Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
17 novembre 2008 1 17 /11 /novembre /2008 00:06

 

 


 

Comme vous devez vous en doutez, chers lecteurs, j’ai un goût immodéré pour les gens qui décoiffent, ceux qui bousculent l’establishment, taillent leur route sans trop se soucier des codes en vigueur. Stéphane Derenoncourt est de ceux là et je suis d’autant plus heureux de l’accueillir que le seul des œnologues sollicités pour répondre à mes 3 mêmes Questions, qui n’ait même pas daigné accuser réception, est le Président de l’Union Nationale des Œnologues, Thierry Gasco – c’est la première fois que cela m’arrive.

 

Comme c’est très tendance Stéphane Derenoncourt est un chti qui descend à Bordeaux au début des années 80 pour « entrer » en viticulture. J’emploie à dessein ce verbe car cet autodidacte avoue que « le vin entre dans sa vie par nécessité et par passion ». Ses expériences sur diverses appellations l’amènent à s’intéresser de plus en plus au concept de « terroir » »,il s’inspire du modèle Bourguignon, et se base sur la minéralité et la fraîcheur pour développer ses propres méthodes de travail, plus intuitives et moins systématiques. L’observation et la dégustation des baies, du jus et du vin sous-tendent sa philosophie.

 

En 1999, avec son épouse Christine, Stéphane Derenoncourt acquiert une propriété située en Côtes de Castillon, Le Domaine de l’A. Vigneron et consultant, il intervient aujourd’hui dans une soixantaine de domaines où il propose une démarche globale allant de la vigne au vin. Stéphane Derenoncourt définit son travail « comme étant la recherche de l’expression optimale du terroir. L’enjeu, au travers des méthodes proposées, étant de favoriser l’exploration du sol par les racines afin de l’imprimer dans le fruit. » Il ajoute que « face au terroir, plus l'homme se fait discret, meilleur est le vin » et il met un point d'honneur à ne pas “signer” ses vins. Son but est d’élaborer des vins singuliers, frais, sensuels, des vins de soif comme il se plait  à le dire. Comment voulez-vous, après une telle profession de foi, que je ne sois pas très heureux de l’accueillir sur mon espace de liberté.


Question N°1
 : Supposons que je sois un jeune bachelier passionné par le vin. Je cherche ma voie Sur le site du CIDJ je lis « L’œnologue, grâce à ses connaissances scientifiques et techniques, accompagne et supervise l’élaboration des vins et des produits dérivés du raisin. Sa principale activité concerne la vinification. Il conseille les viticulteurs dans le choix des cépages et la plantation des vignes. Il surveille les fermentations en cave, le traitement des vins et leur conditionnement. Il effectue des analyses et procède à des recherches technologiques visant à l’amélioration des cépages. L’œnologue peut également être chargé de la distillation ou fabrication des alcools à partir des marcs de raisins. Enfin, connaisseur et expert en dégustation, il participe à la commercialisation des vins en France et à l’étranger. En raison de la concurrence rencontrée désormais par la production française de vin sur le marché mondial, l’œnologue remplit une fonction stratégique pour le maintien ou l’amélioration de la qualité des produits de la viticulture française. »

 

 

Présenteriez-vous ainsi votre métier à une jeune pousse Stéphane Derenoncourt?

 

Réponse de Stéphane Derenoncourt : Je ne suis pas le mieux placé pour juger de cette définition, n’étant moi-même pas œnologue. En revanche, pour en avoir recruté et embauché quelques uns, je connais à peu près le niveau technique du jeune diplômé. Cette définition fait rêver, certes, mais elle est très loin de la réalité. Pour exemple, les étudiants doivent passer en tout et pour tout une à deux journée dans les vignes. En faire des experts relève de l’exploit. Je vous encouragerai donc à nourrir votre passion par vos propres moyens, en allant sur le terrain et en rencontrant des producteurs, pas forcément œnologues, et donc avec souvent plus de spiritualité et de sensibilité que ne l’offre la formation purement scientifique.

 

Question N°2 : « Monsieur Seignelet, qui avait assis Bertrand face à lui, donnait à mi voix des leçons d’œnologie, récitait des châteaux, des climats, des millésimes, émettait des jugements, prononçait du vocabulaire : puis il voulut enseigner à son fils aîné le rite grave de la dégustation. » Tony Duvert « L’île Atlantique » éditions de Minuit 2005. Dans le fameux manga « Les Gouttes de Dieu » «  Le héros est présenté comme œnologue alors que manifestement c’est plutôt un œnophile doué et cultivé.

 

Quel est votre sentiment sur ce glissement sémantique Stéphane Derenoncourt ?

 

Réponse de Stéphane Derenoncourt :  Mr Seignelet devrait se méfier afin de ne pas tomber sous les feux de l’union des œnologues. Cela me rappelle farouchement mes débuts. Souvent les critiques de vin ou journalistes me présentaient comme l’œnologue montant. L’union des œnologues s’est donc occupée durant plusieurs mois, de tenir à jour mon dossier de presse accompagné de menace de procès pour avoir usurpé le titre d’œnologue. C’est à partir de ce jour que j’ai décidé d’ajouter sur ma carte de visite la mention ‘’surtout pas œnologue’’. Ils ont finalement bien du mal à défendre leur profession (la défendre de quoi ?). Il est clair qu’on a besoin d’un médecin, et d’un vrai, pour soigner une maladie. Il est tout aussi clair qu’on peut faire du vin sans œnologue.

 

Question N°3 : Moi qui ne suis qu’un pur amateur aussi bien pour le vin, que pour la musique ou la peinture je place ma confiance non dans les critiques mais plutôt dans ma perception au travers de l’œuvre du génie du compositeur ou du peintre. Pour le vin l’affaire est plus complexe entre l’origine, le terroir, le vigneron, le vinificateur, le concepteur du vin, l’exécution est à plusieurs mains. La mise en avant de l’œnologue, une certaine starification, correspondant par ailleurs avec l’esprit du temps, à une forme de marketing du vin, ne risque-t-elle pas de nous priver d’une forme de référence objective, celle de l’homme de l’art, nous aidant à mieux comprendre l’esprit d’un vin ?

 

Réponse de Stéphane Derenoncourt : Bien que très médiatique, la starification des œnologues ou consultants de tous poils reste anecdotique. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose. Dans le microcosme, la polémique est bien souvent entretenue par ceux qui ne trouvent pas la gloire espérée à travers la qualité des vins qu’ils conseillent ou produisent. Leur frustration les amène à créer des clans, à s’exprimer au moyen des outils modernes, blog ou internet, pour exister. Le monde du vin, et surtout du grand vin, est mystérieux et attire beaucoup les nombrilistes. Mes échanges avec les stars de l’œnologie m’ont souvent laissé penser que leur réussite personnelle tenait d’avantage du chemin philosophique parcouru que de leur connaissance en œnologie.

Partager cet article
Repost0
16 novembre 2008 7 16 /11 /novembre /2008 00:00

Dans ce haut lieu de la transmission du patrimoine, le terme même de patrimoine, cette accumulation de biens, les terres, les immeubles, les meubles, les bijoux, les actions, les bons du Trésor ou de l'emprunt Pinay qui prolongeait de quelques jours la vie légale de certains morts insoucieux de leur succession, qui se transmet de génération en génération, socle dur et invisible de toutes les inégalités, ne faisait pas parti de mon patrimoine culturel. Avoir du bien, comme le disait mémé Marie, outre que ce fusse la source de beaucoup les discordes familiales, n’avait jamais préoccupé mes parents et, leur côté ni ne sèment ni ne moissonnent m’avait façonné. L’instinct de propriété m’était étranger. Comme eux j’étais très oiseau du ciel. Hériter me semblai, comme au sémillant JJSS, une incongruité. Le clerc entama la lecture de l’acte de sa voix minaudante. Langage abscond, formules alambiquées qui me passaient au-dessus de la tête. Chloé, elle, souriait. De toute évidence, bien plus fine mouche que moi, elle comprenait que le père de Marie voulait lier solidement à Marie en faisant de moi le bénéficiaire de ce qui aurait été sa part d’héritage alors que moi, la monstruosité des sommes annoncées me laissait de marbre. J’étais ailleurs. Indifférent. Tout ça m'effleurait à peine et c’était mieux ainsi. À chaque interrogation de Me Dieulefit je répondais par l’affirmative. Tout ce qui m’importait dans cette affaire c’est que je me retrouvais légataire d’une part de Marie dont j’ignorais tout. C’était comme si, par le biais du geste de son père, elle me prenait en otage. M’arrimait à nouveau à elle sans aucun espoir de libération. À mon corps défendant je me retrouvais à la tête d’une petite fortune dont je ne saurais que faire mais que j’allais devoir préserver. Je n’avais pas le choix. Si notre histoire commune n’avait pas été brisée cet argent, ces biens nous seraient tombés dessus, nous en aurions profités, nous aurions peut-être changés ou, sait-on jamais, cela nous aurait peut-être opposés. Peu m’importait, je me fichais pas mal d’être riche, un jour ou l’autre, lorsque j’en aurais fini avec ma plongée dans les entrailles de la société, viendrait le temps de trouver une destination à tout ça. Pour l’heure, je me contentais d’apposer ma signature ou mes initiales au bas de liasses de documents qui semblaient prêt pour l'éternité des notaires.

 

Avant d’entamer la narration de cette tranche de vie calée sur le septennat écourté du président Pompe je vous dois une petite explication afin que vous ne vous perdiez pas dans les méandres de mon récit quelque peu erratique. Au tout début de mon étrange parcours de taupe, commencé sur les chaînes de Citroën, comme vous avez pu le constater, je m’en remettais à l’improvisation. Le tout et n’importe quoi présidait à mon action. Je frisais le nihilisme. L’irruption du père de Marie dans ma vie de patachon, mon installation et ma nouvelle aisance matérielle, ajoutées au sens aigüe de Chloé pour l’organisation, me transformèrent en quasi-chef d’entreprise. Cette reconversion collaient bien à l’esprit de l’ère Pompidou : "les affaires sont les affaires", l’immobilier surtout, et avoir pignon sur rue, dans un beau quartier, fluidifiait la valse des terrains et des permis de construire. Le jour, en semaine, je me vautrais dans les SCPI, fréquentais des margoulins de tout acabit, déjeunais chez Ledoyen, graissais la patte de manieurs de tampons, finançais quelques élus influents. Pour les besoins de la cause je m’étais affublé d’un patronyme à rallonge fleurant bon le terroir de mes origines : de la Mouzinière. Afin de ne pas tomber dans les pattes sales de mes chers collègues des RG mes activités diurnes restaient discrètes et, étant donné mon appartenance à la cellule « Mouvements Révolutionnaires » de l’ambitieux Bertrand Guide, je veillais à dresser des contre-feux. Dans les affaires de l’ombre le cloisonnement absolu entre les activités est la première des sécurités. Pour compléter mes protections je m’habillais chez Arnys, me chaussais chez John Lobb et portais de fine lunettes cerclées d’écaille. Le soir, changement de décor, je retrouvais ma défroque de révolté pour fréquenter mes amis de la GP. Ma très chère Chloé me facilitait le boulot et la vieille enflure de Gustave m’évitait d’aller trop loin dans les délires de mes révolutionnaires d’opérette. Enfin, les week-ends, et certains soirs, je m’infiltrais joyeusement dans les méandres du SAC. Moi qui adore tenir tout sous contrôle je me régalais de gérer un tel embrouillamini.

 

Les chaînes de Javel s’estompaient. Ma petite entreprise prospérait. Alors, me direz-vous, pourquoi ce parcours sans faute vous a-t-il conduit à Sainte Anne – qui était alors un hôpital psychiatrique fermé – dans le 14eme arrondissement de Paris, presqu’en face de la prison de la Santé ? En une réponse volontairement lapidaire je vous répondrai que je m’y suis réfugié, grâce à de hautes complicités, afin d’échapper à un séjour plus déplaisant dans la maison d’en face. Le nouveau Ministre de l’Intérieur, du nouveau Président de la République élu grâce à la trahison de Chirac, Michel Poniatowski, s’était mis en tête, pour déstabiliser la toute puissance de l’UDR – l’ex UNR rebaptisée, suite à la grande manif de défense de la République des Champs Elysées et qui allait de nouveau changer d’appellation pour servir les intérêts du félon qui démissionnerait avec fracas en 1976 avant de prendre d’assaut et de gagner la mairie de Paris – de traquer « les copains et les coquins » c’est-à-dire le terreau de mes activités, alors j’ai préféré opérer une retraite en bon ordre plutôt que de me retrouver pris dans la spirale des trahisons. Ce séjour à Sainte Anne fut pour moi un grand blanc, une retraite au cours de laquelle, simple jardinier, j’ai beaucoup lu et couvert, des petits carnets et des cahiers d’écoliers, d’une écriture soigneuse et précise. Ce sont eux qui sont empilés près de moi sur la belle terrasse, face à la mer et qui vont me servir à tenter de vous faire revivre ce bout de vie, trépidant et jouissif, qui se cale dans ce qui ne fut qu’un quinquennat, le mandat écourté de Georges Pompidou, qui lui-même avait commencé sur le congédiement peu glorieux du fondateur de 5ième République grâce à l'alliance contre nature de tous les conservatismes.      

Partager cet article
Repost0
15 novembre 2008 6 15 /11 /novembre /2008 00:02

Ceci est un nouveau produit de Vin&Cie. Pour le titre, dont vous apprécierez, je l'espère, l'humour torride, merci de bien vouloir rapprocher l'appellation de vinomane impénitent plutôt de celle du mélomane que du pétomane...

Pourquoi diable revendiquer cette appelllation ? Tout simplement parce qu'il est deux lieux d’où je ne ressors que très rarement les mains vides : une librairie et, pour l’autre magasin, je m’aperçois qu’aucun mot équivalent n’existe pour le vin : on ne dit pas je vais à la « vinerie » - qui serait la francisation de winerie – mais chez un caviste, comme si ce lieu de vente, d’origine récente – le vin se consommait à la taverne pour le peuple, lorsqu’il était bouché on le livrait depuis la propriété ou le négoce de place chez les particuliers, Nicolas est fondé en 1822 – n’avait pas su générer une dénomination précise. La cave pouvant, en effet, désigner aussi le chai du producteur, le lieu de stockage au domicile. Bref, même si ce non dit veut dire quelque chose dans notre inconscient collectif, moi j’adore en ces lieux rousiner – flâner sans but précis – découvrir, tripoter, acheter à l’instinct. Même si ça chagrine ceux dont la profession est de conseiller c’est ainsi que j’ai fait mes plus belles découvertes : par exemple, dès sa parution, en 1999, aux éditions Autrement j’ai acheté « Inconnu à cette adresse » de Kressmann Taylor. « Avec une économie extrême, sans complaisance, sans littérature, ces pages abruptes et frémissantes atteignent à la grandeur des œuvres qui ne nous parlent de rien d’autre que de vérité humaine. » Il s’agit de l’histoire de deux amis : Martin Schulse, un Allemand, et Max Eisenstein, un Juif américain qui, depuis des années, sont associés à San Francisco dans une affaire prospère de commerce de tableaux, "La galerie Schulse-Eisenstein", lorsque Martin, au début des années 30, décide de retourner dans son pays. La correspondance entre les deux amis commence le 12 novembre 1932 et s’achèvera le 3 mars 1934. À lire absolument ! Bouleversant.

Pour le vin c’est un peu pareil, sauf que la dimension des boutiques des cavistes n’est pas propice à la flânerie et que beaucoup de ces messieurs, y'a peu de femmes, ont la fâcheuse tendance de vous tomber sur le râble pour tester vos connaissances et vous fourguer leurs découvertes où tout est petit sauf le prix. Les libraires sont plus cools, et eux, ils ne vous toisent pas comme un analphabète si vous vous contentez d'acheter un polard. Alors, pour le vin je rousine essentiellement chez Lavinia et à la Grande Epicerie du Bon Marché car on m’y lâche les baskets. Autre différence d’importance : le poids des acquisitions. En conséquence je ramène toujours plus de livres que de bouteilles mais comme je lis plus que je ne bois, ce qui est heureux car sinon, étant donné que je lis sans modération, je me Chabalieriserais et je ne pourrais ainsi plus lire. Bref, mon nouveau produit, « je suis sous... le niveau de la bonde : notes d’un vinomane impénitent», dont j’espère vous appréciez déjà la somme de sous-entendus qu’il recèle, vous livrera, comme ça, sans emballage particulier, pêle-mêle, mes découvertes, mes pépites, des petits trucs de rien du tout mais qui avec le temps deviennent parfois le miel des faiseurs d’opinion.

Aujourd’hui, deux « découvertes » : le zéro drag et l’effet Veblen ou effet de snobisme. Croyez-moi, je ne m’éloigne pas beaucoup de nos préoccupations habituelles de gens du vin.

« Depuis 1997, une nouvelle expression – «  zéro drag » – s’est mise à circuler dans la Silicon Valley, le cœur de la révolution informatique en Amérique. Au départ, cette expression désignait le mouvement dénué de frottements d’un objet physique, telle une planche à roulettes ou une bicyclette. Par la suite, on l’ a appliqué aux employés qui, indifférents aux incitations financières, passaient facilement d’un emploi à l’autre. Plus récemment encore elle a endossé le sens de « sans attaches » ou « sans obligations ». Ainsi dira-t-on qu’un employé est « zéro drag » lorsqu’il est prêt à accepter n’importe quelle attribution supplémentaire, à répondre aux appels d’urgence ou à se faire muter à tout moment. »

« L’employé idéal serait une personne dépourvues de liens, d’engagements ou d’attachements sentimentaux antérieurs, et désireuse d’en éviter de futurs ; une personne prête à accepter la première tâche venue, préparée pour réajuster et redéfinir instantanément ses propres penchants, acceptant ce faisant de nouvelles priorités et abandonnant sans délai les précédentes ; une personne habituée à un environnement dans lequel il est mal venu et imprudent de « s’habituer » - à un emploi, un talent ou une façon de faire ; une personne, surtout, qui quittera l’entreprise lorsque celle-ci n’aura plus besoin d’elle, sans se plaindre ni porter l’affaire devant les tribunaux. Une personne, enfin, pour qui les perspectives à long terme, les plans de carrière gravés dans le marbre et tout type de stabilité sont encore plus effrayants et rebutants que leur absence »

Zygmut Bauman « S’acheter une vie » aux éditions Actes Sud (l’auteur, comme son nom ne l’indique pas car il est d’origine polonaise, est anglais)

L’actualité met en question la rémunération, et surtout sa disjonction d’avec la performance, des dirigeants de grandes entreprises multinationales. Le fameux pouvoir régulateur du marché de l’emploi de ces managers ne semble pas vraiment fonctionner. Pierre-Yves Gomez, directeur de L’Institut Français de gouvernement des entreprises www.ifge-online.eu  apporte une réponse originale dans Le Monde de lundi. C’est l’effet Veblen ou « effet de snobisme »

« Un argument semble avoir été négligé dans ces raisonnements : la plupart des investisseurs financiers n’ont aucune idée du fonctionnement interne des grandes entreprises cotées. Pour eux, les dirigeants les incarnent et garantissent les profits futurs. Mais les investisseurs sont incapables d’établir le lien exact entre le travail du dirigeant et la rémunération juste pour le récompenser. Dans ces conditions, un effet économique décrit dès 1899 par Thorstein Vebben dans Théorie de la classe de loisir, pourrait tout expliquer : lorsqu’on ne peut pas établir la valeur pratique d’un bien, on préfère bizarrement le payer cher, parce que le prix élevé rassure sur son usage. On se dit que si tout le monde est prêt à le payer cher, c’est qu’il doit être important de le posséder. C’est l’effet Veblen, appelé aussi « effet de snobisme », explique que certains biens comme les produits de luxe, ont des prix démesurés par rapport à l’usage pratique. Leur prix élevé joue comme une assurance de leur valeur.

Ce raisonnement peut s’appliquer à la rémunération des dirigeants. Incapables de connaître sa valeur d’usage réelle, les actionnaires préfèrent un dirigeant qui gagne beaucoup à un dirigeant qui gagne peu. Le salaire du premier les rassure quand à ses éventuels talents : il est très bien payé, donc il est sans doute très compétent, pensent-ils. Le second leur paraît suspect : s’il est mal rémunéré c’est que le « marché » n’en veut pas, parce qu’il n’est pas assez doué. Une logique de sur-rémunération des dirigeants est ainsi mise en place par les actionnaires eux-mêmes. À la limite, ils en arrivent à se flatter de recruter les dirigeants les mieux payés du monde, donc supposés être les meilleurs. »

Ainsi va le monde…

Partager cet article
Repost0
14 novembre 2008 5 14 /11 /novembre /2008 00:09

Dans le monde de la vigne et du vin on ne présente pas Denis Dubourdieu, son nom sonne comme une référence. Très beau cursus à la française, grande école puis université, Ingénieur Agronome (Ecole Nationale Supérieure Agronomique de Montpellier) (1972)Maître es Sciences Economiques (Université de Bordeaux 1) (1973) Docteur Ingénieur en Œnologie Ampélologie (Université de Bordeaux 2) (1978) Docteur d’Etat es Sciences (1982) il s'inscrit dans la lignée du père de l'oenologie moderne Emile Peynaud qui, en 1996, répondait à la question : "Pensez-vous que le modèle que vous avez instauré avec J. Ribéreau-Gayon soit appelé à durer ?"
"Je l'ai dit et répété de nombreuses fois : le vin est le reflet du degré de raffinement d'une civilisation. Il dépend de ceux qui le font et de ceux qui le boivent. Les goûts et les méthodes de travail évoluent constamment. Par conséquent, il est probable que dans dix, vingt ou trente ans, avec d'autres vignobles, d'autres installations, avec d'autres œnologues, les vins soient différents des nôtres." 
Propriétaire de plusieurs crus de Bordeaux : Denis Dubourdieu Domaines  www.denisdubourdieu.com) Château Doisy-Daëne, cru classé en 1855, Barsac Sauternes, Château Cantegril, Barsac Sauternes, Clos Floridène, Graves, Château Haura, Graves, Château Reynon, Premières Côtes de Bordeaux ; Œnologue conseil : auprès de nombreux crus et domaines viticoles réputés en France, Espagne, Italie, Grèce Portugal et même au Japon ; Professeur à la Faculté d’œnologie de  l’Université Victor Segalen Bordeaux 2 et Vice-Président de l’Institut Sciences de la Vigne et du Vin  de Bordeaux, Denis Dubourdieu, bien évidemment, constituait pour moi et mes questions une cible de choix. Sa réponse positive et rapide m'a bien évidemment comblé. Que voulez-vous, j'ai l'orgueil de croire que mon petit espace de liberté fait parti de ces lieux rares, car vous êtes des gens de qualité chers lecteurs, où l'on a plaisir à s'exprimer.

Question N°1
 : Supposons que je sois un jeune bachelier passionné par le vin. Je cherche ma voie Sur le site du CIDJ je lis « L’œnologue, grâce à ses connaissances scientifiques et techniques, accompagne et supervise l’élaboration des vins et des produits dérivés du raisin. Sa principale activité concerne la vinification. Il conseille les viticulteurs dans le choix des cépages et la plantation des vignes. Il surveille les fermentations en cave, le traitement des vins et leur conditionnement. Il effectue des analyses et procède à des recherches technologiques visant à l’amélioration des cépages. L’œnologue peut également être chargé de la distillation ou fabrication des alcools à partir des marcs de raisins. Enfin, connaisseur et expert en dégustation, il participe à la commercialisation des vins en France et à l’étranger. En raison de la concurrence rencontrée désormais par la production française de vin sur le marché mondial, l’œnologue remplit une fonction stratégique pour le maintien ou l’amélioration de la qualité des produits de la viticulture française. »

 

Présenteriez-vous ainsi votre métier à une jeune pousse Denis Dubourdieu

Réponse de Denis Dubourdieu :

Oui à peu près.

J’ajouterais que l’œnologue doit d’abord et surtout aider le producteur à définir le style et le goût de son vin de sorte qu’ils soient à la fois attractifs et inimitables, plaisants et typiques.

Grâce à ses connaissances scientifiques et à son savoir faire l’œnologue conseille le producteur sur l’itinéraire technique à suivre, du sol à la bouteille, pour atteindre l’objectif fixé.  Son savoir est puisé dans plusieurs disciplines des sciences de la Terre et de la Vie : sciences des sols, écophysiologie de la vigne, microbiologie des fermentations, chimie et physico-chimie du vin.

Ainsi, l’œnologue est une sorte d’architecte du vin qui doit être à la fois artiste et « savant », intuitif et précis, sensible et rigoureux. Il doit aussi s’intéresser au marketing et à la communication pour capter les attentes conscientes ou latentes des marchés et « raconter » les vins produits.

Si l’œnologue joue un rôle stratégique pour la défense et le progrès de la viticulture française il peut aussi exercer son métier hors de nos frontières tant l’industrie du vin est aujourd’hui mondialisée et le savoir faire français dans ce domaine prisé sur les cinq continents.

Question N°2 : « Monsieur Seignelet, qui avait assis Bertrand face à lui, donnait à mi voix des leçons d’œnologie, récitait des châteaux, des climats, des millésimes, émettait des jugements, prononçait du vocabulaire : puis il voulut enseigner à son fils aîné le rite grave de la dégustation. » Tony Duvert « L’île Atlantique » éditions de Minuit 2005. Dans le fameux manga « Les Gouttes de Dieu » «  Le héros est présenté comme œnologue alors que manifestement c’est plutôt un œnophile doué et cultivé.

Quel est votre sentiment sur ce glissement sémantique Denis Dubourdieu ?

Réponse de Denis Dubourdieu : En effet, il ne faut pas confondre œnophile et œnologue pas plus que mélomane et musicien ou écrivain et lecteur. L’œnophile apprécie le vin, le commente, le critique. L’œnologue concourt à le produire en utilisant ses  connaissances scientifiques. Le titre d’œnologue est règlementé en France. Celui qui l’utilise doit être titulaire du diplôme national d’œnologue ou de ses équivalents étrangers.

Le glissement sémantique que vous évoquez peut avoir deux causes : l’ignorance du sens exact des mots ou l’utilisation abusive d’un titre tenu pour prestigieux et médiatique.

Question N°3 : Moi qui ne suis qu’un pur amateur aussi bien pour le vin, que pour la musique ou la peinture je place ma confiance non dans les critiques mais plutôt dans ma perception au travers de l’œuvre du génie du compositeur ou du peintre. Pour le vin l’affaire est plus complexe entre l’origine, le terroir, le vigneron, le vinificateur, le concepteur du vin, l’exécution est à plusieurs mains. La mise en avant de l’œnologue, une certaine starification, correspondant par ailleurs avec l’esprit du temps, à une forme de marketing du vin, ne risque-t-elle pas de nous priver d’une forme de référence objective, celle de l’homme de l’art, nous aidant à mieux comprendre l’esprit d’un vin ?

Réponse de Denis Dubourdieu : Cette question est surement la plus délicate. Elle pose le problème des relations entre l’œnologue et la critique et/ou les médias.

La « surmédiatisation »  de l’œnologue peut elle nuire au plaisir du  « pur amateur » ?

Tout dépend dans quel esprit le vin  est conçu et produit.

 Si le travail de l’œnologue consiste à formater les vins des crus qu’il conseille pour d’abord complaire au goût réel ou supposé de tel ou tel critique, alors oui cela peut conduire à des vins standardisés, caricaturaux et souvent sans charme. Mais on aurait tort d’accuser le seul œnologue ou la critique de cette dérive ; c’est souvent le producteur qui pousse aux excès en tous genre : surmaturation, bois, oxygénation intempestive, alcool, sucres résiduels…etc, sacrifiant finesse et complexité sur l’autel de la grosse note que parfois d’ailleurs la presse ne lui attribue pas. Ceci dit, il ne faut pas exagérer les dangers de la médiatisation du vin et de l’œnologie. Je ne pense pas qu’on buvait mieux avant l’avènement de la critique et la starification des œnologues ou des winemakers, ni que les régions sans école d’œnologie influente fassent pour autant de meilleurs vins.

Selon moi, c’est évidemment à l’amateur qu’il faut penser lorsqu’on élabore un vin, à son émotion, à son plaisir, en espérant que la critique s’en soucie également (ce qui est souvent le cas). Le travail de l’œnologue consiste à révéler (s’il existe) le goût typique du lieu où le vin est produit.  La pureté  et la complexité de ce goût doivent toujours être privilégiées. Ce sont les antidotes à la lassitude voire à l’aversion que finissent toujours par susciter les vins trop simples ou défectueux.

Ainsi, je préfère conseiller des producteurs de vins classiques élaborés à partir de cépages situés à la limite nord de leur culture, murissant leurs raisins lentement et parfois difficilement. Ce sont les cabernets ou le petit verdot à Bordeaux, la syrah à l’Hermitage, le pinot noir et le chardonnay en Bourgogne, le riesling en Alsace, le viognier à Condrieu ou à Grillet, le Mourvèdre en Provence, le tempranillo en Rioja, le san giovese en Toscane, l’aglianico en Campanie…etc. Car je suis convaincu que la complexité, l’originalité des vins et donc leur valeur  naissent toujours de difficultés surmontées.

Partager cet article
Repost0
13 novembre 2008 4 13 /11 /novembre /2008 00:02

Ils sont venus, ils sont tous là : Cécile, Cédric et Jack, des moins de 30, pour concélébrer avec nous ce que j’ai osé baptiser le jugement de Paris XIVe - car on se refuse rien à Vin&Cie - : warm up, tour de chauffe en gaulois, du Grand Tasting 2008, en souvenir du titre du recueil de petites histoires érotico-coquines de notre ex-voisine pas très souriante  du 6ième étage, Bénédicte Martin, cliquez sur ce lien www.amazon.fr/Warm-up-Bénédicte-Martin/dp/2080685252  et vous la découvrirez, non dans la tenue où elle descendait promener son vieux chien, un Labrador, mais telle qu’elle s’est exposée sur les rayons de la FNAC.

Le moment est grand puisque Bettane&Desseauve, en éminents dégustateurs qu’ils sont, humant l’air du temps, s’en sont allés solliciter des bloggeurs amateurs de nectar pour qu’ils dégustassent puis classassent – l’imparfait du subjonctif est pour moi l’équivalent du tango, ça me chavire - par ordre de préférence les 5 bouteilles d’une caisse découverte confiée par leurs soins entre les mains d’un collègue du bel Olivier qui ne fait que la ramener depuis que les banquiers se sont pris pour des croupiers. Vous devez penser que, pour capter dans leurs rets mon « espace de liberté », B&D by Floch   http://www.berthomeau.com/article-22808007.html, ont du déployer des trésors de persuasion. Ben non, j’ai dit oui à la première sollicitation car, tout de suite je me suis dit « on va se la jouer Parker, pas Tony les jeunes, le Robert qu’est presqu’un dictionnaire… », les noter sur 100, faire comme des grands se faire un remake du jugement de Paris, XIVème bien sûr. Allez, trêve de plaisanterie mes amis, on s’y colle comme les amateurs de Carquefou en Coupe de France. Croyez-moi nous allons mouiller le maillot.

Bien évidemment pas de cache-sexe sur nos bouteilles, dégustation à visage découvert, nul besoin de jouer à colin-maillard puisque notre groupe de dégustation est, si vous permettez l’expression, « indemne de tout germe », des ignares totaux des notoriétés acquises, des immatures des modes et tendances, mais de réels amateurs et buveurs de vin, ce qui vous en conviendrez est l’essentiel. J’entends déjà certains ricaner « et Berthomeau ce n’est pas un perdreau de l’année… » Exact mes très chers frères, mais en cette circonstance plus muet qu’une carmélite. J’assure le service. Indique les règles de notation. Veille au bon déroulement de la dégustation. Y participe sans ramener ma science qui, comme chacun le sais, en ce domaine tiendrait tout entière sur un timbre-poste à l’effigie de Joseph Capus. Avant de nous jeter à l’eau, un détail d’intendance : notre échantillon se compose de 2 blancs et de 3 rouges, et comme pour les 2 représentantes de l’avenir du vin, l’une ne boit que du blanc et l’autre est plus portée sur le rouge, Cécile et Elisa feront cause commune : Cécile se colle au blanc, Elisa déguste les rouges. En clair, n’y voyez aucun machisme, elles compteront pour un.

 

Donc nous sommes 4 équivalents-notateurs dotés d’un document expliquant la méthode de notation de Parker et d’une fiche de notation récapitulant les critères et le total des points afférents. La dégustation commencera par les 2 blancs. L’ordre des flacons, tous des 2006, a été déterminé par votre serviteur :

1-     Le Saint-Bris « les temps perdus » vieilles vignes Clotilde Davenne http://www.fevb.net/index.php?option=com_content&task=view&id=82&Itemid=28

2-    L’Alsace domaine Pfister cuvée 8  www.domaine-pfister.com/ 

3-    Le Chinon Pierre&Bertrand Couly http://jimsloire.blogspot.com/2008/09/pierre-bertrand-couly.html

4-    Le Bordeaux supérieur Roc de Jean Lys Terra Burdigala Stéphane Derenoncourt&François Thiépont  www.terraburdigala.com / 

5-    Le Costières de Nîmes Château des Nages vendanges tardives Vignoble Michel Gassier. www.chateaudenages.com   

Chaque dégustateur dispose d’un feuillet sur la méthode de notation Parker et le point de vue iconoclaste de Gilles du Pontavice « Pour Robert Parker » et d’une fiche de notation. C’est du sérieux bon enfant. Mes dégustateurs en herbe s’y collent comme des pros. Pas de commentaires, la dégustation est studieuse : des photos en témoignent  (voir rubrique PAGES N°30  en haut à droite du Blog) Je ramasse les copies. Les résultats sont intéressants. Le Saint-Bris fait l’unanimité : 82. L’Alsace déçoit : 74. Pour les rouges, le Bordeaux est le seul à récolter des notes homogènes ce qui lui vaut un très beau 88 ; le Chinon et le Costières  de Nîmes sont aussi bien notés : 85 tous les deux mais c’est le boostage d’une excellente notation d’1 seul dégustateur (pas le ou la même) enthousiaste (exprimé après les résultats). Les notes sont là et, à la réflexion, établir un classement n'aurait aucun sens, il se tiennent dans un mouchoir de poche et sont d'excellents vins.

 

Commentaires personnels : Le Roc de Jean Lys vaut les 90 pour ses qualités d’ensemble et ses possibilités d’évolution (Cédric l'a mis en exergue) Le Saint-Bris, qui ouvrait le bal, en a un peu pâti, on peut donc le situer sur une cote de 85. Mes jeunes dégustateurs ont apprécié l’exercice. Les filles ont tenu la route sans problème. L’expérience est positive et riche d’enseignements pour les dégustateurs professionnels. B&D savent y faire. L’année prochaine je leur suggère de pousser le bouchon encore plus loin, en s’y prenant un peu plus tôt J pour donner aux internautes une place dans leur Grand Tasting.

 Nous pouvons donc passer au dîner. Le menu : soupe de potiron, gratin de nouilles à l’émincé de pot au feu, fromages de Marcel Petite AB : un comté 16 mois, de l’emmenthal et tome de montagne, tarte aux pommes maison. Chaque convive dégustant au cours du repas son vin préféré. Les 3 mecs : Cédric, Jack et moi avons terminé les agapes avec un Hennessy N°1 Réserve Jacques Berthomeau (un assemblage de très vieilles Eaux-de-vie). Jack a aussi honoré le Calvados Camut. Cécile et Cédric repartent avec Vodka leur chatte qui était venue respirer le bon air du XIVe et ce qui reste de la bouteille de Saint-Bris. Jack, lui, serre sur son pull rose sa bouteille de Costières de Nîmes adorée. Tous oublient leurs parapluies preuve que notre petite réunion a porté ses fruits.

 Je sais que ça agace certains mais, que voulez-vous, il se passe toujours quelque chose sur ce petit espace de liberté. Avec patience et ténacité, en créant des liens, en touchant des publics très divers, en défrichant des sujets de toute nature, sans esprit de chapelle, avec la seule volonté de faire progresser la perception conviviale du vin, en ouvrant ses colonnes à tous ceux qui partagent cette philosophie, en donnant la parole à ceux que l’on entend jamais, Vin&Cie défriche un média d’avenir.

Partager cet article
Repost0
12 novembre 2008 3 12 /11 /novembre /2008 00:04

Comme vous le savez, sur mon espace de liberté j'aime donner la parole à tous ceux et celles qui ont quelquechose à dire sur le vin, quel que soit leur statut. Aujourd'hui, mes 3 Questions je les ai posé à une jeune femme passionnée par le vin, par ceux qui le font, le vendent, l'aiment. Sans vouloir m'envoyer des fleurs, même si c'est toujours plaisant de recevoir des compliments, chers lecteurs, nulle part ailleurs que sur "Vin&Cie" vous ne trouverez un tel éclectisme, autant de diversité, d'informations ou de réflexions. En ce moment, sans doute du fait du traitement de sujets très brûlants, l'audience grimpe, des abonnements spontanés affluent et bien sûr ça me conforte dans la ligne éditoriale que je me suis fixée. Alors si vous estimez que cet espace de liberté, qui est aussi le vôtre, doit prospérer, se développer, n'hésitez pas à transmettre son adresse :  www.berthomeau.com à vos relations, parents et amis pour qu'ils puissent au gré de leurs envies ou de leur humeur être de ceux qui veulent que notre beau et grand secteur d'activité soit reconnu dans notre pays à sa juste valeur. Sans faire de trémolos : j'ai besoin de vous car l'Internet c'est créer des liens, faire vivre cette fameuse Toile. Le nouveau Président des USA, Barak Oboma, lui, l'a bien compris pour mobiliser ceux qui n'ont jamais la parole, alors à mon modeste niveau, si nous voulons que nos paroles portent il nous faut les démultiplier en touchant très au-delà de notre petit cercle. Merci de ce que vous pourrez faire et puis des commentaires de temps en tant c'est encouragement pour le petit travailleur de la Toile que je suis. 


Question 1 :
Bonjour Margot de Nicoläy, si vous me permettez cette expression, votre bagage vin, aussi bien universitaire que culturel, pour une jeune femme de 24 ans, est impressionnant. D’où vous vient cette passion pour les choses du vin ?

 
Réponse de Margot de Nicoläy : Cette passion est née très tôt. Ce qui est assez étrange car je ne suis pas issu d’une famille de vignerons ou d’autres acteurs de l’industrie du vin. Je ne sais comment l’expliquer, mais le goût du vin m’a plu très tôt.  Je me souviens encore des gouttes de rosé que ma grand-mère m’autorisait à prendre avec le fromage lorsque nous étions en vacances dans le midi de la France. C’était un moment magique.  Dès l’âge de 13 ans j’appréciais énormément l’accompagnement d’un verre de vin rouge lors d’un repas.  Je me rendis vite compte que le vin et  son univers rassemblaient beaucoup de choses que j’aime dans la vie : la nature, l’agriculture, la convivialité, la gastronomie, l’art de vivre, le partage, les rencontres, etc.. Oui, le vin est un excellent moyen de rencontrer et d’aborder les gens. C’est également une industrie où l’on peut exercer tous les métiers : vente, recherche, finance, marketing… dans le monde entier. Á 15 ans mon secteur d’activité professionnel était choisi : ce serait le vin. Cette décision aurait pu s’estomper et disparaître avec le temps comme cela arrive souvent aux envies de jeunes filles. Mais vous le savez mieux que moi, une fois que l’on goutte à cet univers et que l’on rencontre quelques passionnés, cela ne nous quitte plus. Je cultive cette passion depuis bientôt 10 ans… et c’est merveilleux.  Tant de rencontres, tant d’émotions, tant de partages, tant de joies et tant de beauté…

 

Question 2 : Passion certes, mais pas seulement en simple esthète ou pur amateur, vous avez, bien au-delà des stages inhérents à votre formation, manifesté un goût pour les affaires en travaillant concrètement dans des entreprises du secteur. Avez-vous une idée précise de ce que vous souhaitez faire dans la galaxie très diverse de ceux qui font et qui vendent des vins ?

 

Réponse de Margot de Nicoläy : Comme je l’ai dit plus haut, mon souhait de faire carrière dans ce secteur s’est décidé très tôt. Mes objectifs professionnels ont varié selon mes expériences. Sans bagage scientifique, il m’était difficile de devenir œnologue (à mon grand regret). Alors, je me suis mise à la découverte de tous les métiers à travers des stages et des « petits boulots » : assistante maître de chais, journaliste, organisatrice d’évènements, dégustatrice, vendeuse, RP, etc.… Au fur et à mesure des expériences et des rencontres dans le monde (Italie, Australie, Nouvelle Zélande, Californie…), je me suis prise d’amour pour les vins français, tout en restant très ouverte bien sur. On ne peut pas être partout… alors mon combat, c’est d’aider les vins français et de valoriser les beaux terroirs. Ainsi, mon souhait final serait de pouvoir gérer, développer, valoriser, remettre en route, des belles propriétés viticoles françaises. Á cela s’ajoute mon besoin de communiquer et de partager ma passion. C’est pourquoi je continuerai, comme aujourd’hui, à organiser des dégustations, des rencontres, des week-ends atour du vin.

Aujourd’hui, je fais de la transaction de domaines viticoles, un métier passionnant qui me permet de découvrir beaucoup de régions viticoles et de domaines viticoles de façon très détaillée avec leurs atouts et leurs enjeux. 

 
Question 3 : Margot de Nicoläy vous avez fondé, à Paris, en 2008, le Bistro des Entrepreneurs: www.bistrodesentrepreneurs.com où, au travers de rencontres mensuelles par thème, vous réunissez des entrepreneurs. Qu’attendez-vous de cette sorte de forum ? Ne craignez-vous pas que les échanges tournent un peu en rond ? Les gens du vin ont déjà une grande propension à vivre dans un cercle assez fermé, entre eux, alors pourquoi ne pas chercher à élargir le cercle ?

 

Réponse de Margot de Nicoläy : Le Bistro des entrepreneurs est un rendez-vous que j’ai crée au sein du Master Entrepreneuriat à l’Université Paris Dauphine. Ce concept de «  rencontres » à pour but de stimuler l’entrepreneuriat auprès de tous et de favoriser les «échanges entre ceux qui prennent des risques. Ainsi, ce projet ne gravite pas autour du vin puisqu’il s’adresse à tous les types d’entrepreneurs. Les dernières rencontres que nous avons faites était autour du thème : Le Web 2.0 ou « Entreprendre à 25 ans ». Entreprendre c’est être actif et positif… des valeurs qui me tiennent à cœur.

 

Les idées en rapport avec le vin sont les « Week-end Spi&Spi » qui proposent à des jeunes de 25-35 ans de découvrir une région viticole (visites de caves, dégustations) tout en approfondissant sa foi  (temps de prières et enseignements spirituels). Lancé en Juin 2008, nous en avons fait un en champagne, un autre dans la Loire et le prochain est prévu pour Avril 2009 dans le bordelais. Un concept très ouvert qui cartonne !

D’autres projets sont en cours pour 2009… ils participeront eux aussi au dynamisme de l’industrie du vin et à la transmission de ce savoir faire unique !

Partager cet article
Repost0
11 novembre 2008 2 11 /11 /novembre /2008 00:04

« Un jour viendra où la guerre vous paraîtra aussi absurde et aussi impossible entre Paris et Londres, entre Pétersbourg et Berlin, entre Vienne et Turin, qu’elle serait impossible et paraîtrait absurde aujourd’hui entre Rouen et Amiens.


Un jour viendra où, vous France, vous Italie, vous Angleterre, vous Allemagne, vous, toutes les nations du continent sans perdre vos qualités distinctes et votre glorieuse individualité, vous vous fondrez étroitement dans une unité supérieure et vous constituerez la fraternité européenne.


Un jour viendra où il n’y aura plus d’autres champs de batailles que les marchés s’ouvrant au commerce et les esprits s’ouvrant aux idées.


Un jour viendra où les boulets et les bombes seront remplacés par les votes. »

 

En cette soirée du 4 novembre, douce et claire, nous sommes une petite douzaine au chemin des vignes, où par la grâce d’Yves Legrand il y a de la vigne au flanc du RER, à Issy-les-Moulineaux. Dans la cheminée les buches diffusent une chaleur vive. Au retour des caves qui s’épandent dans le ventre de la terre, anciennes carrières devenues champignonnières qui auraient pu devenir le siège de notre force stratégique, où nous avons savouré un Dom Pérignon 2000, Yves Legrand nous lit ce beau texte de Victor Hugo extrait de son discours inaugural du congrès de la paix de Paris le 21 août 1849. Le ton de la soirée est donné. Á la manière du vigneron qu’il est, Yves a soigneusement préparé le terrain en un cérémonial qui n’a rien de cérémonieux. Tout au fond, la sainte table où sont posés les précieux flacons. Sur la table toute une iconographie de nos poilus de grands-pères, ceux qui sont revenus comme les nôtres : Pierre Legrand et Louis Berthomeau, comme ceux qui se sont mélangés à cette terre de Champagne ou de la Somme éventrée, déchiquetée par le déluge de feu de cette Première Guerre Mondiale aussi atroce qu’inutile. Sur un tableau noir, d’une superbe écriture, l’ode au pinard de Marc Leclerc écrite en 1915.

 

Mais, rassurez-vous, nos nectars de ce soir sont au pinard ce que les Grands du Royaume de France étaient aux marauds de mon bocage vendéen. Entendez-moi bien, puisqu’il s’agit de Bordeaux, mon image n’a rien à voir avec la folie des grandeurs qui a saisi les GCC ces dernières années. Entre l’aristocratie, la vraie, celle qui tirait ses privilèges de l’épée, et les culs-terreux, le lien existait, le soulèvement de l’Ouest fut une guerre populaire. Bref, ce que je veux dire c’est que les grands vins qu’Yves Legrand nous a proposé, sont de vrais aristocrates, pas des gens de cour poudrés et courtisans. Au cours de cette soirée où Yves et son équipe, hors les vins et les mets, ont su mêler la Grande Histoire et l’histoire que l’on qualifie de petite, celle des gens, la conversation est libre, simple, sans affèterie. Nous ne nous connaissons pas mais nul besoin de rompre la glace, la grâce et la magie de ce qui est bien plus qu’une dégustation nous amène sur des chemins débouchant sur des carrefours. L’échange. Comment ne pas être sensible, tout en appréciant ces vieillards toujours verts, à cette « vie » des hommes dans les tranchées, taupes humaines qui écrivaient à leurs proches, prenaient des photos : Yves fait circuler des plaques saisissantes prises par son grand-père, dessinaient, survivaient. L’histoire qui suit, et la lettre qu’Yves nous a lu, sont des bijoux, de ces gens de peu, si vivants.

 

« Constant et Gabrielle M se sont mariés en 1904. Ils tiennent un petit commerce de vins et spiritueux à Petit-Noir, dans le Jura, quand la guerre éclate. De constitution fragile, Constant est d’abord épargné par le conseil de réforme avant d’être mobilisé en février 1915. Les époux ne cesseront de s’écrire ».


Lettre de Gabrielle – Petit-Noir, 7 septembre 1915.


« Ma petite totomette, vraie relique pour moi […] Alors ce petit lulu ne veut pas fonctionner du tout là-bas ? Tu me dis avoir usé d’expédients mais, pauvre chéri, tu n’as pas pu suivre exactement mes conseils, n’étant pas seul dans votre abri. C’est au cantonnement seul que la chose est faisable. Il faut que tu puisses te mettre à l’aise et que ton attouchement la fasse vibrer en la frottant toi-même de haut en bas et cela à toute vitesse. La chaleur jointe à mon souvenir complètera l’excitation et les veuveux de lulette chatouilleront le petit lulu encore davantage. Encore une fois, il faut que tu sois seul, bien déboutonné et par l’esprit et le cœur à mes côtés. Il me semble que tu réussiras à jouir, étant privé de femme […] Je suis désolé de te voir souffrir ainsi et, vraiment, c’est intolérable pour toi. Il vaudrait encore mieux, je crois, que tu puisses rencontrer une femme proprette et saine qui te fera passer tes moments de passion sans que tu y attaches le moindre amour. Oui, mon chéri, tes sentiments respectueux à mon égard me sont excessivement sensibles, je sais que tu appartiens à moi seule, mais vois-tu, si tu peux moins souffrir en ayant des rapports de sexe différent, j’en ferai le sacrifice car je ne puis te sentir malheureux. Moi, je puis attendre ton retour car mon tempérament est plus calme et l’approche d’un homme quelconque me répugne. »

 

Le MENU

 

 

Pour les vins, en dehors du Château Canon 75, 1er Cru classé du Médoc, clin d’œil d’Yves, à ce canon sans recul fleuron d’une artillerie française beaucoup moins puissante que celle d’en face, dans l’ordre, et avec un service absolument impeccable, nous avons bu – j’écris à dessein bu, car tous ces très vieux vins étaient consommables – dans l’ordre : un Château Loubens 1918, Ste Croix du Mont, un Château Ducru Beaucaillou 1916, 2iéme cru de St Julien, un Château Gruaud-Larose 1916, 2ième cru classé St Julien, un Château Latour 1918, 1er cru classé Pauillac, Château Haut-Bailly 1918, Pessac Léognan et enfin un château Rayne Vigneau 1914 1er cru classé de Sauternes. Enfin, avec le café un Pinet Castillon Fine Cognac 1914 et un Maury de la Préceptorie de2008, un nouveau-né qui deviendra vieux. Autour de la table, et mon voisin de droite tout particulièrement, quelques vrais dégustateurs, gestuelle, vocabulaire : oxydation, réduction, appréciatiation pertinente, moi j’avoue que je me contentais d’apprécier ces jeunes vieux de plus de 90 printemps. Et pourtant, en cette période 14-18 les hommes et les chevaux étaient partis au front, tout manquait car l’effort de guerre drainait l’essentiel des ressources du pays, ce sont donc des vins fait avec ceux qui restaient, les femmes tout particulièrement. Sans vouloir en remettre une couche sur notre frénésie du court terme je veux quand même écrire que ces vins debout s’ils l’étaient restés c’est parce que ceux qui les ont fait les inscrivaient dans une transmission de génération, ce qui la meilleure définition de ce que nous qualifions aujourd’hui de durable. Lorsqu’Yves à fait le tour de table c’est ce que j’ai dit, mes préférences n’ayant que peux d’intérêt dans cette communion païenne.

 

Si le vin est pour vous, comme pour moi, ce supplément d’âme, ce compagnon indispensable de la convivialité, l’expression la plus haute de l’art de vivre à la française, alors un jour offrez-vous l’une des rares « dégustations exceptionnelles » d’Yves Legrand www.chemindesvignes.fr/ vous ne serez pas déçus. Pour ma part, ému et reconnaissant d’avoir été l’invité d’Yves à ce moment rare pour, m’a-t-il dit « tout ce que je fais sur cet espace de liberté pour le vin ». Croyez-moi, ça fait chaud au cœur et ça donne du cœur à l’ouvrage…

Partager cet article
Repost0
10 novembre 2008 1 10 /11 /novembre /2008 00:04

Michel Bataille, je l'ai rencontré la première fois pendant l'hiver 2001 lors de la commémoration du 100 ième anniversaire de la création de la première coopérative vinicole à Maraussan, à l'époque j'étais un conférencier très prisé car je succitais la polémique - prononcer pau/lémi/ke -, surtout auprès de ceux qui n'avaient jamais lu mes écrits. L'homme sortait d'un combat à la Languedocienne où les alliés ne sont pas toujours les plus fiables. Poignée de main énergique, belle prestance, sourire qui devait plaire aux filles, regard droit, ce garçon pouvait avoir un avenir si les caciques ne lui cassaient pas les reins. Toujours adepte du mauvais esprit, comme il faisait frisquet, je m'étais étonné qu'il n'y eut point de vin chaud. Ensuite nos chemins se sont souvent croisés et, même si le "bougon des cépages" raybanné s'enracinait dans son fauteuil de président à la Fédé des caves, Michel, à l'image de son patrononyme, bataillait pour que l'on sorte du discours historiquo-romantique avec manifs incorporées pour faire des choix difficiles et passer à l'acte. L'entreprise, "son entreprise", Foncalieu, j'y suis allé lors de la signature d'un contrat de partenariat avec Carrefour, au temps où ce grand groupe de distribution, avec Jean-Louis, se voulait avoir le 1/4 heure d'avance sur ses concurrents. Et puis y'avait aussi une histoire très belle d'une espèce d'oiseau dont j'ai oublié le nom. Bref, même si ça le compromet, je l'écris, j'aime beaucoup Michel Bataille mais j'ai aussi un faible pour les communiqués, qui ont, en général, un goût de béton armé, une saveur de littérature du temps du réalisme socialiste, en bouche des aromes de langue de bois. Je n'ai jamais compris que les zinzins continuent, au XXIe siècle, de publier ce genre de littérarture pré-formée. Michel a suffisament d'humour pour me suivre sur ce chemin lorsque je retranscris celui concernant son élection à l'UEVM..."

"Suite au départ de Guy Sarton du Jonchay, l’Union des Entreprises Vinicoles Méridionales (UEVM) annonce que Michel Bataille, président exécutif des Vignobles Foncalieu dans l’Aude a été élu à sa présidence. Le nouveau président, qui devra œuvrer au rapprochement de la production et des entreprises de l’aval, travaillera avec un nouveau bureau composé des vice-présidents Gérard Bertrand (SPH Vins Gérard Bertrand) et Gilles Gally (Groupe Jeanjean), ainsi que Louis Lazutte (Clarac et Clauzel) et Claude Courset (Ducasse SAS). Dans le cadre de la nouvelle OCM, l’UEVM affirme sa volonté d’améliorer la valeur ajoutée de la filière viticole. A ce titre, ses membres veulent assumer leur leadership sur l’organisation régionale de la filière, d’une part en augmentant les volumes et la valeur des produits vendus par le Languedoc-Roussillon et d’autre part en s’appuyant sur le plan d’action à 5 ans défini dans le plan stratégique InterSud. « Cette action ne peut se faire qu’avec le développement d’un lien fort avec les autres acteurs de la filière et en totale cohérence avec la coordination nationale de l’Association Générale des Entreprises Vinicoles (AGEV) » annonce l’Union dans un communiqué. Les membres de l’UEVM annoncent vouloir renforcer leurs relations avec la Région Languedoc-Roussillon afin de promouvoir les marques aptes à générer de la valeur ajoutée et à occuper tous les segments du marché. Quant au nouveau cadre de l’OCM, ils affirment leur volonté de veiller à ce qu’ils puissent « exercer le plus librement possible leurs activités commerciales ». Par ailleurs, ils rappellent que pour la nouvelle catégorie des vins sans IG, ils souhaitent un espace de liberté le plus large possible. Enfin, l’UEVM souhaite renforcer ses actions en faveur de la recherche et du développement en étroite collaboration avec les acteurs économiques et institutionnels engagés dans ce domaine."
 

 

Question N°1 : Bonjour Michel Bataille, l’élection d’un Président d’un groupe coopératif à la tête de la représentation du négoce languedocien, l’UEVM, c’est une première. Pourquoi ? Est-ce le début d’une réelle unité des metteurs en marché qui vendent l’essentiel des volumes pour que triomphent des solutions tenant compte de la réalité de la demande aussi bien en France que sur les marchés extérieurs ?

 

Réponse de Michel Bataille : « J’ai trouvé au sein de l’UEVM, malgré des tailles d’entreprises fort différentes, une réelle volonté d’avancer dans l’intérêt des entreprises. Il m’apparaît que cette cohésion du négoce languedocien ne se fait plus par opposition à la production, qui a été longtemps le ciment des entreprises du négoce. Il en va de même pour la production qui opérait sur le même mode de mise en cohésion. J’espère que ces changements des deux côtés sont le prélude à un fonctionnement plus équilibré. Mon élection au sein du négoce est surtout le fruit d’une volonté des entreprises de se rapprocher de la production tout en faisant valoir leurs prérogatives et leur spécificités. De là à penser que s’ouvre une ère nouvelle de consensus généralisé, c’est un pas que je ne franchirai pas. »

 

Question N°2 : L’observateur extérieur que je suis, intéressé mais non impliqué dans les grandes décisions, a de plus en plus de mal  à décrypter la réalité languedocienne où le verbe semble toujours tenir le haut du pavé. La nouvelle donne de l’OCM vin exige que des choix rapides soient faits : AOP-IGP par exemple. Le spectre d’un arrachage massif est agité alors que l’immobilisme prévaut depuis presque dix ans. Le regroupement interprofessionnel se transforme en étage supplémentaire. Que faut-il faire pour que le Languedoc retrouve une dynamique qui en fasse enfin le cœur de notre rebond de grand pays généraliste du vin ?

 

Réponse de Michel Bataille : « L’arrachage massif est le résultat d’une pyramide des âges très défavorable, elle-même découlant de 30 ans d’errements des politiques viticoles où la plupart des responsables de la filière -à part quelques visionnaires - n’ont pas su anticiper les changements qui se préparaient. Au lieu d’anticiper ces changements, ils les ont refusé, construisant jour après jour des lignes Maginot qui étaient submergées à chaque reprise. Au contraire, il aurait fallu prendre les devants par une politique résolument offensive, accepter d’abandonner certains pans de notre activité traditionnelle pour en refonder d’autres avec dynamisme et passion . Nous n’avons fait que reculer et atteindre le bord du gouffre, au point que la maxime de Frédéric IIde Prusse « Celui qui veut tout défendre ne défend rien » est une cruelle réalité en Languedoc. La dynamique du Languedoc ne passera que par des entreprises innovantes, à l’écoute de leur environnement, aptes à répondre à tous les segments de marché. Ce n’est pas une question de taille d’entreprise mais d’état d’esprit. Il faudra de grandes entreprises, de taille internationale, pour occuper les grands marchés mais cela n’exclut pas les petites entreprises et celles de taille moyenne pour occuper les segments de marchés spécifiques de différenciation. Cela passe par une capacité à faire évoluer la production en lui conférant une compréhension des marchés et agilité qu’elle n’a pas eu jusqu’à aujourd’hui. »

 
Question N°3 : Michel tu occupes dans ton entreprise Fontcalieu une position originale à la jonction entre les producteurs et le management qui doit te permettre mieux que d’autres de mesurer les difficultés de la gouvernance de notre vignoble. A-t-on avis que faut-il faire pour aider « les gazelles » du vin à se développer pour qu’elles puissent être plus présentes et plus compétitives sur les marchés en expansion ?

 

Réponse de Michel Bataille : « La gouvernance de la filière reste un problème majeur en Languedoc Roussillon. Du défaut de consensus sur l’analyse concurrentielle découle des incompréhensions politiques et des erreurs stratégiques. Cependant certaines entreprises réussissent.

Ces « gazelles » du Languedoc Roussillon doivent pouvoir exercer leur activité en toute liberté, faire preuve d’imagination et d’innovation, l’agilité étant un facteur-clé de succès majeur.

Il faut les appuyer en finançant leur développement notamment commercial et  marketing par le renforcement des actions et des équipes. Ces actions doivent s’inscrire dans une démarche fédératrice de communication sur les produits du Languedoc (y compris les cépages sans IG qui seront essentiellement issus du Languedoc et commercialisés à travers des marques), en faisant taire les querelles de chapelles par produit. »

Partager cet article
Repost0
9 novembre 2008 7 09 /11 /novembre /2008 00:09

Notre villa, nichée dans une végétation luxuriante et bien entretenue, nous offrait un accès direct à la plage par un petit escalier de pierre. Depuis la terrasse, là où je m’installais au petit matin pour écrire, l’encorbellement de la baie par les flancs de la montagne m’offrait un spectacle dont je ne me lassais jamais. Nous étions coupés du monde et ça m’allait bien. La Corse dépayse. L’insularité, l’irrédentisme, l’identitaire, proclamés à propos de tout et de rien, le mépris affiché vis-à-vis du pouvoir central, du « peuple corse » m’indifféraient. Je ne me sentais ni agressé, ni concerné, sur ce confetti aux dimensions de village où tout résonnait, s’enflait, s’autoalimentait, prenait des allures d’une tragédie surjouée par des acteurs peu crédibles. Par construction le nationalisme me donne des boutons, des démangeaisons. C’est le repli sur soi, le refus des autres, le petit pré carré, la consanguinité, le règne des grandes gueules. Je déteste toutes les frontières. J’aime par-dessus tout aller et venir sans présenter de passeport, justifier de la pureté de mon sang ou de mes origines. Pour autant, je connaissais trop les plis et les replis du dossier Corse pour savoir que le clanisme fournissait aux cagoulés les arguments les plus crédibles pour alimenter leur logorrhée et, bien sûr, justifier leur radicalisme et, si je puis dire, leur explosivité. Dans ma traversée des soupentes de la République j’avais « travaillé » avec les uns et avec les autres, sans jamais me lier avec l’un ou avec l’autre. Leur monde, leurs mots, leur geste, m’étaient étrangers. Je n’arrivais ni à les respecter, ni a les mépriser. Ils m’étaient indifférents.

Le président Pompe se méfiait, à juste raison d’ailleurs, l’affaire Markovic le démontrera, des « demi-soldes » du SAC où se mêlaient, autour du noyau dur de la diaspora corse, d’authentiques héros de la Résistance et de vrais truands. Comme l’heure n’était plus aux combats de l’ombre contre les « soldats perdus » de l’OAS ou à la défense de la Vème menacée, alors Pompidou avait demandé à Marcellin de débarrasser le SAC des éléments les plus douteux. Tâche malaisée car ce petit monde de reitres désœuvrés, naviguant en marge de la légalité, vivant d’expédients, cultivait un sentiment de toute puissance, au nom des services rendus au Général, et pensait que leur impunité ne saurait être remise en cause. La cellule « MR », Mouvements Révolutionnaires, créée au sein de la DST par le Fouché du Morbihan, dont je dépendais, allait, par le biais d’une de ses recrues les plus prometteuses, en provenance de Lorient, un « pistonné », à qui je donnerai, par commodité et par souci de sécurité, c’est un nuisible de chez nuisible, le nom de code de Guide, plus exactement de Bertrand Guide, jouer un rôle actif dans l’infiltration du SAC. L’irruption du père de Marie dans ma vie souterraine avait, bien évidemment, facilité mon double positionnement. Familier de Claude, l’épouse du président Pompe, et gros poisson des réseaux gaullistes de la Résistance, mon fugace « beau-père », m’inséra avec un savoir-faire remarquable dans les filières où l’on ne vous pose pas de questions lorsqu’on est adoubé par un référent de cette dimension. Au tout début la complexité et l’embrouillamini de ma situation me rendait un peu paranoïaque mais, grâce à la complicité de Chloé qui me bordait sur mon flanc gauche, je pris de plus en plus de plaisir à jouer un double ou même parfois un triple jeu.

 

Pour la première fois, depuis la disparition de Marie, je retrouvais foi en ma destinée. Bien sûr ce n’était plus le bel avenir de ma jeunesse : la résistible montée vers les sommets, la griserie du pouvoir, le grand amour, que j’avais en ligne de mire mais, de nouveau, même si ça peu paraître étrange et paradoxal alors que je pataugeais plus encore dans les égouts de la République, de nouveaux repères balisaient ma route et je me sentais rasséréné, optimiste même. À l’origine de ce brutal revirement : le père de Marie qui, sans le vouloir, m’avait investi d’une nouvelle responsabilité. Lorsque nous étions sortis du Harry’s Bar, en dépit de nos protestations, il nous avait ramené chez lui. En ouvrant la porte de son appartement il m’avait dit « tu es ici chez toi ». Paroles sympathiques de fin de beuverie qui n’effleuraient qu’à peine mon esprit embrumé. Chloé et lui passèrent le restant de la nuit à converser sous la verrière de son grand atelier. Moi je m’effondrai d’un bloc, tout habillé, sur le grand lit où j’avais dormi avec Marie. Au petit déjeuner, Chloé, tout en trempant des mouillettes dans son œuf coque décapité, m’annonçait comme si c’était dans la nature des choses « qu’elle était allé en moto chercher mes affaires dans mon gourbi de la Butte aux cailles… » À mon grand étonnement je ne protestais même pas. Sans me l’avouer, au fond de moi, cette prise en mains me convenait. Sous mes grands airs je cachais l’extrême plaisir que me procuraient toutes les formes de protection tissant autour de moi les invisibles limites de ma bulle première. Ensuite, tout était allé très vite. Le lundi suivant, nous nous retrouvâmes Chloé, lui et moi dans le bureau de Me Dieulefit, notaire, dont l’étude, avenue de Breteuil, fleurait bon l’encaustique et la respectabilité de cet arrondissement aux fortunes discrètes. L’homme affichait tous les attributs de sa charge : costume sombre bien coupé, petites lunettes cerclées d’or, chemise sur mesure immaculée, boutons de manchettes en nacre, cravate sans fantaisie, richelieu impeccables, mais sa coupe de cheveux romantique, son sourire discret et l’acuité de son regard bleu égayaient son austérité de façade. Il faut dire que, sans aucun doute, le père de Marie devait détonner quelque peu par rapport à sa clientèle traditionnelle. Son clerc, un éphèbe blond, moulé dans un pantalon de flanelle se tortillait sur sa chaise et risquait, à chaque fois que son patron cessait de le solliciter, des œillades enamourées en direction du vieux fripon qui, de plaisir, se rengorgeait. Le speech introductif du cher maître Dieulefit, allusif et flou, ne nous éclairait guère sur les raisons de notre présence en ce lieu.

 

Partager cet article
Repost0
8 novembre 2008 6 08 /11 /novembre /2008 00:03
Un de mes amis vigneron, la semaine dernière est revenu tout tourneboulé de chez son banquier. Le gars, d’ordinaire, décontracté et sur de lui, très golden boy de la City, qui tenait devant lui des propos truffés de mots anglais, du genre : « moi mon bon je traite sur les marchés OTC over the counter des credit default swaps CDS ou des collateralised debt obligations CDO et je dégage des retours carabinés. Vous avec votre jaja vous jouez dans la cour des petits bras, vous ne savez pas faire du profit, faire péter les compteurs… Même qu’il ajoutait avec hauteur face aux objections de mon ami vigneron, qui est un champion de l’exportation, que notre buisiness manquait de visibilité à moyen terme (sic)… » Bref, il le prenait pour un con. Alors, comme on n’est pas des gars à tomber en dépression on se contentait, quand il rentrait de Calyon, de s’envoyer des petits gorgeons au bistro du Patron. Quand on était un peu gais mon ami déclarait « un jour je lui dirai, de mon air le plus niais, que pour moi, bien sûr, le CDS c’était l’ancien parti de Méhaignerie et que toutes ses conneries ripolinés en rosbif de cuisine c’étaient tout bêtement du gré à gré comme sur le marché aux bestiaux de Parthenay et qu’au bout du bout, entre filous, y’en avait toujours un de lésé avec un grand B… »   

 

Donc ce jour-là, balloté, comme un naufragé réfugié dans un canot Bombard, par le grand maelstrom de milliards, alors que ses idoles de Wall Street et de la City, ces jeunes et arrogants traders, tombaient de leur piédestal, que ses veaux d’or adulés, les fameux hedges funds domiciliés off shore (39% aux Îles Caïmans, 11% aux Îles Vierges) s’effondraient avec pertes et fracas, dans la bouche de notre gars la terminologie financière prenait des allures de nomenclature d’hygiène alimentaire : produits pourris, toxiques. Dans un état de déréliction avancé notre banquier psalmodiait  sans rire que la crise financière allait gangrener l’économie réelle. Notre ex-timonier qui raillait nos petites boutanches exportées et trouvait que notre secteur manquait de visibilité, tout bêtement nous avouait qu’il naviguait dans l’irréalité. Terrible aveu que l’existence d’une économie « irréelle » ou « virtuelle » c’est plus chic. Le journal « Le Monde », plus sérieusement que nous, écrit noir sur blanc ce que nous pensions en buvant notre petit blanc : « les innovations financières des dernières années : investissements dans des produits titrisés opaques et toxiques, négociations de produits dérivés de gré à gré – hors les marchés organisés – pour spéculer sur les prix des matières premières, les taux d’intérêt, les risques de défaut de paiement, etc. »

 

Notre banquier, contrairement à la publicité de sa maison où le gars, avant de vous faire signer, derrière son bureau pousse un petit couplet du tube de l’été, a fait à mon ami vigneron une étrange déclaration «In girum imus nocte et consumimur igni.. » qui est un palindrome latin signifiant : « Nous tournons en rond dans la nuit et nous sommes dévorés par le feu ». On aurait pu se le tenir pour dit mais, comme on est des gars qu’avons des lettres, nous on sait que Marcel Lapierre, au mitan des années 70, a croisé un certain Guy Debord qui lui faisait remarquer que « la vie d’ivrogne devenait difficile », et donc que « In girum imus nocte et consumimur igni » est le titre d’un film de Guy Debord sorti en 1978. C’est pour ça qu’on s’est écrié en chœur « merde ! Notre banquier est situationniste !»

 

Ceci dit, tout ça ne nous menait pas très loin car en ces temps chahutés où monsieur et madame tout le monde, hormis le fait qu’ils savent bien qu’un sou emprunté à ces messieurs les banquiers doit être remboursé rubis sur l’ongle avec intérêts, que le découvert y’a pas besoin de leur expliquer ce que c’est, face à cette volatilité qui leur semble un beau rideau de fumée, se disaient que nos « génies de la finance » les qui ont fait des choux gras en jouant l’argent des « courses » (les provisions pas le Tiercé) au Casino (pas celui de la GD), au lieu de nous la jouer la main sur le cœur « allez bonnes gens nous tenons tout sous contrôle » devraient nous expliquer pourquoi les Bourses s’effondrent. C’est écrit dans la presse britannique : « les hedges funds, ces fonds spéculatifs adulés des traders, sont en grande partie responsables du maelström boursier. À Londres c’est le sauve-qui-peut. Ils se délestent, en catastrophe et sans discernement, de leurs actifs en actions car ils sont pris à la gorge par la raréfaction du crédit. Leurs clients, les grosses fortunes comme les investisseurs institutionnels prennent peur et retirent leurs capitaux. En septembre, les sorties ont été estimées à 34 milliards d’euros. ¼ des 8000 hedges funds opèrent à Londres et selon le directeur de l’un des plus importants d’entre eux GLG Partners plus d’un ¼ disparaîtront « dans le cadre d’un processus darwinien ». Le rendement du secteur est tombé à 5% soit la plus mauvaise performance de leur histoire qui remonte à 1959. » On n’est peut-être des ignares mais dit comme ça on est tous capable de comprendre.

 

 

Vous allez me dire que tout ça ce ne sont que des élucubrations de buveur de Brouilly. Pas si sûr mes amis car il y a une poignée d’années me rendant à la Défense plaider un dossier de la wine industry, le Big chief, me répondit en soupirant « le secteur manque de lisibilité… » Sacré Édouard, dans sa retraite basque, il doit s’adonner à son loisir favori, la pêche au gros, en pensant que son successeur devait manquer de lisibilité quand il se goinfrait de « produits dérivés »…

Partager cet article
Repost0

  • : Le blog de JACQUES BERTHOMEAU
  • : Espace d'échanges sur le monde de la vigne et du vin
  • Contact

www.berthomeau.com

 

Vin & Co ...  en bonne compagnie et en toute Liberté pour l'extension du domaine du vin ... 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

Articles Récents