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22 février 2007 4 22 /02 /février /2007 00:23

La nouvelle est tombée sur les télescripteurs relayée par la Confpé, j'en suis encore tout boulversifié : suite à une étude "ethnographique" (sic) sur un échantillon de 100 consommateurs de vin de moins de 35 ans commandé par les as du marketing de la société Castel, eux-même saisis de stupéfaction, le constat est sans appel : les jeunes plébiscitent la tradition. Foin des étiquettes pleines de paillettes, vive le tire-bouchon, le vin reste un produit de vieux cons, pardon c'est le vin bouché de pépé ou le nectar du pater, même les nénettes estiment que c'est un truc de mecs, donc faut rester dans le sélect. Je chambre certes, mais un petit détail : ce petit échantillon est composé exclusivement de buveurs de vin, alors est-il si étonnant que, par un effet mirroir, ils soient le reflet du discours dominant : le vin est un produit avant tout culturel, artisanal, synonyme d'art de vivre à la française, et bien sûr c'est un élément de notre patrimoine - une sorte de chef d'oeuvre en péril quoi !  Plaisanterie mise à part, je ne vois rien de très décoiffant dans cette étude. Nos jeunes buveurs de vin sont formatés, pourquoi diable réclameraient-ils autre chose que ce qu'on leur présente comme le nec plus ultra. Pour être original il faut être en mesure de transgresser les codes, et comme les codes du vin sont complexes les candidats ne se bousculent pas pour ruer dans les brancards. D'ailleurs, dans le jargonage propre à ce genre d'étude, le vin y est décrit comme une boisson sociale et impliquante, qui expose au jugement et à la critique. Pour acheter du vin et le boire faut faire parti des initiés. Tiens donc !

Alors que cherche-t-on puisque la plus grande part de l'offre française de vin colle parfaitement à cette demande ? La bouteille de 75 cl, bouchée liège avec étiquette classique est la reine du marché. Et pendant ce temps-là la consommation de vin, surtout dans cette tranche d'âge pique du nez, c'est donc que la stratégie de mise en marché du produit est la bonne. Je charrie encore, mais tout de même dans cette affaire j'ai le sentiment qu'on parle beaucoup du contenant et peu du contenu. Et le vin dans tout ça ! Ce n'est pas parce qu'on l'autoproclame artisanal qu'il correspond aux attentes de ceux qui en consomment ou qu'il soit en mesure de séduire de nouveaux consommateurs. La bombe est lâchée : mais ils sont où ces jeunes qui n'en boivent pas ? Ailleurs ! Hors jeu... Pour eux le vin n'est pas de leur temps. Et les gens du vin continuent à faire en sorte qu'il ne le soit pas. Pour autant, je ne suis pas de ceux qui pensent qu'on puisse transformer une équipe de bras cassés en équipe qui gagne en se contentant de changer les maillots ou en la dotant des dernières godasses top d'Adidas. Le packaging n'a jamais transformé un produit médiocre ou indigent en nectar. Pour reprendre mon image sportive : une grande équipe, ça se battit sur du solide. En football l'exemple de l'OL, de son président JM Aulas en sont l'illustration. En contre-point, la faillite du FC Nantes montre qu'on peut détruire une réussite de plus 50 ans en quelques années. Au vin quotidien de nos parents nous n'avons pas trouvé de produit de substitution. Nous nous contentons de présenter à ceux qui n'ont pas le portefeuille épais, et les moins de 35 ans y sont bien représentés, de pâles copies de notre beau patrimoine.

Alors que faire pour replacer le vin dans l'air du temps ? Tout d'abord cesser d'opposer tradition et modernité, artisanat et industrie, vin de propriété et vin de négoce, pour nous concentrer sur la ressource. Tant que nous produirons des vins inadaptés, en dehors des faiseurs de miracles, nous n'aurons guère d'atouts à mettre en avant pour proposer des vins qui collent à la demande. L'absence de rigueur en amont est notre tendon d'Achille. Tous les petits génies du marketing peuvent bien se décarcasser, le liquide reste la base indispensable à la réusssite du produit. Ensuite, arrêtons de parler des jeunes, des femmes, qui ne sont pas des catégories sociales et dont les comportements ne sont pas liés qu'à leur âge ou qu'à leur sexe. Mettons un bémol sur nos vieilles rengaines qui n'intéressent que nous. Cessons de réinventer l'eau chaude et observons ce que font, soit des boissons concurrentes ou d'autres produits consommés à table ou dans des moments ludiques de consommation. Enfin, utilisons comme les entreprises d'autres secteurs, des outils d'analyse des grandes tendances de nos sociétés issus d'études sérieuses, menées avec une méthodologie rigoureuse, pour mieux comprendre nos consommateurs.

NB. N'ayant pas eu accès à l'étude, je me contente de réagir à la dépêche d'Agra Presse du 17 février. En France le but essentiel du jeu de nos metteurs en marché consiste à piquer des parts de marché à leurs concurrents français : c'est un jeu à somme négative pour l'ensemble du marché...

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21 février 2007 3 21 /02 /février /2007 00:20

Alexis Gourvennec, 71 ans, vient de décéder. La saga de l'homme du choux-fleur et de l'artichaut bretons, de la SICA de St Pol de Léon, du marché au cadran, de la marque Prince de Bretagne, de la Brittany Ferries et du cochon en batterie, casseur de Préfecture devenu un puissant notable, est emblématique de l'évolution du Grand-Ouest de l'après-guerre passé de la misère noire à une prospérité fondée sur l'intensification technique et l'émergence d'industries agro-alimentaires puissantes.

 

La Bretagne de Bécassine, des bonnes gagées à Paris, exportatrice de bras pour les usines, ces émigrés de l'intérieur, s'impose comme le leader dans le petit poulet congelé à la Charles Doux vendu aux Emirats arabes à grand coup de restitutions, la dinde du père Dodu, le cochon de la Cooperl et les Holstein qui pissent le lait pour le plus grand bénéfice de Michel Besnier le Lavallois, en profitant à fond de l'ineptie de notre OCM céréales, important par les ports de Brest et de StNazaire des cargos de soja et de PSC. Plus qu'une révolution silencieuse, c'est un réveil brutal à la chinoise, implacable et déterminé. Un développement à la Alexis Gourvennec, sans état d'âme, comme une revanche des gars aux galoches, les Finistériens surtout. Lisez ou relisez le Cheval d'Orgueil de Jakez Hélias.


Ce matin, en saluant la mémoire d'Alexis Gourvennec, avec qui je me suis frictionné assez souvent, je  voudrais souligner qu'il faut, avant de vilipender ou de condamner un système, chercher à en expliquer les ressorts.

 

L'exploitation familiale à 2 UTH, invention des premiers technocrates de la Vième République, scellée dans le bronze des lois d'orientation agricole de Pisani, est la mère du productivisme tant décrié de nos jours. En décrivant cela, je ne justifie pas le système, je l'explique.

 

Quel choix autre laissait-on au jeune agriculteur s'installant sur une poignée d'hectares, pour vivre, pour tenter de vivre comme ceux de ses copains partis à la ville, bien logés dans des HLM flambants neuves, avec salle d'eau et chambre individuelle.

 

C'était tout de même mieux que la cohabitation avec les parents et les grands-parents, non ! Alors quand les tous nouveaux industriels de l'aliment du bétail : les Guyomarch et consorts faisaient le tour des fermes pour proposer des élevages intégrés, avec un revenu monétaire palpable, ils trouvaient des candidats.

 

Je peux en parler d'expérience, mon frère aîné Alain fut ainsi dragué par BVT, rattrappé par les cheveux grâce à la SICA-SAVA de Bernard Lambert, elle-même tombée dans l'escarcelle de Tilly pour finir dans celle de Gérard Bourgoin. Il n'a pas pollué les rivières, il s'est contenté d'élever des poules qui pondaient des oeufs pour la reproduction. Le début de la chaîne industrielle, rien qu'un petit maillon, sans pouvoir sur la finalité du système qui l'intégrait.


Tout ça pour dire qu'on ne sort pas d'un système en le stigmatisant ou en proposant des solutions qui ne sont que des copiés-collés d'une vision passéiste de la petite exploitation respectueuse de l'environnement. Que celle-ci soit une voie intéressante et importante pour certains produits, pour certains marchés c'est l'évidence. En faire le modèle unique, en revanche, participe de la même vision que celle qui animait les défenseurs de l'exploitation familiale à 2 UTH.

 

En viticulture, pour la viticulture de masse, qu'elle soit de pays ou d'AOC, nous sommes à ce stade où il faut être en mesure de proposer aux plus grand nombre soit de plier bagage avec un accompagnement social digne, soit de s'adapter à la nouvelle donne mondiale.

 

Mais alors, me direz-vous, le spectre de l'intégration plane sur notre viticulture artisanale ?

 

Non, ce modèle est dominant ailleurs, vouloir le copier nous mènerait à une impasse. En revanche, on oublie de souligner l'importance de la coopération dans ce type de viticulture, et la coopération, comme chacun sait ou ne sait pas, au plan juridique est la continuation de l'exploitation.

 

Le défi est donc au coeur même de la modernisation des entreprises coopératives vinicoles. A elles d'imaginer les méthodes et les pratiques leur permettant d'être réactive et efficace face aux grands metteurs en marché mondiaux. C'était l'un des défis jeté par les auteurs de Cap 2010.

 

Sera-t-il relevé ?

 

L'avenir d'une part importante de notre viticulture en dépend et nos candidats à la fonction présidentielle feraient bien de s'en préoccuper.    

 

 

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20 février 2007 2 20 /02 /février /2007 00:14

Les grands fauves sont lâchés dans la campagne, les petits aussi, tous ont limé leurs canines et affichent ostensiblement sourires et promesses. C'est le jeu dit-on. Drôle de jeu que cet empilement, ce mille-feuilles étrange, bourratif, indigeste, qui au bout du compte, quand on fait les comptes, nous amène tout droit à l'indigestion. Pourtant, on nous dit que nous avons été cigale, mais personne n'ose se parer des vertus de la besogneuse fourmi. Bien sûr emporter l'adhésion populaire en promettant la rigueur - qui n'est pas antinomique avec la juste répartition des efforts - n'est pas très populaire. Les rares qui s'y sont risqués, soit n'ont jamais osé affronter les suffrages : tel J Delors ou soit ont gouverné qu'une petite poignée de mois : c'est le cas du très souvent cité comme un grand homme d'Etat PMF. Si j'étais facétieux je noterais que les plus allumés de mai 68 qui scandaient : " élections piège à cons " n'avaient peut-être pas tout à fait tort. Mais comme on n'a pas mieux en magasin je suis de ceux qui estiment que l'abstention est une désertion.

Mon propos ce matin n'est pas de donner des bons et mauvais points à celles et ceux qui battent la campagne. Je les trouve courageux de briguer une fonction aussi lourde en se mettant de surcroît du plomb dans les sandales. Les mauvaises langues m'objecteront que les promesses n'engagent que ceux qui les entendent. Certes, mais alors ne versons pas des larmes de crocodiles sur la montée et le poids des extrêmes et des démagogues. Simplement, pourrions-nous, en tant que citoyens, plutôt que de nous adonner aux délices du  " je pense que " sur tout et son contraire, très en vogue dans les médias, essayer de nous élever au-dessus de la mêlée, de réfléchir à ce qui est bon pour la cité, à ce qui pourrait faire progresser le bien public, à ce qui pourrait se définir comme l'intérêt général. Là je sais que certains vont exiger de me faire enfermer pour stupidité congénitale, aggravée par le fait que j'ai pratiqué en son temps les antichambres ministérielles. Pourquoi pas, si on me laisse mon clavier et mon écran je pourrais continuer à vous abreuver de mes réflexions stupides.

Nous vivons dans un monde de plus en plus complexe, imbriqué, mondialisé, où un effondrement du système électrique, par exemple, provoquerait des dégâts énormes et sûrement une vraie panique. Alors il nous faut avoir le courage de bien cerner le rôle des experts, de ceux qui savent, de ceux qui font tourner la machine, pour exiger d'eux l'information pour la décrypter, la comprendre. Nos décideurs publics sont des généralistes, très souvent entre les mains de leurs experts, parfois simple haut-parleur de notes qu'on leur écrit, attentifs à leurs électeurs, soumis aux pressions de lobbies divers, et pourtant dans toutes les enceintes où ils nous représentent ce sont eux qui devront prendre la décision. Alors, en ces temps où il est de bon ton de vilipender la Fonction Publique, j'affirme qu'elle seule peut, dans sa diversité, son désintéressement, assurer au Politique l'expertise dont il a besoin. Mais, pour cela, il faut que la haute-fonction publique cesse de se croire investie d'un rôle politique, qu'elle pratique le mélange des genres. A chacun son job, l'Etat impartial est à ce prix, un prix somme toute à la portée de nos finances si l'on prend la peine de redonner à cette élite le sens du service public. 

Au risque de vous paraître immodeste c'est ce que je me suis efforcé de faire lorsque j'ai commis mon rapport en 2001. Certains l'ont baptisé " rapport Berthomeau " alors que bien des éléments qui en constituent la trame ne sont pas, loin s'en faut, la pensée de Jacques Berthomeau. D'ailleurs, beaucoup de ceux qui m'ont accolé l'étiquette de haut-fonctionnaire - que je ne suis pas - et qui ont "politisé" mes écrits n'étaient pas innocents : marqués de tels fers rouges ce document et la note stratégique Cap 2010 pouvaient facilement être jetés en pâture comme étant "orientés", contraire aux intérêts bien compris des vrais défenseurs de la viticulture française, qu'ils soient des professionnels ou des gens de cabinet.   

  

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19 février 2007 1 19 /02 /février /2007 00:07

Pour réussir, il faut vouloir changer le monde....

Les dix principes de l'entrepreneur par Anita Roddick *

1- Savoir raconter une histoire. Le meilleur outil pour imaginer le monde autrement n'est pas la comptabilité. Il s'agit plutôt de savoir raconter une histoire, de montrer ce qui fait votre différence, à vous et à votre entreprise.
2- Mettre l'accent sur la créativité. Il est essentiel pour tout entrepreneur de créer un climat qui encourage ses collaborateurs à avoir des idées. ce qui suppose des structures ouvertes, où les idées communément admises peuvent être remis en cause.
3- Etre à l'affût. En déambulant dans la rue, un chef doit avoir tous les sens en éveil pour repérer tout ce qui serait susceptible de s'appliquer à son activité. cela peut être un emballage, un mot, un poème, ou quelque chose qu'il remarque dans une autre entreprise.
4- Evaluer l'entreprise à l'aune du plaisir et de la créativité. Les écoles sont obsédées par l'évaluation. Or le plus important dans une entreprise - et ailleurs - n'est pas quantifiable.
5- Etre différent, mais inspirer confiance. Etre différent vous fera sortir du lot. Mais ne prenez pas de risques face à des gens essentiels à la réussite de vos affaires, en particulier si vous êtes une femme cherchant à obtenir des fonds d'une banque - c'est ce que j'ai appris quand on m'a refusé mon premier prêt.
6- Avoir la passion des idées. D'une idée qui l'obsède un chef d'entreprise veut faire un moyen de subsistance - et pas forcément une entreprise. Lorsque l'accumulation d'argent tarit ses idées et la colère qui en étaient le moteur, il cesse d'être un entrepreneur.
7- Entretenir sa capacité d'indignation. L'insatisfaction nous incite à l'action. Inutile de chercher une vision novatrice si vous n'avez pas la rage nécessaire à sa concrétisation.
8- Tirer parti de la composante féminine. L'entreprise telle que nous la connaissons a été créée par des hommes pour des hommes, souvent sous l'influence du modèle militaire et selon des principes hiérarchiques. Elle est à la fois marquée par des préceptes autoritaires et résistante au changement. En créant leurs propres entreprises, les femmes peuvent remettre en question ce modèle, ce qui plaira à leurs clients.
9- Croire à son intuition. La frontière entre esprit d'entreprise et folie est ténue. Les fous voient et ressentent des choses qu'ignorent les autres. Mais vous devez croire que tout est possible. Si vous y croyez, ceux qui vous entourent y croiront eux aussi.
10- Se connaître soi-même. Vous n'avez pas besoin de savoir tout faire, mais vous devez être suffisamment honnête envers vous-même pour identifier ce que ne vous pouvez pas apporter..."

* Anita Roddick est la fondatrice de la chaîne de cosmétiques The Body Shop extraits du Financial Times

Je sais que cette prose ne va pas plaire à certains de mes petits camarades mais ça ne fait rien. J'aime. Réagir, commenter, jeter des tomates sur votre écran, tout est possible... Ci-dessous Ruby de Body Shop et son slogan " seules 8 femmes sont des top models 3 milliards n'en sont pas"

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18 février 2007 7 18 /02 /février /2007 00:06

Au cours de la traversée nous découvrîmes, blotti dans un rond de cordages, notre Achille un peu penaud. Comment s'était-il faufilé sur le bateau sans éveiller l'attention de l'équipage, lui seul le savait ? Très, le chien d'Alexandre le Bienheureux, il nous la jouait regard implorant et queue qui frétille. Marie ne cédait pas au chantage de notre astucieux bâtard, à l'arrivée elle le confiait à Antoine Turbé, le charcutier de Port-Joinville, qui rapatriait ses carcasses de cochons, tout justes abattus, dans sa fourgonnette frigorifique. A Fromentine, Lucien Button, le menuisier qui rafistolait nos meubles, nous attendait. C'est lui qui, à la demande expresse de Jean, faisait office de chauffeur. J'avais eu beau protester, Jean n'avait rien voulu savoir. Je compris pourquoi lorsque ce tordu, alors que je m'apprètais à grimper sur le bateau, m'avait marmonné pipe éteinte au bec " tu me diras au retour ce que tu penses de Button. C'est pas une lumière mais il est sérieux. Tu comprends, ça me ferait un bon associé ". J'avais balancé de lui répondre " vieux salaud de gauchiste, quand tu veux, tu sais où sont tes intérêts... " mais je m'étais contenté d'un " tu peux compter sur moi " très professionnel.

En traversant le bourg de St Julien-des-Landes un détail d'intendance s'installait dans ma petite tête : maman allait-elle nous proposer de faire chambre à part ? Au lieu de m'inquiéter, cette question, qui peut vous paraître saugrenue aujourd'hui, mais qui en août 1968, aux confins du bocage vendéen, sentait le péché, déclenchait chez moi un irrépressible fou rire. Entre deux hoquets, afin de ne pas vexer le brave Lucien Button qui s'échinait à entretenir la conversation avec Marie sur des sujets aussi importants que le nombre de voitures d'estivants qui passaient devant chez lui depuis que son voisin avait ouvert un camping dans son pré ou le prix de l'essence qui avait augmenté à cause des évènements, je dis à Marie " je repense à l'histoire que tu m'as racontée hier au soir... " Et, c'était la plus belle expression de notre complicité, même si elle n'y comprenait goutte, à son tour elle partait dans son grand rire clair. Button, bon prince, sans poser de questions, affichait le contentement du type qui a la chance de cotoyer des gens qui ne sont pas de son monde.

La maisonnée nous attendait en faisant comme si de rien n'était. Maman cousait. La mémé Marie égrenait son rosaire pendant que la tante Valentine lisait Le Pélerin sans lunettes. Papa, avec le cousin Neau et mon frère, s'affairaient autour de la moissonneuse-batteuse. Ma soeur n'était pas là, bien sûr, puisqu'elle s'était mariée en 65. Entre la voiture de Button et la maison j'avais affranchi Marie de la raison de mon fou-rire. Très pince sans rire elle me répondait du tac au tac " tu sais je n'avais pas l'intention de partager ton lit cette nuit. Je ne suis pas une Marie couches-toi là mon petit Benoît en sucre..." Mon soupir et mon haussement d'épaules la faisaient s'accrocher à mon bras " ne t'inquiètes pas nous ferons comme ta maman voudra..." Au premier coup d'oeil sur maman je sus que la partie était gagnée. Marie était digne de son fils chéri. Papa, l'oeil coquin, fut le premier à l'embrasser. Dans son coin, la mémé Marie, devait en direct adresser, à la Vierge du même nom, un Je vous Salue Marie de satisfaction. Même la tante Valentine, d'ordinaire avare de compliments, dodelinait de la tête pour marquer son assentiment.  

    

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17 février 2007 6 17 /02 /février /2007 00:33

Pour maman j'étais l'expression la plus aboutie de ce qu'une mère peut rêver. Ses amies lui disaient " Madeleine comme vous en avez de la chance, votre Benoît a tout pour lui..." Ce statut d'enfant doué, à qui l'on donnait le bon dieu sans confession, j'en avais joué tout au long de ma prime jeunesse pour préserver mon petit jardin d'intérieur mais aujourd'hui, introduire entre maman et moi, une femme aimée, celle avec qui je voulais partager mes jours et mes nuits, n'était pas chose simple. Jusqu'à ce jour, même si mon goût pour le butinage devait lui causer quelques frayeurs, un accident était si vite arrivé en ces temps obscurs, ma chère maman s'accomodait fort bien de ne voir aucune fille s'installer dans mon coeur d'artichaut. Lors de ma dernière visite je m'étais bien gardé de préparer le terrain.Maman n'avait rien perçu, les mères aimantes sont aussi aveugles que les maris trompés, ou les épouses d'ailleurs. Pas un mot sur Marie, je m'en voulais de ce manque de courage et, chaque matin qui se levait, je me disais que j'allais lui écrire une belle lettre et, chaque soir, en me glissant au plus près du corps de Marie, la mauvaise conscience s'installait. Comment le lui dire ? Lui dire tout simplement.

Dans nos conversations, parlant de mon pays crotté, de mon enfance de sauvageon, de mes ballades dominicales dans les métairies, avec mon père, pour voir ses clients si peu pressés de lui régler son du, je ne cessais de dire à Marie " tu vas lui plaire, il va t'adorer..." ce qui me valait en retour de ma douce et tendre un beau sourire ponctué d'un regard rieur qui me titillait. Moi je traduisais " et ta maman, elle, elle va me détester. Je suis une voleuse, la rivale absolue, celle par qui le cordon invisible se rompt..." Jamais elle n'allait au-delà, Marie attendait. A la veille du 15 août je revins de Port-Joinville avec deux aller-retour pour le continent. " Je vais te présenter à maman Marie..." Son regard se voilait d'un léger nuage et, pour faire diversion, elle voltait pour que sa jupette tournoie " je vais tout faire pour lui plaire mon Benoît..." Achille, lui aussi, esquissait une gigue pataude. Jean, de derrière son journal ouvert, en bon célibataire inoxydable commentait " vous allez monter la première marche qui va vous mener à la salle à manger des petits bourgeois..."

Une petite heure de traversée et pourtant nous quittions l'île d'Yeu tous les deux accoudés au bastingage comme de grands voyageurs rompant les amarres avec leur vie d'avant. Jean, égal à lui-même, la veille au soir, nous avait sorti le grand jeu. Tournée des grands ducs chez nos plus gros clients puis dîner chez Van Strappen un antiquaire très blonde oxygénée avec solitaire au petit doigt. Tout au Krug millésimé pour une conversation très langue de pute. Marie, halée pain d'épices, mangeait des boudoirs de Reims rose qu'elle trempait dans le champagne aux fines bulles. Babaresco, le grand noir homme à tout faire de Van Strappen, flambait des langoustes au Richard Hennesy en un rituel sauvage : sur un billot de bois d'un coup précis de hachoir de boucher il les tranchait en deux, vivantes, sans s'émouvoir de leurs violents et désespérés coups de queue ; puis il les grillaient sur de la braise vive : les chairs exalaient leur puissant parfum de roche iodée. La flambée, haute et incandescente, illuminait la terrasse et Jean, ludion, n'en finissait pas de lever sa coupe en marmonnant " le problème avec la champagne c'est que ça pétille, les bulles mes amis sont des traîtresses, elles amusent la galerie, vous font des ronds de jambes, vous aguichent et pfutt, disparaissent... " 

        

  

  

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16 février 2007 5 16 /02 /février /2007 00:23

Après moults hésitations, toute honte bue, je me lance. Je plonge dans le bassin olympique du haut du grand plongeoir. Si je m'aplatis comme une crèpe, merci aux ricaneurs de ne pas trop se fiche de ma poire. Comme disait le baron olympique : l'important c'est de participer. A ma manière je suis comme un éthiopien qui s'alignerait dans la descente des JO d'hiver à Wengen. Mais, me direz-vous, pourquoi fais-je ça ? Tout bêtement parce que je me suis aperçu que pour les officionados du vin, un blog sur le vin où l'on ne tartine pas sur l'attaque en bouche n'est pas digne d'être admis dans le saint des Saints des blogs pur jus. Entre nous soit dit, ça me fait un peu marrer, prêcher à des convaincus c'est tout de même plus fastoche que de se taper les ligues ou les chantres du risque zéro. Faut ce qui faut, même se regarder le nombril du haut du grand plongeoir. Alors j'y va, sans rouler ma caisse, cool et adviendra qui pourra...

Choix du produit : puisque les Canaris sont dans la mouise, y changent d'entraineur comme de chemise, y filent tout droit vers la D2, faut dire que leur président se nomme Roussillon, je jette mon dévolu sur un Muscadet Sèvre et Maine de Sauvion dans une bouteille de limonade chez un caviste branché de la rue du Bourg Tibourg www.nysa.fr . Que ça s'appela fil de fer ne m'a pas accroché. Donc déjà pas très glorieux comme approche, même si pour faire plaisir à Perrico jsui zalé chez un caviste, mais je ferai mieux la prochaine fois. Le vendeur m'a dit qu'il était vif et fruité pour un Muscadet qu'il faudrait que je le boive frais et ça m'a coûté 4,5 euros.

La dégustation : j'ai bien essuyé un grand verre, puis pas besoin de tire-bouch puisque cétune bouteille de limo. Je verse dru. J'agite gauchement (normal). C'est jaune paille et ya dé tout petits points partout ki sont pas des bulles ça ressemble à des têtes d'épingles. Mon tarrin : j'hume ! Le Sèvre et Maine de Sauvion ne fait ni dans la fleur genre genet, ni dans quoi que ce soit, ça me fait penser à un petit matin frisquet, c'est frais et net. Bon faut que j'y aille. La première gorgée. J'gazouille ski faut. Si j'osais j'écrirais que c'est un vin gai mais ptète qu'on me frais un procès. Bon jfais pas des bonds c'est plutôt gentillet, c'est pas vraiment Muscadet mais c'est peut-être ski plaît au palais des bobos du quartier. Jsuis totalement sec sur le vocabulaire. Pour faire le calamantran je pourrais écrire qu'il a de la jarretière ce qu'est plus fin que de dire de la cuisse. Si je ne le fais pas c'est que ça ne m'inspire pas. Tout même, comme je suis un gars sérieux, je peux vous dire que ça me laisse une bouche fraîche et légère. Bref ça casse pas trois pattes à un canard, ça se laisse boire. Maintenant je vais me faire un petit mâchon. Désolé, pour assurer, va falloir que je prenne des cours par correspondance. A votre bon coeur m'sieudames ! Et pendant ce temps-là, le FC Nantes boit le calice jusqu'à la lie mais que faites-vous donc Monsieur le maire, pour éviter que je me désespère de voir gaspiller l'héritage de mes belles années...

Note : 10/20

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15 février 2007 4 15 /02 /février /2007 00:03

 

Vive Voutch Very Good ! Depuis dix ans ce dessinateur créé des saynettes souvent absurdes, franchement hilarantes, toujours drôles. Son trait est fin et pur, ses couleurs pétantes, ses légendes très à l'ouest, du Woody Allen made in France. Il chambre gentiment les travers des bobos, des psy, des coatches, des managers et autres petites bêtes de notre société qui se regardent essentiellement le nombril. Il croque tout le monde. Comme il dessine aussi pour le Point deux vignettes consacrées à notre cher nectar, très terroirs et marketing, du Cap 2010 compréhensible. J'adore ! Il vient de publier son septième opus " Le futur ne recule jamais " Le Cherche-Midi 23 euros. Allez consulter son site vous ne serez pas déçu. www.voutch.com/ et peut-être passer commande. Bonne lecture...

 

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14 février 2007 3 14 /02 /février /2007 00:16

 

Oui j'oz l'avouer
dokteur
gé peur
peur d'être démaské.
Cé le drame de ma vie
la hantiz de mé jours zé de mé nuits.
Jfé zin komplex !
Passez-moi les kleenex !
Pourtant jme soigne, en vain
je blok dékil s'agit de kozer du vin.
Jveu dire kozer kom lé zexperts.
Jouer tel un virtuoz avek le vocabulaire.
Tenter de côtoyer lé Paganini de la dégustation.
Leur faire dé génuflexions.
M'envoler dans lé hautes sphères.
M'envoyer en l'air !
Etre un Dieu sur terre.
Avoir un nez de chien truffier.
Le regard acéré de Jacques Puisais.
La bouche ékuménik de toucé prélats.
Savoir tout ce ke je ne cé pas.
Cé dur
la kultur !
Moi jvoudrais bien faire bonne figure.
Os kour !
Ce poids devient trop lourd.
Gé honte !
Je raz lé murs de peur kon me règle mon kompte.
Vite faxez-moi l'adresse des dégustateurs zanonymes
ke je puisse confesser mé tares en un effort ultime.
Ayez pitié d'un povre pécheur
ki ne demande ka ax cédé à votre bonheur...

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13 février 2007 2 13 /02 /février /2007 00:31

Monsieur le 1er Président, cher Philippe Séguin,

Je vous sais amateur de bonne chère et de bons vins. Vous êtes, comme on dit, un bon vivant. La première fois où je vous ai croisé c'était début juin 81, jeune bretteur de la droite, dans l'hémicycle de la nouvelle Chambre rose vous pourfendiez, avec talent et une belle dose de mauvaise foi, les nouveaux arrivants. L'eau a coulé depuis sous les ponts de la Seine. Des hauts et des bas en passant par un démâtage grave du côté de l'Hôtel de Ville : qu'étiez vous aller faire dans cette galère ? Depuis vous avez jeté l'ancre rue Cambon. Sous l'hermine vous voilà 1er juge des comptes de notre France dispendieuse. Vous devez vous y ennuyer ferme, l'ivresse du politique est une addiction incurable. C'est avec un réel plaisir que je vous ai vu lever votre verre, en compagnie de Catherine, chez Christies, lors de la soirée de lancement du n°spécial Vins du Point. Je vous ai salué d'un " bonsoir Monsieur le 1er Président..." qui vous a permis d'afficher votre sourire ironique.

Mais revenons à votre nouveau job. La Cour vient de publier le 8 février dernier un " rapport sur la politique sanitaire de lutte contre l'alcoolisme " 21 pages très conseiller référendaire maniant la toile émeri et l'eau bénite. Pour un non initié, je dois l'avouer, le pensum est assez peu digeste. Il y ai dit que l'Etat ne sait pas ce qu'il veut, qu'on a du mal à recenser les financements, que le système d'information sur l'alcoolisme est perclus de faiblesses ce qui rend illusoire les tentatives d'évaluation, que les actions d'information et de prévention reposant essentiellement sur une communication grand public, notamment sous forme de campagnes, est d'une portée réduite. Ecrit en français simple : c'est le foutoir, la gabegie et c'est inefficace. Par exemple " En 2003, la Cour relevait que l'ANPAA ne disposait pas d'un système interne de suivi de la gestion de ses activités locales. Un nouveau plan comptable a été mis en place au 1er janvier 2005 et vise à ventiler les dépenses de prévention et de soins, à consolider au niveau national les comptabilités des établissements locaux et à suivre leur activité au travers de tableaux de bord. Mais la mise en service de la nouvelle version du logiciel de gestion des patients annoncée dans la réponse du directeur de l'ANPAA aux observations de la Cour, a été retardée suite à des difficultés techniques..." Compétence vous avez dit compétence 4 années pour des prunes..." ça doit vous plaire cher Philippe Seguin de tancer la bureaucratie.

A mon tour d'être impertinent : pour faire simple, la Cour des Comptes c'est le service d'audit interne de l'entreprise France, un service de luxe bien sûr, vu le coût de ce beau monde. Mais ne chipotons pas, nous sommes un grand pays, et que le retour sur investissement soit quasi-nul, qu'importe ! L'important c'est que nos magistrats publics se piquent de juger, du haut de leur haute compétence sur tout et n'importe quoi, les politiques elle-même. Du fond d'un bureau, penchés sur leurs liasses, maniant avec aisance le politiquement correct, entonnant sans nuance des antiennes éculées du style " la réduction de l'accès à l'alcool, stratégie pourtant efficace pour en diminuer la consommation, n'a pas progressé " (merci de me faire parvenir les sources), nos procureurs à charge feraient bien de réclamer haut et fort des enquêtes lourdes sur les réalités de l'alcoolisme de la France d'aujourd'hui. Le fléau de l'alcoolisme mérite mieux que ce brouet convenu simple écho du sanitairement correct. Quelques économies sur les campagnes dispendieuses et inefficaces ajoutées à une saine gestion des zinzins, l'ANPAA par exemple, dégageraient sans nul doute des moyens pour ce travail de fond.

En vous remerciant par avance, monsieur le 1er Président, d'avoir supporté ma prose alcoolisée, je vous prie de croire à mon entier et actif dévouement à la cause d'une bonne gestion des deniers publics et à mon engagement sincère à tout ce qui fera régresser l'alcoolisme qui est la pire contre-publicité à l'égard du divin nectar que je défends avec mes petits moyens. A vous revoir autour d'un verre pour aller au-delà de ces quelques mots. Bien à vous.

Jacques Berthomeau

  

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