" Coca Cola achète The Taylor Wine Company dans l'état de New-York et acquiert en même temps des vignobles en Californie; on baptise l'ensemble Taylor California Cellars, pour apparaître tout de suite comme acteur reconnaissable sur le marché national. Il faut maîtriser la qualité et, dans ce but, Coke achète dans la Napa Valley le spectaculaire Sterling Vineyards, dont les merlots comptent parmi les meilleurs du monde. On s'attache le grand oenologue Douglas Petersen qui, de ses mains, a vinifié la mémorable Private Cuvée 1970 de Beaulieu Vineyards. Sur une telle base, la puissante compagnie inaugure dans le monde du vin la publicité comparative, par des spots télévisés mettant en scène l'expert Steven Spurrier. Il faut faire en sorte de devenir très vite premiers. The Wine Spectrum entre dans le groupe. On lance des vins de marque pour étoffer les ventes : california-classic-red, qui vise à dépasser la plupart des crus bourgeois de Bordeaux, california-classic-white et monterrey-chardonnay, particulièrement léger et fin. Ce lancement établit, dit-on, un record dans l'histoire du vin, par le nombre de caisses vendues au bout d'un an. En parallèle, on cherche des grands produits étrangers, un champagne français, par exemple, et on approche en coulisse d'autres producteurs américains pour les acquérir, en commençant par le plus grand, Gallo "
Ce n'est pas un récit de science-fiction mais un épisode bien réel de la saga de la grande maison d'Atlanta qui, à la fin des années 1970 met en place une division Vins. " Al Killeen , qualifié de flamboyant et charismatique directeur du marketing de la company, a conçu un grand dessein : Coke a été à l'origine du style de vie de l'après-guerre; il fallait créer le style de vie de la fin du XXe siècle et viser la génération plus cultivée, plus riche, qui boit du vin. Avec notre expérience du marketing, nous allons dominer ce secteur en pleine croissance "
Imaginez l'abomination de la désolation si Coke était allé au bout de ses ambitions, j'en frémis rétrospectivement en pensant à Perrico et ses disciples contemplant avec horreur tous les bouffeurs de Mac Do de notre belle capitale sirotant dans un gobelet plastique un red ou un white made in Atlanta. Pour ne pas en rajouter dans le destroy j'évite de mettre en avant le scénario catastrophe où Krug, Cheval Blanc et autres fleurons de nos terroirs fussent tombés dans l'escarcelle de Coke.