Les 6 accusés du procès du Petit-Clamart en 1963. En haut: Alain de la Tocnaye, Bastien-Thiry , Pierre Magade. En bas: Jacques Prevost , Alphonse Constantin , Etienne Ducasse. ©Rue des Archives/AGIP Rue des Archives/©Rue des Archives/AGIP
Depuis que le dernier carré du grand parti gaulliste, du RPF au RPR en passant par l’UNR, l’UDR, puis l’UMP qui avait bouffé l’UDF, et enfin Les Républicains, sombre lentement mais sûrement comme le PS de Tonton qui lui n’a jamais changé de nom, sous l’étreinte du jeune Macron, de Gaulle est très tendance.
C’est à qui se poussera du col en se revendiquant gaulliste, parant le temps où le fondateur de la Ve sur les cendres chaudes de la IVe honnie, celle de ce pauvre René Coty, régna sur notre vieux pays. Même la fille du borgne essaie de capter l’héritage en allant faire une virée sur l’île de Sein. C’est la ruée sur le grand Charles, lui au moins était nickel-chrome à l’Elysée avec la tante Yvonne.
Lorsque le petit Fillon sombra sous le poids du job fictif de bobonne et de ses costars gratis de chez Arnys, une question fit florès : est-ce que de Gaulle aurait fait ça ? Sûrement pas mais les français qui ont la mémoire courte avaient oublié que Jacques Chirac fut condamné pour les emplois fictifs de la ville de Paris et que jusqu’à l’heure de sa mort il logea dans un appartement prêté par Rafik Hariri.
Laissons de côté ces problèmes d’intendance pour nous intéresser aux débuts chahutés du Général deux étoiles.
Tout commence le 8/1/61, le référendum sur l'autodétermination en Algérie, est approuvé par 75% des voix. Pour les partisans de l'Algérie française, c'est l'annonce de l'abandon de celle-ci.
L'Organisation Armée Secrète pour la défense de l'Algérie française par tous les moyens est créée le 11/2/61.
Le 22/4/61 se déroule le putsch des généraux Salan, Challe, Jouhaud et Zeller, suivi par 200 officiers. L'attitude attentiste des officiers supérieurs et la loyauté de la majorité de l'armée en Métropole provoquent l'échec du pronunciamento et l'Armée rentre dans le rang.
Une partie des insurgés ; militaires, civils partisans de l'Algérie française, sympathisants d'extrême-droite, entre dans la lutte clandestine : attentats contre les pro de l'indépendance, contre-terrorisme FLN, terrorisme contre les Musulmans...
Une vague de violence meurtrière déferle en l'Algérie, en Métropole. Le général De Gaulle, principal artisan du référendum, est la cible de plusieurs tentatives d'attentat.
Le 22/8/63, le lieutenant-colonel Bastien-Thiry, officier de l'armée de l'air organise un guet-apens visant à assassiner le chef de l'Etat. Il entretient une haine profonde à l'égard de de Gaulle coupable de vouloir brader l'Algérie, d'avoir trahi l'Armée et la Nation.
Avec ses seconds, Georges Watin, ingénieur agricole et Alain Bougrenet de la Tocnaye, hobereau d'extrême-droite, Bastien-Thiry va monter le coup du Petit-Clamart. Une douzaine de tireurs sera postée sur la route du convoi présidentiel, aux abords du croisement du même nom, mais une série d'événements inattendus va faire capoter l'attentat. Seule une douzaine de balles sur les cent-cinquante va percer la voiture de de Gaulle, sans résultat.
Après cet échec, les responsables en fuite furent pour la plupart arrêtés. Le service action du SDECE qui a infiltré l'OAS a réussi à situer tous les membres importants impliqués dans l'affaire. Trois réseaux entiers en France furent démantelés, deux autres complots déjoués.
Chazenet, pur et dur de l'Algérie française affronte la sombre réalité. A court d'argent et la perte d'appui sur le plan national et international, la perte de ses membres et de son prestige, L'OAS s'écroule sous les assauts répétés des services secrets et de la police.
Exilé en Italie avec ses deux principaux lieutenants ; André Casson et René Monteclair ; Chazenet va monter un nouveau complot pour assassiner De Gaulle. Mais, tous les tueurs de l'OAS sont grillés.
Il va falloir prospecter à l'étranger pour recruter un professionnel, un inconnu spécialiste des crimes dans le milieu politique mondial. Les trois hommes en réunion vont plancher sur les dossiers de candidats potentiels. Ils vont se mettre d'accord sur un tueur à gages anglais dont le palmarès est édifiant. Son nom de code sera Chacal.
Le secret total étant de mise, c'est à lui d'organiser le coup : faire des repérages, connaître les habitudes du Président dans ses déplacements, se procurer l'arme adéquate, choisir la date et l'endroit de l'attentat. Tout cela pour la modeste somme de 250000 dollars.
Andreas50
La réponse à ma question titre est donnée dans la préface de Ken Follett
C’est un roman outrageusement original, au style unique : précis à l’extrême, trompeusement sec, capable de capter notre attention par la seule force de sa conviction. Un style qui a influencé tous les auteurs, moi inclus.
On a l’impression de lire un article de journal bien écrit.
Forsyth nous accroche littéralement, page après page : en nous donnant l’impression qu’un homme dans le secret des dieux nous raconte précisément comment un vrai assassin s’y prendrait pour accomplir la tâche presque impossible de tuer de Gaulle. Il nous intrigue, nous fascine.
L’édifice de Forsyth est aussi solide qu’une vieille église millénaire ; juste avant le milieu du roman, l’auteur nous sort la scène, essentielle à tout thriller bien construit, dans laquelle il nous rappelle à quel point les enjeux sont élevés :
Certains pays possédaient des institutions douées d’assez de stabilité pour survivre à la mort d’un président ou à l’abdication d’un roi, comme l’avait démontré la Grande-Bretagne vingt-huit ans plus tôt et comme le démontrerait l’Amérique, avant même que l’année fut achevée. Mais le ministre avait assez clairement conscience de l’état des institutions françaises en 1963 pour n’entretenir aucune illusion : la mort du Président ne pouvait être que le prologue d’un putsch et d’une guerre civile.
C’est le danger qui constitue l’essence même des thrillers. Bon, ce n’a rien de sorcier d’inventer une situation dangereuse. Le plus difficile, c’est de la faire durer, à coups de rebondissements, de surprises et d’échappées belles, pendant 400 pages ou davantage, tout en restant crédible. Chacal en fait près de 500, et le suspens ne cesse d’augmenter, page après page, chapitre après chapitre, jusqu’à sa conclusion. À seulement deux pages de la fin, le lecteur ne sait toujours pas comment l’intrigue va se résoudre. Et chacune de ses pages respire la crédibilité.
Thriller haletant, Chacal nous happe dès les premières pages. Le récit est passionnant, on n’en lâche pas la lecture et on le quitte à regret. Une œuvre magistrale et fascinante. A lire absolument, même si on n’est guère friand de roman policier.
En outre, je trouve l'atmosphère des années 60 remarquablement décrite : la lutte contre l'OAS bien sûr mais aussi toute cette "guéguerre" entre services dans une Vème République qui se cherche encore et qui vit sous l'ombre tutélaire du grand homme. Un vrai régal......
3 petits détails :
- Si le Chacal ne put éliminer de Gaulle physiquement, Giscard le déplumé de Chamalières s’en chargea en 1969 en appelant à voter non au référendum du grand Charles.
- Forsyth écrit que Jacques Foccart était secrétairegénéral de l’Elysée à l’époque, c’est inexact il n’était rien que le tout puissant prince des ténèbres qui, de 1960 à 1974, fut le « Monsieur Afrique » des présidents français tirant toutes les ficelles de la Françafrique. ICI
- On croise aussi Alexandre Sanguinetti « Papa est mort en octobre 1980, soit un an après Robert [Boulin]. Et pendant un an, il a creusé la question et mené son enquête », affirme Laetitia Sanguinetti. C'est la fille de feu le ministre et député gaulliste Alexandre Sanguinetti, ami de la famille du ministre du Travail retrouvé mort dans un étang en octobre 1979. Elle détient les noms de "trois personnes qui pourraient être entendues comme témoin » …
Chacal (The Day of the Jackal) est un film franco-britannique réalisé par Fred Zinnemann, sorti en 1973 (sortie le 30 juillet 1973 aux États-Unis), tiré du roman de Frederick Forsyth.