vocabulaire. Pour faire le calamantran je pourrais écrire qu'il a de la jarretière ce qu'est plus fin que de dire de la cuisse. Si je ne le fais pas c'est que ça ne m'inspire pas. Tout même, comme je suis un gars sérieux, je peux vous dire que ça me laisse une bouche fraîche et légère. Bref ça casse pas trois pattes à un canard, ça se laisse boire. Maintenant je vais me faire un petit mâchon. Désolé, pour assurer, va falloir que je prenne des cours par correspondance. A votre bon coeur m'sieudames ! Et pendant ce temps-là, le FC Nantes boit le calice jusqu'à la lie mais que faites-vous donc Monsieur le maire, pour éviter que je me désespère de voir gaspiller l'héritage de mes belles années...

Note : 10/20

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15 février 2007 4 15 /02 /février /2007 00:03

 

Vive Voutch Very Good ! Depuis dix ans ce dessinateur créé des saynettes souvent absurdes, franchement hilarantes, toujours drôles. Son trait est fin et pur, ses couleurs pétantes, ses légendes très à l'ouest, du Woody Allen made in France. Il chambre gentiment les travers des bobos, des psy, des coatches, des managers et autres petites bêtes de notre société qui se regardent essentiellement le nombril. Il croque tout le monde. Comme il dessine aussi pour le Point deux vignettes consacrées à notre cher nectar, très terroirs et marketing, du Cap 2010 compréhensible. J'adore ! Il vient de publier son septième opus " Le futur ne recule jamais " Le Cherche-Midi 23 euros. Allez consulter son site vous ne serez pas déçu. www.voutch.com/ et peut-être passer commande. Bonne lecture...

 

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14 février 2007 3 14 /02 /février /2007 00:16

 

Oui j'oz l'avouer
dokteur
gé peur
peur d'être démaské.
Cé le drame de ma vie
la hantiz de mé jours zé de mé nuits.
Jfé zin komplex !
Passez-moi les kleenex !
Pourtant jme soigne, en vain
je blok dékil s'agit de kozer du vin.
Jveu dire kozer kom lé zexperts.
Jouer tel un virtuoz avek le vocabulaire.
Tenter de côtoyer lé Paganini de la dégustation.
Leur faire dé génuflexions.
M'envoler dans lé hautes sphères.
M'envoyer en l'air !
Etre un Dieu sur terre.
Avoir un nez de chien truffier.
Le regard acéré de Jacques Puisais.
La bouche ékuménik de toucé prélats.
Savoir tout ce ke je ne cé pas.
Cé dur
la kultur !
Moi jvoudrais bien faire bonne figure.
Os kour !
Ce poids devient trop lourd.
Gé honte !
Je raz lé murs de peur kon me règle mon kompte.
Vite faxez-moi l'adresse des dégustateurs zanonymes
ke je puisse confesser mé tares en un effort ultime.
Ayez pitié d'un povre pécheur
ki ne demande ka ax cédé à votre bonheur...

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13 février 2007 2 13 /02 /février /2007 00:31

Monsieur le 1er Président, cher Philippe Séguin,

Je vous sais amateur de bonne chère et de bons vins. Vous êtes, comme on dit, un bon vivant. La première fois où je vous ai croisé c'était début juin 81, jeune bretteur de la droite, dans l'hémicycle de la nouvelle Chambre rose vous pourfendiez, avec talent et une belle dose de mauvaise foi, les nouveaux arrivants. L'eau a coulé depuis sous les ponts de la Seine. Des hauts et des bas en passant par un démâtage grave du côté de l'Hôtel de Ville : qu'étiez vous aller faire dans cette galère ? Depuis vous avez jeté l'ancre rue Cambon. Sous l'hermine vous voilà 1er juge des comptes de notre France dispendieuse. Vous devez vous y ennuyer ferme, l'ivresse du politique est une addiction incurable. C'est avec un réel plaisir que je vous ai vu lever votre verre, en compagnie de Catherine, chez Christies, lors de la soirée de lancement du n°spécial Vins du Point. Je vous ai salué d'un " bonsoir Monsieur le 1er Président..." qui vous a permis d'afficher votre sourire ironique.

Mais revenons à votre nouveau job. La Cour vient de publier le 8 février dernier un " rapport sur la politique sanitaire de lutte contre l'alcoolisme " 21 pages très conseiller référendaire maniant la toile émeri et l'eau bénite. Pour un non initié, je dois l'avouer, le pensum est assez peu digeste. Il y ai dit que l'Etat ne sait pas ce qu'il veut, qu'on a du mal à recenser les financements, que le système d'information sur l'alcoolisme est perclus de faiblesses ce qui rend illusoire les tentatives d'évaluation, que les actions d'information et de prévention reposant essentiellement sur une communication grand public, notamment sous forme de campagnes, est d'une portée réduite. Ecrit en français simple : c'est le foutoir, la gabegie et c'est inefficace. Par exemple " En 2003, la Cour relevait que l'ANPAA ne disposait pas d'un système interne de suivi de la gestion de ses activités locales. Un nouveau plan comptable a été mis en place au 1er janvier 2005 et vise à ventiler les dépenses de prévention et de soins, à consolider au niveau national les comptabilités des établissements locaux et à suivre leur activité au travers de tableaux de bord. Mais la mise en service de la nouvelle version du logiciel de gestion des patients annoncée dans la réponse du directeur de l'ANPAA aux observations de la Cour, a été retardée suite à des difficultés techniques..." Compétence vous avez dit compétence 4 années pour des prunes..." ça doit vous plaire cher Philippe Seguin de tancer la bureaucratie.

A mon tour d'être impertinent : pour faire simple, la Cour des Comptes c'est le service d'audit interne de l'entreprise France, un service de luxe bien sûr, vu le coût de ce beau monde. Mais ne chipotons pas, nous sommes un grand pays, et que le retour sur investissement soit quasi-nul, qu'importe ! L'important c'est que nos magistrats publics se piquent de juger, du haut de leur haute compétence sur tout et n'importe quoi, les politiques elle-même. Du fond d'un bureau, penchés sur leurs liasses, maniant avec aisance le politiquement correct, entonnant sans nuance des antiennes éculées du style " la réduction de l'accès à l'alcool, stratégie pourtant efficace pour en diminuer la consommation, n'a pas progressé " (merci de me faire parvenir les sources), nos procureurs à charge feraient bien de réclamer haut et fort des enquêtes lourdes sur les réalités de l'alcoolisme de la France d'aujourd'hui. Le fléau de l'alcoolisme mérite mieux que ce brouet convenu simple écho du sanitairement correct. Quelques économies sur les campagnes dispendieuses et inefficaces ajoutées à une saine gestion des zinzins, l'ANPAA par exemple, dégageraient sans nul doute des moyens pour ce travail de fond.

En vous remerciant par avance, monsieur le 1er Président, d'avoir supporté ma prose alcoolisée, je vous prie de croire à mon entier et actif dévouement à la cause d'une bonne gestion des deniers publics et à mon engagement sincère à tout ce qui fera régresser l'alcoolisme qui est la pire contre-publicité à l'égard du divin nectar que je défends avec mes petits moyens. A vous revoir autour d'un verre pour aller au-delà de ces quelques mots. Bien à vous.

Jacques Berthomeau

  

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12 février 2007 1 12 /02 /février /2007 00:15

Saviez-vous que celui qui a conçu chez Apple le look de l'ipod et, avant cela, de l'iMac et de l'iBook, est un anglais de 39 ans, Jonathan Ive ? C'est un type discret, doué, qui recherche des influences inhabituelles pour ses réalisations. Avant d'être chez Apple, dans un bureau de design londonien, Tangerine, pour concevoir un nouveau mobilier de salle de bain, il achète des livres de biologie marine, qu'il étudie pour trouver des influences dans la nature. Pour moi c'est un dessinateur d'horizon. " Il sait mieux que quiconque ce que nous allons avoir entre les mains d'ici cinq ans " dit de lui un de ses confrères. Alors, ce matin, pour enfoncer le clou dans mon petit espace de liberté, je vous offre des extraits d'un texte de Christine Cayrol sur Picasso et l'innovation (L'intelligence sensible Village mondial, pour les assidus j'ai déjà publié un texte d'elle : la culture, Saint-Emilion ou Coca-Cola ?)

Rester soi-même tout en ne restant pas le même

" On peut seulement travailler contre. même contre soi. C'est très important. La plupart des peintres se fabriquent un petit moule à gateaux, et après, ils font des gâteaux... Toujours les mêmes gâteaux..." Pablo Picasso

 "(...) le pire ennemi d'un être, d'un couple, d'une équipe, d'une entreprise, c'est l'inévitable répétition. Or cette peur qui est en même temps une force se donne sur un mode exacerbé et presque pathologique chez Picasso. L'enjeu Picasso c'est celui-là même de tout organisme vivant, et il s'applique particulièrement aux entreprises. Celles qui ont réussi à se forger une identité forte, à mobiliser des compétences incontestables, à faire vivre une mémoire soucieuse de conserver la force de la marque, de la maison, du produit, se trouvent confrontées à la nécessité de se renouveler et de répondre aux sollicitations du monde extérieur. Autrement dit, comment rester soi-même tout en ne restant pas le même ? L'inquiétude du peintre ici stigmatise ce qui devrait être l'interrogation de toute organisation, de toute vie...
(...) Picasso n'a cessé de casser les moules dont il disposait et c'est ce geste systématique de transgression qui permet de le définir.
Pour innover il faut sans doute commencer par sentir de quels moules, codes, dogmes nous sommes plus ou moins consciemment prisonniers, et utiliser nos compétences pour fuir la pensée dominante : alors même que l'on manie parfaitement la technique impressioniste et pointilliste en vogue, se décider à peindre en bleu. Qui sommes-nous, où sont nos douleurs, nos joies, nos lieux de vulnérabilité et d'émotion ? La création appartient aux êtres qui ne peuvent se dispenser de puiser en eux-mêmes les sources de l'innovation."

à suivre...

ci-dessous tableaux de la période bleue 1895-1903 après la mort de Cagermas

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11 février 2007 7 11 /02 /février /2007 00:04

 

 

Quand nous discutions, et surtout lorsqu'elle se passionnait, Marie jouait en permanence avec le troisième bouton de ses corsages ; j'adorais ce geste léger, instinctif. Voulait-elle le défaire ou vérifiait-elle qu'il fût bien en place ? Balancement ou équilibre, je fixais le jeu de son pouce et de son index avec volupté. Parfois, dans le feu de la conversation, la barrière du troisième bouton tombait, les pans du corsage s'entrouvaient, découvrant la naissance de la gorge de ses seins.  Je la désirais alors, avec une force brutale que je réfrénais. Souvent je me levais pour lui caresser la nuque. Sentir au bout de mes doigts le grain si fin de sa peau m'apaisait. Transfuser de sa chaleur adoucissait le tranchant de mon sexe de silex. Marie attrappait ma main. Je la laissais me guider. Elle me disait, " Benoît, m'aimeras-tu quand je serai vieille et que mes seins seront des petites pommes ridées ? " En enveloppant dans le creux de mes mains ses seins je lui répondais " nous ne serons jamais vieux ma belle car nous veillirons ensemble..."

Nos parents, les miens surtout, nous avaient élevé dans la   diabolisation de la chair, le plaisir érigé en péché et maintenant, après ce mois de mai de tous les excès, nous étions étiquetés comme les enfants de la libération sexuelle, et dieu sait que nous allions traîner ce boulet dans les temps futurs, mais il nous restait encore des traces de notre éducation rigide. Nous n'abordions que rarement ce sujet, notre harmonie suffisait, le mot fidélité s'ancrait naturellement dans notre manière d'être. Pour ma part, libertin repenti, j'appréciais l'intensité de notre vie à deux. Marie comblait tous mes vides. Elle me protégeait de mes démons. Je n'imaginais rien d'autre que la vie avec elle. Sur cette miette d'île, je travaillais, elle peignait, nous lisions dans notre lit jusqu'à des heures avancées, je m'appuyais sur elle, Marie me déliait, Marie me bordait, Marie m'aimait, je l'admirais, elle me haussait, je l'adorais, avec Achille nous arpentions la côte sauvage en nous disant que nous aurions vite des enfants.  

A partir du 18 août, les 200 000 soldats et les 5000 chars du Pacte de Varsovie allaient étouffer les premiers bourgeons du printemps de Prague. L'opération Danube réprimait brutalement dans le sang le peuple de Prague qui n'avait que ses mains et son courage à opposer aux tankistes soviétiques, qui, sur les photos, semblaient tout étonnés de ne pas être accueillis par des jeunes filles aux bras chargés de fleurs. Ils sont jeunes eux aussi mais les pré-séniles du Kremlin n'ont que faire du sang neuf, ils préfèrent l'épandre dans les caniveaux de Prague. Marie et moi nous pleurons. Nous pleurons de rage en écoutant le silence assourdissant des dirigeants communistes français. Fort des voix populaires, ces couards, insensibles aux cris de liberté, ces merdes suffisantes, ces intellectuels émasculés, vont jouer la comédie de la protestation officielle. Ils deviendront le parti de Georges Marchais, tout un symbole du dévoiement d'hommes et de femmes confinés dans leur bunker de la place du Colonel Fabien. Ils sont morts, jamais plus ils ne pourront parler en notre nom.

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10 février 2007 6 10 /02 /février /2007 00:12

Avant l'irruption de Marie dans ma vie j'adorais me glisser dans la peau du libertin. Dans ces temps où le péché de chair pour les filles gardait un goût de fruit défendu, conduire hors du sentier balisé l'innocente victime, la séduire, l'amener dans ses filets, procurait des émotions fortes. Faire oeuvre de séduction pour un libertin c'est suivre un plan déterminé, avoir un projet. Tout est dans l'avant, la traque, l'attente, la jouissance suprême de voir la caille innocente s'engager sur le chemin de l'abandon. Le libertinage est cérébral, on y manipule le coeur humain, on y est patient, calculateur. Se contrôler, ne pas céder à la passion, éviter l'écueil de l'amour forment l'armature froide du projet libertin. Dans ce jeu cruel, où la victime devient très vite consentante, l'important pour le libertin est de ne pas être conduit à son insu là où il n'a pas prévu d'être. Toute la jouissance vient de ce contrôle sur ses actes, ses sentiments, ses pensées et d'exercer sur l'autre un empire total. Comme dans un jeu d'échecs il faut toujours prévoir le coup d'après. Mais une fois l'acte accompli l'angoisse du vide vous saisit. On n'est plus qu'un animal à sang froid.

Comme dans les Liaisons Dangeureuses j'avais levée, en mon pays,  ma Mme de Tourvel. Femme mariée, aux yeux de biche effarouchés à peine masqués par sa voilette légère de pieuse se rendant à la messe du matin. Jeune, très jeune prisonnière de la couche d'un barbon ventru et moustachu, au portefeuille épais, pour moi ces messes matinales ne pouvaient être que le change donné à sa sèche et impérieuse belle-mère. Il me fallait donc me placer sur son chemin avec une régularité qui attiserait sa curiosité. Ce que je fis sans jamais lui adresser autrechose que des regards appuyés. Après avoir baissé les yeux puis sourit sous son manteau je pressentis qu'une révolution s'opérait. Elle devait, avant son départ du domicile conjugal, ruser, se donner des frayeurs extrêmes. Restait pour elle à franchir une nouvelle étape : me donner le premier signe de sa soumission. Le printemps à cette vertu que les matins y sont souvent tendres. Ce matin-là, sa trajectoire ordinaire s'incurva et la belle, d'un pas vif, gagnait la place des tilleuls. Dans ma ligne de mire, elle posait le pied sur un banc de pierre dévoilant une jambe galbée d'un bas de soie. Imperméable à sa volupté j'exigeais d'elle plus encore. Ce qu'elle fit. Sous un imperméable mastic, perché sur des hauts talons, elle me présenta avec des yeux implorants sa nudité. Nos amours dans les prés hauts de Bibrou furent catastrophiques, elle attendait, soumise, ma jouissance, alors que c'était la sienne que je voulais.

Marie m'ota ce carcan de froideur. Moi le silencieux, le garçon qui tient tout sous contrôle, je me laissais aller à lui dire mes peurs et mes faiblesses. Cet abandon je le devais à l'absolue certitude, peut-être que le temps m'aurait démenti, que jamais Marie ne retournerait ces armes contre moi. Nous étions si différents, nos origines étaient aux antipodes, mais notre nous s'érigeait sans question, avec naturel. Elle me donnait la chance de m'aimer moi-même, de me départir de mes hautes murailles. Jamais nous ne faisions de projets. Nous vivions. A chaque moment, seuls ou ensemble, nous inventions notre vie. Tout ce j'écris semble idyllique, une reconstruction du passé idéalisée, alors que nous eumes des orages, des divergences mais ce ne furent que des scories dont nous avions besoin de nous débarasser. J'abordais notre vie à deux avec dans ma besace de jeune homme rien de ce qui encombre les gens de mon âge : tous ces désirs refoulés qui le jour où la flamme décline resurgissent à la surface.

  

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9 février 2007 5 09 /02 /février /2007 00:02

Voici deux petites histoires, deux jolies petites histoires courtes pour commencer la journée avec un sourire. 

" Juste après le déluge le plant de vigne s'étirait sans cesse, épuisant sa sève à nourrir des gourmands, sans bénéfice pour l'homme. Lorsque l'âne, en descendant de l'arche, pénétra dans l'enclos de Noé, il se précipita sur les tendres rejets pour les brouter avant que de se faire chasser par le gardien du lieu.
Le scénario se renouvela plusieurs fois au cours de l'hiver et au grand étonnement du vigneron, les ceps attaqués par l'animal poussèrent au printemps avec beaucoup plus de vigueur et se couvrirent de raisins à la différence de ceux qui avaient été épargnés par les dents de l'animal.
Voilà comment les hommes, instruits par l'exemple de l'âne, furent amenés à tailler la vigne. "

Paul Delarue dans Le folflore vivant Cahier n°1 éditions Elvézir 1946  

" Noé avait emporté sur l'arche un sarment de vigne, et, quand le déluge cessa, et que, l'eau commença à décroître, Noé voulut mesurer la profondeur de l'eau dessous la barque. Il enfonça sous l'arche le sarment de vigne qui resta coincé dans la vase en haut de la montagne. Si la vigne donne de si bons vins au sommet des montagnes c'est parce que Noé y planta le premier cep. Les cépages de vignes, comme ceux du Tokay viennent du sarment de Noé et c'est pourquoi ils sont si fameux et si réputés.

La Bible paysanne Contes et légendes traduit du Hongrois éditions Bayard

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8 février 2007 4 08 /02 /février /2007 00:18

Les " tontons flingueurs " dégainent à nouveau ! Dans une déclaration publiée dans le quotidien " Libération " du 22 janvier les promoteurs de la loi Evin montent à l'assaut pour demander un engagement des candidats à la Présidence sur la sécurité sanitaire. Arguant de leur combat immémorial, ces auteurs du rapport sur la prévention à l'origine de la loi de 1991, déclarent " Pour l'alcool, il faut revenir aux propositions de 1988 sur la publicité qui ont fondé la loi de 1991 et interdire sa promotion sur des supports qui s'imposent aux enfants (affichage, radio). Il faut aussi indiquer la quantité d'alcool contenue dans un conditionnement, renouveler les messages sanitaires et supprimer le Conseil de la modération et de la prévention. Sa composition exprime plus une forme de soutien psychologique à la viticulture en crise qu'une volonté de réflexion sur le contenu des messages de prévention ". 
Emballé c'est pesé, circulez y'a rien à voir et à quand, messieurs les professeurs, l'élaboration d'un protocole compassionnel pour les pauvres viticulteurs en phase terminale ? 

Au cours des discussions qui précèdèrent l'élaboration du projet de loi dit Evin, à notre demande, trois de ces messieurs, Got, Tubiana, et Hirsch je crois, avaient accepté de dîner à la table du Ministre de la Santé avec des représentants de la viticulture emmenés par le président de l'INAO. J'y étais, avec Jean Nestor le dircab d'Henri Nallet. Les échanges furent courtois. Ces messieurs apprécièrent les vins. Nos représentants du vin ne furent guère brillants. Les éminents professeurs leurs concédèrent que le vin n'était pas vraiment leur coeur de cible mais que, las d'être roulés dans la farine par les grandes sociétés de spiritueux et les brasseurs, ils avaient décidé de leur déclarer la guerre tout azimut, que le vin ne pouvait être épargné, et d'ajouter, que cette guerre ils la gagneraient, forts de l'appui de l'opinion publique.

Le grand feuilleton de la loi Evin était sur les rails. Ces messieurs, en dépit de leur arrogance de professeurs de médecine et de leurs certitudes à deux balles, ont perdu une bataille : celle de la lutte contre l'alcoolisme. Croire qu'interdire ou cadenasser la communication constitue un axe fort d'une politique de prévention et de protection de la jeunesse est une illusion. Leur analyse date. Ils vivent dans leur monde. La jeunesse est un âge de la vie où l'on transgresse, on s'oppose, on se différencie. Bref, la politique du cachez-moi ce sein que je ne saurais voir est une pure tartufferie. Mais revenons à la remontée au créneau des croisés. Je sens monter le courroux dans le monde du vin : trop c'est trop ! La colère est mauvaise conseillère. Monter au pas de charge, bannière au vent, contre les chars des biens-pensants du sanitairement correct nous conduirait, comme d'habitude, à recevoir un choc en retour plus brutal encore. Alors, que faire ? Pratiquer la politique de la non-violence, le déjeuner sur l'herbe des convives, adhérer massivement au grand mouvement convivial du pique-nique, venir dans la ville offrir le spectacle du bien-vivre. Face à un tel mouvement du peuple, nos ayatollahs seront désarmés car, croyez-moi, nous n'avons pas perdu la guerre mais, de grâce, cessons de leur fournir des armes qu'ils tourneront contre nous.

C'est toujours lepiknik-demonik@hotmail.fr ou 06 80 17 78 25 (attention pour l'adresse c'est point fr) alors au lieu de ronchonner, de se plaindre, de s'autocélébrer entre nous, bougeons-nous !

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