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15 août 2007 3 15 /08 /août /2007 00:03

Cette histoire est extraite d'une nouvelle de Frédérique Echard : Le balcon publiée dans un livre collectif Les dernières nouvelles de Rome publié pour les cinquante ans de la librairie française de Rome Piazza San Luigi de' Francesi, 23 par La Procure, Palombi et la Librairie Française de Rome. Je la dédie à ceux de mes lecteurs qui ont séjourné à Rome. La narratrice y vit  près de la via Sforza sur un boulevard assez fréquenté qui relie la place Cavour à celle du Risogimento. Avec des grands immeubles du XIXième et des trottoirs bordés d'arbres il fait très haussmannien.  De ce boulevard souvent arpenté elle ne voyait rien, sauf un balcon installé au premier étage d'un palazzo cossu. Ce balcon, profond et long " dévidait de bout en bout une ballustrade en fer forgé délicatement ouvragée et arborait, neuf mois sur douze, une végétation dense et emmêlée, d'où émergeaient dans la gamme des verts un jasmin, un laurier rose ou un bouguinvillée..." Ce balcon la fascinait.


Elle s'étendra sur deux chroniques. Imprimez-les pour les lire à la fraîche en buvant de "l'Est ! Est !! Est !!!" qui est un vin blanc de Montefiascone, près du lac de Bolsena. Les points d'interrogation ne sont pas toujours portés sur les étiquettes mais c'est un vin célèbre à Rome, sec ou plus souvent doux, jaune foncé, même si ce n'est pas un grand il faut le goûter rien que pour sa légende. Sa légende veut qu'il remonterait à l'an 1111 au cours duquel un certain évêque Fugger fit un voyage d'Allemagne à Rome. le prélat très pointilleux sur le chapitre du vin envoya un de ces hommes de confiance goûter les vins dans toutes les auberges et les tavernes de la route. S'ils lui semblaient bons l'homme devait écrire près de la porte "est" et dans le cas contraire "non est". Bref tout se passa normalement jusqu'à ce qu'il atteigne Montefiascone. Là, à peine eut-il goûté le vin qu'il ressortit en trombe écrire sur le mur : "Est ! Est !! Est !!!". Selon la légende, lui et son maître en burent, heureux jusqu'à leur mort.


"     Et voici l'histoire étonnante que mon mari me raconta...


      Au-dessus de la boîte de nuit vivait depuis des lustres une vieille dame.
    Quand le club avait ouvert, elle n'avait pas apprécié ! Ce qui la dérangeait le plus, ce n'était pas le fait que les murs de son appartement, à partir de 23 heures, se missent à vibrer au rythme abrutissant de la musique. Non, le plus gênant, c'étaient les stations prolongées des garçons et des filles qui attendaient pour entrer, ou qui prenaient le frais avant de se replonger dans l'atmosphère moite et enfumée de la discothèque.


    De sa chambre donnant sur le boulevard, que sa fenêtre soit fermée ou non, la vieille dame entendait leurs éclats de voix et de rires comme au milieu d'eux. Ils montaient jusqu'à elle par vagues, certaines immenses, d'autres plus ouatées. Le flux et le reflux de cette marée de sons duraient sans s'interrompre jusqu'à l'aube. Au lever du soleil, il n'était pas rare de voir encore quatre ou cinq personnes conversant sous le balcon aussi paisiblement que si la soirée commençait et qu'elles n'eussent pas dû, bientôt, rentrer chez elles.


     Difficile de dormir dans ces conditions. C'est l'argument que la vieille dame avança, par l'intermédiaire de son avocat, dans le procès qu'elle fit aux propriétaires de la boîte de nuit.


     Comme toute chose en Italie, l'affaire s'éternisa. Mais la dame n'en avait cure, elle était riche, désoeuvrée, patiente. Et après une longue procédure, un matin d'avril, le juge - que le retour du printemps avait peut-être rendu sentimental - délivra un avis d'expulsion de la discothèque.


     La vieille dame en fut si heureuse qu'elle alla sur-le-champ se saisir dans le buffet du salon, de la bouteille de Grappa à laquelle personne depuis la mort de son mari, ne touchait plus. Elle s'en servit non pas un, mais plusieurs verres et si elle ne dormit pas la nuit suivante, les clients du club n'y furent pour rien : elle avait somnolé l'après-midi entier.


     Puis elle recommença à attendre.

 

à suivre demain

 

 
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14 août 2007 2 14 /08 /août /2007 00:03

Que mes nombreux adorateurs du Gard se rassurent, ma chronique du jour n'annonce pas l'irruption sur la scène déjà bien encombrée des présidents divers et variés d'un ex-JV atteint par la limite d'âge qui voudrait prendre le TGV pour se propulser dans un fauteuil inoccupé par un PQ qu'aurait oublié, à l'insu de son plein gré, qu'on l'y avait nommé par inadvertance et non pour ses compétences. Loin de moi une telle perfidie, moi aussi, à trois reprises, j'ai occupé le fauteuil de président : de l'association la Journée Nationale du Cheval (président fondateur), de la SIDO (président liquidateur) et du BNIC (président transformateur) donc je ne saurais me désolidariser de la corporation même si j'ai toujours quitté ces fonctions en des temps raisonnables. Bref, ce matin mon intention est de vous entretenir sur un merveilleux livre d'Eric Orsenna : Voyage aux pays du coton petit précis de mondialisation chez Fayard. Un bijou d'écriture alliant plaisir de la lecture et réflexion, loin des charges lourdingues des alter ou des plaidoyers enluminés des adorateurs du laisser faire laisser passer on découvre un produit au travers des femmes et des hommes qui le font, des pays qui en vivent, des traditions et des dérives, des contradictions, tout ce qui nous relie les uns aux autres. Lisez-le, chers lecteurs, comme moi, j'en suis persuadé, vous l'aimerez comme un bon vin élaboré avec soin, sans prétention.

La scène se passe au Brésil, dans une petite ville fondée par des réfugiés sudistes de la guerre de Sécession : Americana dans un atelier d'une grande usine textile.
" Tout de suite, le directeur tient à préciser :
- Nous ne craignons pas la Chine.
Et il enchaïne aussitôt sur la ville de Nîmes. Un flot de questions :
- Se trouve-telle bien en France ? Combien d'habitants y vivent ? Y fait-il froid ou chaud ? Y élève-t-on du bétail ? Y monte-t-on à cheval ?
Je réponds comme je peux, sans parvenir à masquer mon étonnement : pourquoi une telle passion pour cette cité du Gard ?
C'est ainsi que j'apprendrai le drôle de voyage et la réussite planétaire de deux petits mots, le premier de deux syllabes, le second d'une seule.
Au XVI e siècle, certains tisserands du midi de la France avaient créé une étoffe particulière, mélange de soie et de laine, tissée en diagonale. très vite elle acquit la célébrité sous le nom de "serge de Nîmes", par référence au lieu où elle avait vu le jour.
Les tisseurs anglais cherchaient à donner de la valeur à leurs produits. La méthode française de tissage leur plut. Ils décidèrent de l'adopter et aussi de lui fabriquer un nouveau nom. "Serge" pouvait être oublié, puisque la laine et la soie n'étaient plus employées. Quant à l'origine, "de Nîmes", on allait la contracter pour plus de commodité. Le mot denim était né, qui allait bientôt désigner les cotonnades les plus sommaires et les plus solides.
Pendant ce temps, les marins de Gênes utilisaient des pantalons particulièrement résistants, faits d'un mélange de coton et de laine ou de lin. Leurs collègues français les adoptèrent et les baptisèrent gênes, qui devint jean. Un peu partout, en France et en Angleterre, on se mit à tisser ce produit miracle.
Longtemps, denim et jean coexistèrent. Ils ne se mêleront qu'après avoir traversé l'Atlantique. Dans la colonie qui veut s'émanciper de l'Angleterre, on ne s'embarasse pas de ces subtilités. Le jean est fait avec le tissu denim et devient la tenue des pionniers."

Le sujet de cette chronique permet de compléter mon descriptif du héros de l'Hérault, manque la chaîne en or, soyez patiente Laetitia ça va venir un jour et pour vous faire patienter je vous conseille de vous taper un petit gorgeon de Costières de Nîmes (le site dusyndicat est en cours de fabrication)

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13 août 2007 1 13 /08 /août /2007 00:05

Cette chronique est la dernière de la série sur la typologie des cabinets ministériels de Guy Carcassonne.

Les lieutenants

    Quoi que ce soit le système le plus approprié, ce n'est nullement le plus répandu. Tous les membres du cabinet sont choisis par le ministre lui-même, éventuellement à partir de propositions qui lui sont faites par le directeur mais auxquelles il ne souscrit jamais sans rencontrer d'abord les intéressés.
    Quand il les a recrutés, il les investit de sa confiance une fois pour toutes. Elle leur sera acquise jusqu'à ce qu'il la leur retire en les congédiant.
     Le directeur de cabinet est moins un commandant qu'un animateur et si, pratiquement, tout passe par lui, ce n'est pas pour qu'il exerce une censure mais uniquement pour qu'il soit toujours informé et puisse remplir son propre rôle de conseil et de coordination.
     Les conseillers, entre lesquels est opérée une claire répartition des compétences, dont largement délégataires des pouvoirs du ministre. Leur parole vaut la sienne. Il leur a défini une ligne de conduite générale : à eux de savoir comment la mettre en oeuvre, quitte, lorsqu'ils ont un doute, à demander à en référer, quitte encore, lorsqu'ils commettent une erreur, à en assumer la responsabilité vis-à-vis de leur ministre (lui seul supporte le coût politique des fautes de son cabinet) dont les conséquences pourront aller de la remontrance au limogeage.
      Matériellement, ils tiennent réunion toutes les semaines, souvent tôt le matin, et bénéficient de deux grans privilèges. D'une part ils exercent une influence réelle sur l'agenda du ministre en lui indiquant des audiences à accorder dont ils déterminent le délai ; d'autre part ils ont à tout moment accès au bureau du ministre, ces deux facultés leur étant consenties grâce à la certitude qu'ils n'en abuseront pas.
     Entre eux, la rivalité, qui caractérise les valets, tourne à l'émulation et, dans certains cabinets, des séminaires réguliers fourniront l'occasion d'une réflexion de fond sur le long terme que le rythme quotidien interdit habituellement.
     Dans la limite de l'emploi du temps, enfin, les déjeuners sont souvent pris en commun et permettent la circulation rapide de l'information, tandis que seront saisies toutes les opportunités de se retrouver tous ensemble, avec le ministre et dans son bureau, pour, lorsque la pression diminue légèrement, partager, verre en main, un instant de détente et resserrer les liens humains au sein de l'éuipe.
    Cette formule présente nombre d'avantages. Se sentant pleinement responsables, les membres du cabinet sont tout aussi pleinement mobilisés. Leur rôle est assez gratifiant pour assurer leur dévouement. l'autorité qu'ils exercent sur les services étant à la mesure de la confiance que le ministre leur accorde, ils peuvent travailler dans de bonnes conditions, sans crainte de désaveu (sauf définitif) ou de court-circuit.

Le verre à la main, tout est dit...

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12 août 2007 7 12 /08 /août /2007 00:34

 

Sylvie partait en fumée dans la solitude et l'indifférence. D'un coup d'un seul, sous la morsure violente des flammes crachées au coeur de cet étrange four, elle redevenait poussière, rien qu'un petit tas de cendes chaudes versé dans une urne anonyme par l'employé du crématorium ; sans odeur ni volute, la technologie effaçait sa trace de chair, la réduisait à l'épaisseur d'une ligne grise. Voir la gueule de ce four crématoire engloutir la boîte de bois blanc posée sur un chariot à roulettes, avec lenteur, me parut le seul instant de solennité de cette cérémonie sans rituel, pure formalité administrative. Dans le troir métallique de l'Institut Médico-Légal, étiquetée au gros doigt de pied, ensachée dans une toile rugueuse, son corps supplicié, rafistolé, tel un mannequin de son, réduisait en miettes mes beaux souvenirs d'elle. La reconnaître, l'identifier, cruelle procédure accomplie aux côtés de ces hommes en blanc, étranges médecins de la mort, froids, précis et affairés, qui à la pointe de leur scalpel traquaient les stigmates de l'éternelle barbarie des hommes. Ici, en bord de Seine, dans cette bâtisse trapue et laide, on charroyait indifféremment aussi bien les malchanceux, les exclus, les paumés, tous ceux qui avant leur mort violente survivaient dans la marge, sans nom ni staut, que les soi-disant heureux frappés par la main meurtrière d'un amant, d'un ivrogne, d'un mari ou d'un peu tout ça à la fois. Curieux mélange sur les tristes registres de la lie et du bon grain ; comptabilité sinsistre des futurs locataires de la fosse commune. En contemplant la fermeture des lourdes machoires de la porte de fonte du four je laissais traîner mes pensées dans l'anonymat de ce no man's land administratif, forme la plus anonyme du vide afin de m'épargner de songer à mon avenir.

Mon effroi muet devait impressionner Dornier. En retrait, il affichait la dose de bons sentiments prescrite en de telle circonstances. Après tout, il avait rempli son contrat. J'étais coincé. En choisissant le crématorium du cimetière Montparnasse, au plus de notre gare d'arrivée, confusément, j'acceptais mon sort. Cette fois-ci je lâchais prise. En peu de mois, moins de six, mon avenir, en deux boucles aussi brèves que brutales, de bel et grand basculait dans le sordide ordinaire. Des mots de Gainsbourg, avec son génie des mots troubles - troublants comme des pieds pataugeant dans un fond vaseux souillent l'eau claire - m'emplissaient la tête, revenaient en boucles : les sables émouvants. Je m'enfonçais. Je m'enfouissais. Je disparaissais. Avant la mort de Sylvie tout restait encore possible. A tout moment je pouvais m'esquiver, faire un pas de côté, retrouver la terre ferme, la vraie vie. Me remettre à marcher droit en cessant de me complaire dans le malheur. Certes, la perte de Marie me privait d'un point d'appui, de mon roc. Tout aurait été plus difficile mais en me laissant porter par Sylvie j'aurais trouvé la force de m'extraire de ce purgatoire. La rémission restait ouverte. Je vivais un temps de latence. Maintenant, avec cette urne dans mon sac, sur le quai 3 de Montparnasse, après avoir accepté cet ignoble contrat, je filais droit en enfer. 

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11 août 2007 6 11 /08 /août /2007 00:01

La nuit tombe sur Pigna. Sur la terrasse, toutes les tables sont occupées et,ce soir, nous avons droit à un fond musical de qualité avec Tribal Poursuite www.tribalpoursuite.fr , une formation de jazz bordelaise (beau clin d'oeil pas vrai). J'ose l'écrire : une enclave de paradis. Le menu annonce : "des producteurs amoureux de leur terre, s'inscrivant dans la tradition et l'authenticité. Des produits simplement mis en scène, aux saveurs recherchées, aux touches sauvages..." Mes amis de Sève, Marc et Patrick, seraient déjà en lévitation, ce qui, pour le second nommé, optimiserait ses dons de guide. Le chef, Jean-Luc Debeuf, passionné de légumes rares et de jardinage, et qui cuisine les produits de son potager, nous propose une mosaïque de plats à 49 euros : mise en bouche, entrée, plat et dessert à choisir sur la carte. Sans concertation, notre choix se porte à l'identique sur :


- Petites langoustines de pêche locale, rôties en coque, huile d'olive et fleur de sel
- Jarret de veau de "Nesa" cuit 8 heures en cocotte lutée, légumes en gros morceaux cuisinés au lard de prisuttu
- Clafoutis aux abricots et amande, sorbet abricot.
Reste, que boire ?
Les vins proposés au verre ne me séduisent pas. J'aurais pourtant bien aimé goûter le vermentinu d'Antoine Arena mais je ne vais pas me siffler une bouteille entière sur les langoustines. Sur les conseils de la patronne mon choix se porte sur un Patrimonio rouge 2004 de Muriel Giudicelli, un vin de vigneronne récoltante avec logo des VIF (et oui, cher Eric et cher Michel Issaly je sais donner les coups de chapeaux...)
 en voie d'obtenir la certification AB pour ses vignes. Les femmes corses ont du caractère, le vin de Muriel, en dépit de ses 14°, se pare de tout ce qui fait le charme de la féminité 
 corse-juillet-2007-216-1.jpg

Sans tomber dans le dithyrambe, de toute ma vie je n'ai mangé de langoustines aussi succulentes - et par ma chère maman qui m'a élevé à la langoustine du dimanche j'estime être une référence - l'alliance de la fleur de sel et de l'Oru di Balagna exhaussait la finesse de la chair de ces mini-langoustes juste pêchées. C'était péché mortel : à damner un saint, le chemin de Damas d'un libertin. Le nectar de Muriel s'alliait bien. Les jazzeux bordelais s'inscrivaient avec justesse dans le calme et la magnifiscence du lieu. Nous étions heureux. Puis vint le veau de "Nessa", exhalaisons fortes d'herbes du maquis, fondant exquis d'une viande choyée et respectée et des carottes au goût de carotte (carottes de sable me précisera-t-on). Chapeau bas, je m'en fus aux cuisines le dire au chef qui m'offrit le menu. Du nectar de Muriel y'en avait plu. Il avait tellement plus à ma compagne qu'elle se sentait plus proche que d'ordinaire des étoiles. Fans de clafoutis, celui-ci se classait dans les grandes douceurs qui vous réjouissent le coeur. Vraiment, chers lecteurs, si vous passez par Pigna, offrez-vous U Pallazu et, couchez-y pour vous laissez aller à tous les beaux péchés du monde autour de sa sainte table...   

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10 août 2007 5 10 /08 /août /2007 00:02

La Balagne, au temps où je suivais le dossier de l'agriculture corse, je l'avais à plusieurs reprises survolée en hélicoptère mais je ne l'avais jamais parcouru au niveau du plancher des vaches - et dieu sait que la vache corse dument étiquetée à l'oreille fait partie intégrante des routes de l'île de Beauté - alors, cette année, au petit matin, cap sur Belgodère par la nationale Ajaccio-Bastia via Corte. La route qui grimpe jusqu'au col de Vizzavona serpente dans un paysage grandiose. Ici, dans ce pays, tout est d'une si étrange et si inquiétante beauté qu'on s'attend à voir surgir, au détour d'un virage, des bandits d'honneur. Petit déjeuner sur la place de Belgodère face à l'église St Thomas fondée en 1269 par Andrea Malaspina. Le soleil monte,  dur, à la sortie de Speloncato plongée dans la Balagne montagneuse, végétation rase, brun rouge, pas une âme qui vive à l'horizon. Arrêt déjeuner sous une tonnelle, le propriétaire italien nous propose un spuntinu, le casse-croute du berger avec une Pietra. Petite sieste à l'ombre puis, de nouveau la route jusqu'à Olmi Capella, où, surprise, à la sortie du village se dresse fièrement un bâtiment imposant "U Stabilimentu Battiglini" cadeau d'un philanthrope, Noël Battiglini, à sa pieve d'origine.


 

L'histoire est belle pour être contée. Battigliani qui avait quitté très jeune la Corse, avec l'intention de ne jamais y revenir, transite d'Italie vers l'Egypte où se creuse le canal de Suez. Il vend du sucre aux ouvriers musulmans grands consommateurs de thé. Après 52 ans de labeur il se trouve à la tête d'une confortable fortune. Il décède au Caire en septembre 1887. Un mois après, le maire d'Olmi-Capella est informé des dispositions testamentaires : Battiglini lègue 78000 francs-or pour la construction d'un groupe scolaire. " J'ai constaté qu'avec l'instruction on peut réussir alors je veux que les Ghjunsaninchi s'instruisent." aurait-il déclaré pour justifier son geste. Le bâtiment aurait du s'élever au centre du village mais au terme de tractations politiques obscures il est érigé au lieu-dit "Aghje a San Martinu" sur un terrain offert par le capitaine Antoniotti. Tout cela explique les pertes de temps puisque l'inauguration n'a lieu qu'en 1903. " U Collegiu Battaglini" offre à la population : 6 classes, 6 appartements de fonction, 3 cours de récréation, un laboratoire de sciences, une salle de spectacle et des locaux administratifs. Après la guerre 14-18, dirigé par le couple Giudicelli, le collége se fait une belle réputation et accueille jusqu'à 300 élèves en provenance des nombreux villages environnants. En 1960 ils ne sont plus que 80 ; en 1998 une classe unique regroupait seulement 8 élèves ; en 2004, 15 élèves sont répartis de la maternelle au CM2. Mais, comme l'histoire est un éternel recommencement, un autre enfant du pays, Robin Renucci, avec l'implantation de son école de théâtre de l'ARIA, redonne une seconde vie à "U Stabilimentu Battaglini". Mais ceci est une autre histoire...


 

La première journée se termine à Pigna où nous logeons dans une très belle demeure restaurée du XVII e, en plein du village, U Pallazu. Accueil chaleureux et tour de la maison avec le propriétaire. Tout y est d'un goût très sur, pas une fausse note sans tomber dans la caricature papier glacé type maisons et jardins, ça vit. La chambre, sous les toits, est à l'image de l'ensemble : on a envie de s'y installer pour écrire un roman. Ce n'est pas donné mais, par rapport au kit Sofitel ou Hyatt, le prix est largement justifié : 140 euros. Rien que la terrasse avec vue sur la mer, là où nous allons dîner ce soir, vaut une large part de ce prix. Pour les plus jeunes d'entre vous, qui voudraient verser dans le romantisme post-mariage, U Pallazu clicquez sur ce lien vous ne serez pas déçu www.hotel-palazzu.com propose deux suites à 200 euros. Comme j'ai été un peu long ce matin je vous réserve la suite pour demain sur une fille du pays : une vigneronne de Patrimonio qui fait du vin corse au féminin. Patience vous en aurez pour votre argent chers lecteurs.

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9 août 2007 4 09 /08 /août /2007 00:01

 

 













Citation de Pierre Dac, bien sûr, en exergue de la vie d'un joyeux passe-frontières, jovial, à l'intelligence jubilatoire, buveur, noceur et scientifique remarquable : Georges Gamow, un des physiciens des années 20, ces conquérants du minuscule avec le plus connu Albert Enstein, les inventeurs de la physique quantique, des créateurs d'une "poésie sophistiquée " . Son portrait, ainsi que six autres est brossé, avec un humour et une légèreté formidables, par Etienne Klein, professeur à l'Ecole Centrale, dans un chouette petit livre :" Il était sept fois la Révolution Albert Enstein et les autres..." collection Champs Flammarion. A lire absolument chers amis, ça fait du bien à l'âme et à tout le reste. Si j'ai choisi Gamoff c'est que c'est l'un de nos frères, le mien sûrement. Comme le souligne E.Klein " Une rumeur qui a la vie dure prétend que les physiciens théoriciens ne sauraient avoir de vices sensuels, qu'ils évitent la ripaille, ont un coeur de pierre ponce, s'enferment de leur plein gré dans des tours d'ivoire, refusent divertissements et plaisirs, synonymes de de démission de la raison et d'abandon aux forces obscures. Gamow, lui, a bu (de la vodka, surtout, et beaucoup), mangé, fumé et festoyé plus souvent qu'à son tour. Il a ajouté de la vie à ses années plutôt que des années à sa vie. Le 19 août 1968, juste avant d'expirer, il déclare sans regrets : " Finalement, mon foie paie l'addition." Que voulez-vous, chers lecteurs, moi je craque. Deux anecdotes, tiré du livre, donnent toute sa dimension à ce savant hors norme.

" A l'âge de douze ans, il utilise le microscope offert par son père pour mettre à l'épreuve le dogme de l'eucharistie. le pain devient-il chair ? Le vin devient-il sang ? Y a-t-il vraiment transsubstantiation, comme le proclame le dogme ? Il existe sûrement un moyen d'en avoir le coeur net. Le jeune Gamow réfléchit à un protocole expérimental qui soit potentiellement décisif. Un beau matin, muni d'idées assez naïves sur ce que signifie l'eucharistie, il trempe un morceau de pain dans le vin, puis saisit un couteau et prélève un petit morceau...de sa propre chair ! Ayant disposé chacun de ces éléments dan sune soucoupe qu'il laisse à la cuisine familiale, il se rend à la messe et y communie en s'arrangeant pour conserver dans sa bouche un peu du pain imbibé de vin que lui a tendu le prêtre. Il court ensuite à la maison y comparer les trois échantillons à l'aide du microscope. Mais il constate aucune différence entre les deux morceaux de pain, ni de ressemblance entre eux et le morceau de chair. La résolution spatiale de son instrument ne lui permettant pas de distinguer les cellules sanguines, sa démonstration demeure incomplète mais elle suffit à le détourner de la religion. Bien plus tard, un tel sens critique le poussera à rejeter l'orthodoxie marxiste et à fuir son propre pays."  

La seconde anecdote concerne la période, 1931, où, attaché à l'Institut Polytechnique de Moscou, il n'hésitera pas avec son collègue Landau à brocarder les vieilles barbes staliniennes, dans une lettre à leur directeur, ce qui leur vaudra d'être jugés par les autres membres du labo et bie sûr condamnés pour leurs idées "déviationnistes". Courageux avec humour, ça s'applaudit. " Après la seconde guerre mondiale, au plus fort de l'affaire Lyssenko, Geoge Gamow, alors installé aux USA, ridiculisera d'une phrase les thèses de ceux qui affirlmaient l'hérédité des caractères acquis : " Quand un enfant ressemble à son père, ils disent que c'est en vertu des lois de Mendel ; quand il ressemble au facteur, ils disent que c'est un effet de l'environnement. "

 

 

 

 

 

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8 août 2007 3 08 /08 /août /2007 00:32

Paris le 8 août 2007

 

Madame la Commissaire,

 

Je suis déçu. En vous, femme du Nord soucieuse des consommateurs, j'avais placé des espoirs immodérés : j'espérais que votre réforme dégraisserait le mammouth viti-vinicole survivance d'un temps où le vin - le gros rouge colonial puis transalpin - se transportait par pinardiers, trains entiers pour être assemblé en plein coeur de Paris à Bercy. Notre divin nectar y était traité comme un vulgaire boisseau de blé, bref comme une commodité - commodity pour vous chère Mariann - avec ses contrats de stockage à court et long terme, sa garantie de bonne fin et sa palanquée de distillations en tout genre.

Ce fut ensuite la "guerre du vin" menée par une poignée d'irréductibles de notre Midi : Montredon, l'Ampelos à Sète, des morts et, en 1986, un comble pour des vins médecins, du méthanol assassin en provenance d'Italie...

Produire, produire, pour rien, alors nous avons, à Dublin, avec Michel Rocard, décidé de la double peine : l'arrachage et la distillation obligatoire à bacs prix pour les hauts rendements (DO). En clair, on nettoie la base, on brise la productivité, et ce fut le triomphe des VQPRD. Notre Midi releva la tête et le défi.

En 1999, en une douce euphorie, votre prédécesseur Frantz Fichsler, raffina, sembla coller à la nouvelle demande des marchés en expansion. Dans les faits, par une reconversion primée à tout và, il permit à la Mancha et au sud de l'Italie de créer de nouveaux excédents. En France, les Inaoistes se laissèrent aller, sous la houlette d'un président débonnaire et laxiste, à planter, à gonfler les rendements, à faire du vin n'importe comment, à nous amener à demander des aides pour distiller certaines de nos AOC. Je comprends parfaitement que vous disiez stop, c'en est assez et que vous nous demandirez des comptes mais, pour autant, balancer le mammouth à la mer ne me semble pas une réponse adaptée à la situation de la viticulture européenne.

 

Alors, me direz-vous, de quoi me plains-je ?

Cette OCM n'a jamais été à mon goût et votre réforme met un terme aux débordements, elle passe par-dessus bord, et les hectares, et les distillations, et toute une floppée de règlementations, l'heure est à la libération; à dessein, je n'ai pas écrit à la libéralisation chère madame.

Why ?

Parce que votre dessein n'a pas grand chose à voir avec la réalité et la spécificité de la vigne et du vin : plante pérenne, cycle long, produit alcoolisé non indispensable à la nutrition, stockable, produit défini par son processus d'élaboration, produit à fort contenu d'image, fortement territorialisé (...) Autant de caractéristiques qui ont induit un contenu règlementaire particulier : régime des plantations, aides à l'abandon et à la restructuration, panoplie oenologique restreinte et spécifique à l'UE, la distinction VQPRD et VDT à IG bien avant les AOP-IGP, un règlement étiquetage spécifique traité dans un niveau de Conseil des Ministres différent de l'étiquetage général, réservation des mentions valorisantes aux vins à IG... Cet ensemble, qui a fait ses preuves, et nous ne sommes pas encore à la rue, même s'il touche à ses limites méritait mieux que l'application étroite du catéchisme en vogue dans vos services.

 

En effet, derrière vous j'aperçois le très sérieux Jean-Luc Demarty, que j'ai pratiqué au temps des socialos-communistes post-81, le patron de la DG VI, un delorien de stricte observance, ce que notre belle administration des Finances fait de mieux en  parangon de la rigueur. Lui, et ses services disciples de la vulgate de Milton Friedmann et de ses zélotes, n'ont de cesse de jeter la PAC en général, et l'OCM vin en particulier, par-dessus bord. Notez bien, chère Mariann, que je ne me situe pas dans les défenseurs forcenés de la PAC à la française, puisqu'en 1993 j'ai été de ceux qui ont poussé à son changement de nature (Dieu que mon facétieux Ministre a, en ce temps-là, déclanché de saintes colères de ce cher Jean-Luc qui conseillait, sous la houlette ferme de Pascal Lamy, notre Jacques Delors ami de ce cher Louis Mermaz).

D'accord pour dépenser moins, pour dépenser mieux, mais je doute de la capacité de vos collaborateurs de bien gérer. En effet, ce qui met en joie vos dignes fonctionnaires ce sont les leurres environnementaux (ils se tamponnent comme de leur première chemise de la viticulture durable), le découplage et son sabir Omcéien, la couleur des boîtes : verte, bleue, orange, le relifting du développement rural, l'alourdissement de la contrainte budgétaire, le modèle intégré du Nouveau Monde... Quand je pense qu'à Vinitech, un de vos porte-paroles s'est permis de faire la leçon aux négociants bordelais en les tançant sur leur incapacité à vendre du vin. Faut pas pousser le bouchon trop loin madame la Commissaire...

 

Alors me direz-vous - je me leurre moi aussi car cette lettre ne recevra jamais de réponse - que me reprochez-vous au juste monsieur le donneur de leçons ?

Rien madame la commissaire, si ce n'est que vous avez amusé la galerie, que vous avez réussi l'exploit de souder le front de tous les conservatismes, que vous n'avez pas su vous appuyer sur une expertise indépendante, que vous vous exonérez trop facilement de la part de responsabilité de vos services dans les dérives de gestion de l'OCM, que vous avez une vision tronquée de l'industrie européenne du vin, qu'en définitive, ce qui compte pour vous c'est de diluer le secteur dans la machine paperassière de Berlaymont avec l'illusion du deuxième pilier, que vous n'avez pas su profiter des perches tendues par certains producteurs pour responsabiliser les régions réservoir d'une ressource vin capable de relever le défi des vins du Nouveau Monde...

Vous  confiez les clés de la régulation du marché aux metteurs en marché, ce qui somme toute paraît normal puisque leur fonction est d'être à l'écoute de celui-ci.

En ont-ils les moyens ?

S'en donneront-ils les moyens ? 

Je ne le crois pas, leur rentablité n'a pas à se soucier des contraintes sociales et territoriales. De plus, la volatilité des goûts des consommateurs pour des produits où le nouveau vieilli vite provoquera des ajustements douloureux, des tensions brutales et débouchera sur un affrontement de type producteurs de matière première et multinationales.

Belle avancée pour le Vieux Monde que de copier une viticulture intégrée cousine germaine de l'agriculture productiviste tant décriée. Sans vous offenser, chère Mariann, une telle orientation méritait mieux qu'une pseudo-réflexion, que des colloques fumeux et de beaux discours. Dans mon beau pays, qui adore donner la leçon au monde entier, j'ai fait l'expérience, à l'instar de nos grands concurrents, de l'animation d'une réflexion stratégique. Pour du beurre, certes, mais vous où est-elle votre réflexion stratégique pour l'industrie européenne du vin ?

Nulle part, car c'est plus commode pour justifier des politiques malthusiennes. Le contrat et la responsabilité sont des gros mots pour vos fonctionnaires si tatillons lorsqu'il s'agit de leur propre paperasse. En son temps, le commissaire Lamy, négociateur à l'OMC, m'avait cuisiné toute une matinée sur le sujet vin, pour comprendre me disait-il (sous entendu ce que lui racontait la DG VI ne le convainquait pas). Ce qui me navre c'est que vous, et vos dignes fonctionnaires, semblez ne rien comprendre ou pire, que vous nous anesthésiez pour mieux faire passer votre potion amère.

 

L'heure est à la négociation au sein du Conseil agricole. Qu'en sortira-t-il ?

Je ne sais !

Mais, ce dont je suis certain, madame la Commissaire, c'est que les occasions perdues ne se retrouvent jamais : " Trop tard ! " comme disait Mac Arthur. Par vos méthodes vous renforcez le clan des eurosceptiques, vous alimentez les populistes de tout poils, vous ne faites rien pour rendre au politique - car vous êtes une politique chère Mariann - une aura perdue.

Le secteur du vin dans l'Union est une grande affaire qui méritait mieux que l'agitation d'un chiffon rouge : l'arrachage, la mise aux normes de la doctrine de la nouvelle PAC et des économies de bout de chandelle. L'heure n'est plus aux propositions mais, comme il n'y a que les sots qui ne changent pas d'avis, et que bien sûr, chère madame, vous avez fait la démonstration d'une intelligence vive, il est encore temps d'infléchir votre ouvrage mal fagoté. Très immodestement, et pour de rire, je me tiens à votre disposition, et à celle de ce cher Jean-Luc Demarty, pour contribuer à l'accouchement d'un compromis à la hauteur des potentialités et des ambitions de la viticulture européenne.

 

Dans cette attente, en vous priant d'excuser, ma liberté de ton, ma mauvaise foi manifeste et mon vocabulaire parfois outrancier, je vous prie, madame la Commissaire, d'agréer mes hommages les plus respectueux.

Jacques Berthomeau

 

 


PS : comme je suis un incorrigible je ne peux m'empêcher de vous confier que j'eusse préféré que vous vous prénommiez Bibi, Liv ou Ingrid en hommage à votre grand compatriote Ingmar qui vient de nous quitter.

Traduit en californien votre discours chère Mariann donne ça clicquez sur ce lien et lisez : www.calwineries.com/blog/greg-kendall-ball/-46k

Note en bas de page : mes propos n'engagent que moi bien sûr et toute publication de cette lettre est soumise à mon autorisation...

 

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7 août 2007 2 07 /08 /août /2007 01:02
" Ecoutons les spécialistes qui décrivent le bouquet du vin en termes de fruits, de fleurs, plantes, matières minérales... Depuis  des millénaires qu'ils chantent le vin, ils n'ont pas trouvé de qualificatifs qui lui soient intrinsèques : tous les adjectifs font référence à des produits qui n'ont rien à voir avec le raisin ! Insistons : pour d'autres perceptions, nous avons des mots spécifiques - sucré, amer, salé, acide, pour le goût -, grave, aigu, sourd et autres pour le son -, rêche, lisse, mou, dur pour le toucher... Pour les arômes du vin, rien. "

Quand j'ai lu ça, je me suis dit : "oh, là là, là là..." y'en a des qui vont pas être contents qu'un physico-chimiste de l'INRA, un certain Hervé This, du laboratoire de chimie du Collège de France et j'en passe pour faire court, créateur de la gastronomie moléculaire (ouille, ouille, ouille...) aligne autant de gros mots sur leur fond de commerce et, comme j'ai l'esprit mal tourné, ça m'a rappelé le pauvre transfuge soviétique assaisonné par la CIA, à grandes lampées de LSD, que j'ai vu sur l'écran en plein air de Sagone (en VF sans sous-titres corses) dans le film de De Niro "Raisons d'Etat" qui, avant de se jeter par la fenêtre, dit à ses tortionnaires à propos de la menace soviétique : " vous savez bien que nos chars sont nazes, que nous manquons de pièces détachées... mais vous avez besoin de nous pour faire peur afin que votre complexe militaro-industriel continue de faire des affaires..." Comme d'habitude je pousse le bouchon un peu loin mais, comprenez-moi, pendant un mois sur l'Île de Beauté, la campagne de pub de l'interpro (très utile puisqu'en Corse on ne trouve que des vins corses) me disait que grâce aux nectars locaux j'allais aimer les bouchons ; plus sérieusement les mots du vin pour la dégustation ne me touchent pas, ils me gonflent, ils sont pauvres,  et surtout ils ne permettent pas de faire une lecture claire de ce qu'ils veulent décrire. C'est la bouteille à l'encre si je puis m'exprimer ainsi, en effet y'a ceux qui causent qui ne se comprennent même pas entre eux et ceux qui les entendent en opinant du chef pour ne pas passer pour de sombres ignares qui ne comprennent rien au sabir de ceux qui savent. Incommunicabilité quand tu nous tiens ! Pratique pour entretenir un fond de commerce pour gogo snob ou bobo smogg... Je repasse la parole au professeur This, car lui, au contraire de moi, c'est un monsieur sérieux qui s'appuie sur les 54 étudiants testés à la Faculté d'oenologie de Bordeaux (lire l'article cité en référence ci-dessous).

" Le fait est patent : la couleur d'un vin détermine son appréciation olfactive, et les gourmets sont sous le coup d'une l'illusion sensorielle : ils sentent le vin, font un acte conscient de détermination sensorielle (olfactive), et énoncent une perception en utilisant des descripteurs, mais la perception est déterminée par la couleur et non par la perception olfactive proprement dite. L'analyse de cette illusion conduit à d'autre examens, qui révèlent d'autres cas où la couleur influence la description verbale de la perception olfactive. Par exemple, les vins vieux, tuilés, ont généralement des arômes d'orange ou de marron, de fruits secs, et les vins rosés sont souvents décrits par des fruits roses (groseille, fraise...)
Pourquoi cette illusion ? "

Après réflexion, pour la réponse à cette question vous êtes priés de vous reporter à la page 31 de l'article Biais oenologique paru dans De la science aux fourneaux éditions Belin Pour la science, car c'est de la science. Ne ricanez pas, ne vous fachez pas, je ne suis pas en train d'affirmer qu'il n'y a pas de mots pour décrire ou écrire sur le vin. Loin de moi une telle ineptie, bien au contraire il suffit de lire le texte de Baudelaire que je vous ai proposé " Du vin et du Haschish " pour faire la démonstration inverse. Mais de grâce qu'on nous épargne le sabir des es-spécialistes, des critiques de tout poils : ils me font penser aux critiques musicaux, comme si leurs petits mots ou leurs mots boursouflés pouvaient traduire notre émotion. Le vin, la culture du vin, au sens de celle qu'on acquiert par la lecture, est une affaire personnelle, une affaire de temps, de curiosité, de goût au sens esthétique, ce n'est pas un truc prêt à consommer qu'on trouve dans les guides. Alors horizontale, verticale ou, pourquoi pas, longitudinale tous ces compte-rendus de dégustations me donnent le sentiment d'entendre des Précieuses Ridicules glosant sur les sonnets d'un éphèbe Trissotin boutonneux et pas encore déniaisé... 



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6 août 2007 1 06 /08 /août /2007 01:12

C'est le titre d'un joli petit livre, que l'on peut facilement glisser dans une poche : 10,5 par 15, publié dans la petite collection des éditions Mille et Une Nuits et c'est signé Charles Baudelaire. Pour 2 euros 50 soixante petites pages exquises dont 45 traitant de notre sujet : " Du vin et du haschich comparés comme moyen de multiplication de l'individualité ". Pour vous inciter à faire l'acquisition de ce compagnon de route je vous propose quelques extraits de ce texte et le lien www.1001nuits.com Bien sûr, précision utile pour les hygiènistes, les repentis modèle Chabalier ou les tenants de l'ordre moral, je laisse à ce Baudelaire l'entière responsabilité de ses propos.


 

 

" Profondes joies du vin, qui ne vous a connues ? Quiconque a eu un remords à apaiser, un souvenir à évoquer, une douleur à noyer, un château en Espagne à bâtir, tous enfin vous ont invoqué, dieu mystérieux caché dans les fibres de la vigne. Qu'ils sont grands les spectacles du vin, illuminés par le soleil intérieur ! Qu'elle est vraie et brûlante cette seconde jeunesse que l'homme puise en lui ! Mais combien sont redoutables aussi ses voluptés foudroyantes et ses enchantements énervants. Et cependant dites, en votre âme et conscience, juges, législateurs, homme du monde, vous tous que le bonheur rend doux, à qui la fortune rend la vertu et la santé faciles, dites qui de vous aura le courageimpitoyable de condamner l'homme qui boit du génie ?
D'ailleurs le vin n'est pas toujours ce terrible lutteur sûr de sa victoire, et ayant juré de n'avoir ni pitié ni merci. Le vin est semblable à l'homme : on ne saura jamais jusqu'à quel point on peut l'estimer et le mépriser, l'aimer et le haïr, ni de combien d'actions sublimes ou de forfaits monstrueux il est capable. Ne soyons donc pas plus cruelsenvers lui qu'envers nous-mêmes, et traitons-le comme notre égal."

" J'ai souvent pensé que si Jésus Christ paraissait aujourd'hui sur le banc des accusés, il se trouverait quelque procureur qui démontrerait que son cas est aggravé par la récidive. Quant au vin, il récidive tous les jours. Tous les jours il répète ses bienfaits. C'est sans doute ce qui explique l'acharnement des moralistes contre lui. Quand je dis moralistes, j'entends pseudo-moralistes pharisiens."

" Si le vin disparaissait de la production humaine, je crois qu'il se ferait dans la santé et l'intellect de la planète un vide, une absence, une défectuosité beaucoup plus affreuse que tous les excès et les déviations dont on rend le vin responsable. N'est-il pas raisonnable de penser que les gens qui ne boivent jamais de vin, naïfs ou systématiques, sont des imbéciles ou des hypocrites; [...] Un homme qui ne boit que de l'eau a un secret à cacher à ses emblables."

" Le vin exalte la volonté, le haschisch l'annihile. Le vin est un support physique, le haschisch est une arme pour le suicide. Le vin rend bon et sociable. le haschisch est isolant. L'un est laborieux pour ainsi dire, l'autre essetiellement paresseux. [...] Le vin est utile, il produit des résultats fructifiants. le haschisch est inutile et dangereux." 

 

Note de bas de page :
Comme je suis un gentil garçon je vous signale qu'Hervé Gaymard notre ancien ministre de l'agriculture a publié en 2007 aux mêmes éditions dans la collection les petits libres : le nouvel usage du monde et que l'intégralité des droits d'auteur sont reversés aux Fondations pour la Recherche Médicale et Abbé-Pierre.

 

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