Monsieur,
Sur le fond de votre bouquin je n'écrirai rien puisque, pour l'heure, je n'ai pas pris la peine de le lire. Pourtant, juste avant Vinexpo, votre éditeur me fit une offre guère alléchante, un maigre 10%, pour que j'achetasse cette charge girondine contre l'affreux pouvoir jacobin, en plus vulgaire je devrais écrire parisien. Mon propos de ce matin, mûri, pesé sur un trébuchet de pharmacien, affirme, sans grand risque que je puisse être contredit que, l'appellation non contrôlée, que vous m'accolez ou qu'habilement vous suggérez, est erronnée. Je vous sais trop fin pour ne pas comprendre que vous le faites à dessein pour me disqualifier. Par la bouche de vos présidents vous ne vous en êtes point privé. A plusieurs reprises j'ai expliqué que je n'étais ni haut, ni fonctionnaire, en vain. Un conseil en passant, puisque vous n'êtes pas avare dans ce domaine, faites le ménage dans votre maison au lieu de me chercher des poux sur la tête. Donc, monsieur, en dépit de votre obstination, je filais des jours heureux, en me disant, qu'après tout, si tel était le poids et la pertinence de vos arguments, je n'allais pas m'échiner à les réfuter.
Alors, pourquoi donc me suis-je décidé à vous écrire ? Tout simplement parce que Jean-Jacques Chiquelin, journaliste au NO, m'a signalé, au détour d'une conversation, que dans votre petit bouquin, vous vous offusquiez de mes écrits dans Vin&Cie, ici même. Drapé dans vos habits professoraux, Sciences-Po Bordeaux je crois, vous évoquez le devoir de réserve qui devrait m'empêcher de m'exprimer. Vous voudriez qu'on me censura. Mais, grand dieu, au nom de quoi ? De quelle règle de Droit ? Moi qui suis docteur en droit public, qui ai occupé un poste de Professeur-associé de l'Université, permettez-moi d'écrire que c'est du n'importe quoi. Depuis fort longtemps je n'occupe plus de poste d'autorité dans l'Administration. Mes seules fonctions officielles, attestées par le JO, avec délégation de signature ministérielle, furent d'être Directeur de cabinet d'un Ministre. Depuis, nenni, je suis un pékin ordinaire pas un haut-fonctionnaire. Sur mon espace de liberté j'écris en mon nom et je n'engage que moi. Alors, monsieur, une fois, deux fois, trois fois bonjour les dégâts, ça suffit. Je vous prie donc de me lâcher les baskets et de refouler vos instincts dénonciateurs.
Enfin, vous qui m'avez fait un jour le plaisir de me faire parvenir cet e-mail savoureux : " mon président me demande de vous inviter..." je vous prie de bien vouloir noter que votre fonction de Directeur d'un zinzin interprofessionnel, vivant de CVO, sous contrôle d'Etat, fait de vous un salarié émargeant sur des fonds dont le caractère public est avéré. Pour preuve, vous pouvez avoir recours à la contrainte publique pour faire payer les récalcitrants. Alors, je suppose, que vos écrits n'engagent que vous qui n'avez jamais ôté vos fesses du même fauteuil depuis fort longtemps. Alors, permettez-moi, aussi, de vous signaler que moi j'ai changé, tous les 4 ou 5 ans de fonction ou d'employeur et que, suprême indécence, pendant 3 ans, j'ai acheté, embouteillé, livré du vin - gros contributeur pour votre maison-, au sein de la plus grande société de vin française à l'époque : la SVF. Si j'avais été, un haut-fonctionnaire, j'eusse pantouflé. J'ai tout bêtement démissionné. Pas de parachute doré, monsieur, tout simplement la vie d'un salarié. Je vous saurais donc gré de m'épargner votre suffisance sur la pertinence et l'opportunité de mes écrits. Mon expérience dans le secteur du vin vaut largement la vôtre, CV contre CV, je laisse à chacun, puisque cette lettre est ouverte, d'en juger.
Ceci étant écrit, cher monsieur, je ne m'interdis pas, après lecture des vôtres, de commettre une nouvelle chronique, afin de livrer, à mes chers lecteurs assidus, ce qu'ils m'inspirent. Certains, alors, seront peut-être surpris de lire que je partage certaines de vos analyses et que, contrairement à vous, je ne me prive pas de l'écrire car, à votre différence, je n'ai aucun fond de commerce à défendre. Ma liberté, certes vous dérange, mais sachez qu'elle a un prix, à l'occasion je pourrai vous l'indiquer, cher monsieur. Dans cette attente, je vous prie d'agréer l'expression de mes salutations les meilleures.
Jacques Berthomeau