Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
22 juin 2008 7 22 /06 /juin /2008 00:09

Entre autre connerie, il les enfilait comme les saucisses et les petites filles en fleurs, le Grand Timonier variqueux, dans son petit livre rouge, avait déclaré pour stimuler les larges masses : « Mourir, c’est toujours grave ; mais mourir pour le peuple, c’est léger comme une plume… » L'état-major de la GP, au nom du son nécessaire sacrifice pour le peuple, avait besoin de martyrs et ce fut le malheureux Gilles Tautin, noyé accidentellement le 10 juin dans la Seine, alors qu’il tentait d’échapper aux gendarmes mobiles, qui avait eu l'insigne honneur de voir son nom gravé dans le marbre du mausolée de la Révolution prolétarienne, nouveau Panthéon des sacrifiés de la longue marche des partisans de la prise du pouvoir par les damnés de la terre. Vous apprécierez, je l'espère, le poids de ma phrase, lourde, ancrée dans le plomb, parfaite image de la littérature ordinaire des fêlés que je devais infiltrer. Même  si la soldatesque de Marcellin, avec son nouvel équipement : visières antigaz, bouclier en plastique, plus mobile, mieux aguerrie à la guérilla, n’avait pas à proprement parlé poussée Tautin à la baille, on l’accusait de l’avoir sciemment laissé mourir en ne lui portant pas assistance. Ce qui était faux puisque d’autres baigneurs involontaires avaient été tirés de l’eau par les gendarmes. Le cadavre embaumé de Tautin, modeste tireur de portraits pour La Cause du Peuple couvrant la bataille de Flins, va être instrumentalisé par les « maos » dans un exercice dont les français raffolent : la commémoration de la date anniversaire de son "assassinat". Un an après, commémorer « l’assassinat » du martyr permettrait, selon l'état-major de la GP, de raviver la violence insurrectionnelle pour qu’elle explosât à la gueule des chiens de garde du capitalisme.

Pour Pierre Victor, le Raïs de la GP, le faux clandestin reclus au fond de Normale Sup, petit brun affublé grosses lunettes d’intello qui donnaient, à son regard « gris et froid comme celui d’un héros de James Hadley Chase » (1), la dureté consubstantielle à sa position de chef suprême, la « guerre civile » ne pourra être menée par la classe ouvrière sans que des flots de sang soient versés. Le gourou fascine son entourage, sa douzaine de zélotes, par son verbe brillant, son goût de la synthèse et l’art qu’il a de déceler chez ses interlocuteurs la faille dans laquelle il s’engouffre sans pitié - l'autocritique étant à la GP la seule thérapie autorisée. Tout passait par lui, il auditionnait ses lieutenants et parfois même de simples hommes de troupes , dépiautait leurs dires, tranchait, approuvait ou désapprouvait, sans appel possible, lançait des ordres du jour délirants. Ses batailles de référence, Flins et Sochaux, ses Austerlitz à lui, loin des bastions tenus par ceux qu’il nomme avec mépris les chiens de garde du PCGT, dans le terreau vierge des prolétaires, fondait sa stratégie militaire. Ceux qui n’ont pas connu cette période de diarrhée verbale putride et délirante ne peuvent comprendre l’ambiance qui régnait dans les hautes sphères de la GP. Pour convaincre les sceptiques je leur propose ce que Benny Levy, alias Pierre Victor, confiait à Michel Foucault en 1972.

 

« Soit le patron d’une boîte moyenne, on peut établir la vérité des faits, a savoir qu’il a exploité les ouvriers abominablement, qu’il est responsable de pas mal d’accidents du travail, va-t-on l’exécuter ?

Supposons qu’on veuille rallier pour les besoins de la révolution cette bourgeoisie moyenne, qu’on dise qu’il ne faut exécuter que la toute petite poignée d’archi-criminels, en établissant pour cela des critères objectifs.

Cela peut constituer une politique tout à fait juste, comme par exemple pendant la révolution chinoise…

Je ne sais pas si cela se passera comme cela ici, je vais te donner un exemple fictif : il est vraisemblable qu’on ne liquidera pas tous les patrons, surtout dans un pays comme la France où il ya beaucoup de petites et moyennes entreprises, cela fait trop de monde. »

Sympa le petit juif pro-palestinien, enfin un politique qui se préoccupait du sort des PME, qui dans les années 80  jettera sa défroque marxiste par-dessus bord pour renouer avec le judaïsme de son enfance, un judaïsme ultra-orthodoxe, deviendra rabbin et affirmera toujours aussi implacable  « Le peuple palestinien n’existe pas. Il n’a pas le droit d’exister… »
(1) Claude Mauriac dans son journal Le Temps immobile vol 3 l'attribue à Gilles Deleuze... 

Partager cet article
Repost0
21 juin 2008 6 21 /06 /juin /2008 00:01


Avant que ce mois de juin de 40ième anniversaire de mai 68 ne tire à sa fin, même si les ouvrages commémoratifs ont, comme je le craignais dans ma lettre à Régis Debray(1) http://www.berthomeau.com/article-13245857.html déferlé tels des tsunamis mercantis, j’ai envie de dire ce que j’ai sur le cœur. Toute cette récupération, positive ou négative, me gonfle. Ça conforte ceux qui, comme Thomas qualifiait mes propos de radotage d'ancien combattant de mai 68. Récupération et surtout, erreur totale de focus que de réduire le mouvement étudiant à un mouvement de minoritaires « hyper-politisés » Faux ! Archi-faux, nous étions majoritaires, pas du tout manipulés par les groupuscules, même que nous étions allergiques à leur langue de béton marxiste quelquechose. Ce que nous voulions avant tout et par-dessus tout c'était faire craquer les coutures d’une société étriquée, mesquine, hypocrite. Nous étions joyeux, conviviaux, barjots et, n'en déplaise à Thomas, et à tant d'autres, mai 68 a été aussi une grande fête, le retour en force de la convivialité, d'une réelle envie de bien vivre ensemble, un espace de liberté dans une France, dont Vianson-Ponté écrivait dans le Monde, quelques mois avant 68, qu'elle s'ennuyait. L’attitude hostile de la CGT, du PC à l’égard du mouvement étudiant, la sympathie d’une majorité des français, avant qu’elle ne se lasse du désordre et aspire aux vacances, le plantage de la vieille gauche, Mitterrand en tête, la couardise et la débandade des « élites dirigeantes », la grève générale la plus longue et la plus suivie, sont là pour mettre en lumière le caractère, non pas révolutionnaire, mais hors norme de cette éruption. En faire le creuset de toutes les dérives sociétales ou celui du mouvement social, type « gauche de la gauche, celle du facteur ravi mais qui ne se lache jamais, c’est réécrire l’histoire. Comme Cohn-Bendit, le libertaire, j’écris, ça suffit : « Forget 68 » oui, 68, c’est fini et on a gagné…

(1) Modeste contribution aux discours et cérémonies officielles du dixième anniversaire vient d'être réédité sous le titre Mai 68, une contre-révolution réussie Mille et une nuits éditions un peu grâce à des gens comme moi que Régis Debray qualifie dans son avant-propos "d'amicaux fouilleurs des ténèbres".
Pure provocation ? Non, pur constat de faits non fantasmés, d’évènements qui ont certes marqués la mémoire collective - pour preuve, la référence au Grenelle de 1968 à propos de la récente grand-messe sur l'environnement mériterait un examen que l'on n’abrite pas sous cette référence tout et n'importe quoi : ce ne fut ni la nuit du 4 août, ni un modèle de négociation sociale – mais qui s’inscrivaient dans un mouvement dépassant largement notre petit hexagone. Accélérateur d’une évolution sociale, c’est indéniable, mais l’idéologie de « l’enfant roi » provenant des USA a fait bien plus de ravages dans notre système éducatif et à la maison que la permissivité des très minoritaires parents fumant la moquette. Houellebecq est un mythomane. De même, les « pédagogistes »  peuplant l’Éducation Nationale ne sont pas des clones de soixante-huitards mais de purs produits du syndicalisme ossifié si hostile à la chienlit des évènements. Quand j’affirme que nous avons gagné je sors mon Luc Ferry, qui convenez-en, n’a rien d’un soixante-huitard attardé comme moi : " Sans ironie, le plus formidable de Mai-68, c'est son côté émancipateur. Mai-68 a accouché de la victoire définitive du mariage d'amour sur le mariage de raison, disons de la famille moderne, la famille fondée sur l'amour, qui gagne définitivement sur la famille bourgeoise. Aujourd'hui, il est de bon ton d'idéaliser la famille bourgeoise. On entend partout ce discours : tout fout le camp, c'est monoparental, c'est éclaté, recomposé, tout va mal. En effet, 50% des mariages se terminent par un divorce dans les grandes villes européennes. Mais malgré l'apparence c'est un formidable progrès. Que les gens soient pacsés, mariés ou non, ça m'est égal, mais c'est une union fondée sur l'affinité élective et le sentiment qui va l'emporter définitivement sur le mariage bourgeois de raison. Ca c'est le bel héritage de Mai-68. L'idéalisation de la famille bourgeoise était une absurdité, au prétexte qu'on n'y divorçait pas. De ce point de vue-là, l'héritage de Mai aura été un grand progrès, dans la sincérité et dans l'authenticité, qui sont préférables aux mensonges ».

 

Sans vouloir en rajouter une couche, il faut se rappeler ce qu’était le traitement de l’information à la radio et à la télévision publiques dans notre beau pays à cette époque. Le mouvement à l’ex-ORTF est emblématique de ce que mai 68, en bousculant les frontières politico-syndicales, pour mobiliser des journalistes qui en avaient plus que marre de la chape de plomb qui pesait sur eux, a fait souffler un grand vent de liberté et de créativité. Plus qu’un discours, la photo ci-dessous, montre que la majorité n’était pas silencieuse. Elle s’exprimait. Elle prenait des risques puisque des personnes aussi modérées que Zitrone, Chapatte, Rolland, se feront virer pour avoir participé au mouvement. L’oublier ou railler prête à sourire en ces temps où triomphe le « courage fuyons » et le « ce n’est pas de ma faute » Y’avait du panache dans ce beau mois de mai. Des conneries aussi, j’en conviens, mais quand à nous faire porter « tous les péchés du monde », de nous étiqueter comme des « égoïstes patentés », des gus qui ont tourné leur veste pour se vautrer dans la société de consommation, des jouisseurs et autres noms d’oiseaux, c’est nous faire trop d’honneur. La génération du baby-boom, dont je suis, s’est retrouvée à une époque charnière, un temps de basculement, et dans sa grande diversité sociale, géographique, elle s’est inscrite dans son temps, tant bien que mal, avec ses contradictions, ses espoirs, ses combats, ses lâchetés, lui demander des comptes me semble normal mais à la condition de ne pas se contenter de ne noircir que la colonne du passif. Ce pays nous l’avons aussi construit et il n’est pas encore un champ de ruines même si il n’est pas forcément, et c'est peut-être heureux, celui dont nous rêvions en mai 68.

Allez " good bye 68 ! " ça va faire un sacré tas de bouquins pour le pilon. Pour le 50 ième, de grâce, plumitifs de tous poils, lâchez-nous la grappe, j'espère, si je suis encore de ce monde, que vous me laisserez tranquille dans mes charentaises de papy-boomer à fumer mes Boyards maïs et à boire mon petit verre de jaja...

 

 

Pierre Mondy, Philippe Noiret, Claude Brasseur, même le beauf de tonton en ce temps-là rien que des "gauchistes échevelés et dépenaillés" tout comme Michel Drucker, Thierry Rolland, Robert Chapatte, Léon Zitrone et Claude Darget à la télé...

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
20 juin 2008 5 20 /06 /juin /2008 00:03

 

Ce matin j'accueille avec grand plaisir Michel Chapoutier sur mon "Espace de Liberté". Michel fait partie de ceux qui ont lu sans oeuillères, ni à priori, mes écrits de 2001. J'ai le souvenir, lorsque je me faisais harponner dans les allées d'un salon ou après un énième débat, d'un Michel Chapoutier qui plantait  son regard rieur, auréolé par ses petites lunettes, dans les yeux de mes interlocuteurs, pour leur lancer pince sans rire, un peu provocateur, je suis "berthomophile". Michel est un passionné. J'aime les gens qui exercent leur métier avec passion. Ils font avancer le monde. Prenez le temps de lire les réponses de Michel Chapoutier. Commentez. Pensez-vous que vous puissiez trouver ailleurs que sur Vin&Cie une telle variété et une telle richesse de débats ? Péché d'orgueil peut-être mais dans la médiocrité actuelle des partisans du Kroskill des AOC je trouve qu'ici nous élevons le débat. Bonne lecture.

1ière Question :

Michel Chapoutier bonjour, lors d’une récente conférence lors du 5ième rendez-vous annuel des vignerons bios d’Alsace vous avez notamment déclaré « En vinification, l'art du vigneron c'est de venir interrompre une phase naturelle de décomposition, de retour du végétal vers le minéral pendant la fermentation alcoolique, et de s'extraire de ce chaos en redonnant une dimension de vie. » « Je suis obsédé par l'inertie thermique » « Beaucoup de vins sont issus d'une grande œnologie et d'une agronomie pitoyable. L'œnologue prend trop d'importance. » Pouvez-vous nous expliquer ce que la biodynamie apporte à vos vins ?

Réponse de Michel Chapoutier :

La fermentation « naturelle » est la transformation du sucre en alcool, par l’action des levures, puis de l’alcool en acide, par l’action des bactéries. Par définition donc, le vin n’est pas simplement naturel puisque l’art du vigneron est d’interrompre cette réaction naturelle au niveau de l’alcool. Sans l’intervention humaine du vinificateur, le vin n’est pas. En effet, en présence de ces fermentations, nous sommes face à un processus de décomposition par lequel le végétal redevient minéral. C’est pourquoi je m’étais permis d’appeler ce processus : processus de chaotisation.
Pour l’anecdote, certaines expérimentations biodynamiques cherchent une logique en choisissant des jours fruit pour les interventions importantes en vinification. Cela me parait de plus en plus inapproprié à la logique biodynamique car, si nous considérons la fermentation comme une chaotisation où le végétal redevient minéral, la logique serait de considérer le jour racine comme jour propice.
Mon intérêt pour la biodynamie s’est construit par l’observation du résultat qualitatif au niveau des vins dégustés en tant qu’amateur de vin, ensuite, ne voulant pas me laisser aller à des dérives trop ésotériques, par la volonté de marier recherche expérimentale et recherche fondamentale.
En tant que pur autodidacte, non conditionné par la norme universitaire, il a fallu, par mes petits moyens, que j’observe, comprenne et apprenne l’agronomie.
Lorsque l’on observe l’évolution des rendements en parallèle à l’évolution de l’extrait sec, très rapidement on se rend compte qu’agronomiquement on favorise la production de « pompe à flotte » (et flotte chère et de piètre qualité).
J’ai toujours regretté que nos gouvernants n’aient jamais eu l’originalité ou le culot d’obliger les légumiers ou les maraîchers à associer sur leur étalage le prix du gramme d’extrait sec à côté de celui au kilo.
Ainsi, nos braves défenseurs de l’agriculture plus raisonnée en rendement, mais avec un prix de revient plus coûteux, auraient pu tirer leur épingle du jeu.  Un abricot à 2€ pourrait avoir un prix au gramme d’extrait sec largement inférieur à celui de 1 €, le consommateur peut comprendre si on veut bien le lui expliquer.
Le produit agricole fragilisé issu de rendement exagéré est vite devenu la norme. Si nous prenons l’exemple de la profession viticole, certaines théories œnologiques sont basées sur des approches sécuritaires car partant du principe que la matière première est potentiellement fragile et donc carencée. Le vinificateur devient un « toubib » qui fait une médecine purement curative.
De nos jours, on voit des œnologues se rendre de moins en moins dans les vignes. Les normes analytiques les intéressent plus que le goût, les saveurs ou la texture. Le vinificateur est devenu trop pragmatique au détriment de sa créativité.
Qu’est-ce que la biodynamie apporte à nos vins ?
Bio = vie  -  Dynamie= en action
On utilise la force de vie par opposition à l’agriculture traditionnelle (herbicides, insecticides…) où les forces de mort règnent.
La logique de l’agriculture par la puissance de la mort arrive à ses limites car face à l’agression, à la mort, le nuisible doit lutter et s’adapter pour créer sa propre résistance. Ainsi, il est capable de muter pour apprendre à résister comme il est capable de muter pour accélérer sa reproduction et compenser les pertes dans son espèce.
Nous faisons des AOC parce que nous nous attendons à ce que dans le terroir : le climat (climat + millésime), le sol (pédologie + géologie), l’humain (tradition + talent) s’expriment.
Le minéral  se transmute en végétal par l’activité des micro-organismes présente autour de la racine. Ces oligoéléments, présents dans le raisin, vont influencer la flore levurienne indigène qui amènera la signature aromatique propre à son sol. Si on veut que le sol influence la partie du terroir, le vin, il faut bien respecter et encourager la vie. Pour cela, une des réponses est la biodynamie.

2ième Question :

Depuis votre arrivée à la tête de l’entreprise familiale en 1989, Michel, votre vignoble est passé de 80 à 300 hectares, vous êtes présent dans le Languedoc, les Coteaux d’Aix, Banyuls et jusqu’en Australie, où vous exploitez 70 hectares en joint-venture et où vous prévoyez d’en planter 230 de plus d’ici à cinq ans. Quel appétit ! Dites-nous ce qui vous anime Michel Chapoutier ? Dans la patrie du small is beautiful, des vignerons stars, où vous situez-vous ?

 

Réponse de Michel Chapoutier :

 « Lorsque j’ai rejoint l’entreprise familiale, mon grand-père était le propriétaire et mon père le dirigeant.
En 1990, cette entreprise était au bord du dépôt de bilan et j’ai eu l’opportunité de l’acquérir.
Je ne me considère donc pas comme un héritier étant donné que j’ai acheté cette entreprise et qu’il a fallu la ressusciter, la ranimer.
Ce qui m’exaspérait le plus, en tant qu’amateur de vin, était que le goût, la signature Chapoutier prenait le dessus sur la typicité de l’AOC. Je considérais que cela était un irrespect du consommateur à qui on proposait un AOC.
En effet, l’acteur dans le domaine du vin devrait savoir se subordonner à son terroir s’il veut revendiquer l’AOC.
Dans cet esprit, j’ai mis en place le système des sélections parcellaires avec, non pas l’ambition de faire le meilleur vin possible (la notion de meilleur est subjective, subordonnée au goût de l’acteur) mais la volonté de faire la meilleure photo du terroir. Nous considérons le millésime comme partie intégrante du terroir et nous n’allons en aucun cas essayer de le corriger (chaptalisation, acidification, levurage …). Nous ne sommes pas là pour juger si le millésime mérite d’exister ou non, donc quel que soit le millésime, grand ou petit, la sélection parcellaire naît. Ainsi, sur l’Ermitage, on se promène sur 4 terroirs différents en rouge et sur 3 terroirs différents en blanc. Avec 300 m de distance, où le climat, le cépage, la viticulture et la vinification sont strictement identiques. Seules la pédologie et la géologie varient. Nous voyons combien le sol, quand on le laisse parler, peut influencer le vin.
N’ayant pas les moyens financiers d’acquérir de nouveaux terroirs dans le nord de la Vallée du Rhône (qui étaient beaucoup plus chers), j’ai pu satisfaire ma curiosité et mon enthousiasme en devenant pionnier et en allant chercher des terroirs dont le prix à la parcelle ne reflétait pas le potentiel qualité. C’est ainsi que je me suis orienté vers le Tricastin, le Roussillon, l’Australie et le Portugal.
Je suis très attaché à notre philosophie de joint-venture car c’est un échange intellectuel et professionnel basé sur un équilibre 50 – 50. Là, les associés sont obligés de s’entendre, la notion de pouvoir et de la propriété est neutralisée. Il y a forcément une émulation intellectuelle et professionnelle lorsque deux passionnés s’associent pour créer un nouveau vin.
En fréquentant les milieux biodynamiques et biologiques, j’ai parfois été agacé par certaines attitudes un peu hostiles vis à vis de ma volonté de croissance. Trop souvent lorsqu’une entreprise a des  ambitions de croissance, elle est perçue comme méchamment capitalistique.
Si l’on veut que l’agriculture biologique et que l’agriculture biodynamique avancent, il faut obligatoirement s’appuyer sur l’aide de la recherche fondamentale. Les acteurs de ces agricultures ne doivent pas critiquer l’INRA, le CNRS ainsi que les entreprises qui peuvent dégager les fonds pour contribuer au financement de la recherche fondamentale.
J’ai voulu démontrer qu’une entreprise pouvait être florissante avec une ambition de croissance, tout en restant fidèle à sa philosophie de travail et à son exigence de qualité.
Nous avons un taux de personnel dans les vignes extrêmement important. Nous ne faisons aucun sacrifice sur l’apport en ressources humaines au niveau viticole et nous le compensons simplement par de l’investissement supplémentaire au niveau commercial. Ceci nous permet d’avoir le courage et le savoir-faire pour vendre nos vins au vrai prix.

3ième Question :

Vous êtes aussi, Michel, à Inter-Rhône, le chef de file des maisons de négoce, et vous siégez au Comité National de l’INAO en tant que représentant  du secteur du négoce. Comme dirait Berthomeau « un excellent positionnement » qui vous place à l’intersection des débats qui agitent ces dernières années le monde du vin. Quel regard portez-vous sur la dernière décennie ? Temps d’occasions perdues ou période de remises en cause ? Pour l’avenir, pensez-vous que les réformes en court et la nouvelle OCM vin vont nous mettre au pied du mur et nous permettre de redonner aux viticulteurs de certaines régions des perspectives ?

Réponse de Michel Chapoutier
 :

Pendant très longtemps, la fragilité économique de mon entreprise m’a obligé à toujours travailler avec un œil sur le compteur de la rentabilité, au risque d’une dérive purement matérialiste.
C’est pour cette raison que j’ai voulu rejoindre le travail collectif et afin d’utiliser la réflexion intellectuelle dans un esprit plus altruiste et collectif. Je me suis donc investi dans le négoce de la Vallée du Rhône. Pour moi, le négociant doit savoir acheter le vrai produit au vrai prix, le bon produit au bon produit. Je me suis toujours battu, et je continuerai à me battre, pour que le négociant ne soit plus ce professionnel qui achetait des produits de moindre qualité pour les mettre sur le marché. Plus le négociant aura des ambitions qualitatives et plus la filière de la production devra avoir le courage de mettre au rebut les vins qui ne méritent pas l’AOC.
Je pense que la Vallée du Rhône est sortie de la crise rapidement et sans trop de dégât au niveau de la production parce que le négoce a su travailler en collaboration avec la production pour financer un stockage tampon intermédiaire.
Je n’aime pas les gens qui revendiquent de manière légère ou de manière un peu trop rapide le libéralisme absolu en matière de vin. En effet, il faut bien reconnaître qu’aujourd’hui un des gros problèmes de la filière viticole est une triche trop souvent présente.
Le libéralisme, à tout va, va simplement mettre sur la touche le viticulteur respectueux et consciencieux. Le viticulteur tricheur et peu scrupuleux (vignes éponges, surendement, raisins de vin de table qui arrivent par accident dans les zones d’AOC) aura su commercialiser habilement ses excédents. Ainsi, il pourra passer la période de turbulences grâce à son pécule frauduleusement constitué. Sans oublier que ce contrevenant contribue pleinement à l’effondrement des cours.
Dans cet esprit, quand je vois les orientations que nous prenons actuellement, je pense que nous avons enfin compris que l’AOC doit être une garantie de qualité mais aussi de revenu et non pas un acquis social où « parce que je suis dans une zone d’appellation, j’ai droit à ce label de qualité ».
L’export est un magnifique  débouché en matière de valeurs ajoutées mais malheureusement certains ont trop souvent la faiblesse d’utiliser l’export comme des marchés de déstockage à vil prix. Lorsque certaines maisons investissent en temps, en argent sur les marchés export pour créer des valeurs de référence des appellations supérieures à ce que l’on trouve sur la moyenne du marché domestique, il est dommage de voir arriver de nouveaux acteurs qui cassent ce travail historique en donnant des référentiels tarifaires déconnectés de toute logique économique. Attention, je n’accuse pas, je constate et regrette, car il faut reconnaître que cette attitude ou faiblesse est la conséquence d’une politique bancaire non adaptée à la profession du vin.
Au jour où j’écris, est discuté au parlement la loi de modernisation économique où, pour des raisons que je ne me permettrais pas de juger, on va de nouveau favoriser la guerre des prix. Ce sont nos acteurs à la base qui vont le payer.
On vendra les vins au moins cher et par conséquence on rémunèrera nos vignerons et nos coopérateurs de moins en moins. Puis ces derniers, qui ne seront plus correctement rémunérés, seront obligés de faire l’impasse sur certains travaux viticoles hautement qualitatifs pour survivre. Je crains que ces logiques ne nous emmènent dans une spirale descendante car si l’on croit augmenter le pouvoir d’achat en compressant les marges, à trop de se rapprocher du plancher, on risque d’y passer à travers.

Partager cet article
Repost0
19 juin 2008 4 19 /06 /juin /2008 00:00

Comme vous le savez peut-être, j’ai un faible pour les journalistes du Figaro (cf François Simon http://www.berthomeau.com/article-20041799.html), et plus encore pour ceux qui sont critiques au Figaro-littéraire (ah ! le bloc-notes de Mauriac)  surtout lorsqu’ils sont, comme Sébastien Lapaque, des rebelles. Je n’ironiserai pas sur le rejeton du père Marcel, l’inénarrable maire de Corbeil-Essonnes, chasseur en 4x4 tourelle incorporée, ci-devant proprio du dit Figaro. Notre homme, Lapaque bien sûr, pas Dassault, vient de commettre une charge contre notre Président : « Il faut qu’il parte » Je cite les deux derniers paragraphes de l’opus :

 

«Aujourd’hui, la France est allée trop loin dans le reniement de ce qu’elle est pour que les choses ne reviennent pas tranquillement dans l’autre sens. Nous avions envie d’autre chose, mais nous ne savions pas quoi. C’était un désir un peu obscur et un peu sourd, c’était un pari idiot que nous avions fait de tourner la page. La provocation au futur est l’hameçon auquel nous avons mordu. Tout ce qui était ancien a paru diminué. Nous avons cru que l’instant, la vitesse, la fête, la transparence allaient nous rendre heureux.

Le cœur lourd, nous nous demandons comment nous avons pu laisser arracher tant d’années du milieu de notre vie, comment nous avons pu oublier ce que nous étions, comment nous avons pu laisser salir ce que nous aimions, pour un homme qui ne nous plaisait pas. »

 

Pire que des missiles de Rafale les écrits de notre Lapaque qu’est érudit en diable : y cause par rafales de citations ou de « comme l’écrivaient Bossuet, Aristote ou Montesquieu, très « France de  la pierre et du seigle, de l’apéro et de l’instit, du oui-papa, oui-patron, oui-chéri », grand-prêtre du tout fout le camp ma bonne dame : le bon pain, le bon vin et le black béret, éploré, transpercé de flèches notre Sébastien, on le sent prêt à prendre le maquis tout ça en cassant une petite graine sur le trottoir chez son pote Camdeborde, petit gargotier sis au Relais St Germain à côté de gars en Rolex et Ray Ban qui ne boivent pas que des vins d’irréductibles mais plutôt le 3ième vin de Latour, le château bien sûr, y z’ont laissé le Cayenne sur le trottoir et y pianotent sur leur Black Berry pour ne pas perdre une miette du CAC 40. Faut ce qui faut mon coco : plutôt une Gold Card que des Tickets Restaurant pour essorer la douloureuse. Bon je ne suis pas là pour critiquer ce pourfendeur intègre, j’ai acheté son livre, je l’ai lu et ça devrait suffire à son bonheur. Ce qui m’amène à chroniquer sur lui c’est que non content d’être un romancier, essayiste, critique littéraire notre plumitif cumulard est un « écrivin » reconnu, adulé, encensé par les Bobos et la fine fleur des amateurs, qui peut se permettre de commettre « Le petit Lapaque des vins de Copains » et nous offrir une virée « Chez Marcel Lapierre ».

Lapaque c’est le versant small in beautiful de la doulce France des vignes, bottes dans le terroir, nez dans les étoiles, faut pas gagner des sous ce n’est pas beau du tout, le bistrot ne ment pas, c’est l’anti-croskill par excellence http://www.berthomeau.com/article-20287518.html et http://www.berthomeau.com/article-20320269.html J’adore ! Perfusé aux vins des refusés il nous gratifie d’une de ces envolées qui ravira le dernier carré des résistants. Moi qui me contente de boire et d’apprécier Marcel Lapierre et ses frères, mais qui sait lire en creux les procès à charge, sans grandes nuances, où l’emphase à le petit côté bodybuildé des vins dénoncés, je trouve la part de mépris, de ce type de réquisitoire facile pour les vignerons des 99% restant, un peu lourde, indigeste et totalement contre-productive. Sébastien Lapaque se fait plaisir, grand bien lui fasse mais, en dépit de son ripolinage du passé, il devrait savoir et comprendre que, depuis le haut de sa chaire, tel un prêcheur stigmatisant les pécheurs, ses mots ne tombent que dans les oreilles ravies des convaincus, les mécréants eux, ils s’en tamponnent la coquillette. Mais après tout c’est sans doute ainsi qu’on recueille les honneurs du Goncourt et qu’on n’a pas besoin, comme l’écrivait ce pauvre Gaston Chaissac mort dans l’indigence, de chercher un éditeur pour délivrer ses impérissables messages…

 

Je vous propose donc l’ouverture du « Petit Lapaque… » avec 2 coupures : celles sur les copains du Sébastien et celle, très comique, sur le vocabulaire de la dégustation. Je dois prévenir les âmes sensibles : la vision « lapaquienne » du monde du vin c’est l’abomination de la désolation, la déferlante des barbares, la grande trouille des « homoncules » qui adorent jouer à se faire peur. Attachez vos ceintures ! Moi je vais me faire une petite embeurrée de beurre salé avec 2 carreaux de chocolat bien noir (faut que je fasse vite avant que les bonnes choses ne soient rayées de la surface du globe…)

 

« Une étrange rumeur court de chai en chai, de cave en cave, de vignoble en vignoble. Faite d’approximations et de considérations commerciales hasardeuses, gonflée par des chiffres farfelus, elle est en passe de devenir un nouveau lieu commun. Une idée reçue qu’on entend entre la poire et le fromage dans la France d’en haut, au comptoir du café du Commerce dans celle d’en bas. Gustave Flaubert se serait fait un plaisir d’en ciseler l’énoncé avant de l’intégrer à son dictionnaire. »Vin : pâtit en France de classifications trop compliquées. » Il suffit de tendre l’oreille. »On n’y comprend rien ! » radotent les Bouvard et Pécuchet du drinkement correct. À défaut de savoir choisir du vin, ces naïfs se raccrochent à l’appellation bordeaux comme à une bouée de sauvetage. Car, celle-ci, ils refusent qu’on la leur enlève, et tant pis si elle est trouée. Pour le reste, ils sont prêts à faire table rase du passé.  « Trop d’appellations, trop de cépages, trop de climats, trop de millésimes, trop de terroirs… » Leur tête en bourdonne, comme lorsqu’ils se réveillent après avoir abusé de vin chargé en souffre, en sucre ajouté, en acide tartrique, en saletés et en chimie.  « Simplifiez-nous tout ça ! » supplient-ils… « Trop de bouteilles, trop de vignerons, trop d’étiquettes nouvelles, trop d’insectes dans les vignes, trop d’étoiles dans le ciel…» On attend le jour où ils exigeront un vin mondialement uniforme conditionné en canettes aluminium (...)

Nous en seront là lorsque nous serons résignés à boire des néovins de cépage, technologiquement parfaits, simples euphorisants destinés à embrumer nos cerveaux pour nous aider à supporter l’impitoyable monde moderne. Pourquoi d’ailleurs ces breuvages seraient-ils encore fruits de la vigne, soumis aux intermittences du ciel, aux caprices du végétal et aux humeurs des hommes ? La viticulture industrielle pourra demain produire des vins hors-sol, avec trois récoltes par an sous serre en Chine ou en Australie. Après-demain, des arômes de synthèse, des levures sèches et un peu d’alcool blanc suffiront à transformer un jus de raisin pasteurisé en grand cru classé. Vous souriez ? Nous y sommes presque.

Qu’on se rassure. Ce presque est tout. Il est le gage de la liberté de vignerons décidés à retrouver ce qui était perdu. Ou à s’obstiner dans leur façon exceptionnelle de travailler. À la fois une avant-garde, un dernier carré, une réserve d’élite. Et surtout la promesse de toutes les prochaines fois (...)

Comparé aux volumes énormes produits par les zélateurs de la religion de l’abondance industrielle, la production annuelle de ces viticulteurs paraîtra chiche. Admettons qu’ils soient 500 en France. Ils exploitent tous des domaines à taille humaine, sans avoir la prétention de concurrencer les wineries californiennes. L’ensemble de leurs parcelles représente peut-être 1% du vignoble français. Le paradoxe est que c’est dans ce « pour cent » que s’est réfugiée la variété des vins français, leur infinie complexité. Les cépages, les terroirs, les cultures, les noms de villages que l’on a envie de réciter comme un poème… Au moment où certains vignerons, appliquant à la lettre les leçons de leurs professeurs, se sont mis à produire des vins uniformes, concentrés et standardisés par des levures chimiques qui tuent leur potentiel aromatique, une volée d’irréductibles ont eu l’audace de faire la pari de la variété.

Oui, le vin c’est compliqué. Oui, c’est difficile de s’y retrouver. Oui, il faut apprendre à le connaître. Qu’on songe au vocabulaire de la dégustation (…)

Je n’ose pas le croire. Je ne peux pas me résoudre à voir disparaître cet émouvant lieu de mémoire qu’est le vin en France, avec ses histoires, ses légendes, ses usages. D’où cette théorie du 1%. Dans la grande bourrasque qui secoue aujourd’hui le monde du vin, une poignée de vignerons ont ouvert la voie. Tournant le dos à ceux qui produisent des vins gonflés, boisés, bodybuildés en espérant décrocher une note supérieure à 90/100 dans le Guide Parker, ils ont redécouvert l’antique description d’Olivier de Serres, qui recommandait, dans son Théâtre d’agriculture et ménage des champs (1600), d’employer et de cultiver les terroirs selon leurs diverses qualités, situations et climats ». Comment n’y avoir pas songé plus tôt ? C’est chez ce gentilhomme campagnard, agronome, huguenot amoureux su Vivarais, que résidait la sagesse. Non pas chez les winemakers qui rêvent d’une viticulture radicale capable de transformer l’arome des vins fins en cavalerie industrielle, avec poivre et cassis, chocolat et vanille à tous les services… Et plus si affinités !... Ceux qui parcourent le Guide Parker comme on lit l’Almanach Vermot – pour s’amuser à peu de frais – se souviennent des notes de dégustation où il est question de « monstres », d’arômes de « boîtes à épices » et même de « ketchup »… Certes, monsieur Parker, mais de quelle marque de ketchup ? N’en jetons plus. »


Tout à fait d'accord : n'en jetez plus Sébastien Lapaque je vais mal digérer mon embeurrée... 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
18 juin 2008 3 18 /06 /juin /2008 00:00

La Birmanie, sa dictature, ses généraux, son malheur permanent, est à nouveau rangée au rayon des dictatures oubliées par le grands médias qui n'aiment que les urgences humanitaires. C'est plus vendeur que le malheur au jour le jour. Alors je vais vous dire ce matin ce que j'ai sur le coeur depuis que ce pays a été frappé par la désolation...

Quand je vois plastronner tous ces hommes « forts », arborant des uniformes militaires tapissés de barettes et constellés d'étoiles, ployant sous les médailles comme des sapins de Noël, qui tiennent sans partage les rennes du pouvoir civil, j’enrage : « Combien de batailles contre l’ennemi de l’extérieur ont-ils gagnées ces galonnés d’opérette ? »

Aucune !

Clônes grotesques du général Alcazar ou du général Tapioca de Tintin et Milou, à part qu’eux ils font tirer à balles réelles sur le seul ennemi qu’ils connaissent, celui de l’intérieur, leur propre peuple. La légalité de leur pouvoir ils la puisent de la seule force des armes qu’ils pointent, sur ceux qu’ils disent gouverner, pour mieux les  maintenir sous leur joug.

Qui les a fait Roi ?

Ni Dieu, ni le peuple, ils sont illégitimes.

Face au spectacle affligeant de la junte birmane sacrifiant sa population meurtrie  à ses délires paranoïaques ce matin, j’en ai marre, je sature. Alors honteux de mon impuissance je tire la sonnette d’alarme et je crie au contrôleur : « arrêtez le monde, je veux descendre… »

 

Comme y’a pas de contrôleur dans ma rame, et qu’elle continue de tourner imperturbablement notre foutue terre, même si elle ne tourne pas bien rond dans sa tête, qu’elle perd vraiment la boule cette mappemonde bigarrée, qu’elle est en surchauffe, gaspilleuse en diable, insoucieuse des lendemains, le cul posé sur ma banquette, je continue à contempler les images de notre Terre, impuissant.

 

Ainsi va le monde me diront les blasés. Que pouvons-nous faire ?

 

Certes pas grand-chose sauf d’entretenir en nous un sentiment de révolte, de cultiver le mépris, de ne pas détourner le regard de ces peuples asservis, de ne pas applaudir les  « nouveaux Daladier »  qui ne nous proposent que de la lâcheté au nom de la défense de nos intérêts économiques.

 

Rappelons-nous, ce n’est pas si vieux.

 

Les défricheurs

 

Notre XXième siècle fut riche en dictateurs en uniformes. Leurs régimes, totalitaires, adoraient les uniformes, les bannières, les défilés et leurs milices paramilitaires exhibaient des accoutrements grotesques.

Benito fut le précurseur avec ses chemises noires et ses faisceaux qui donneront à la peste brune son appellation : le fascisme, et avec Adolf, le petit caporal, ils iront se faire la main en Espagne, pour donner la victoire au falot Francisco, bedonnant général au calot ridicule qui saura gérer d’une poigne de fer les lendemains de la chute de ses encombrants alliés.

Pendant cinq longues années les bruits des bottes bien cirées des Obergruppenfhürer, des Brigadefhürer, des Oberfhürer, des Standartenfürer, des Obersturbannfhürer, des Hauptsturmfhürer, vont faire trembler le monde libre et les uniformes impeccables de cette horde noire dirigeront l’entreprise d’extermination la plus monstrueuse. La guerre froide permettra de recycler les compétences de beaucoup de ces professionnels de la torture et de la mort.

Au Japon, l’empereur Hiro Hito et la caste militaire caricaturale, entraîneront ce pays dans une folle barbarie, avant de céder sous le feu nucléaire d’Hiroshima et de Nagasaki.

À Yalta, Winston Churchill et Franklin D. Roosevelt sont en civil, le père Joseph, lui, arbore son uniforme de généralissime de l’Armée Rouge.

Et pendant ce temps-là, chez nous, un vieux Maréchal se faisait remettre les clés de la Gueuse par des parlementaires désemparés, et déclarait faire don de sa personne à la France.

Les libérateurs 

Par bonheur, un général avec deux petites étoiles toutes neuves relevait le gant et je dois le reconnaître que ce de Gaulle avait l’uniforme modeste, minimaliste. Plus politique que chef de guerre, l’homme avait du panache et ce qu’il faut d’intransigeance pour imposer la voix de la France aux Alliés.

L’armée américaine, avec ses débarquements sur nos côtes, imposait son approche technicienne de la guerre et ses officiers affichaient une décontraction vestimentaire qui rompait avec la tradition des culottes de peau du Vieux Monde. D’une certaine manière, ils allaient, après la déroute de 1940, réhabiliter aux yeux de beaucoup de Français les militaires.

 

Bref, au sortir du 2d conflit mondial, les militaires alliés sont des libérateurs et la société internationale naissante fait que nos parents se prennent à rêver, un bref instant, en un monde pacifié.

 

Les  héritiers

 

Les conflits coloniaux vont redonner des couleurs aux culottes de peau :

- l’Indochine, où l’Amiral D’Argenlieu nous embourbera jusqu’au désastre de Dien Ben Phu ;

- l’Algérie, où le pouvoir civil de Guy Mollet confiera aux militaires, Massu, les pleins pouvoirs pour faire le sale boulot de la bataille d’Alger et où un quarteron de généraux : Challe, Salan, Jouhaux et Zeller, qui semblaient tout droit sorti d’un mauvais film des années 50, ouvrira les vannes des exactions de l’OAS.

 

La guerre froide va impulser le surarmement des deux empires et alimenter de multiples foyers de guerre ou de tensions : la Corée, le Vietnam, l’Angola et beaucoup de pays africains, des luttes de libération en Amérique du Sud, avec Cuba pour modèle, de conflits endémiques au Proche-Orient entre Israël et ses voisins.

 

Dans la deuxième moitié du XXième siècle, la caste militaire peut toujours croire en un « bel avenir » et faire tourner le complexe militaro-industriel à plein régime. Peu ou prou, cette grande peur mutuelle des 2 blocs, entretenue, enfante une flopée :

- de dictateurs galonnés, pourvus de lunettes noires : le chilien Augusto Pinochet, l’argentin Jorge Raphaël Videla, le Paraguayen Alfredo Stroessner, le polonais Jaruzelski



















- de dictateurs libérateurs comme à Cuba où le leader Maximo, Fidel Castro, en battle-dress, uniforme camouflé et casquette de simple troupier s’incruste et défie son grand voisin avec l’aide des russes ;

- de fantoches : en Ouganda avec le Maréchal Amin Dada… en Centre-Afrique avec l’ex-sergent de l’armée française Jean Bedel Bokassa autoproclamé empereur…

- de dictateurs « socialistes » comme en Algérie, avec l’ascétique général de l’ALN Houari Boumediene qui va mener son pays, avec la caste des militaires, à la ruine et à la sauvagerie islamiste…

- de dictateurs « populaires » avec bien sûr, l’ami de la France, Saddam Hussein – je ne dresserai pas ici la liste de ceux qui voyaient en lui le grand chef d’un Irak laïc, ce serait ravageur – qui gazait son peuple et humiliait ou massacrait ses opposants.

J’en oublie, bien sûr, les Hafez el-Assad, Kadhafi, Mobutu, Charles Taylor, Ceausescu, Pol Pot – ces deux derniers sans uniforme connu - et bien d’autres moins people.

 

Par bonheur, la mode des militaires au pouvoir a refluée en Amérique du Sud, elle perdure en Afrique, et des poches de dictature d’anciens satellites de l’ex-URSS résonnent encore du bruit des bottes.

Les travestis

Reste les stigmates du communisme asiatique : la Chine bien sûr, la Corée du Nord, le Vietnam et, hors tout, la Birmanie. Dans ces pays, l’armée est l’héritière d’une armée aux pieds nus, « populaire », qui a pris le pouvoir au nom du peuple et où, rien ne ressemble plus à un civil qu’un militaire et vice-versa. Dans les allées du pouvoir, en Chine, la caste qui tient le pays sous sa férule maquille les brèmes, elle joue à merveille de la compréhensible fierté du peuple chinois de voir sa patrie à nouveau considérée comme un grand pays. À Tiananmen ce sont les chars qui ont fait face aux étudiants et l’appareil de contrôle policier tient le pays. Alors, dans nos beaux pays démocratiques le syndrome Munichois reste toujours de mise vis-à-vis des dirigeants chinois : les réalistes, ceux qui font des affaires, ceux qui n’en ont rien à foutre, prônent l’à plat ventrisme et la lâcheté comme au bon vieux temps de l’ami Saddam ou du shah d’Iran. On raille les droitsdel’hommiste mais, entre nous, je propose à tous ceux qui font litière des libertés, d’aller faire un petit stage au quartier, dit des VIP, de notre prison de la Santé pour goûter les charmes de la privation de liberté pour délit d’opinion. Le réalisme des relations d’État à État n’exclut en rien la fermeté. Les pouvoirs forts ou totalitaires ne respectent que les forts. Soyons-le, sans ostentation, ni discours moralisateur, simplement.

 

Kang Xioguang, membre de l’académie des Sciences sociales de Pékin

 

« De toutes les civilisations anciennes, il n’y en a qu’une qui ait une véritable vitalité aujourd’hui ! Une seule qui connaisse une telle expansion et qui, peut-être un jour, dominera le monde : c’est la Chine »

 

On ne saurait être plus clair. C’est dit avec une tranquille assurance dans le film de Jonathan Lewis : « Chine : derrière la Grande Muraille » qui nous plonge dans les coulisses de la réussite chinoise.

 

En guise de conclusion

 

« Tu ne vas pas nous faire tout un fromage de tes histoires chinoises coco : une petite robe à deux balles de chez H&M, des grolles à trois francs six sous de chez Carrefour, mon portable, mon baladeur, mon zizi gougou pour presque rien du tout ça vaut bien le coup que nous baissions notre pantalon…" Bon, alors : Vive la Wall Martisation ! Comme le grommelait Daladier acclamé à sa descente d’avion au Bourget, au retour de Munich : « Ah ! Les cons… »   

 

Partager cet article
Repost0
17 juin 2008 2 17 /06 /juin /2008 00:07

 

Transgresser ! Au temps de mes culottes courtes vendéennes, nous ne fumions pas la moquette mais, sous le contrôle du clan des femmes et de ses alliés : curé, instituteur en soutane, grenouilles de bénitier et autres forces supplétives, notre principale transgression consistait à fumer en douce. Avant de pouvoir accéder aux P4, les fameuses Parisiennes vendues en paquet de 4 disponibles chez l’unique buraliste de la Mothe-Achard, le père Simon, mais inaccessibles car l’homme à la carotte nous aurait cafardé, les frères Remaud et moi nous nous étions rabattus sur une denrée disponible dans les champs environnants : la barbe de poupée de maïs. Nous la faisions sécher au soleil puis nous la roulions dans du papier kraft. Redoutable ! Acre ! Un dimanche nous avions poussé la provocation jusqu’à griller nos cigarettes d’un 3ième type devant nos mères sous la justification très écologique pour l’époque : la fin des années 50, « que c’était naturel… » Madeleine et Berthe stupéfaites par un tel argumentaire nous laissèrent griller nos cigarettes de maïs.

Alors vous comprendrez qu’à Nantes, rue de Santeuil, tout près du passage Pommeraye cher à Jacques Demy, face à l’imprimerie du quotidien « Presse Océan », sur le coup de 2 heures du matin, nous refaisions le monde en mangeant des œufs durs arrosés de ballons de rouge et nimbés de l’épaisse fumée de mes Boyard maïs. Record du monde de la nicotine : 2,95 mg, un must inégalé, comme l’auraient dits les fêlés de la Gauche Prolétarienne : un trait d’union avec les larges masses. C’était avant mai 68 et les linotypistes grillaient plutôt des Gitanes blanches. La Boyard maïs, je ne le savais pas à ce moment, étaient l’apanage des intellos : le photographe Brassaï qui mesurait son temps de pause au temps de consomption de sa Boyard et de l’emblématique Jean-Paul Sartre qui, selon Annie Cohen-Solal s’envoyait en une journée : « Deux paquets de cigarettes — des Boyard papier maïs — et de nombreuses pipes bourrées de tabac brun ; plus d'un litre d'alcool — vin, bière, alcool blanc, whiskies, etc. — ; deux cents milligrammes d'amphétamines ; quinze grammes d'aspirine ; plusieurs grammes de barbituriques, sans compter les cafés, thés et autres graisses de son alimentation quotidienne. »
Je n’ai jamais eu une grande sympathie pour JP Sartre, surtout le Sartre du tonneau de Billancourt qui, comme l’écrit Morgan Sportès dans Ils ont tué Pierre Overney, « post festum, donnait des leçons de résistance, une résistance à laquelle il n’a jamais participé au demeurant, sauf dans son imaginaire et celui de son fan-club »  mais lorsque la BNF, sur l’affiche et le catalogue de la commémoration du centenaire de sa naissance, fait disparaître la boyard, là je sors mon révolver. « Une regrettable erreur, explique la directrice générale de la BNF », Agnès Saal. « Ce serait d'ailleurs contre notre mission patrimoniale de modifier un document », ajoute-t-elle. Erreur mon cul, puisque cette gente dame reconnaît qu'il était impossible pour les organisateurs de placarder dans le Tout-Paris des affiches d'un Sartre fumant, loi Evin oblige. « Lorsque nous avons choisi cette photo, elle était déjà sous cette forme. C'est-à-dire sans le spot sur lequel Sartre s'appuie et... sans cigarette », affirme Agnès Saal qui plaide l'innocence.

 

Pour lutter contre l’hypocrisie ambiante j’ai donc décidé ce matin de vous offrir une galerie de portraits de personnalités à la cigarette non censurés. Pour ne pas encombrer votre messagerie j'ai aussi publié ce jour : Portraits avec clope : que du beau monde où vous pourrez compléter la galerie ci-dessous (pour ce faire allez dans la rubrique articles récents et cliquez sur le titre indiqué ci-dessus)...

Partager cet article
Repost0
16 juin 2008 1 16 /06 /juin /2008 00:01

 

 

C’est une histoire vraie comme on n’en vit plus dans notre vie bien propre et bien sage. Elle a pour décor la crèmerie-restaurant Chez Rosalie, au 3 rue Campagne Première. C’était l’âge d’or du Montparnasse des artistes, Rosalie Tobia, une romaine, qui au temps de la splendeur de ses appâts fut le modèle favori du maître des pompiers, le peintre Bouguereau, l’âge venant, s’épaississant, a acquis pour 45 francs* une petite crèmerie où elle installe 4 tables et ce qu’il faut de tabourets.

 

La Rosalie, dure au labeur, a du cœur, n’aime pas les snobs et leur dit, s’emporte facilement pour redescendre aussitôt, prend parti et a un faible pour Amadeo Modigliani. Entre eux deux c’est toujours la commedia qui vire souvent à la tragedia. Bref, son Osso Bucco, sa lasagne al forno, ses tagliatelles et ses vins : barolo, valpolicella, frascati, lambrusco, chianti, le tout à petits prix, sont connus dans le monde entier. Rosalie est la madone des artistes dans la dèche et, dieu sait, qu’ils sont légion dans cet état car comme le lui dit Modigliani « un artiste ne peut gagner sa vie. Il peint… Le reste ? Pfutt ! Est-ce qu’on sait ? Vois. » en lui présentant une superbe étude de nu : Commediente l’Amadeo…


 

 

Donc, un beau jour, un jeune type barbu aux joues creuses, déjà bien éméché, pousse la porte de Rosalie. Il s’enfile trois verres de vin rouge, les paye, puis demande qu’on aille lui acheter des « caramels de couleur » * chez le marchand de couleur voisin. On s’exécute. Il les mets dans sa bouche et quand ils sont à point, bien mous, il se met à peindre directement sur le mur des esquisses de Montmartre. L’artiste c’est Maurice Utrillo surnommé par les poulbots de Montmartre pour son goût immodéré de la boutanche : Litrio.

 

Sur les entrefaites, Modigliani entre chez Rosalie. L’estime des deux peintres est réciproque : ils tombent dans les bras l’un de l’autre et entament des libations vineuses. Les bouteilles descendent sans que les deux larrons daignent mettre la main à la poche. Rosalie s’inquiète, demande son dû et de guerre lasse les prie d’aller cuver leur vin ailleurs. Litrio balbutie pour se dédouaner «  regardez ce que je viens de vous peindre sur votre mur » et reçoit en retour une volée de bois vert « je ne vais pas découper le mur pour payer mon vin » éructe-t-elle. Rosalie se déchaine en exploitant toute la palette du vocabulaire d’une matrone du Trastevere. Pendant ce temps les deux maîtres se font assaut de compliments : « le plus grand peintre c’est toi » « Non, c’est toi » pour en venir aux mains et tout casser dans la crémerie de Rosalie.


 

 

Les pandores en pèlerine, alertés par le souk des deux compères, ramènent leur tarin et les menacent de les embarquer au commissariat de la rue Delambre. Litrio, en dépit de sa vinosité avancée, trouve la force de bredouiller le sésame des artistes en perdition : « Lé-on Za-ma-ron » Les hirondelles se font alors clémentes.


 

Mais, me direz-vous, qui est Léon Zamaron ?

 

 

Accrochez-vous à la rambarde, ça va vous faire un choc : c’est le préfet de Paris. Grand amateur d’art et collectionneur, il est l’ami des peintres et vient en aide aux artistes étrangers en situation irrégulière – bon je ne vous fais pas un dessin, imaginez simplement le Préfet de Police Gaudin – On le voit souvent à la Rotonde et les murs de son bureau à la Préfecture témoignent de leur reconnaissance : Soutine, Modigliani, Utrillo, Chagall, Foujita, Valadon… tous les grands de l’École de Paris…

 

 

Autre temps, autres mœurs, loin des interdits, alliance merveilleuse du génie et d’une vraie vie que l’on vit, dure mais chaleureuse, tumultueuse et fructueuse, bariolée et incandescente, où un représentant de la République, emblème de l’ordre public appliquait avec bonheur nos trois mots chéris : Liberté, Égalité, Fraternité…


 

Partager cet article
Repost0
15 juin 2008 7 15 /06 /juin /2008 00:03

Les « nouveaux barbares » étaient en retard ce qui me laissait tout le loisir de contempler quelques beaux spécimens de petits culs des beaux quartiers qui cherchaient des mains prolétariennes, rudes et calleuses, pour connaître le grand frisson que seules les « larges masses », fleurant bon la sueur et le cambouis, pouvaient leur procurer. Je ne raille pas, elles n’attendaient que ça. Les têtes d’œufs de la GP, sinistres, fuyaient le sexe considéré comme la faille suprême où la pureté révolutionnaire risquait de s’engloutir, se diluer, alors ils combattaient et réprimaient les délices de la chair comme l’opium des fils de bourgeois en quête de rédemption des maîtresses de leurs pères et des amants de leurs mères. Cet ascétisme ne pouvait que profiter à ceux qu’ils vénéraient : les prolos. L’érection des damnés de la terre en phares de la Révolution les plaçaient en position de se servir à volonté au grand festin du cul. Mes sources de basse-police brodaient avec délectation sur les parties de jambes en l’air entre les belles héritières et la nouvelle race des élus dans les alcôves des grands appartements du Triangle d’or. On aurait cru qu’ils tenaient la chandelle les balourds des RG.

 

Des amuse-gueules, ces mijaurées en jeans me mèneraient droit au lit de leur mère. J’allais me goinfrer. Avant le festin, il me fallait assurer mes arrières. Un détail vous a sans doute échappé dans mes écrits touffus et confus : à aucun moment je n’ai fait état de mes obligations militaires. Comme dans notre beau pays, en ces années là, nous vivions encore sous le régime de la conscription obligatoire, lorsque je plaquais mes études mon statut était celui de sursitaire. Ma réussite au concours de la Police Nationale ne me dispensait pas d’être appelé sous les drapeaux et, si j’avais été un tant soit peu plus attentif, j’aurais du m’étonner que la hiérarchie m’offrît une affectation avant que je n’eusse fait le bidasse. Ces enflures m’avait débusqué dès l’origine et m’avait manipulé. À mon tour de leur rendre la monnaie de leur pièce : préserver les avantages de mon statut d’agent infiltré et me débarrasser au plus vite de ma couverture de prolo chez Citroën tout en évitant de me retrouver 2ième pompe au camp de Mourmelon et être soumis aux menus plaisirs de salopards du type de l’adjudant-chef Chanal. Pas simple mais faisable, j’avais ma petite idée sur le mode opératoire. Dans le bordel ambiant et la paranoïa de mes chefs collant aux obsessions de Marcellin, plus ce serait gros mieux ça passerait. Il me fallait leur en donner pour leur argent.

 

Depuis toujours je suis un ramier qui bosse comme un perdu lorsqu’il se retrouve au pied du mur. L’adrénaline est mon seul moteur. Dans les derniers instants, avant d’affronter un truc important, je suis capable d’absorber des tonnes de renseignements, de les trier, de les analyser, de les hiérarchiser et, après une bonne nuit de sommeil, d’en faire mon miel. Avant de venir affronter mes frelons j’avais bouffé tout ce que mes très chers confrères avaient gratté sur l’opération Flins de juin 68 menée de mains de maître par mes révolutionnaires en peau de lapin. Comme le disait Fouché – pas Christian, mais l'autre, le vrai, l’inventeur de la police politique moderne – toute personne à un prix mais pour l’acheter, sans ruiner le Trésor Public, il suffit de la dévaluer. Les fiches sont d'excellents dépresseurs de prix et, tout pur et dur qu’il soit, le gauchiste peut aussi se trimballer des casseroles dont le bruit pourrait importuner ses camarades, surtout les grands guides toujours prompts à condamner et à jeter les déviants dans les ténèbres extérieurs. Je disposais donc d’une relation crédible, vu de l’intérieur du mouvement, qui me permettait d’aborder les chefs militaires de la GP, surtout ceux qui avaient joué un rôle  éminent dans l’équipée de Flins, sans me prendre les pieds dans le tapis.

Partager cet article
Repost0
14 juin 2008 6 14 /06 /juin /2008 00:06


Aujourd'hui dans le cadre de notre bistro philo j'ai invité notre grand voisin étasunien. Au menu, les pensées élevées  de deux monuments de ce grand pays neuf et celle, plutôt enlevée, "déconstruite" comme l'aurait écrit le philosophe français Jacques Derrida coqueluche des universitaires de côte Est des USA, de l'astucieux  Bill Clinton. Le vin qui va avec est bien sûr Californien : un California White Table Wine répondant au doux nom de Ménage à Trois... C'est blend de Chardonnay, Moscato et Chenin blanc www.folieadeux.com

Élévation 1

«  Non seulement la plupart des produits de luxe, et beaucoup de prétendues commodités de la vie, ne sont pas indispensables, mais ce sont de véritables obstacles à l’élévation morale de l’humanité. L’homme est riche en proportion est riche en proportion du nombre de choses dont il peut se passer. (…) L’argent n’est pas nécessaire pour acquérir ce dont l’âme à besoin. »
 
Henry Thoreau

Élévation 2

«  Il n’est d’autre richesse que la vie, la vie et tout son potentiel d’amour, de joie et d’admiration. Le pays le plus riche est celui qui nourrit le plus grand nombre d’êtres humains nobles et heureux ; l’homme le plus riche est celui qui, étant parvenu au plus haut degré d’accomplissement personnel, a aussi la plus grande influence utile, grâce à ses vertus et à ses biens, sur la vie d’autrui… Beaucoup de ceux que l’on tient habituellement pour des gens riches ne sont, en réalité, pas plus riches que les serrures de leurs coffres-forts, étant foncièrement et éternellement incapables de vraie richesse. »
 
John Ruskin, Unto this Last (1862)
Élévation 3

Question à Bill Clinton
devant le grand jury de l’affaire Monica Lewinsky :
- l’affirmation: « There is no sex of any kind “est-elle correcte?
Réponse:
- “It depends on what the meaning of the word is.”
Partager cet article
Repost0
13 juin 2008 5 13 /06 /juin /2008 00:06

L'Internet c'est good. Je ne vais pas cracher dans ma soupe : c'est grâce à ses gros tuyaux que je déverse tous les jours mes chroniques dans la tentaculaire Toile, mais les remous de ce que l'on appelle dans notre petit monde : "l'affaire Microsoft" m'amène à faire une proposition, que certains jugeront sans doute incongrue, remettre au goût du jour les hommes-sandwiches. Carton rouge : l'ANPAA va nous "mettre au tribunal" vous allez me rétorquer. Rassurez-vous mon intention n'est pas de ressortir de la naphtaline des gars payés trois francs six sous pour se trimballer sur les trottoirs avec des panneaux dans le dos. Non, non, trop ringard, trop en décalage avec le statut de notre nectar le style Primior versus Bercy. La tendance sur le trottoir c'est la bimbo aux couleurs de la marque, parfois sur roller, qui vous distribue toutes dents dehors des petits PQ pour le téléphone portable ou l'abonnement canon à un distributeur d'accès internet. Moi mon truc c'est de transformer, monsieur et madame tout le monde en homme-sandwich. Pour ce faire 2 vecteurs : le sac et le tee-shirt.



Pour le sac, pas le pochon plastique de bout de caisse, non le vrai sac à provisions réutilisable, sympa, décalé ou engagé et surtout siglé. On va encore dire que je délire. La réponse est non, à condition bien sûr de passer entre les gouttes des interdictions édictées par les lois et de le vouloir. Les conseillers fiscaux sont des as de ce type de pratique : où comment aller se réfugier dans les niches fiscales pour ne pas payer d'impots alors que nous, sur les sujets qui fâchent, on y va toujours avec nos gros sabots. Je m'explique. Le durable a le vent en poupe. Le MEL, toujours à l'affut des vents portants, l'a bien compris en supprimant les sacs de caisses et en proposant le sac réutilisable orné du logo Leclerc. Gagnant sur tous les tableaux : économies et des clients transformés en homme-sandwiches pour le compte de l'enseigne. Alors pourquoi pas nous avec des formules du type : " nos vignes sculptent vos paysages..." ou, si nous ne traitions plus la question des pesticides par dessus la jambe " comme vous nos terroirs préservent la nature..." ou " le durable est notre affaire : le vin est aussi vieux que le monde..." Bien sûr les ricaneurs vont ricaner, les plus gentils vont dire que je suis givré, les moins sympa qu'il faut m'enfermer... Peu m'importe, mais je ne vois pas au nom de quoi nous aurions la vigne et le vin honteux, nous ne sommes pas des marchands d'armes ou de drogue légale, et que nous restions là à nous lamenter. L'opération pourrait, bien évidemment, sortir de nos belles frontières pour essaimer sur le vaste marché de l'Union Européenne. On va me rétorquer que tout cela est bel et beau mais : qui va décider ? Qui va payer ? Bonne question, en l'état des lieux la réponse est connue : personne !

Tout le monde ou presque dans notre beau secteur se fout comme de sa première chemise d'épouser les contours du temps, de participer à la mouvance de l'opinion, d'être un acteur attentif des préoccupations de la vie des gens. Chacun dans son coin on vend du vin, point. Fort bien, mais n'être perçu que comme des marchands de vin nous place dans la ligne de mire des hygiénistes, des prohibitionnistes, de toutes les ligues de vertu, qui elles savent à merveille mobiliser l'opinion publique contre ces affreux qui alcoolisent notre beau pays. Tant que nous resterons bien au chaud entre nous, tant qu'aucune action d'envergure en direction de l'opinion publique ne sera menée pour mieux expliquer ce que nous sommes, ce que nous faisons, ce que nous apportons au pays, nous continuerons de subir. La politique à courte vue des grandes Interprofessions arqueboutées à leur pré-carré, à leur vision étroite, à leur défense d'une ressource qui est pourtant un quasi-prélèvement obligatoire, rien d'intelligent n'est envisageable. Attention, je n'appelle pas de mes voeux la création d'un zinzin national supplémentaire avec siège social, plaque de cuivre, budget de fonctionnement et tout ce qui s'ensuit. Absolument pas, mon souhait est que l'ensemble des bailleurs de fonds, des décideurs professionnels  se réunissent pour mettre en commun les moyens nécessaires à un travail de fond auprès de l'opinion publique pour que notre produit soit traité par les décideurs publics nationaux, communautaires et internationaux, sans ostracisme ni diabolisation.  
 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0

  • : Le blog de JACQUES BERTHOMEAU
  • : Espace d'échanges sur le monde de la vigne et du vin
  • Contact

www.berthomeau.com

 

Vin & Co ...  en bonne compagnie et en toute Liberté pour l'extension du domaine du vin ... 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

Archives

Articles Récents