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26 mars 2021 5 26 /03 /mars /2021 06:00

 

Parmi les Appellations Originales Contrôlées du Rugby, il y a sans hésitation celle de « coupeur de citrons »

 

Pendant longtemps, à la mi-temps des matchs les joueurs recevaient un quartier de citron pour retrouver leurs esprits et se donner un coup de fouet. Il y avait alors un « porte-citron » dévoué à la découpe et à la distribution. On prenait en général un bon copain à qui on faisait gentiment comprendre que ses aptitudes physiques n’étaient pas compatibles avec la pratique du rugby. Mais s’il le voulait, place lui était réservée sur le banc.

 

Je n’ai jamais joué au rugby, les citronniers ne poussent pas en Vendée, mais dans le cadre de mon droit à la paresse j’ai décidé d’occuper le poste de « porte-citron » pour le compte d’Alexis Ferenczi.

 

 

Plus un zeste : quand les agrumes valaient de l'or

Véritables « joyaux du monde végétal », citrons, oranges et mandarines ont longtemps été convoités par les rois, les nobles et les bourgeois.

 

 

Par Alexis Ferenczi

 

 

 « Quand la vie vous donne des citrons, faites de la citronnade ».

 

Ce vieil adage stoïcien, qui aurait été utilisé pour la première fois en 1915 par Elbert Green Hubbard dans sa nécrologie de l’acteur de petite taille Marshall Pinckney Wilde puis repris par les fans d’Ayn Rand, n’est valable que depuis deux siècles. Avant, si la vie vous donnait des citrons, c’était uniquement parce que vous étiez membre d’une caste de privilégiés ou botaniste à la cour du roi.

 

Les agrumes sont longtemps restés inaccessibles au commun des mortels – ceux qui n’habitaient pas dans les zones chaudes et humides d’Asie où l’on suppose que les fruits de la famille des citrus sont nés il y a 5 à 6 millions d’années. En Occident, on découvre l’orange, le cédrat ou la mandarine en même temps que s’établissent les premières routes commerciales vers l’Orient. À cause de leur rareté et du coût élevé de leur transport, ces fruits sont d’abord réservés à une élite. Ils deviennent de fait un symbole de luxe et de pouvoir. 

 

C’est pour recenser toutes les variétés connues à son époque – et pour le prestige – que le botaniste allemand Johann Christoph Volkamer publie entre 1708 et 1714 une somme sur les agrumes intitulée Nurenberg Hesperides, descriptions complètes du noble citron, lime et orange amère. Comment, ici et dans les environs, planter correctement, maintenir, et produire ces fruits, ouvrage titanesque composé de gravures représentant les fruits grandeur nature.

 

Volkamer sait que les nobles d’Europe vouent un véritable culte aux agrumes. Certains ont même développé une passion qui frise la syllogomanie, rivalisant d’ingéniosité pour dénicher le fruit le plus gros ou le plus bizarre, sans se soucier des dépenses. Cette fascination va de pair avec la prise de conscience de la valeur des jardins. Dès le début du XVIe siècle, on sait comment planter certains fruits exotiques pour qu’ils surmontent les rigoureux hivers du nord. C’est Pacello Mazzarotta, le jardinier italien du roi Charles VIII, qui a l’idée de la « culture en caisse » permettant aux premières oranges de France d’être abritées du froid à l’intérieur d’un bâtiment.

 

Toujours de ce côté du Rhin, le naturaliste Antoine-Joseph Dezallier d’Argenville (1680-1765) dédie lui aussi plusieurs chapitres de La théorie et la pratique du jardinage aux seuls agrumes : « L’on distingue plusieurs sortes, comme le Citronnier ou Balotin, le Limier ou Limonier, le Bigaradier, le Cédrat, le Riche-dépouille, le Poncyre, le Pommier d’Adam, la Bergamote, l’Oranger de Chine. Leurs différences sont peu considérables : elles ne consistent qu’en ce que les uns font des arbres de tige, et les autres des nains ou buissons, ou parce que le fruit des uns est doux et celui des autres plus aigre : ils conservent tous leur beau feuillage. »

 

La suite ICI avec une superbe iconographie tirée de The Book of Citrus Fruits, J.C. Volkamer, 125 euros, publiée chez TASCHEN

 

 

 

 

 

An early-modern ode to citrus fruit – in pictures ICI

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25 mars 2021 4 25 /03 /mars /2021 08:00

 

Le boudoir, c’est sans doute le premier gâteau que j’ai croqué car, pour la petite histoire, saviez-vous que le premier biscuit que l’on donne aux bébés est souvent un boudoir pour qu’ils fassent leurs dents de lait ?

 

Et puis, il y eut, les merveilleuses charlottes de maman.

 

Mais alors, le boudoir est-il un frère du biscuit à la cuillère ?

 

Comme souvent il est difficile de déterminer l’inventeur d’une recette, ainsi pour le biscuit à la cuillère qui aurait été inventé par les cuisiniers de Catherine de Médicis, qui auraient eu l'idée de confectionner leurs biscuits aux œufs en utilisant deux cuillères pour écarter la pâte à partir du centre, pour ne pas l'abîmer — d'où leur forme allongée et leur nom. Mais on doit à Antonin Carême, cuisinier de Talleyrand, la mise au point définitive de ce petit gâteau moelleux.

 

 

Le Prince de Talleyrand aimait les biscuits secs mais comme ses dents ne lui permettaient plus de les croquer, il les trempait dans son verre de Madère pour les ramollir. Mais ce n’était guère pratique à cause de la petite taille du verre, et peu élégant. C’est son célèbre Chef de cuisine, Antonin Carême qui a alors eu l’idée d’en créer une version qui s’imbibe facilement sans faire de miettes. « Il imagina, pour préparer des biscuits cuillères plus petits, de suspendre un entonnoir au plafond de la cuisine et de faire ainsi couler la pâte qui formait alors un fin boudin ensuite coupé. C’est ce bricolage qui est à l’origine, plus tard en 1847, de l’invention de la poche à douille » Ducasse

 

 

Antonin Carême aurait alors nommé sa toute nouvelle création «boudoir», un clin d’œil à la diplomatie du même nom conduite par l’homme d’Etat, alors réputé à la cour pour les nombreuses intrigues qu’il menait en secret.

 

 

Le mot boudoir trouve son origine dans le verbe bouder attesté en 1740 dans le Dictionnaire de l'Académie. En 1929, il devient un petit gâteau long recouvert de sucre cristallisé. Il est dégusté souvent avec le champagne.

 

« Le boudoir, comme lieu d’intériorité, est une véritable invention du XVIIIème siècle, que ce soit dans le terme, dans la forme ou dans l’usage. Le terme, apparaît en 1740 dans le dictionnaire de l’Académie Française, qui le dit familier, et le définit comme « petit cabinet où l’on se retire quand on veut être seul ».

 

Le dictionnaire de Trévoux précisera en 1752 : « petit réduit, cabinet fort étroit, auprès de la chambre, ainsi nommé apparemment parce qu’on a coutume de s’y retirer pour être seul, pour bouder sans témoin, lorsque l’on est de mauvaise humeur. »

 

« Monsieur se retirera dans son cabinet pour vaquer à ses affaires, quand Madame ira dans son boudoir pour s’adonner à des plaisirs oniriques, intellectuels, ou plus prosaïquement, charnels. »

Audrey Higelin-Fusté

 

Au 18ème siècle. La pâte était alors couchée avec une grande cuillère (d’où le nom de ce biscuit), ce qui donnait de gros et longs biscuits.

 

Biscuit vient du fait que le biscuit est cuit deux fois (bi-cuit). On le fait cuire une première fois, on le saupoudre de sucre glace et on l’enfourne une seconde fois, ce qui donne une délicieuse croûte. Le mot cuillère vient du fait que l’on se servait à l’époque d’une cuillère pour dresser les biscuits sur la plaque de cuisson, à la place de l’actuelle poche à douille qui n'existait pas encore.

 

En France, la variante la plus connue est le biscuit de Reims à la jolie couleur rose. En Italie, on parle de Savoiaridi.

 

Pour terminer en beauté, écoutons Stéphane Bern expert en tête couronnée :

 

 

La charlotte, le dessert français, doit son nom à une reine d'Angleterre. Il s'agit de Charlotte de Mecklembourg-Strelitz, femme du roi Georges III. Elle est la quintaïeule de la reine actuelle Elizabeth II.

 

Charlotte est avant tout une reine extrêmement populaire auprès des Anglais. Botaniste éclairée, elle s'investit également dans l'éducation des filles et fonde de nombreux orphelinats et maternités. Les plus grands artistes lui rendent hommage, à l'instar de Mozart qui, âgé de 8 ans, lui dédie 6 sonates pour clavecin avec accompagnement de violon.

 

Si elle reçoit les honneurs du monde de la musique, la cuisine n'est pas en reste. Pour elle, un chef réinvente le fameux pudding, fourré à la compote, et le nomme charlotte. Mais ce dessert n'est pas encore celui que nous connaissons aujourd'hui.

 

 

La charlotte est aujourd'hui un dessert qui ravit toute la famille. Une crème bavaroise, des fruits, le tout dans une coque de biscuits à la cuillère. Le moule à charlotte est d'ailleurs considéré par beaucoup de ménages comme un essentiel d'une cuisine française digne de ce nom.

 

Pourtant, aussi étonnant que cela puisse paraître, cet entremet au nom si français nous vient bien d'Angleterre. C'est en effet à l'origine un pudding cuit pendant de longues heures dans un moule aux bords évasés, fait de pain de mie ou de brioche et rempli de compote de fruit, une recette on ne peut plus simple. (1)

 

Il fallait bien qu'un français passe par là pour que ce gâteau de brioche chaud et fourré devienne un entremet léger à déguster froid. C'est Antonin Carême, le père de la pâtisserie moderne française, qui après avoir été au service de la couronne d'Angleterre, rapporte ce pudding en France.

 

(1) Le moule était tapissé de  pain de mie beurré, bread and butter, ou de brioche, puis rempli de compote de pommes ou de prunes. C'était en fait une sorte de pudding, que l'on cuisait  longtemps au four. De la cuisine anglaise, quoi. Très éloigné de notre charlotte  sans cuisson, à base de biscuits à la cuillère et de crème bavaroise.

 

C'est quand il était dans les cuisines du Prince Régent d'Angleterre, le futur George IV, qu'Antonin Carême fit la connaissance de l'ancêtre  british de notre charlotte actuelle. Antonin Carême modifia la recette anglaise, à partir de la nouvelle forme des biscuits cuillère. Il créa l'entremets que nous connaissons : sans cuisson, dans le moule tapissé de biscuits cuillère et rempli d'une crème bavaroise. Il nomma sa création "charlotte à la parisienne", pour la distinguer du dessert anglais. Plus tard, lorsqu'il travailla dans les cuisines du tsar Alexandre (celui qui combattit Napoléon), il la rebaptisa "charlotte à la russe".  C'est le nom officiel qu'elle porte aujourd'hui.

Champagne Vouette et Sorbée, Fidèle Maison Vouette et Sorbée

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25 mars 2021 4 25 /03 /mars /2021 06:00

 

« Y’a pas écrit la Poste là ! »  

Avez-vous déjà entendu parler de Richard Stávek ?

 

La 12 juillet 2020, jour de mon anniversaire, l’immense Antoine Gerbelle, un Bettane moderne, m’avait mis la puce à l’oreille en évoquant  « la cuvée DIVY RYSAK 2017 du vigneron tchèque Richard Stávek.  Les raisins blancs et rouges sont co-fermentés et aboutissent à une floralité de pétale de rose, à une gourmande acidité épicée de baies sauvages sèches. A la fois accessible et complexe, ce vin peu alcoolisé (11,5% vol) est un magnifique paradoxe, inoubliable. »

 

Et puis, un beau soir, avant que je ne pédalasse à toute berzingue, afin d’échapper à la patrouille de Darmanin, Claire me confia un flacon étiqueté, tel un faire-part mortuaires : PN 2017, afin que je le goûtasse.

 

 

Ce que je fis.

 

 

Richard Stávek est l'un des pionniers du vin naturel en Moravie, qui a commencé à commercialiser au milieu des années 1990.

 

standard du strasser de Moravie - Site du club francais du pigeon strasser

 

Ne pas confondre la Moravie avec la Moldavie-Syldavie chère à Tintin...

 

 

Richard Stávek est l'un des pionniers du vin naturel en Moravie, il a commencé à le commercialiser au milieu des années 1990, il a toujours fait du vin, même sous le communisme, sur quelques parcelles de vignes appartenant à  sa famille pour la consommation personnelle. Il fait donc « tout simplement » le vin comme on l'a toujours fait à partir de 4,5 hectares de vignes, sur les 11 autres hectares il produit du miel, du fromage et des fruits et légumes. Il fait sécher des douelles de bois qui servent à fabriquer des fûts pour le fabricant de barriques autrichien de renommée mondiale, Stockinger.

 

Ne)vinné zápisky Richarda Stávka: O našich vínech v Polsku

 

Ce polyculteur dans l'âme, touche à tout, a pris le parti de cultiver des cépages rares aux noms bien difficiles à prononcer : Veltlinske Zelene, Neuburské, Svatovavřinecké… et de les vinifier sans intrants, sans même la plupart du temps une once de soufre.

 

 

richard stavek pn

Richard Stávek

TCHÉQUIE - NEMEICKY - RICHARD STÁVEK ICI

 

 

PN

Richard Stávek

Vin de Table Tchèque - Rouge - 2017

PN comme Pinot Noir bien évidemment ... Epicé et frais, vous allez piéger pas mal de gens en dégustation à l'aveugle !

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24 mars 2021 3 24 /03 /mars /2021 08:00

Kylie Minogue Wines | Vin De France Rosé Beautifully pale pink shade

Je ne précise pas le degré auquel ce qui suit doit être lu, à chacun de vous de le mesurer, c’est du brut de Gala et de Voici, du pur jus de marketeur, la fine fleur, du liquide sitôt bu sitôt pissé, de l’incolore, de l’inodore, de la saveur ajoutée… Mais si ça se vend, pourquoi pas, moi ça ne me dérange pas, je n’en bois pas…

 

Après Sting, Gérard Depardieu, Carole Bouquet, Brad Pitt et Angelina Jolie ou encore Sarah Jessica Parker c’est au tour de la star australienne Kylie Minogue de se lancer dans le vin.

 

 

Qui est Kylie Minogue ? ICI 

Elle s'est découvert une appétence pour le vin lors d'un enregistrement à New York. Depuis, la chanteuse australienne Kylie Minogue s'est bien implantée dans le secteur. Et c'est en France qu'elle va désormais vendre plusieurs de ses bouteilles. Dans toute la gamme qu'elle a sortie, Kylie Minogue possède 4 vins français : un Côtes de Provence, un autre vin rosé, un Merlot et un Sauvignon blanc. Elle les a élaborés avec le négociant français de Carcassonne (LGI Wines) et le Britannique Benchmark Drinks. Mais surtout la chanteuse a choisi l'enseigne Carrefour pour les distribuer en exclusivité en France pendant un an.

 

D’après le communiqué annonçant le lancement des produits, la chanteuse aurait découvert « la fraicheur du rosé de Provence pendant les nuits étouffantes à Nashville, lors de l'enregistrement de son 14e album ».

 

 

Les Français pourront découvrir dès le mois d’avril dans les magasins Carrefour ses 2 rosés : un côtes-de-provence 13,95€  et un rosé 5,95€

 

Le merlot et le sauvignon seront quant à eux à découvrir lors de la foire aux vins d’été de l’enseigne qui aura lieu dès la fin mai.

 

Les deux parties se sont mis d’accord sur la création d’une gamme de vins « faciles d’accès, aux arômes généreux et à la structure souple ». Les bouteilles ne prétendent donc pas à la grande sophistication et jouent à fond la carte pop : les bouteilles sont ornées d’une étiquette épurée où le prénom de la star apparaît en gros pour la touche féminine.

 

Les vins de stars sont une des marques de fabrique de Carrefour, puisque l'enseigne écoule déjà ceux de l'actrice Carole Bouquet Passito du Pantelleria, un moelleux italien ou encore ceux du Château de Tigné appartenant à Gérard Depardieu

 

Carrefour selon sa directrice de catégories vins, champagnes et mousseux, Audrey Sonnendrecker veut ainsi redynamiser le marché

 

Une aubaine pour l'enseigne qui veut ainsi redynamiser le marché « qui souffre d'un manque de marques fortes »

 

D'ailleurs, si l'opération fonctionne, Kylie Minogue pourrait ajouter d'autres vins comme un pinot noir du sud-est australien. Il faut dire que la chanteuse ne se lance pas à l'aveugle à l'assaut du marché français, puisque ses deux rosés ont déjà été plébiscités en Irlande et en Australie avec 600.000 unités écoulées.

 

https://static.cnews.fr/sites/default/files/2020_redaction/kylie_minogue_gamme_vins_hd-taille640_603d16b89d5eb.jpg

 

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24 mars 2021 3 24 /03 /mars /2021 06:00

 

 

Le gouvernement algérien déplore la non-reconnaissance des « crimes coloniaux » de l’État français.

 

Trois semaines après la remise du rapport Stora sur les relations entre la France et son ancienne colonie, Alger a réagi pour la première fois et dit regretter l’absence d’excuses et de reconnaissance. Loin d’apaiser les relations, cela semble les crisper, relève la presse algérienne. ICI 

 

Les plaies sont encore vives, pour avoir vécu 2 ans en Algérie, à Constantine, j’ai pu en mesurer la profondeur et leur réalité. La colonisation fut brutale et sans pitié, quand à la guerre, elle fut tout aussi sauvage et sanguinaire.

 

Ce qui est relaté dans le roman de Didier Daeninckx : Le Banquet des Affamés, n’a rien d’anecdotique, c’est un véritable viol de la mémoire.

 

Livre: Le Banquet des Affamés, Didier Daeninckx, Gallimard, Blanche,  9782070137879 - Leslibraires.fr

Page 22-23-24

 

Le capitaine qui régnait sur cette horde (ndlr la 1er compagnie des fusiliers de discipline) s’appelait Chabras, et ne valait guère mieux. Il s’était illustré en pacifiant une grande partie du massif voisin de l’Ouarsenis avec des troupes de cette qualité. On racontait qu’il n’assaillait pas que les vivants, que les cimetières aussi l’intéressaient, étant lié par son épouse à des industriels de Marseille (avec succursale à Orléansville) qui arrondissaient grâce au « noir animal » leur fortune assise sur la production sucrière. On sait assez peu qu’avant de se poser en blanc sur les tables raffinées le sucre n’est qu’une mélasse peu engageante dont la teinte varie du marron au verdâtre. Plusieurs procédés permettent de faire perdre à cette substance la couleur des origines. L’une des principales applications du noir animal consiste justement dans sa propriété remarquable à décolorer les liquides. Il se présente sous la forme d’une poudre que l’’on pourrait confondre avec la suie. En fait, on l’obtient en chauffant  des os à haute température, à l’abri de l’air, ce qui explique qu’on l’appelle aussi couramment « charbon animal ». La demande de sucre ne cessant de croître, le commerce des squelettes nés des abattoirs s’est développé dans de telles proportions que l’offre ne satisfaisait plus l’industrie. On a essayé de creuser d’autres mines… Il faudrait disposer de temps et remonter la filière pour trouver l’identité de celui qui eut l’idée d’aller ramasser, dans les cimetières d’Algérie, les ossements ancestraux afin d’opérer, par l’abondance de la matière, une détente sur le prix de la poudre à décolorer le sirop de sucre. On a vu des centaines d’ânes, autant de chameaux razziés dans toutes ces provinces, ployant sous le poids de paniers emplis d’ossements, prendre la piste d’Orléansville où des étuves transformaient des généalogies entières en promesses de douceur. Vous prendrez combien de sucre dans votre chocolat, comtesse ? Trois… Le père, la mère et, tenez, la grand-tante pour faire bonne mesure ! L’empirisme ayant sa part dans les avancées scientifiques, on s’aperçut que les os longilignes offraient le meilleur rendement, que e crâne et les vertèbres donnaient de l’onctuosité aux gélatines ou fournissaient l’azote nécessaire aux terres qui portaient les futures moissons. On doit nous envier, chez les cannibales d’Océanie, d’absorber ce qu’ils délaissent.

 

ALGERIE-TIARET-lt-Vue-animee-de-LA-CASERNE-DE-LA-LEGION

 

Un commerce peu « catholique »

 

Les os des cadavres algériens, au service de l'industrie coloniale! -  Babzman

 

Les ossements humains, exhumés par la charrue coloniale ou par le matériel des ponts et chaussées, vont également servir pour un commerce sordide. Ils auraient été expédiés à Marseille, pour être utilisés dans la fabrication du sucre.

 

L’historien Moulay Belhamissi fait état des navires chargés d’ossements provenant des cimetières musulmans en partance pour Marseille : « Pour du noir animal nécessaire à la fabrication du sucre, les ossements récupérés des cimetières musulmans sont expédiés à Marseille. A l’époque, on réfuta les faits malgré les témoignages. Mais l’arrivée dans le port phocéen, en mars 1833, d’un navire français La Bonne Joséphine », dissipa les derniers doutes. Des os et des crânes humains y furent déchargés.

 

Le docteur Ségaud témoigne à son tour dans le journal Le Sémaphore, le 2 mars 1833 : « J’ai appris par la voix publique, que parmi les os qui servent à la fabrication du charbon animal, il s’en trouve qui appartiennent à l’espèce humaine. À bord de la bombarde, « la bonne Joséphine » venant d’Alger et chargée d’Os, j’ai reconnu plusieurs os faisant partie de la charpente humaine. J’y ai vu des crânes, des cubitus, et des fémurs de la classe adulte récemment déterrés et n’étant pas entièrement privés des parties charnues ».

 

Informé de ce commerce des restes humains, l’Emir Abdelkader fit parvenir partout dans le pays des recommandations interdisant impérativement aux Algériens de consommer le sucre blanc, une consommation qui pourrait, en toute évidence, assimilée à une forme d’anthropophagie. « De troublantes assertions ont couru au sujet de l’utilisation des restes humains. »

 

« A la suite de ces révélations, prises très au sérieux par les autorités politiques de la métropole au point que l’affaire devint rapidement nationale, le ministère de la guerre ordonna à l’intendant civil de la province d’Alger de mener une enquête pour déterminer les origines de ce commerce et pour le faire immédiatement cesser ». (Coloniser-Exterminer - p.169)

 

La « Métropole » informée de l’utilisation des ossements provenant des cimetières musulmans ne semblait pas approuver ce commerce indécent ; mais comme à l’accoutumée, on n’est pas à un scandale près et les promoteurs de l’industrie utilisatrice d’ossements humains ne seront jamais inquiétés…!

 

Les départements français d'Algérie

Département d'Orléansville

 

Le département fut créé par décret du 28 juin 1956. Il comprenait alors 4 arrondissements.

 

Dès le décret du 20 mai 1957, et toujours sous le nom de département d'Orléansville, il se divisait en 6 arrondissements, au lieu de 4.

 

Il a porté aussi le nom de département du Cheliff. En 1958, il comptait 637.000 habitants.

 

Le premier préfet fut Raymond Chevrier, nommé le 6 décembre 1956. Mais les événements du 13 mai 1958 provoquèrent un changement. Convoqué par le général Salan, auquel ont été confiés par le gouvernement Pflimlin les pouvoirs civils et militaires pour le maintien de l’ordre en Algérie, Raymond Chevrier se rend à Alger le 18 mai 1958. Avant d’avoir été reçu par le général Salan, il est arrêté, assigné à résidence à Aïn Taya, puis remis à la disposition du ministre de l’Intérieur. De toute manière, ce sont des généraux qui furent chargés en juin 1958 d'exercer les pouvoirs civils dans les départements algériens : c'est le général Gracieux qui les exerce le 24 juin 1958 et donc succède au préfet Chevrier, puis le général du Passage en 1959, commandant la 9e division d'infanterie.

 

Le préfet Louis Verger fut nommé le 10 mars 1960. Il resta jusqu'au 20 décembre 1960, et devint alors directeur du cabinet civil et militaire du délégué général du gouvernement en Algérie. Enfin, le préfet Mohand Sadek OURABAH fut le dernier titulaire du poste, du 21 décembre 1960 à juin 1962.

L’historien Benjamin Stora (photo d’illustration).

Rapports entre la France et l’Algérie : Benjamin Stora répond aux critiques dans une tribune ICI

 

L’auteur du rapport faisant des propositions pour organiser la réconciliation entre Alger et Paris a publié une tribune dans un quotidien algérien ce matin pour répondre aux critiques et défendre sa méthode.

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23 mars 2021 2 23 /03 /mars /2021 08:00

 

Murphy-Goode | Dieline - Design, Branding & Packaging Inspiration

« La cave de Murphy-Goode de la région de Sonoma propose de lancer votre carrière dans la viticulture avec un salaire de 10 000 $ par mois à la clé et un logement gratuit en prime sur une année. Vous aurez également la possibilité de jouir de 30 caisses de vin Murphy-Goode, ça sent le bon plan ! L’entreprise vous promet de belles rencontres et une mise en relation avec des partenaires en commerciaux pour construire votre réseau. Vous serez accompagné dans la direction du domaine. »

The History of Murphy-Goode Winery | Murphy-Goode Wine

ICI

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23 mars 2021 2 23 /03 /mars /2021 06:00

 

S’il est un cours  à la Fac qui me gonflait c’était celui de Finances Publiques.

 

Dans ma vie privée je me suis toujours gardé de me sur-endetter afin de conserver ma liberté de choix.

 

Mon niveau d’analyse financière nage dans les eaux de la chanson de Jean Poiret : « Une vache à mille francs » c’est pour cette raison que j’ai bossé au Ministre de l’Agriculture.

Pour ne pas mourir idiot je lis Le Monde :

 

Le 18 mars 2021

Dette : le rapport Arthuis plaide pour une meilleure maîtrise de la dépense publique ICI 

 

Dans l’hypothèse la plus optimiste, sans mesure nouvelle et avec une croissance à 1,5%, la dette française gonflerait à 128 % du PIB en 2030.

 

Ils ont été nommés par le premier ministre, Jean Castex, début décembre et se sont réunis à six reprises à Bercy, et en visioconférence pour ceux vivant à l’étranger. Jeudi 18 mars, les dix membres de la commission pour l’avenir des finances publiques, présidée par l’ancien ministre de l’économie Jean Arthuis, devaient remettre à Matignon leur rapport sur la dette Covid-19, que Le Monde a pu consulter.

 

« Notre mission était d’éclairer la trajectoire des finances publiques au lendemain de la crise Covid et de proposer des modifications de la gouvernance budgétaire. Je tenais à un texte non partisan », explique M. Arthuis.

 

Le 20 mars au soir Jean-François Collin, qui connaît mon peu de goût pour les comptes publics, est venu à mon secours.

 

Je vous préviens c’est du lourd, 14 pages, Pax va me morigéner mais on attrape les mouches avec du miel.

 

 

Que faire de la dette publique ?

 

Nul ne sait comment évoluera la pandémie due au virus du covid 19 et si nous en sortirons bientôt. Cependant, dans beaucoup de pays, le nombre de personnes contaminées est en forte réduction et la part de la population ayant bénéficié d’un vaccin devient significative. L’espoir revient de sortir de la phase aiguë de cette crise, avec son cortège de restrictions d’activités, de loisirs et tout simplement de liberté. 

 

Déjà, à Bruxelles comme à Paris, des responsables pensent que le temps est venu de refermer la parenthèse du « quoi qu’il en coûte ». Le ministre des comptes publics, Olivier Dussopt s’est exprimé à plusieurs reprises dans ce sens. 

 

La commission de l’Union européenne a demandé au Comité budgétaire européen d’engager une réflexion sur l’évolution des règles budgétaires à l’issue de la pandémie. 

 

À Paris, une commission est installée, présidée par Jean Arthuis avec pour mission, selon le communiqué du gouvernement, de « proposer des scénarios de retour à l’équilibre des comptes, dans un objectif de stabilisation puis de réduction progressive de notre dette publique. Ces travaux intègreront notamment l’objectif de pérennisation des baisses de prélèvements obligatoires prévues au cours du quinquennat ».

 

Tout est dit en quelques mots. Les déficits publics sont une mauvaise chose imposée par les circonstances. Il faut y mettre fin au plus vite et parvenir à l’équilibre budgétaire. Mais il n’est pas question de revenir sur les avantages fiscaux accordés aux plus riches pour cela. Le rapport remis par cette commission le 18 mars 2021, respecte sans surprise le mandat qui lui a été donné.

 

Inutile d’avoir fait de longues études de finances publiques pour comprendre que si l’on n’augmente pas des recettes il faudra réduire les dépenses. Et contrairement à ce que l’on dit trop souvent à l’opinion publique, les sources potentielles d’économies importantes sur les dépenses publiques ne se trouvent pas dans les dépenses de fonctionnement de l’État, le nombre et la paye des fonctionnaires en particulier, car cette part de la dépense publique est restée remarquablement constante, rapportée au PIB, au cours des 30 dernières années. En revanche, ce sont les dépenses consacrées à la santé, aux retraites, à la formation et à l’emploi qui ont considérablement augmenté depuis les années soixante-dix. Pas étonnant donc qu’il soit à nouveau question de la réforme de l’indemnisation du chômage ou de celle des retraites.

 

Mais plutôt que de discuter des projets incessants de réforme de notre régime social, réfléchissons aux présupposés qui conduisent à présenter ces réformes comme des nécessités absolues et urgentes.

 

I – La dette publique toujours présente toujours contestée, toujours convoitée

 

1) L’endettement public est-il condamnable?

 

John Fitzgerald Kennedy déclarait à Yale en 1962, à l’occasion d’une remise de diplômes : « les dettes publiques et privées ne sont ni bonnes, ni mauvaises ». 

 

Ce point de vue pondéré et exprimé de façon ramassée est pourtant loin d’être partagé par tous.

 

La dette publique est souvent condamnée au motif qu’elle ferait supporter aux générations futures le poids de nos dépenses inconsidérées d’aujourd’hui. Nous serions des cigales ayant trouvé le moyen de ne pas affronter les conséquences de notre légèreté en nous contentant de laisser à nos descendants le soin de payer les factures, sans nous exposer à la vindicte de la fourmi. 

 

Cette fable, beaucoup moins bien écrite que celle de La Fontaine est aussi beaucoup moins exacte. En effet, comme dans « la cigale et la fourmi », c’est bien entre vivants que nous réglons nos comptes et pour l’essentiel entre vivants de la même génération.

 

Première observation, la durée de vie moyenne des encours de la dette publique en septembre 2020 était de 8 ans et 265 jours (contre 7 ans et 38 jours en 2015). Comme nous n’avons pas tous plus de quatre-vingt ans, ce sont bien ceux qui vivent et travaillent aujourd’hui qui rembourseront la dette d’aujourd’hui et nos petits enfants ne seront pas nécessairement appelés à le faire à notre place.

 

Par ailleurs, l’Etat ne s’endette pas auprès des générations futures, comme cela est dit trop souvent. Quand « l’Agence France Trésor » vend un titre de dette à dix ans en 2021, elle le vend à un acheteur d’aujourd’hui, l’Etat s’endette auprès des générations présentes. Si l’acheteur du bon du Trésor est vivant à l’échéance, en 2031, il touchera le remboursement du prêt qu’il a fait à l’Etat et s’il est mort, il aura transmis le bénéfice de ce remboursement à ses héritiers ou à celui qui aura racheté le titre de dette.

 

Pendant ce temps, l’Etat aura dépensé le montant de cet emprunt en prestations qui auront bénéficié à des vivants d’aujourd’hui et en investissements qui profiteront aux vivants d’aujourd’hui et de demain.

 

L’endettement de l’Etat s’accompagne donc d’un transfert de ressources au sein des générations présentes, entre ceux qui prêtent à l’Etat et ceux qui bénéficient de ses dépenses. A l’échéance des titres de dette publique, si l’Etat emprunte à nouveau pour rembourser – ce qu’il fait souvent et souvent et à juste raison-  un nouveau prêteur trouvera intérêt à acheter de la dette d’Etat et les contribuables ne seront pas appelés à financer la dette d’hier. En revanche, si l’Etat décide de réduire sa dette et n’a pas les moyens de faire les économies correspondantes, il devra augmenter la fiscalité, et dans ce cas une partie de la génération concernée bénéficiera du remboursement de la dette arrivée à échéance et tous les contribuables contribueront au remboursement de la dette passée. Mais encore une fois, comme l’Etat n’emprunte majoritairement pas sur des durées de cinquante ans ou plus, les contribuables d’aujourd’hui ont bénéficié de la dette d’un hier récent sous forme de dépenses d’éducation, de santé, d’infrastructures de toute nature.

 

C’est cette réalité des transferts de ressources au sein d’une génération et entre générations, en plus de la pérennité des Etats, qui rend parfaitement absurde la comparaison entre l’Etat et une entreprise et les tentatives d’établir un « bilan » de l’Etat comparable à celui d’une entreprise multinationale. Ces exercices, dûment certifiés par les Cours des comptes européennes n’ont aucun sens économique et ne sont qu’une entreprise de mystification idéologique. Ce ne serait pas très grave si cela ne servait pas à justifier des décisions complètement erronées en matière de politique économique et de gestion de l’Etat.

 

2 - Et L’Etat dans tout cela ?

 

Le second motif principal de condamnation de la dette publique est qu’en empruntant sur les marchés financiers pour financer ses dépenses, l’Etat évincerait les entreprises et leur interdirait de financer leurs investissements.

 

Ce point de vue est pourtant difficile à défendre au vu du niveau extrêmement bas des taux d’intérêts actuels qui traduit plutôt l’absence de concurrence entre les Etats et les acteurs privés sur les marchés financiers et un excès d’épargne mondiale par rapport à l’investissement. 

 

L’explosion de l’endettement des Etats consécutif à la crise dite des « subprime », à partir de 2007, s’est accompagnée d’une baisse considérable des taux d’intérêts réels. Il y a de quoi troubler les économistes.

 

De plus, la baisse des taux d’intérêt n’est pas conjoncturelle, elle dure depuis quarante ans. 

Plusieurs facteurs peuvent être invoqués pour l’expliquer : ralentissement de la croissance mondiale depuis la fin du vingtième siècle qui a conduit certains économistes à parler de « stagnation séculaire » ; faible volume d’investissements privés dans le monde depuis le début des années 2000, sauf en Chine ; augmentation des inégalités et mise en cause des régimes sociaux qui obligent les populations à augmenter leur épargne de précaution ; vieillissement de la population dans les économies développées qui s’accompagne d’une augmentation du taux d’épargne. Chacun de ces facteurs mériterait des développements détaillés qui ne trouveront pas leur place ici. Mais ce qui est certain, c’est que l’endettement public n’entraine pas « d’effet d’éviction du financement des investissements privés » pour le moment. 

 

La conception des rapports entre l’Etat et les marchés financiers a une histoire.

 

Jacques Rueff considérait les déficits publics comme « la gangrène du corps social » et voyait un « péché » dans l’intervention politique dans les monnaies, péché conduisant à la « satanique inflation ». Le recours au vocabulaire religieux par un l’économiste également inspecteur des finances, est symptomatique de la force de l’interdit qu’il prononçait contre le droit des Etats à contrôler la monnaie et derrière elle la finance. Il était un anti-Keynésien déterminé, contempteur des accords de Bretton Woods. Economiste libéral il fut membre du groupe X-Crise entre les deux guerres et il rejoindra la « Société du Mont-Pèlerin » dès 1948, aux côtés de F Hayek et de ses fidèles.

 

Malheureusement pour lui, au lendemain de la guerre, les idées libérales et ceux qui les portaient n’étaient pas très en bien vus. La classe dominante de l’entre-deux guerre était discréditée. En France, une nouvelle génération de hauts fonctionnaires s’est installée dans les ministères. Elle place l’Etat au-dessus du marché et crée le « circuit du Trésor » pour le financer. L’Etat se finance directement auprès du Trésor par la création de monnaie « à robinet ouvert » et les banques sont obligées de souscrire des titres du Trésor. Ce système permettra la reconstruction rapide de la France et une période de prospérité vers laquelle nous nous tournons avec nostalgie. 

 

Dans le même temps, le système de Bretton Woods, imaginé au sortir de la deuxième guerre mondiale, avait établi des parités fixes entre les monnaies et instauré un système de coopération internationale entre les Etats, sous contrôle américain, leur permettant de contrôler les capitaux, ce qui décourageait la spéculation et privait les financiers de marché. 

 

Mais les temps changent et en 1958, Jacques Rueff revient aux affaires dans les valises du Général De Gaulle, de Michel Debré et de Pinay. Le plan de stabilisation de 1959 est son œuvre. Il repose sur le retour à l’équilibre budgétaire, la dévaluation du franc et la création du nouveau franc, le rétablissement de la convertibilité du franc, en même temps que des autres monnaies européennes et l’ouverture des échanges commerciaux. Il s’agissait de mettre la France en état d’intégrer la communauté économique européenne après la signature du traité de Rome. Cette forte inflexion de la politique économique française montre au passage toutes les ambiguïtés de la politique Gaullienne, trop vite résumée en une affirmation de l’indépendance nationale et planification de l’économie. Le générale de Gaulle prolongera les programmes industriels engagés sous la IVème République en matière de défense, d’énergie, de politique spatiale et aéronautique, mais il aura aussi le souci de réduire l’inflation et de préparer l’économie française au marché commun.

 

Ensuite viendra l’éclatement du système de Bretton Woods : le 15 août 1971 : Richard Nixon déclare la non-convertibilité du dollar en or et nous fait entrer dans le nouveau monde des changes flottants et du grand marché des monnaies, pour le plus grand bonheur des « marchés financiers ». 

 

On voit donc que sur cette courte période de 1945 à nos jours, le rôle des Etats dans la création monétaire et la situation de la « finance » que F Hollande désignait comme son ennemie avant de se raviser, a beaucoup évolué.

 

3) Plus les dirigeants veulent réduire la dette, plus elle augmente

 

Avec la contre-révolution libérale initiée dans les années quatre-vingt par Ronald Reagan et Margaret Thatcher, s’est ouverte une période de hausse continue et vertigineuse de l’endettement public, ce qui peut paraître paradoxal car ces nouveaux responsables politiques et les partis qui les soutenaient avaient fait de la réduction de la place de l’Etat dans l’économie leur l’objectif principal. 

Durant les deux mandats de Ronald Reagan, la dette publique des États-Unis est passée de 988 milliards de dollars le 30 septembre 1980 à 2 602 milliards de dollars le 30 septembre 1988, soit un quasiment le triplement. Cette tendance s’est prolongée après lui puisque la dette publique américaine a atteint 132% du PIB fin 2020 selon le FMI. Rappelons qu’elle n’était « que » de 119% en 1945, après une période singulièrement plus difficile que celle que nous avons traversée depuis 1945. 

 

Margaret Thatcher réussit, elle, à réduire la dette publique au prix d’un chômage de masse et de l’explosion de la pauvreté au Royaume-Uni, mais au Japon, la dette publique atteint 250% du PIB. 

 

En Europe, le traité de Maastricht, signé le 7 février 1992 et entré en vigueur en novembre 1993, devait assurer la convergence des économies européennes grâce à la liberté de circulation des capitaux, des parités monétaires irréversibles, des déficits budgétaires faibles et limités à 3% du PIB et l’indépendance de la banque centrale européenne, la BCE.

 

En réalité, alors que les économies européennes convergeaient avant la création de l’euro, elles divergent depuis qu’il existe. Le revenu par habitant était le même en Allemagne, France et Italie au début des années quatre-vingt-dix. Aujourd’hui, le revenu par habitant d’un français est inférieur de 15% à celui d’un Allemand et la différence est de 30% pour un Italien. 

Pour préparer son entrée dans l’euro, la France s’est accrochée désespérément au Deutsch Mark, de 1992 à 1997, au nom du « sérieux économique ». Ce faisant, elle s’est enfoncée dans la récession, avec une monnaie surévaluée et la dette française est passée de 40% à 62% du PIB en cinq ans. 

 

Comme cela ne suffisait pas, après la crise des « subprime » de 2008 - 2012, l’Allemagne a imposé au reste de la zone euro, en même temps qu’un contrôle renforcé sur les politiques budgétaires des Etats par la Commission européenne, sa « règle d’or » : l’inscription dans les constitutions nationales de l’interdiction de voter des budgets en déficit sauf circonstances exceptionnelles et l’interdiction d’un déficit structurel supérieur à 0,5% du PIB. 

 

Une bonne partie des économistes considère aujourd’hui que la priorité donnée à la réduction des déficits budgétaires après l’effondrement des économies européennes entre 2008 et 2012 a empêché l’Union européenne de retrouver le chemin de la croissance, à l’exception de l’Allemagne qui a compensé la faiblesse de sa demande interne par des excédents commerciaux et de sa balance des paiements « excessifs », mais non sanctionnés par le système européen. 

 

Nous pouvons mesurer chaque jour l’inefficacité de cette tentative de corseter la réalité des divergences de situations économiques dans un carcan idéologique et juridique. Notons que les représentants français, fonctionnaires et politiques, non seulement n’ont rien fait pour s’opposer à tout cela mais en furent des zélateurs, depuis Jacques Delors, Président de la Commission européenne, jusqu’à Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et financières. Mais leur foi n’a pas suffi à déplacer les montagnes. Les dettes ont continué à augmenter dans les pays du sud de l’Europe et les excédents à s’accumuler en Allemagne. 

 

Du coup, alors que les accords de Maastricht puis le traité de Lisbonne interdisaient le financement monétaire de la dette publique, la BCE a contourné les traités, au grand soulagement des gouvernements de toute l’UE, pour monétiser cette dette en rachetant massivement des titres publics sur le marché secondaire, en créant une quantité correspondante de monnaie, afin d’éviter l’effondrement des économies européennes, Allemagne comprise. « La BCE a ainsi racheté 54 % des titres de dettes émis en 2020 et elle détient désormais plus de 25 % du stock de dette publique française. En ajoutant l’action des banques centrales étrangères (24 % de l’achat des titres émis en 2020), 78 % des montants de dette émise par la France en 2020 ont été rachetées par des banques centrales. » (Rapport commission J Arthuis).

 

Il faudra tout de même expliquer un jour pourquoi la réalité se rebelle à ce point contre les politiques mises en œuvre depuis le début des années quatre-vingt. 

 

L’euro a créé à la fois la maladie et le remède. Il a contribué à mettre en difficulté une majorité des pays qui en ont fait leur monnaie, mais qui n’ont pas pu s’adapter à la concurrence interne à la zone euro car il aurait fallu pour cela mettre complétement à genoux leur propre peuple pour démanteler complètement le système social. Et en même temps, l’Eurosystème a permis aux Etats de s’endetter à moindre coût et de ne pas subir, tout de suite, une crise de la dette en plus d’une crise économique.



 

 

 

4) Pourquoi s’inquiéter de la dette publique et pas de la dette privée

 

L’endettement privé est élevé et supérieur à l’endettement public, sans que personne ne s’en émeuve. 

 

Au troisième trimestre 2020, l’endettement privé en France représentait 152,8 %du PIB selon la Banque de France (contre 112,5% du PIB en 2010). En 2019, la dette des ménages a augmenté trois fois plus rapidement que leurs revenus pour atteindre 1 170 Mds d’euros. Aux Etats-Unis la dette des ménages est un peu supérieure à 14 000 milliards de dollars. La dette des agents non financiers privés représente, fin 2020, 167% du PIB au Japon, 160% du PIB au Etats-Unis, 152% en France, 150% au royaume Uni, etc.

 

Cette augmentation de l’endettement privé, en Europe, a été rendue possible en partie grâce au soutien de l’Etat, réclamé par tous notamment face aux pertes engendrées par la crise sanitaire. Il s’explique aussi par la politique monétaire de la BCE sur laquelle nous reviendrons. 

 

Mais la dette privée n’est pas sans risques. La crise économique espagnole de 2008 – 2015 fut d’abord une crise de la dette privée, provoquée par l’incapacité des ménages à rembourser leurs crédits immobiliers garantis par des actifs surévalués, qui a entraîné la faillite des banques créditrices puis celle de l’Etat. 

 

Pourtant aucune commission n’a été chargée par le gouvernement de réfléchir aux moyens de réduire la dette des entreprises et des ménages. 

 

La dette serait-elle comme le cholestérol, la dette privée serait la bonne, la dette publique la mauvaise ? L’histoire nous enseigne qu’il n’en est rien.

 

II – Et maintenant, qu’allons-nous faire ?

 

1) La dette publique augmente mais la charge de la dette diminue et diminuera encore

 

A- La charge de la dette diminue grâce à la baisse des taux d’intérêts

 

L’augmentation de la dette publique est un phénomène mondial. La dette publique mondiale accumulée en 2020, rapportée au PIB mondial, a dépassé le plus haut point atteint pendant la seconde guerre mondiale selon le FMI. 

 

Pourtant, la charge de la dette diminue ; comment un tel miracle est-il possible ?

 

Lorsqu’un État emprunte pour 10 ans 100 € portant 5% d’intérêt par an, son coût pour les finances publiques sera de 5 € par an pendant 9 ans et de 105 € la 10e année, l’année du remboursement au prêteur, soit au total 150 €. 

 

Mais si l’État emprunte à nouveau 100€ à l’échéance du prêt précédent pour le rembourser, le coût supporté par les finances publiques pendant 10 ans n’aura été que de 50 € (la charge des intérêts) et si les taux d’intérêt ont diminué de moitié au cours des 10 années précédentes, la charge de la dette au cours des 10 années qui suivent diminuera dans les mêmes proportions. C’est exactement ce qui se passe en France depuis quelques années et qui se poursuivra en raison de la poursuite de la baisse du taux apparent (c’est à dire du taux moyen de l’ensemble des prêts en cours) de la dette française. Le taux moyen de la dette française baisse parce que la dette contractée par l’Etat pour financer le déficit budgétaire et rembourser la dette venue à échéance porte un intérêt inférieur à la dette qu’il rembourse.


C’est ainsi que la dette publique de la France est passée de 40 % du PIB en 1991 à 120 % en 2020. Dans le même temps, la charge d’intérêts sur la dette publique en France rapportée au PIB est passée de 2,5 % en 1990 (3,5 % en 1996) à 1,5 % en 2020, et même à 1 % si l’on sort du total de la dette française la part détenue par « l’euro-système » (BCE et Banque de France). C’est le résultat de la baisse continue des taux d’intérêts pendant cette période et de la croissance du PIB.

 

Les faibles taux d’intérêts nominaux accordés aux prêteurs ne sont pas un phénomène conjoncturel, la baisse est continue depuis 40 ans. Les taux d’intérêts portés par les emprunts publics sont maintenant négatifs jusqu’à des maturités de 20 ans. Le taux apparent de la dette publique française, c’est-à-dire celui qui prend en compte tous les emprunts passés et leur date de maturité, est passé de près de 7 % en 1996 à un peu plus de 1 % en 2021 et le taux des nouvelles émissions est négatif. 

 

En d’autres termes, la charge de la dette, va continuer à diminuer dans les prochaines années à mesure que l’état remboursera des emprunts souscrits lorsque les taux d’intérêt étaient plus élevés.

 

B- Elle diminue aussi grâce à la politique de la BCE et des banques centrales

 

L’intervention massive de la Banque Centrale Européenne et des banques centrales des Etats de l’union européenne pour racheter des titres de public a beaucoup allégé la charge de la dette publique. 

 

L’Union européenne a interdit le financement monétaire des déficits publics (cf. supra) et obligé les Etats membres à financer la totalité de leur dette sur le marché financier. L’Agence France Trésor vend chaque mois ses titres à 15 « Spécialistes en Valeur du Trésor » (SVT). Il s’agit notamment de BNP Paribas, du Crédit Agricole, de Natixis, de la Société Générale, de Goldman Sachs, de City Group, de JP Morgan ou UBS. 

 

En 2020, à peine ces « spécialistes » avaient-ils acheté les bons du Trésor que la Banque Centrale les leur a rachetés, non sans payer au passage une commission aux banques en questions. En période plus « normale », les SVT revendent ces valeurs du Trésor à leurs propres clients (d’autres banques et intermédiaires financiers) qui les revendront à leur tour sur le marché secondaire. A chaque étape, les intermédiaires se font rémunérer. 

 

L’interdiction du financement monétaire direct de la dette publique dans la situation actuelle n’a aucun sens. Elle renchérit le coût global du financement public, pour le plus grand profit des acteurs du marché financier mais sans bénéfice pour les autres acteurs économiques.

 

Une fois détenus par les banques centrales, les titres de dette publique ne coûtent plus rien aux Etats jusqu’à leur éventuel remboursement. Les intérêts payés par l’Etat à la banque centrale reviennent dans les caisses publiques sous forme de dividendes et d’impôt sur les bénéfices des sociétés payés par les banques centrales dont le capital est détenu à 100% par les Etats.

 

L’Eurosystème a racheté, en 2020, 70% de la dette publique émise par les pays de la zone euro.

 

La BCE est devenue l’acteur principale du système européen, la Commission européenne, le Conseil et le Parlement européens ne jouant qu’un rôle de figuration. Est-ce la réalisation de la prophétie de Jacques Rueff (encore lui) qui disait « l’Europe se fera par la monnaie » ? Ou bien le signe d’une crise institutionnelle européenne dont les conséquences apparaîtront plus nettement bientôt ?

 

Le plan de relance européen adopté à grand peine en juillet 2020 par le Conseil européen et qui n’est toujours pas mis en œuvre, fait bien pâle figure à côté du rachat de 1 000 milliards d’euros de dette des Etats de la zone euro en quelques mois, auxquels il faut ajouter un plan d’urgence au début de la pandémie, en mars 2020, de 750 milliards d’euros de prêts aux banques de la zone. Pourquoi dans ces conditions perdre son temps avec la bureaucratie européenne pour obtenir une part des 390 milliards de subvention répartis entre les 27 Etats membres et emprunter auprès de la Commission européenne à des taux plus élevés que ceux qu’obtiennent le Trésor français ou allemand sur les marchés? Il faudra être mal avisé pour le faire.

 

L’autonomie de la Banque centrale européenne a été si bien garantie que c’est elle qui exerce l’essentiel du pouvoir effectif au sein de l’UE, les instances politiques animant un théâtre d’ombres   dans lequel on fait semblant de décider.

 

A propos du plan de relance européen, le rapport de la commission Arthuis donne l’information suivante :

 

« Afin de financer cette dette (NB : il s’agit de la dette contractée par la Commission pour financer le plan de relance), deux scénarios, qui pourraient être combinés, sont envisagés :

 

Scénario 1 : recettes fiscales européennes nouvelles – La Commission européenne doit faire des propositions sur le sujet d’ici juin 2021 (par exemple taxe numérique, taxe carbone aux frontières ou marché des quotas (SCEQUE)).

 

Scénario 2 : contributions _ classiques _ des États Membres au budget de l’Union européenne. Dans le scénario 2, l’impact financier net pour la France serait d’environ 26 Md€. En effet, compte tenu de la grille de contribution financière, la France paierait environ 17 % des subventions du plan de relance européen (environ 66 Md€) tandis qu’elle recevrait environ 40 Md€ du plan de relance européen. »

 

Jean Arthuis confirme ainsi ce que nous avions écrit dès le mois de juillet. Ce n’est pas l’UE qui va financer la relance en France mais l’inverse. Cette grande victoire française est une victoire pour le compte du roi de Prusse.

 

2) Que faut-il faire ?

 

Puisque nous avons écrit que la dette n’était ni bonne ni mauvaise, constaté que la charge de la dette diminuait et restait supportable pour les finances publiques, que la BCE assurait l’urgence et allégeait la charge supportée par les Etats, peut-on conclure que tout va bien et que la question de la dette n’en est pas une ?

 

A) La dette est-elle soutenable ?

 

Même si jusque-là ça va, chacun est bien conscient que la dette, publique et privée, ne peut pas augmenter indéfiniment. Nous avons connu au cours de notre histoire d’autres moments de fort endettement ; les solutions ayant permis de le réduire ont été à chaque fois différentes. La banqueroute a rarement été utilisée, sauf celle fameuse du Directoire en 1797. La croissance et l’inflation ont souvent permis de réduire la dette.

 

Personne n’est capable de dire quel est le niveau de dette soutenable par un Etat. 

 

Le Japon vit depuis des années avec un niveau de dette qui nous paraît inimaginable.

 

La barre des 60% de dette sur PIB avait été fixée comme infranchissable par le traité de Maastricht. Le taux moyen de dette publique rapportée au PIB dans la zone euro est supérieur à 100% et la zone euro vit avec.

 

Mais la dette coûte cher, même si la charge de la dette a diminué au cours des dernières années comme nous l’avons vu. Le cumul des intérêts payés aux détenteurs de titres du Trésor de 1973 à 2019 atteint 1 500 milliards d’euros, que l’on peut rapprocher d’une dette cumulée de 2 400 milliards d’euros en 2019. Le maintien du « circuit de financement Trésor » de la dette publique, tel qu’il existait jusqu’à la fin des années soixante-dix, nous aurait-il permis de n’avoir aujourd’hui qu’une dette de 900 Mds d’euros et d’économiser 1 500 milliards? La question mérite d’être posée, même si le circuit Trésor comportait aussi des inconvénients et avait d’autres effets sur l’économie.

 

En 2012, l’Etat a payé 56,1 M€ d’intérêts à ses créanciers et ce n’est que parce que les taux d’intérêts ont baissé depuis que la charge de la dette est restée soutenable.

 

La possibilité offerte aux Etats d’emprunter à taux négatifs ne durera peut-être pas aussi longtemps que les contributions. C’est une situation anormale qui témoigne d’un déséquilibre entre l’épargne et l’investissement résultant d’une faible croissance mondiale. Ce déséquilibre devra se résorber un jour soit par une reprise de la croissance, soit par un ajustement de la valeur des actifs détenus par les épargnants. Si les Etats-Unis s’engagent dans une politique conduisant à une remontée progressive des prix et des salaires, en même temps que celle des taux d’intérêts, la charge de la dette pourrait bien alors, avec un décalage résultant de la maturité de la dette, reprendre un chemin ascendant.

 

Il n’est pas complètement rassurant de constater que la dette publique a atteint des niveaux qui dépassent ceux de la seconde guerre mondiale, alors que nous ne vivons rien de comparable.

 

Le financement massif de la dette publique par les banques centrales injecte des quantités de liquidités dans l’économie qui ne s’orientent pas vers les secteurs productifs, faute d’opportunités. De ce fait, elles contribuent à l’inflation de la valeur des actifs financiers - les bourses se portent bien même quand tout le monde est confiné- et à la création d’une bulle immobilière. Le niveau des transactions immobilières atteint des sommets en pleine pandémie et la croissance des prix du mètre carré dans les agglomérations urbaines est plus vive que jamais, interdisant aux jeunes et aux pauvres de se loger et les renvoyant toujours plus loin vers la périphérie des villes. Il est infiniment plus rentable d’investir son argent dans l’immobilier à Paris que dans une entreprise.

 

La situation actuelle est donc tout sauf idéale

 

B) Il faudra vivre avec une dette publique élevée pendant longtemps

 

« Ce n’est pas comme si on pouvait la rembourser » fut la réponse concise et pleine de bon sens que me fit un de mes fils que j’interrogeais sur ce qu’on pouvait faire de notre dette publique.

 

En effet, nous ne sommes pas près de pouvoir la rembourser sans aggraver une situation économique déjà déprimée. Même la commission Arthuis considère qu’il n’est pas possible de réduire la dette avant 2025 sans faire disparaître les espoirs de reprise économique. Alors ne faisons pas semblant de croire que cela est possible.

 

A court terme, on peut espérer que les restrictions liées au Covid toucheront à leur fin et que le rebond d’activités qui suivra permettra à la fois d’emprunter un peu plus et de réduire le ratio dette / PIB, tout en bénéficiant de la poursuite de la baisse du taux apparent de la dette, donc de la charge de la dette. Il n’y a donc pas de risque d’insoutenabilité de la dette à court terme.

 

Cela ne signifie pas que la dette n’est pas un problème. Bien sûr l’utilité des dépenses publiques doit être évaluée en permanence, mais il faut regarder toutes les dépenses, pas simplement celles dont bénéficient les plus démunis. Ce qui nous distingue du reste de l’Europe selon la commission Arthuis, c’est l’importance des dépenses consacrées à la protection sociale (invalidité, vieillesse, chômage, logement, famille) supérieures de près de 5% à la moyenne européenne, puis les dépenses de soutien à l’économie et les dépenses de santé. Un examen scrupuleux de  ces dépenses et de leur efficacité est nécessaire avant de les réduire ou d’en réduire d’autres. Et en tout état de cause, il existe un consensus pour dire que dans l’immédiat, il y a d’autres urgences que de tailler dans ces budgets.

 

C) Des investissements sont nécessaires

 

La crise a révélé combien le credo libre-échangiste de l’Europe l’avait affaiblie sur le plan de la recherche, de la santé, aussi bien que de ses capacités industrielles et agricoles. Que l’Union européenne soit incapable de produire un vaccin contre le Covid, alors que le Royaume Uni, objet de tous nos quolibets sur l’impasse dans laquelle il se serait placé en quittant l’UE, la Russie dont le PIB en dollars est inférieur à celui de la France, et d’autres pays moins avancés en ont produit un ou plusieurs, signe notre échec collectif. Que nous en soyons encore à acheter hors d’Europe non seulement les vaccins mais les masques et le matériel sanitaire, un an après le début de la crise devrait être un électrochoc. 

 

La seule solution dont dispose l’UE, c’est le confinement, comme au Moyen-âge!

 

Ce qui vaut pour l’UE, vaut pour la France.

 

Il est plus que temps de se ressaisir.

 

L’Europe doit cesser de faire des plans de relance pour le bénéfice de l’industrie chinoise. Il faut passer des déclarations d’intentions aux actes. Le projet de taxation du carbone aux frontières en cours de discussion est beaucoup trop faible et complexe pour être efficace. L’Europe doit mettre en place des mécanismes simples et efficaces de protection de son marché comme le font les USA ou les pays asiatique. Elle ne le fera que si elle affirme en même temps une politique déterminée de relocalisation de la production en Europe et met fin à sa course à la signature d’accords de libre-échange qui ne profitent qu’à nos partenaires et concurrents.

 

Quant à la France il est temps qu’elle se demande où sont ses intérêts nationaux, si ces mots ont encore un sens dans notre République et qu’elle les défende. Il faut cesser de croire que la multiplication des start-ups développant des applications plus ou moins utiles et rachetés par les GAFA lorsqu’elles sont susceptibles de rapporter de l’argent, constitue un modèle de développement économique.

 

Ne nous laissons pas aveugler par les Etats-Unis. La capitalisation boursière de la bande des six (Apple, Google, Amazon, FB, Microsoft et Tesla) est supérieur à 50% de la capitalisation du Nasdaq (principal indice boursier américain) et représente plus de 30% du SP5OO (les 500 plus grosses sociétés américaines). L’inflation de la valeur boursière de ces entreprises résulte en grande partie de la spéculation alimentée par les flots d’argent déversés par la banque centrale américaine, la FED et par la BCE. Cette survalorisation de ces quelques entreprises inquiète aux USA mêmes. Elle témoigne à sa façon du faux-semblant de la croissance américaine. 

 

Enfin, si l’on compare les 390 milliards d’euros de subventions du plan de relance européen répartis entre les 27 Etats de l’UE dans les trois ans qui viennent au plan de relance américain de 1 700 milliards de dollars que J. Biden vient de faire adopter, on mesure à quel point les moyens mis en œuvre en Europe ne sont pas à la hauteur des enjeux.

 

D) Pas de solution sans croissance économique

 

Le seul intérêt du ratio dette / PIB, c’est qu’il met en rapport la dette et une image approximative de ce qui peut servir de base d’imposition pour la rembourser. Ce ratio peut diminuer en réduisant le numérateur, donc en remboursant la dette, mais aussi en augmentant le dénominateur, le PIB. 

 

L’exemple grec, après d’autres, a montré qu’en cherchant d’abord à réduire la dette quitte à étrangler l’économie du pays, on aggravait l’importance relative de la dette comparée au PIB, tout en interdisant au pays de trouver dans la croissance économique les ressources lui permettant de se dégager progressivement de la contrainte. C’est l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire.

 

La croissance économique est étouffée par la pression exercée sur le pouvoir d’achat des ménages. La classe moyenne a été écrasée depuis 30 ans, en France et en Europe, sa situation s’est dégradée. Il faut inverser la tendance en organisant une augmentation de son pouvoir d’achat au long de la prochaine décennie, d’abord par une augmentation des salaires qui ne sera possible qu’en protégeant un peu le marché européen.

 

Les pays européens doivent donc sérieusement se mettre d’accord sur un objectif de croissance, sur le contenu de cette croissance, aujourd’hui euphémisé par les mots croissance verte, transition écologique, sobriété heureuse. Ils doivent aussi définir les moyens permettant de réaliser ces objectifs.



 

E) Pas de solution sans correction des inégalités

 

Des efforts ne peuvent être demandés aux populations qu’à deux conditions :

 

  • la contribution demandée doit être équitable, elle doit être proportionnellement plus élevée pour ceux qui ont des revenus et un patrimoine élevés que pour ceux qui n’ont rien ou peu. Cela peut paraître trivial, mais la politique fiscale française fait exactement l’inverse. La principale ressource fiscale du budget de l’Etat, la TVA est un impôt qui frappe proportionnellement plus les bas revenus que les hauts revenus. La CSG et la CRDS sont rigoureusement proportionnelles aux revenus et n’en modifient pas les écarts. La fraude et l’évasion fiscale sont massives chez les riches et les entreprises. Une remise à plat de la fiscalité assurant plus de justice est nécessaire et si elle est plus juste elle assurera de meilleures ressources fiscales. Il n’y a pas de ressources infinies dans les poches des Français, mêmes riches, mais une élévation modérée de la pression fiscale sur les couches aisées est possible si elle est justifiée moralement et employée au financement de la croissance. La commission Arthuis écarte la piste de l’augmentation des prélèvements obligatoires, comme le lui avait suggéré le gouvernement en l’installant. Mais cela n’est pas recevable. Nous traversons une situation sans précédents ; des moyens sans précédents doivent être mobilisés. Le rétablissement de l’ISF sur la fortune mobilière est justifié. Il ne réglera pas le problème de la dette, mais tout de même, les détenteurs de valeurs mobilières profitent autant que les propriétaires immobiliers de la flambée des actifs. La suppression de l’ISF sur les valeurs mobilières avait privé l’Etat de 3 milliards de ressources ; son rétablissement pourrait lui rapporter un peu plus tant le patrimoine des riches a augmenté. B Lemaire veut faire l’inverse et exonérer les transmissions de patrimoine après les avoir détaxés une première fois. Il serait également justifié de supprimer le prélèvement forfaitaire unique de 30% sur l’ensemble des revenus et plus-values des valeurs mobilières. Le Conseil d’analyse économique placé auprès du Premier ministre estime que 70% de l’épargne supplémentaire engrangée pendant la crise du Covid a été faite par 20% des ménages les plus riches. Serait-il anormal, dans une situation exceptionnelle comme celle que nous traversons, d’instaurer une taxe exceptionnelle sur certains produits d’épargne préférés des ménages les plus aisés, comme l’assurance-vie ?

 

  • il faut que la population voie concrètement le résultat des efforts demandés en termes d’investissements, d’emplois et de revenu, or nous avons une classe dirigeante championne du monde des délocalisations et de l’expatriation des revenus et des profits, comme l’attestait encore une récente enquête sur les patrimoines détenus au Luxembourg. Ces comportements doivent cesser en utilisant aussi bien la pression morale que le contrôle et les sanctions. Le maintien de l’activité en France et la relocalisation des activités de production doivent être une priorité de l’action publique. Nous pouvons mesurer chaque jour la fragilité d’un modèle économique fondé sur le tourisme et les services qui fait de la France un pays de seconde catégorie.





F) Un grand emprunt pour financer les investissements nécessaires

 

Des investissements très importants sont nécessaires pour financer la transformation de l’économie, la construction de moyens de production moins émetteurs de CO2 et l’adaptation du pays au changement climatique déjà en cours.

 

  • l’enseignement et la recherche dans le sciences fondamentales et appliquées dans les secteurs où nous décrochons : mathématiques (affaiblissement du niveau moyen constaté année après année), physique, chimie, biologie ;

 

  • la santé pour une remise à niveau des équipements et des salaires dont le « Ségur de la santé » ne représente qu’un premier petit pas.

 

  • La réindustrialisation du pays et les investissements nécessaires à ce qui est désigné comme « transition écologique »

 

La souscription à ces emprunts pourrait être obligatoire pour les détenteurs d’un patrimoine et de revenus d’une certaine importance, ce qui serait une façon de les appeler à contribuer au redressement national.

 

Cet emprunt serait géré par une caisse d’amortissement spécifique et un organisme de gestion propre permettant d’en suivre l’emploi et les résultats.

 

G) Rembourser ou pas la dette publique détenue par les banques centrales ?

 

Il s’agit d’une décision qui ne pourrait pas être prise par la France seule et seulement pour elle.  Un accord européen serait nécessaire et il est inutile d’entretenir des illusions, comme cela a été fait trop de fois : un accord européen sur une annulation partielle ou totale de la dette souveraine détenue par la BCE est inatteignable sauf si survenait une crise financière majeure et le défaut d’un ou plusieurs grands Etats membres de l’Union européenne. 

 

La France fait partie des Etats très endettés de l’UE, avec d’autres comme l’Italie ou l’Espagne, mais ses intérêts sont antagoniques à ceux de l’Allemagne, des Pays-Bas ou d’autres pays du Nord.

 

A supposer qu’un accord puisse être obtenu, il ne le serait qu’au prix de concessions qui pourraient rendre le système monétaire européen encore plus défavorable qu’il ne l’est aujourd’hui à nos intérêts. 

 

Plutôt que demander une annulation de dette inatteignable et qui pourrait être payée chère par la France, peut-être serait-il plus intéressant de négocier la possibilité d’un financement monétaire partiel et directement par les banques centrales de la dette souveraine des Etats de l’UE, de façon à retirer aux marchés financiers une partie de leur pouvoir. Après tout, si les politiques veulent reprendre le pouvoir en Europe, comme ils disent depuis la crise sanitaire, ce serait le meilleur moyen d’y parvenir et de limiter la puissance de la BCE.

 

Enfin, les règles budgétaires de l’UE sont caduques. Même le rapport Arthuis en convient : « Un aménagement de certaines règles apparaît inéluctable, notamment les règles de désendettement (nécessité de réduire de 1/20ème par an l’écart entre le niveau de dette et la cible de 60 %, qui paraissent inadaptées car hors de portée. En France, cette règle supposerait désormais de baisser la dette de 3 points de PIB chaque année pendant 20 ans à partir du rétablissement des règles européennes. » Difficile d’y parvenir sans crise sociale majeure en effet.

 

Il faudra donc que l’UE abandonne cette règle, ainsi que celle des 3% de déficit annuel, pour accepter enfin des objectifs différents par pays, prenant en compte les réalités de leurs économies et de leurs trajectoires de croissance et de finances publiques.

 

*

***

 

Nul doute que le dossier de la dette fasse partie des enjeux des prochaines élections générales en France. Il ne doit pas être confisqué par les spécialistes ni par le pouvoir et la commission Arthuis qui propose des mesures visant exclusivement à stabiliser et réduire la dette, sans toucher à la fiscalité. Le mandat donné à cette commission ne lui laisse pas d’autre choix que de proposer des mesures de réduction des dépenses publiques. Elles ne sont pas toutes à exclure, mais elles ne constituent qu’une petite partie du sujet et n’aborder la question de la dette publique que sous cet angle est l’assurance de combiner les « réformes » de l’Etat social, c’est-à-dire son démantèlement sans cesse remis sur le métier et l’échec de la réduction de la dette.



 

JF Collin

 

19 mars 2021

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22 mars 2021 1 22 /03 /mars /2021 08:00

 

« Encore un que les boches n’auront pas ! »

 

« Combien de fois ai-je entendu ça ? » dans la bouche du pépé Louis après qu’il eut sifflé un godet en compagnie de ceux qui, comme lui, s’étaient tapés leurs jeunes années (certains osent parler de génération  sacrifiée pour nos pioupious du Covid  19) dans les tranchées de ce qui devait être la Der des der,  la boucherie de 14/18.

 

« Un vin comme celui-là, ça monte pas à la tête, ça caresser le cerveau. […] Et c'est toujours ça que les Boches n'auront pas... » Les pieds-bleus, Claude Ponti.

 

Bruno Frappat, dans la Croix, évoquant un livre de Ludovic Halévy (1834-1908) s’était rendu célèbre par les livrets d’opérette écrits, notamment, avec son acolyte Henri Meilhac (1831-1897) pour le compositeur Jacques Offenbach. ICI 

 

Celle-ci aurait pu légitimement être appelée la «Première Guerre». Mais elle n’aura pas eu ce douteux privilège. La guerre de 1870-1871 n’a laissé que peu de traces dans nos mémoires, éclipsée qu’elle fut par la suite des temps et des calamités : par sa conclusion terrible, la Commune ; par la guerre de 1914-1918, dite la Première, ou la Grande, ou… la Der des der ; par la «Seconde», enfin, dont il reste de nombreux survivants. Pourtant elle fut comme une répétition générale, une anticipation atroce.

 

Pourtant aussi, dans de nombreuses familles françaises, surtout à l’est et au nord du pays, les anciens, nos grands-parents, nés juste après, en parlaient encore avec des tremblements d’émotion, dans les années cinquante. Et lorsqu’ils évoquaient les combats et la boucherie de 14-18, souvent ils appelaient les Allemands les «Prussiens», utilisaient des expressions comme celle-ci, vengeresse et entendue si souvent après qu’une soupe a été avalée : «Encore une que les Prussiens n’auront pas.»

 

 

Chez nous, c’était moins subtil, et même que l’appellation BOCHES est gravée dans le premier pont en béton armé construit en Vendée, enjambant le fond du lit de l’Yon long de 20 mètres pour 2,50 m de large. Inauguré en 1907, construit par une entreprise allemande qui exploitait la mine des Thermelières peu avant la grande guerre, il fut surnommé « Pont des Boches ». ICI

 

Les wagonnets chargés de minerai de fer descendaient par gravité jusqu’à l’Yon. Au pont, des chevaux les remontaient jusqu’à la gare de marchandises de Beaupuy, où le minerai partait pour le port des Sables-d’Olonne. « Le procédé, n’a pas quinze ans quand une des premières réalisations européennes, [le Pont], est lancée face à La Berthelière. Les piles en pierre, l’absence de culées et la pose du tablier sur des roulettes de dilatation en font un ouvrage patrimonial qui mériterait quelques égards à la veille de son centenaire. »

 

Au début du XXe siècle, les terres où coulait l’Yon, étaient partagées entre La Ferrière et Dompierre. Et le pont était considéré comme étant sur le territoire de La Ferrière. Un pont oublié…

 

 

Faut-il classer le pont des Boches ?

 

Faut-il changer le nom du pont ?

 

 

On le sait, le nom de  pont des Boches  ​ne fait pas l’unanimité. Certains le considèrent comme péjoratif envers les Allemands. La Ferrière est jumelée depuis 1997 avec Wandlitz, une commune au nord de Berlin. Jean-Luc Soulard, un habitant de La Ferrière, a interpellé la mairie à ce sujet dans un courrier, voyant arriver le 25e anniversaire de l’association l’Aflech qui s’occupe du jumelage. « Je pense que le temps est venu de ne plus utiliser le vocable de boche et d’utiliser le terme le pont de la mine » écrit-il. « Cette période d’anniversaire pourrait être une excellente opportunité pour le faire. Ainsi, nous donnerions un message fort de solidarité et de respect pour nos contemporains de Wandlitz. »

 

 

Et chacun d’envisager une solution plus politiquement correcte en supprimant l’appellation de « pont des Boches »​, au profit de celle de pont de la Mine, « dit des Boches »​.

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22 mars 2021 1 22 /03 /mars /2021 06:00

 

 

 

« La Corrèze avant le Zambèze ». Raymond Cartier n'avait pas employé cette formule-là, mais elle lui fut vite attribuée par la droite antigaulliste qui, encore sous le choc de l'abandon de l'Algérie, jubilait.

 

 

La France, à cette époque, se cramponnait à son empire. Ravalée au rang de puissance moyenne par la seconde guerre mondiale, elle se croyait forte de ses colonies, d'où était partie en 1940 la reconquête du territoire national. Longtemps indifférents à la colonisation, les Français se découvrirent ainsi colonialistes sur le tard, à l'heure, précisément, où le colonialisme était condamné. Parmi les gens de plume et de savoir qui tentèrent d'éclairer leur lanterne, une voix compta plus que d'autres car elle parlait à la France profonde. Celle de Raymond Cartier, journaliste-vedette à Paris-Match, mort d'un cancer en 1975, le seul journaliste à avoir donné son nom à une doctrine, le « cartiérisme».

 

 

A Match, dont le tirage atteignait ces années-là 1,7 million d'exemplaires, Raymond Cartier exerçait un magistère comme peu de journalistes à l'époque.

 

Le « cartiérisme » est l'histoire d'un reniement. Abjurant ses convictions colonialistes, Raymond Cartier avait préconisé dès 1956 le « lâchage » par la France de ses possessions d'Afrique noire. Et s'il ne figure pas aujourd'hui au panthéon des anticolonialistes éclairés, c'est que ses arguments sentent encore le soufre. La France, prétendait-il, doit se défaire de ses colonies non pour répondre à l'aspiration légitime des colonisés, mais parce qu'elles coûtent trop cher. Comme coûtent trop cher, ajouta-t-il en 1964, les faveurs que la France octroie au tiers-monde.

ICI 

 

La Corrèze et le Zambèze - Denis Tillinac - Babelio

 

La Corrèze d’Henri Queuille, de Bernadette et Jacques Chirac maire de Paris, de François Hollande…

 

 

C'était un complexe qu'elle détenait depuis 1920. Mais la Ville de Paris a décidé de passer à autre chose, nous raconte Le Parisien, lundi 15 mars. Ainsi, pour financer d'autres projets en particulier des logements sociaux, la Ville a décidé de sacrifier plusieurs hectares de son patrimoine, estimés à plus de 8 millions de mètres carrés selon nos confrères. Car sur les 19.000 biens dont elle dispose, plus de 500 sont situés hors de Paris, et selon le premier adjoint à la mairie de Paris, Emmanuel Grégoire, "les politiques publiques évoluent". Ainsi selon lui, les investissements d'après-guerre ne "sont plus d'actualité".

 

 

Raison pour laquelle Paris vient de vendre la Chartreuse Notre-Dame-du-Glandier (Corrèze), un ensemble de 44 bâtiments situés sur 17 hectares et sur deux communes (Beyssac et Orgnac-sur-Vézère). Le domaine a été cédé pour la somme de 2,8 millions d'euros à des courtiers en vin bordelais. Un projet social pour la mairie de Paris, mais également financier, car outre les 250 emplois que le site générait, ce sont surtout les frais d'entretien et de gardiennage (850.000 euros par an) qui ont poussé Paris à prendre cette décision.

La suite ICI

 

La Chartreuse du Glandier à Beyssac est en vente

Paris vend Notre-Dame du Glandier, son monastère en Corrèze, pour 3 millions d’euros

 

Propriétaire de la chartreuse depuis un siècle, la Ville passe la main à un investisseur bordelais. D’autres cessions suivront afin d’améliorer les finances de la capitale.

Par Denis Cosnard

Publié le 02 mars

 

C’est un lieu hors du commun. Un immense monastère à l’abandon, niché en Corrèze, au creux d’une vallée. Un cloître désert, une église vide, une salle du chapitre, d’interminables couloirs dont la peinture s’écaille, une infirmerie, des maisonnettes, des cours, des jardins où prospèrent les herbes folles, l’ensemble ceint d’un mur ocre. Pas moins de 44 bâtiments au total, entourés de 17 hectares de bois de chênes et de châtaigniers ainsi que de prairies. Il y a même une station d’épuration et un ancien élevage de lapins.

 

Un siècle après avoir mis la main sur l’imposante chartreuse Notre-Dame du Glandier, aux confins des communes de Beyssac et d’Orgnac-sur-Vézère, la Ville de Paris s’apprête à vendre cet ensemble immobilier d’exception à un investisseur bordelais pour 3 millions d’euros, frais d’intermédiaire inclus. L’opération doit recevoir le feu vert du Conseil de Paris, qui se réunit à partir de mardi 9 mars. Un parfait exemple de la politique menée par la Mairie pour se défaire de certains bijoux de famille dont elle n’a plus l’usage, alors qu’elle traverse des difficultés budgétaires.

 

La chartreuse du Glandier avait été mise en vente en octobre 2020 sur le site du courtier Agorastore, à 750 000 euros. Cinq candidats ont remis des offres, échelonnées entre le prix plancher et 3 millions d’euros. La plus élevée a été retenue par la Ville de Paris, en accord avec le département de Corrèze. Elle émane de Descas, un négociant en vins de Bordeaux. La famille Merlaut, une des grandes fortunes du négoce bordelais, qui en est propriétaire, développe depuis vingt ans une activité d’investissement immobilier.

 

Deux fois confisqué par l’Etat

 

Pour elle, pas question de transformer la chartreuse en centre de méditation ou en résidence de luxe, comme l’imaginaient d’autres candidats. Son projet prévoit bien des logements, au terme d’une profonde rénovation. Mais il intègre aussi des espaces de coworking, une bibliothèque, des ateliers artistiques, des jardins partagés, ou encore des « espaces coopératifs de commerce alimentés en circuit court ». Autant d’éléments de nature à séduire les élus socialistes décisionnaires.

 

Notre-Dame du Glandier était entrée en 1920 dans le patrimoine de Paris. A l’époque, les autorités parisiennes étaient à la recherche de lieux de cure pour les tuberculeux, et l’endroit, au cœur des bois, avait été jugé « particulièrement bien choisi » pour installer un sanatorium. Une nouvelle vie avait ainsi débuté pour cette chartreuse au passé déjà chargé.

 

Fondé en 1219, confisqué deux fois par l’Etat, en 1789 puis en 1901, le monastère masculin de l’ordre des chartreux, largement reconstruit au XIXe siècle, avait notamment été le théâtre d’une sombre histoire d’empoisonnement ayant suscité plusieurs livres et films, l’affaire Marie Lafarge.

 

Une fois dans le giron parisien, la chartreuse a effectivement été aménagée en sanatorium, puis en centre pour enfants handicapés mentaux, avant d’héberger des adultes handicapés. Mais au fil du temps, le lieu est apparu de moins en moins adapté, et, début 2020, le département de Corrèze, à la disposition duquel avait été mis l’établissement, a préféré accueillir les personnes handicapées dans des locaux plus fonctionnels. C’est alors que les élus de Paris ont choisi de vendre l’ancien monastère désormais inoccupé, et situé à cinq heures de voiture de l’Hôtel de ville. « Cette propriété ne présente plus d’utilité pour le service public parisien et sa gestion à distance par les services de la Ville s’avère complexe et coûteuse », constate la Mairie.

 

A la place, la Ville va toucher un chèque de 2,8 millions d’euros, supérieur à l’estimation des domaines (2,3 millions). La somme ne suffira pas à résorber la dette de la Ville de Paris, qui, avec la crise due au Covid-19, devrait bondir de 15 % en 2021, pour approcher 7,1 milliards d’euros fin décembre. Mais en cette période financièrement tendue, tout ce qui peut éviter d’augmenter les impôts locaux est bon à prendre.

 

« Désherbage »

 

Sur l’année, le premier adjoint, Emmanuel Grégoire, a prévu de tirer 186 millions d’euros de recettes foncières. Pas question évidemment de mettre aux enchères la tour Eiffel ou la maison de Victor Hugo à Guernesey. Mais la Ville n’hésite pas à vendre les biens qui ne correspondent plus à ses besoins. Comme la chartreuse du Glandier, mais aussi le garage Bayard (13e arrondissement), ou encore ces lots dans un hôtel particulier du quai Malaquais (6e), dont un immense appartement, cédés récemment pour plus de 10 millions d’euros. Le château de Bellefontaine, à Samois-sur-Seine (Seine-et-Marne), inoccupé depuis 1999, se trouve lui aussi en vente.

 

Au-delà de ce « désherbage », l’équipe d’Anne Hidalgo s’appuie sur les opérations « Réinventer Paris », qui offrent beaucoup de souplesse pour valoriser des lieux atypiques. Après divers sous-sols et endroits vacants, la troisième édition de Réinventer Paris, lancée en février, propose aux investisseurs de « donner une nouvelle vie à des anciens bureaux et lieux de travail », dont plusieurs appartiennent à la Ville, notamment un immeuble de l’université Sorbonne-Nouvelle situé rue des Bernardins (5e) et un centre de distribution électrique rue d’Aboukir (2e).

 

En dépit de ces cessions, le patrimoine de Paris tend plutôt à s’accroître, la Ville ne cessant de préempter des appartements et des immeubles afin, avant tout, d’y installer des logements sociaux.

Denis Cosnard

 

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21 mars 2021 7 21 /03 /mars /2021 08:00

 

La quille, le "père cent"... ( "la quille bordel" ) - Traditions ( terre,  mer, air, gendarmerie ). - Forum Militaire

Je me disais bien qu’il ne me laisserait pas fêter le Père 100 que je n’ai jamais fêté dans mes jeunes années.

 

Pour « la jeunesse fracassée » le Père Cent désignait le faire-part et la fête du libérable qui a lieu 100 jours avant la fin du service militaire.

 

La quille bordel !

 

Le service militaire moderne a été créé en 1905 par la loi Berteaux dans un contexte d’après-guerre que l’on connaît. Tous les hommes sont appelés sous les drapeaux durant 2 ans. Il n’y aura plus de tirage au sort, ni d’exemptions ni de remplacements. La durée sera ajustée en fonction des besoins : le contingent en Algérie, pour finir à 12 mois.

 

Le 22 février 1996 : le président Chirac annonce la professionnalisation de l’armée. S’en suit un grand débat national.

 

Le 28 mai 1996, Jacques Chirac propose « que le service national que nous connaissons aujourd’hui soit supprimé dès le 1erjanvier 1997  c’est-à-dire pour tous les jeunes nés après le 31/12/78

 

La loi est promulguée le 28/10/97 et la suspension devient effective en 2001.

 

Je n’ai pas échappé à la conscription mais j’ai effectué mon service national sous une forme civile : VSNA, en coopération en Algérie à la Faculté de Droit de Constantine pour 18 mois au lieu de 12.

 

Revenons au nouveau confinement touchant deux grandes régions et des départements limitrophes, donc Paris. Je constate qu’il sera pour les pékins de mon espèce plus vivable puisque je vais pouvoir faire du vélo, le rayon (pas de ma bicyclette) de 10 km est suffisamment large pour mon bonheur. Les librairies sont commerce essentiel.  Le couvre-feu est à 19 heures, alors la quille du côté de Pâques ?

 

En attendant, non pas Godot, mais le soleil, je vais continuer à déverser mes graffitis quotidiens et j’avertis ceux qui les exècrent que s’ils les lisent c’est qu’ils ont mauvais goût comme les vins nu qu’ils détestent aussi.

 

Précision : je n’aime pas jouer à la belotte, les seules cartes que j’ai maniées sont celle de l’aluette et  du poker.

 

17 janvier 2007

Un vrai jeu de bandits ICI  

 

Dans mon pays, la belotte était l'apanage des gars du bourg, l'aluette un jeu de paysans. Comme la Mothe-Achard était un gros bourg de commerçants, et comme un commerçant c'est quelqu'un qui veut être bien avec tout le monde, les concours de cartes organisés pour remplir les caisses des pompiers, des anciens d'AFN ou de la Vaillante Mothaise, étaient toujours mixtes. Ma génération considérait le bistro et les jeux de cartes comme des trucs de vieux. Nous préférions courir les filles. Quand nous nous alignions dans les concours, officiellement pour nous fendre la gueule, c'était l'aluette que nous choisissions. Pour deux raisons, d'abord parce que nous y retrouvions les figures les plus emblématiques du pays – des tronches en général affublés de sobriquets savoureux : Bite au dos, Lucien dit le Caïphe, Morisset dit Cécette, Romain dit Maës... – ensuite, parce qu'à l'aluette on joue à la parlante (voir § 3)et qu'on se fait des signes. Y'avait donc une ambiance pagnolesque, l'accent en moins. Du côté jaja, on barbotait dans l'infâme et le toxique.

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