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21 novembre 2011 1 21 /11 /novembre /2011 00:09

En ce temps incertain qui précède ce dont les Français raffolent le plus : la campagne électorale pour l’élection présidentielle je n’ai pas pu m’empêcher de jouer avec le mot Champagne qui comme chacun sait signifie campagne. Ce faisant, contrairement à ce que j’écrivais souvent pour  justifier les errances de ma plume, je n’ai pas l’esprit de l’escalier mais plutôt l’esprit de marelle. En effet, suite à la remarque d’un lecteur je suis allé vérifier la signification de cette expression et j’ai découvert  que l’esprit de l’escalier, ou esprit d’escalier signifiait que l’on pense souvent à ce que l’on aurait pu et dû dire de plus juste, après avoir quitté ses interlocuteurs ; « l’inspiration nous vient en descendant l’escalier de la tribune », mot de Diderot, dans son Paradoxe sur le comédien.

 

Pour le mot compte associé à campagne il évoque les valises pleines de précieux liquide alors que le taulier en suggérant que je me colle à un conte de champagne n'a pas voulu sous-entendre que, moi, Marie de Saint Drézery marquise de Bombon je me mettais à la colle avec un comte de Champagne.


Vous voyez comme c'est simple l'esprit de marelle ; marelle qui, avec son parcours dessiné sur le sol : simple tracé à la pointe du pied dans la poussière ou marqué à la craie sur le bitume du préau de l’école, va de la terre au ciel et se joue à cloche-pied. Jeu d’évitement : les pierres des autres et les limites, c’est aussi un jeu de filles. Et alors ? J’aime les filles mais pour satisfaire les tenants de la virilité je peux aussi faire dans la métaphore sportive et dire que je fais des passements de jambes, que  je change de pied pour tenter de vous surprendre mais comme je n’ai pas le talent de Zidane il m’arrive souvent de m’emmêler les guiboles.


Tout ça pour vous dire que venant de lire le second opus de Jean-Paul Kauffmann « Voyage en Champagne 1990 » il me fallait rebondir face à la dédicace taquine de JPK « Pour Jacques Berthomeau qui n’aime pas le champagne, je crois, non ? » Aurais-je manqué au Champagne sur cet espace de liberté ? Non bien sûr, ce désamour supposé, je le sais, n’a rien à voir avec mon amour immodéré du vin de Champagne, mais trouve ses racines profondes dans ma mauvaise réputation. Je ne suis pas sortable et surtout en Champagne. Et pourquoi me direz-vous ? Je ne sais pas, ou je fais comme si je ne le savias pas, seul Ghislain de Montgolfier pourrait vous éclairer.


Trêve de mystère et boules de gomme ce qui est incontestable c’est que je n’ai mis les pieds en Champagne que quatre fois dans ma vie et, à chaque fois, en fonction, loin des vignes : un voyage d’études avec des énarques et un dîner chez Ruinart juste avant 1981 puis suite à mon rapport pour rencontrer le président de la CNAOC et Yves Bénard et enfin récemment pour un autre rapport dont je tairais le nom. Comme vous le constatez c’est l’horreur absolue, la mise à nue d’un chroniqueur imposteur, et c’est pour cette raison que, toute honte bue, je ne pouvais ce matin que me livrer d'abord à ce coming out et ensuite, pour me sortir de ce mauvais pas, sortir ma botte secrète : Marie de Saint Drézéry.


Pour ne rien vous cacher au cœur de l’Ouragan Marie de Saint Drézéry se cache un zéphyr de légèreté qui permet d’aborder les sujets qui fâchent. Notre marquise de Bombon sait poser le doigt là où ça fait mal avec grâce et élégance. Le taulier lui a beaucoup crapahuté du côté de Cognac qui est l’image inversée de l’organisation du champagne. Il y a croisé : Christophe Navarre actuel PDG de Moët-Hennessy, Dominique Hériard-Dubreuil qui s’est aventurée en Champagne avant de s’en retirer, les gens de chez Pernod-Ricard qui juraient qu’on ne les reprendrait pas à vendre du champagne (Besserat de Bellefon) et que le cognac n’était pas leur tasse  de thé et qui sont revenus en Champagne avec Mumm et Perrier Jouet et ont conforté leur position à Cognac avec Martell… Que du beau monde, mais qu’irait-il faire en Champagne ?


En deux chroniques magistrales en janvier 2008 : Les champenois y font rien comme les autres...link et Je rêve d'épouser la veuve du sacristain de Bouzy...link  le taulier s’était déjà aventuré sur les terres de la Champagne pouilleuse mais lorsque JPK dans sa postface lève les mêmes lièvres (lire ci-dessous), alors il m’a dit avec grandiloquence : Marie tu seras mon Missi Dominici ! 

 

« La nouveauté est que le Great Game* champenois se joue pour une large part à Paris et non plus à Epernay ou à Reims. Ce déplacement du pôle de décision vers la capitale, qu’ont choisi d’habiter les chefs de maison des grands groupes et leurs états-majors, est un objet de préoccupation pour l’avenir. L’absence d’enracinement est un handicap pour un produit issu de la terre. Une marque de champagne a besoin d’être représentée autrement que par un gestionnaire qui sait baisser les coûts et optimiser les stocks. Il entre en effet dans cette fonction une dimension humaine et culturelle impliquant un ancrage solide et durable dans l’environnement immédiat. Poser au milieu du vignoble pour la photo, convier à déjeuner la presse dans les salons désuets de la marque soigneusement entretenus et repartir ensuite pour la capitale constituent les limites de l’exercice. »


Et, avec son air de pas y toucher, un peu chanoine sur les bords, le taulier m’a dit : « tu y passeras aussi tes week-end, sinon tu manqueras l’essentiel : la messe ou le temple, le passage à la pâtisserie et la brocante… » et il a soupiré : moi je me contenterai d’aller à la rencontre des petits vignerons qui font et a sitôt appelé son vieil ami Ghislain de Montgolfier en me confiant, avant que celui-ci ne décrochât, qu’il me faudrait trouver un éditeur ce qui serait plus facile pour moi que pour lui qui n’est qu’un chroniqueur de l’inutile…

  • Expression inventée par Rudyard Kipling pour désigner au XIXe la lutte d’influences en Asie centrale  entre l’Angleterre et la Russie. Le Grand Jeu est aussi le nom de la revue lancée en 1928 par quatre lycéens de Reims parmi lesquels Roger Vaillant et René Daumal.
  • Le terme de chef de maison serait intéressant à décrypter, à Cognac on ne parle que de chefs de famille pour désigner ceux qui s’affrontent au BNIC.9782849902011.gif
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20 novembre 2011 7 20 /11 /novembre /2011 07:00

Ça faisait un bail que ce bout de ma vie n’était pas remonté à la surface : la vague rose de 1981, la fête à la Bastille, Mitterrand rose à la main se perdant dans le ventre du Panthéon, la vieille garde de la Convention des Institutions Républicaines, une forme d’ivresse face à une droite KO debout, le procès de la compétence, quatre communistes, les plus présentables, au gouvernement de Pierre Mauroy : Charles Fiterman Ministre d’Etat, Anicet Le Pors, Jack Ralite et Marcel Rigoud, les nationalisations :cinq groupes industriels la Compagnie Générale d’Électricité, Péchiney-Ugine Kuhlmann, Rhône-Poulenc, Saint-Gobain et Thomson-Brandt, deux compagnies financières (Suez et Paribas) et 36 banques, l’abolition de la peine de mort… Dans ce maelström désordonné la garde rapprochée d’un Rocard confiné dans un Ministère du Plan sans grands pouvoirs battait le rappel et, par une succession de rencontres amicales je m’étais retrouvé propulsé dans le marigot politique. Rien que des bons souvenirs et un carnet d’adresses dodu. Se préparer aux échéances futures, la machine huilait ses rouages dans l’attente du grand combat présidentiel. Bien évidemment, eu égard à mon expérience, j’œuvrais dans le cambouis.

 

Stef en était lui aussi. Lorsque « Rocard d’Estaing », dixit cette vieille roulure cryptocommuniste de Chevènement, se scratchera aux européennes par les bons soins de Bernard Tapie manipulé par Mitterrand, la machine volera en éclat, chacun reprendra le fil de sa vie professionnelle et seuls les d’amitiés perdureront. J’aimais bien Stef, un vrai démerdard, fidèle, traçant sa route avec le génie de miser toujours sur les bons chevaux. Lorsque son nom s’afficha sur l’écran de mon téléphone je savais par avance que j’allais de nouveau plonger dans la merde. Notre échange fut concis. « Je lui dois bien ça, tu comprends… » me disait-il. Oui je le comprenais et, en creux, je savais que j’allais exercer le même devoir en réciproque. Par amitié pour Stef et non pour l’autre dont l’incommensurable légèreté arrogante m’avait toujours déplu. Aimer le cul est une chose fort compréhensible mais se vautrer dans le n’importe quoi lorsqu’on ambitionne de se présenter à un tel poste m’apparaissait comme de la pure inconscience. Mais tout cela je le gardais pour moi, le devoir d’amitié passait largement au-dessus de mes analyses personnelles.

 

Restait Jasmine ! En raccrochant je prenais conscience que j’avais charge d’âmes et que, pour une fois, je devais m’expliquer. Ça peut paraître simple, sauf que jusqu’ici je n’avais jamais pratiqué. Mes décisions je les avais toujours pris seul. Je n’engageais que moi. D’un seul coup je me sentais démuni et un peu honteux d’avoir donné ma parole sans réfléchir. Une fois rentré, au lieu de me mettre devant mon écran pour écrire je m’installai dans la cuisine pour me préparer un plat de pâtes. J’avais besoin d’énergie lente pour avoir le courage de dire à Jasmine que j’allais au casse-pipe pour un type qui en valait tout juste la peine.

-         Je prends l’avion ce soir pour New-York…

-         Tu as bien réfléchi mon amour ?

-         Non…

-         Alors puisque ta décision est prise je ne te demande qu’une seule chose : fais-le cracher un max…

-         Tu n’y penses pas !

-         Ce n’est pas une hypothèse mon grand c’est une exigence…

-         Mais…

-         Il n’y a pas de mais… tout travail mérite salaire… de toute façon c’est moi qui vais régler tout ça…

-         Avec qui ?

-         Donne-moi ton téléphone !

Je m’exécutai. Elle appuya sur le numéro du dernier appel et je poussai un lâche soupir de soulagement.

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20 novembre 2011 7 20 /11 /novembre /2011 00:09

Leader-Price-002.JPGComme j’y étais invité, sur le coup de midi mardi, je suis allé à la dégustation du beaujolais nouveau de Dominique Piron, assemblé avec Jean-Pierre Coffe pour Leader Price au restaurant Mon Vieil Ami, en l’Île Saint Louis. Il était écrit sur l’invitation que c’était autour de délicieux plats lyonnais... et en musique, grâce à l’accordéoniste Roland Romanelli...

 

Moi j’aime bien Dominique Piron et déjà l’an dernier j’avais salué son initiative pour promouvoir du bon Beaujolais Nouveau vendu par Leader Price. Pour moi c’est clair tout ce qui concourt à redonner au Beaujolais, et au Nouveau qui fut un beau temps fort de la convivialité festive, me va. Tout le reste n’est que littérature, parti-pris et petites chapelles d’excommunicateurs qui se disent buveurs. J’affirme qu’on peut aimer le Beaujolais de JP Brun, de l’ami Cyril Alonso, et de quelques bons vignerons du cru, et ne pas mettre au piquet le Nouveau de Leader Price assemblé par JP Coffe.

 

Je sais que Coffe « exaspère » la blogosphère et sur mon espace de liberté je ne l’ai pas ménagé. Ceci écrit c’est la vie que l’on vit. Le Nouveau de Coffe était de très bonne facture, joyeux, j’ose même écrire originel. Ne jamais jeter le bébé avec l’eau du bain et relire ma chronique de jeudi  link le monde du vin ce sont de belles et jolies bouteilles mais aussi des cols qui permettent de mettre en marché des volumes. La GD est faite pour cela alors lorsqu’elle le fait bien je ne vois pas au nom de quoi il faut lui cracher dessus.

L’an dernier Leader Price avait vendu 27000 bouteilles de BN, cette année les commandes sont en hausse : 30 000 bouteilles dont 6000 partiront à l’export principalement chez nos amis belges. Le prix de vente en magasin 3,95 €.

 

Vous allez me dire que je vous ai embarqué sur une fausse piste avec le titre de ma chronique puisque je vous parle du BN de papy  Coffe. J’en conviens mais si vous avez été attentif à mon entame : le mâchon, fort bon d’ailleurs, était en musique avec Roland Romanelli l’accompagnateur de Barbara. Il y était en compagnie de Rébecca sa muse chanteuse avec qui il produit un spectacle « Barbara 20 ans d’amour » au théâtre Hébertot 7 bis Bd des Batignolles dans le XVIIe à Paris http://www.caspevi.com/barbara-20-ans-damour/


« Vingt ans…Elle a eu le temps de m’apprendre ce qu’est la vie, la musique, l’amour…

Ce spectacle, je le lui devais; il est le reflet de ce que j’ai vécu auprès d’elle : ses colères, ses joies, ses éclats de rire… son professionnalisme, sa mauvaise foi aussi, son côté exclusif… et son amour pour ce métier qui était toute sa vie. 

Il est aussi ma plus belle récompense, et je le vis avec sincérité, avec amour et respect, en compagnie de Rébecca, la partenaire que j’ai choisie, et avec qui j’ai parfois la troublante impression de revivre certaines situations, certaines ambiances dont était tissée notre complicité, tant artistique qu’amoureuse… 

Mon espoir est de donner à vivre au public à travers ses chansons, ces instants si intenses où l’on apprend la vie, et de graver dans la mémoire des jeunes, présents, passés et à venir, ce nom d’un monstre sacré qui pour moi ne s’éteindra jamais, BARBARA. »


Roland ROMANELLI

 

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19 novembre 2011 6 19 /11 /novembre /2011 00:09

« Pour une minorité avide, les cours du vin doivent correspondre à la hausse maximum, le client doit cracher (il n’y a pas d’autre mot). Le juste prix, compromis entre les exigences du producteur et les possibilités de l’amateur, provoque chez eux une franche hilarité. Pourquoi se priver quand on est en position de force ? Dans leur cerveau, ils ont logé ces certitudes : nos crus classés sont des produits de luxe (des produits financiers aussi), leur surface n’est pas extensible (elle l’est un peu tout de même, en plus, c’est permis), la demande est supérieure à l’offre (pour l’instant), le rapport de force sera toujours en notre faveur (il a déjà commencé à changer avec la crise de la dette : l’austérité va se traduire par une austérité des comportements qui ne manquera pas de jaillir aussi sur le luxe et le marché chinois). Mais il est vrai qu’une poignée de crus historiques tirera toujours son épingle du jeu. »


C’est ce qu’écrit Jean-Paul Kauffmann dans sa postface de son opus Voyage à Bordeaux 1989. Il ajoute « Cette fois, un seuil a été franchi<. L’écart est tel qu’il ne saurait justifier des prix aussi prohibitifs même si ce propriétaire peut invoquer la loi de l’offre et de la demande. Certes un cru classé est une marchandise mais il ne détient pas qu’une valeur commerciale. C’est aussi une création originale dans la mesure où elle est doublement culturelle, issue d’une terre en même temps que d’une civilisation. « Attention, produit atypique et inclassable, à ne pas mettre entre toutes les mains. » C’est une mise en garde qu’on pourrait afficher sur des panneaux au milieu du vignoble »

574948462.jpgDeux hommes viennent de mourir, peu connus du grand public : Hubert Nyssen et Guy Dejouany. Le premier a créé en 1968, avec sa seconde épouse, au Paradou, dans la vallée de Baux, à quelques kilomètres d’Arles une association : l’Atelier de cartographie thématique et statistique (Actes). « Il commence par l’écriture » puis il passe ensuite à l’édition avec les fameux petits livres 10x19 d’Actes Sud et leurs couvertures dessinées par son épouse Christine le Bœuf. « Mais Hubert Nyssen n’aurait pu imaginer que, trente ans plus tard, sa maison sortirait 500 nouveautés par an, aurait un catalogue très international de quelques 9600 titres. » note Josyane Savigneau dans le Monde. Grâce à lui j’ai pu découvrir Nina Berberova, Paul Auster, Don De Lillo et bien d’autres…


Créateur donc, mais contrairement à beaucoup de ceux qui ont mené une grande aventure personnelle, il a su transmettre. Depuis 2000 il s’est progressivement retiré de l’activité éditoriale en confiant la direction d’Actes Sud à sa fille Françoise. « Il a su accompagner ses désirs de développement, et ceux de son mari, Jean-Paul Capitani : le siège d’Actes Sud est devenu aussi une librairie, un restaurant, un hammam, un cinéma. » « Je n’aime pas posséder, capter, j’aime que tout circule… » disait Hubert Nyssen.


Une pleine page dans le Monde pour la disparition d’Hubert Nyssen et presqu’autant pour celle de Guy Dejouany dans les Echos. « Le Sphinx » qui avec les Ambroise Roux à la CGE et Marc Viénot à la Société Générale, a été dans les années 80 un bâtisseur d’empire à la française avec la Compagnie Générale des Eaux. D’une PME spécialisée dans la distribution de l’eau il fit un pilier du CAC : 200 000 salariés, 2000 filiales et 24 milliards d’euros de CA. « On l’a souvent comparé à Mitterrand, pour sa façon de tirer à distance les ficelles entre les hommes, nourrissant les ambitions des uns contre les autres, édifiant un management d’émulation » explique Henri Proglio qui fut l’un de ses vassaux. Dejouany repoussa deux fois l’âge de son départ à la retraite mais rattrapé par le juge Jean-Pierre, il passera la main au désormais célèbre Jean-Marie Messier trente-sept ans, prototype de la tête d’œuf à la française, qui « n’avait jamais rien dirigé d’autres que sa secrétaire… » selon la formule d’un des membres du CA de l’époque. La suite vous la connaissez, c’est la saga calamiteuse de Vivendi-Universal et la chute de J 4M Marie Messier Moi Même…

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Voilà, ce n’était rien que pour vous dire que je n’aime rien tant que les bâtisseurs, les vrais, comme Hubert Nyssen, qui a commencé dans sa bergerie et 20 000 francs de capital. Les autres, les voraces, ce que n’était pas à titre personnel Guy Dejouany, tous ceux qui se contentent de bâtir leur fortune personnelle à coups de stock-options, de rémunérations mirobolantes, de retraites-chapeaux, comme l’était Daniel Bouton, le Président déchu de la Société Générale un grand acheteur de GCC, tout en n’assumant pas leurs choix hasardeux, sont à l’image de nos sociétés où « l’élite » économique et financière des profiteurs. Et qu’on ne vienne pas me rétorquer que je suis de ceux qui n’aiment pas la réussite. Bien au contraire je m’en réjouis toujours lorsqu’elle a valeur d’exemple, lorsqu’elle est le fruit du faire de femmes et d’hommes qui créent, osent, prennent des risques mais savent, à l’heure de la reconnaissance sociale, se souvenir de ce qu’ils ont été.

 

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18 novembre 2011 5 18 /11 /novembre /2011 11:00

 

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Cher Jean-Marie,

 

Je viens de visionner le documentaire «  C'est arrivé dans une cave près de chez vous » link réalisé par Jean-Yves Cauchard, je suis stupéfait, atterré et ébranlé par ce que toi, ta famille et tes collaborateurs venez de subir et d’endurer pendant des mois et des années de la part de fonctionnaires d’État, assermentés, dans l’exercice de leur fonctions de police judiciaire.


Jean-Marie, mon ami, le serviteur de l’État que je suis est partagé entre colère froide et grande honte. Oui vraiment j’ai honte, une honte qui en appelle, sans faire de phrases, à réparation. J’admire ta force d’âme et ta dignité, ce bel orgueil à la Guffens face à une adversité si méprisable. Il n’empêche que cette affaire est indigne d’un véritable État de Droit, vous avez souffert dans vos corps, vos cœurs et vos âmes, dans votre dignité, d’un acharnement, d’une volonté de vous nuire et de vous briser. C’est intolérable et ça ne doit pas être toléré.


Bien évidemment, Jean-Marie, a aucun moment, tu n’as fait état auprès de moi de ces horreurs, de tes tourments, alors maintenant tu m’es redevable que d’une seule chose : accepter que je m’enrôle à tes côtés. Mon espace de liberté est ouvert à ta juste cause.


Dans cette attente reçois, cher Jean-Marie, mes excuses de citoyen, mon regret de ne pas avoir su et pu t’accompagner dans la tourmente et l’assurance de cette franche amitié que nous avons nouée un soir, tout au bout de la nuit, à Apt avec ce cher Jean-Louis.


Embrasse ceux qui te sont chers de ma part et à bientôt autour d’une bouteille de Guffens seule appellation qui sait dire merde à ceux que Fernand Raynaud a si bien campés.

 

Jacques Berthomeau

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18 novembre 2011 5 18 /11 /novembre /2011 00:09

Le vin du jour se dénomme 1963  ORIGINE c’est un Bordeaux Supérieur élaboré par Patrick Boudon www.vignoble-boudon.fr C’est un Petit Verdot majoritaire (70%), un vin AB, et pour faire bon poids : un point d’interrogation : pourquoi 1963 ?

Marjolaine-004.JPGComme vous vous en doutez je répondrai à cette question mais il vous faudra patienter car, pour votre taulier, 1963 est un point de bascule important, équidistant de 1958, l’année de ses 10 ans et 1968 celle de ses 20 ans car c’est l’année où il a passé sa première partie de bac (supprimée cette année-là) en série M’ (sciences) et que sa grosse note en français lui a fait choisir la série Philo à l’Institution Amiral Merveilleux du Vigneaux au Sables d’Olonne. Même si ça va faire sourire les djeunes je quittais alors pour la première fois, à la rentrée de septembre, mon patelin natal : la Mothe-Achard. Jusqu’en première en effet je fréquentais l’école d’Agriculture de ND de la forêt située à 500 mètres de la maison de mes parents au Bourg Pailler.


Ainsi, chaque matin et chaque soir nous prenions le car pour rejoindre les Sables d’Olonne, et dans le car y’avait des filles qui elles allaient à Sainte Marie du Port. Les filles donc et, comme vous les savez celles-ci occuperont une place privilégiée dans la vie du taulier. Cependant, au risque de décevoir les égrillards, 1963 fut une année où ma conscience politique commença à lever. En quelques dates ci-dessous des petites graines germaient dans le terreau de la bien-pensance de mon enfance. Irruption aussi de la musique dans mon petit univers.

 

1963 fut donc une année à la fois lourde : assassinat de Kennedy, mort de Jean XXIII, marche des droits civiques, le garrot de Franco et légère : les filles, les Stones, la réconciliation avec les « boches » de pépé Louis, le non de De Gaulle aux anglais… Et pour sourire, si je puis dire : deux tubes Dominique de sœur Sourire et Elle était si jolie d’Alain Barrière à l’Eurovision


14 janvier : Charles de Gaulle rejette la candidature du Royaume-Uni au Marché commun.

 

22 janvier : Signature du traité de l'Élysée d'amitié entre le président français Charles de Gaulle et le chancelier de l'Allemagne fédérale Konrad Adenauer.

 

20 avril : Exécution en Espagne du communiste Julián Grimau.

 

En juin, sortie du premier 45 tours des Rolling Stones, avec, sur la face A, une reprise de Chuck Berry, Come one, et, sur la face B, I want to be loved de Willie Dixon.

 

3 juin : mort du Pape Jean XXIII (Angelo Giuseppe Roncalli), pape italien (1881).

 

26 juin : Voyage triomphal de John F. Kennedy en Europe et à Berlin, accueilli par une immense foule sur la Rudolph Wilde Platz, il prononce une brève allocution «Ich bin ein Berliner».300px-JFK_speech_lch_bin_ein_berliner_1.jpg

 

10 août : Fingerstips de Stevie Wonder (âgé de 12 ans), est en tête du palmarès international.

 

28 août : Marche vers Washington pour le travail et la liberté, une gigantesque marche pour les droits civiques à Washington (200 000 manifestants) avec le discours de Martin Luther King contre la ségrégation raciale : I have a dream.300px-1963_march_on_washington.jpg

 

22 novembre : Assassinat du président John Fitzgerald Kennedy à Dallas.

 

Alors pourquoi avoir baptisé cette cuvée 1963  ORIGINE?

 

Patrick Boudon : « Origine : intuition, respect de l’homme et de son environnement sont les valeurs qui ont motivé mon père à reconvertir le vignoble à l’agriculture biologique cette année là. Depuis, j’ai l’intime conviction d’avoir mis en place un équilibre essentiel de nature à permettre l’expression la plus pure du raisin. Une belle rencontre entre mon terroir et le vigneron que je suis, à partager avec vous. »

Marjolaine-003.JPGCe 1963  je l’ai dégusté et apprécié à Marjolaine hors la présence de Patrick Boudon. C’est très majoritairement un Petit Verdot (70%) vendange 2008. Comme me l’a dit Patrick Boudon, avec humour, lorsque je suis repassé sur son stand c’est un « vin de garage » : un tout petit nombre de bouteilles.  Du caractère, une force tranquille, vin chaleureux et fruité qui va bien avec ce début d’automne lumineux et un peu frisquet le matin.

Mais bien sur le Vignoble Boudon c’est bien plus que 1963, vin de l’origine : Château Haut-Mallet etDomaine Du Bourdieu, 30 ha de vignes dans l’Entre Deux Mers, produisant en moyenne 150 000 bouteilles par an. www.vignoble-boudon.fr

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Little Stevie Wonder - Fingertips 1964 par essentialme

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17 novembre 2011 4 17 /11 /novembre /2011 16:00

Il est de bon ton dans les cercles qui pensent le vin plus qu’ils ne le boivent de crier haro sur le baudet à propos de ce que fut pendant de longues années l’arrivée du Beaujolais  Nouveau. Que celui-ci, emporté par son succès planétaire, se soit vautré dans la facilité, voire même la médiocrité, je suis le premier à en convenir. Pour autant le revirement brutal de jurisprudence, ce désamour ostensible, à propos de ce vin qui se voulait simple et festif, ne se fondent pas exclusivement sur une soudaine prise de conscience du niveau de la qualité ou de l'authenticité du jus du Beaujolais Nouveau de la part des joyeux buveurs.

Corbieres-004.JPGDans notre vieux pays la caste intellectuelle a toujours méprisé, ignoré tout ce qu’elle considérait comme l’apanage du populo : l’accordéon par exemple, piano du pauvre, sauf à aller s’encanailler dans les bistros ou les lieux malfamés. Le vin en fut un bel exemple tant qu’il se scindait en deux parts très inégales : la boisson du peuple majoritaire et les vins fins apanage des grands amateurs et des gens aisés. Avec l’urbanisation, la montée des classes dites moyennes, de l’emploi tertiaire, le vin est devenu un marqueur social, un produit de statut : dis-moi ce que tu bois et je te dirai qui tu es.


 Où est la fête maintenant, la vraie, joyeuse, ludique, ouverte, sans distinction d’appartenance ? En posant cette question je n’affirme pas qu’elle n’existe plus mais je constate que l’arrivée du Beaujolais Nouveau sera fêtée majoritairement dans les lieux de dégustations, entre membres de tribus, d’initiés, de gens du vin, où, bien sûr on échangera : sur le vin bien sûr, on grignotera, mais où la fête sera étrangement absente. Ce qui faisait le charme du Beaujolais Nouveau des belles années c’est que dans tous les lieux publics, monsieur et madame tout le monde, sans complexe, sans les béquilles du vocabulaire expert, participait à la fête. Ça donnait un air de fête, comme un supplément de bonne humeur.


Sans vouloir pousser le bouchon trop loin c’est à l’image de la danse d’aujourd’hui : on danse seul au milieu des autres, on se met en scène, alors que lorsqu’arrivaient les slows ou les tangos c’était vraiment au bonheur des corps, ce qui ne signifiait pas pour autant que les danseurs finissaient la soirée dans le mitan du lit. Il fallait faire le geste d’aller inviter sa danseuse, quitte à essuyer un refus, premier acte social que la démarche vers l’autre. Tout ça c’est ringard ! Le vin est entré dans sa phase intellectuelle : il faut penser le vin avant de le boire. « Oui, oui, l’accordéon c’est génial quand c’est le bandonéon de Piazzolla que nous écoutons avec ma copine en buvant un bon petit Beaujolais nature de chez… »

Corbieres-003.JPGOui j’avoue sans honte que je me fais très souvent chier dans tous ces pinces-fesses du vin où le sens de la fête a disparu pour laisser place à, soit au truc super chiadé par une agence de communication, soit à un truc approximatif où les gens tirent des têtes de trois pieds de long. Alors, dis, quand reviendras-tu, le temps où l’on ne se prenait pas la tête avant de faire la fête ? Resterait-il plus que les vieux pour la faire, ainsi Yves Legrand en sa guinguette du Chemin des Vignes à Issy-les-Moulineaux où en plus du bien boire et du bien manger la maison fait dans le culturel  avec une exposition « L’année des Forêts » de Catherine FEFF, les dédicaces de Benoist Simmat et Philippe Bercovici de leurs livres « Les caves du CAC 40 » et « Dico-Vino » et une animation « couccounic » par la fanfare « les Jacky Parmentier » Bien sûr on va me dire que dans la province profonde la fête est toujours au rendez-vous du Beaujolais Nouveau. Merci de m’envoyer des photos. Bonne soirée à toutes et à tous…

 

Et pour qu'Eva s'envole je lui offre NIRVANA Rap me

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17 novembre 2011 4 17 /11 /novembre /2011 00:09

Cocorico ! C’est à la Une des Echos : La France redevient le premier producteur mondial de vin,link en volume bien sûr. Le directeur de l’OIV Frederico Castelluci le 8 novembre a permis au vin de sortir des pages obscures de la presse spécialisée. Je ne vais pas comme mes chers confrères, y compris bloggeurs, m’en tenir au verbatim de Frederico Castelluci mais tout d’abord mettre en perspective les statistiques volumiques pour que les charmants petits loups et louves qui comptent en quilles apprennent ce que sont les ordres de grandeur ; ensuite je soumettrai à votre sagacité les tableaux de chiffres et les courbes publiées par l’OIV.

 

La production mondiale est stable 2011 : +1% à 269,8 millions d’hl c’est 36 000 000 000 bouteilles de 75 cl (36 milliards soit 5 kils par habitant de la Terre) et 1% de plus c’est 360 millions de bouteilles à siffler en plus.

 

Vertigineux, non !

 

Pour la France la récolte 2011 c’est 49,6 millions d’hl soit +9% de plus et donc en bouteilles : 6 613 000 000 soit un surplus  de bouteilles d’environ 66 millions de cols.

 

Presqu’autant que d’habitants de notre vieux pays va falloir rendre le vin obligatoire pour éponger le surplus.

 

Pour ne pas vous saturer la tronche de gros chiffres je ne recommence pas l’opération pour l’Italie dont la production plonge de 13% à 42,2 millions d’hl.

 

Et pourtant on arrache de la vigne en Europe surtout (cet hiver 2011-12 se terminera la troisième et dernière campagne d’arrachage dans le cadre de la nouvelle OCM vins). 45000 à 50 000 ha devraient donc être rayés du potentiel viticole européen.

 

Dans l’ordre l’Espagne 28 000 ha, l’Italie 9000 ha et la France 6000 ha…

 

Et pourtant la production n’a pas régressée, elle reste stable. Donc la productivité de la vigne européenne augmente. Vive les petits rendements !

 

Du côté de la concurrence la croissance des surfaces plantées dans l’hémisphère Sud et aux USA s’est ralenti, voire a régressée sauf au Chili. Pour les volumes : les USA affichent une baisse de10% à 18,74 millions d’hl, l’AFS est stable avec 9,25 millions d’hl et le Chili explose : +15,5% à 10,6 millions d’hl. L’Argentine 15,5 millions d’hl progresse légèrement et l’Australie 11,86 millions d’hl est stable.

 

France vigneronne : « combien d’hectolitres de vins en Languedoc-Roussillon en 2011 ? » et « en termes de comparaison ça équivaut à quel pays ? »

 

Que de vin, que de vins… Dites-moi comment on vend tout ça, à qui, dans quels pays ?

En termes d’écoulement, le sieur Castelluci table, dans l’hypothèse la plus pessimiste sur 235 millions d’hl et la plus optimiste sur 251,5 millions d’hl…alors que pour 2010 ce fut 243 millions d’hl.

 

Le Monde, qui reste encore une référence,  dans son 4 pages Economie titrait«  La France redevient le premier producteur de vin de la planète et sous-titre : au niveau mondial, la consommation devrait pâtir de la crise économique ». C’est en effet la bonne question car nous ne nageons pas, hormis les bulleurs des GCC, dans une douce euphorie. Après le trou d’air de 2008 et l’embellie de 2010 la consommation va-t-elle de nouveau piquer du nez ?

 

Méfions-nous des effets de focale : la crise de la dette souveraine touche la zone euro et, comme le développement de la consommation se situe hors zone euro, l’actuelle dynamique des exportations françaises devrait se maintenir sauf effet de contagion lié à une propagation de la pression sur les pays endettés, dont la France.

 

Le vrai risque c’est la pression sur les prix liée à la progression des volumes. Ce phénomène est souligné par le directeur de l’OIV « le vrai risque pour les petits producteurs est la grande distribution. Elle représente près de la moitié des ventes en Europe et fait jouer la concurrence pour baisser les prix. » Il clair pour moi que les vins d’entrée de gamme, dont beaucoup d’AOC régionales risquent de souffrir sur leur marché domestiques : France et UE sauf à ce qu’elles trouvent une meilleure sortie sur les pays tiers.

 

Mais tout ça c’est de la grosse cavalerie, du jaja à deux balles, des boutanches qui ne plaisent pas à ceux qui comptent les ventes de bouteilles sur leurs doigts. Cependant, dites-moi les gars et les filles on en fait quoi de toutes ces vignes, de tous ces vignerons ? On arrache leurs vignes  et on les reconvertit ? En quoi dites-moi ? Et puis ceux qui sont dessus on les réorientent vers quoi ? Pas de souci y’a ka… Y’a ka quoi ? Moi je suis assez rase-mottes sur ces questions, faut pas se contenter de me chanter la petite chanson habituelle qui court dans les salons de ceci ou de cela. Quand je dis ça vous savez parfaitement que je n’incrimine pas ceux qui font des petits ou des grands vins d’artisans mais je me contente de poser une question dont on ne peut pas se débarrasser facilement car elle est du genre sparadrap du Pr Tournesol.

 

Notre monde du vin compte tellement de beaux esprits, qui se réunissent à grands frais dans des lieux agréables pour soi-disant réfléchir à l’avenir, produire de l’intelligence, que je suis persuadé qu’ils vont se mobiliser pour y répondre… Tonton pourquoi tu tousses ? Ah, tu as avalé de travers ta dernière gorgée de GCC… Je suis désolé…

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16 novembre 2011 3 16 /11 /novembre /2011 00:09

 

Avec Jean-Paul Kauffmann nous ne nous croisons que peu souvent, physiquement du moins, mais mon petit doigt me dit que, chaque matin, ou presque,  ça nous arrive. Des liens quoi ! Alors, lorsque le postier a déposé un petit paquet emplit de deux livres dans ma boîte aux lettres, j’ai beaucoup aimé cette réciprocité. Et puis,  il y avait un petit mot sur chaque page de garde, bien plus qu’une dédicace, je vous assure ça encourage.

 

Je commence, en respectant la chronologie, par « Voyage à Bordeaux 1989 » chez Équateurs parallèles. Dans sa postface de JPK écrit que cette période, qui évoque un monde obsolète, celui du début des années 80, voire la fin des années 70, fut celui de sa découverte de l’univers du vin. Il menait, comme je le fais ici, une double vie, en étant rédacteur en chef de l’Amateur de Bordeaux le week-end et journaliste en semaine au Matin de Paris. « C’était mon hobby. En guise de délassement, certains choisissent le rugby, la guitare électrique ou la collection de timbres, moi je passais mon temps dans le Médoc ou à Sauternes, une distraction et non un métier. Je me suis toujours considéré comme un amateur, sans esprit de compétition ou d’autorité. L’amateur ne boit pas pour exhiber son savoir ou son habileté de dégustateur mais pour discerner ce qu’il aime et mieux comprendre sa délectation en se conformant à son propre jugement (…)

 

« J’abordais alors le vin avec une certaine naïveté dans ce moment unique qui précède la connaissance. Je le découvrais en même temps que mes lecteurs, les premiers essais constituant souvent les meilleures leçons (…)

 

« L’époque n’était sans doute pas ingénue, mais elle était plus simple, plus lisible, moins rouée qu’aujourd’hui. Elle se caractérisait surtout par un état mouvant, incertain. Ce champ des possibles avait un côté bon enfant (…)

 

« J’étais enthousiaste. Mon zèle devait attendrir mes interlocuteurs capables de perdre un après-midi dans des dégustations où l’on retraçait l’histoire complète du vin. Nous remontions le sens interdit du temps en goûtant tous les millésimes disponibles, les années moyennes ou franchement médiocres voisinant avec des bouteilles de légende telles que 1928, 1929, 1945, 1947, 1949. Une longue halte marquait le 1961 : « Le premier millésime moderne, le millésime Peynaud.  (…)

 

« J’ai toujours eu un faible pour les sciences inexactes telles que la météorologie, l’économie, sans compter la plus irrationnelle, la science-fiction. Mais de tous ces savoirs improbables, la dégustation reste sans doute le plus fascinant parce qu’il est une herméneutique, c’est-à-dire un art tout d’interprétation. À l’époque, cet exercice n’en était qu’à ses balbutiements. Il reste toujours à mon sens empreint d’une certaine puérilité dans la mesure où, sous couvert d’une description exhaustive, chacun interprète en fonction de ses propres représentations et de ses préférences.

 

Goûter le vin reste néanmoins une excellente école du jugement personnel. Il est aussi un assez bon révélateur de l’individualité. Interpréter ne consiste pas seulement à identifier mais aussi à s’identifier. « Le vin est professeur de goût et, en nous formant à la pratique de l’attention particulière, il est le libérateur de l’esprit et l’illumination de l’intelligence* », à écrit Paul Claudel. La dégustation possède au moins cette vertu qu’elle démasque la nature profonde des êtres. L’arrogance, la rigueur, l’humilité, la poltronnerie, la sagacité, l’opportunisme, la ruse, la cuistrerie, une certaine forme de sagesse (la liste n’est pas exhaustive) s’y découvrent fugitivement. Il suffit d’observer et d’attendre l’instant de l’aveu.

J’ai beau me méfier de l’exercice, je garde de ces dégustations passées un souvenir émerveillé. J’y ai appris le caractère relatif de la connaissance même s’il m’arrive de succomber parfois à la fatuité de celui qui identifie ou devine. »

 

Comme vous le savez je suis un grand amateur de petits livres (j’évoque ici le format bien sûr) que je peux aisément glisser dans la poche de ma veste ou dans mon célèbre sac Pan Am. Ce sont mes livres de soif, légers mais indispensables à ma satiété en tout lieu et en tout temps. Autant mes livres de chevet sont pansus, lourds, intransportables, mes petits livres jaillissent et m’abreuvent dans les salles d’attente bruyantes des aéroports que je fréquente pour aller voir mes vaches ou à la terrasse d’un café tranquille alors que je viens d’attacher mon grand destrier noir à la grille d’un jardin public.

 

« Voyage à Bordeaux 1989 » de Jean-Paul Kauffmann 17x11, 150 g, 150 pages, fut donc ces derniers jours mon compagnon fidèle et discret. Il en a fait des voyages avec moi, sans jamais se plaindre de mes traits de crayon  ni rechigner à se voir manipuler aussi bien dans les airs qu’au fond de la terre (le métro seulement). Mais puisque j’évoquais samedi Bordeaux-Bourgogne je ne puis m’empêcher d’évoquer le fait que, comme lui, ce fut Lalou Bize-Leroy qui m’a appris à aimer le Bourgogne. Comme lui j’ai déjeuné à Auvenay après avoir recollé les morceaux, non du vase de Soissons, mais d’une affaire déclenchée par Henri Nallet Ministre de l’agriculture link Je la vois bien dire à JPK, inflexible, intransigeante, comme elle le fit souvent avec moi qu’elle était perturbée par cette histoire d’assemblage : »Disposer de plusieurs cépages est une manière d’apporter des correctifs. Je suis opposée aux artifices qui permettent le repentir. J’aime cette idée qu’un cépage est une clé, la clé unique qui ouvre un terroir et permet d’en atteindre la vérité et le mystère. »

 

Ce livre a été écrit, dans la maison des Landes que Jean-Paul Kauffmann venait d’acquérir à un « moment périlleux de son existence »,  il y a 22 ans dans la foulée d'un texte qui lui est cher Le Bordeaux retrouvé où il relatait certains épisodes de sa captivité – trois années du 22 mai 1985, son enlèvement à Beyrouth avec Michel Seurat, jusqu’à sa libération le 4 mai 1988 – à travers la métaphore du vin. J’ai donc choisi pour illustrer ma chronique un beau dessin de SERRE. 

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15 novembre 2011 2 15 /11 /novembre /2011 12:00

SmithQuatro-5751.JPGJ’étais à Ferrals-les-Corbières et je ne le regrette pas. Mais quand je lis en commentaire sous la relation qu’en fait Michel Smith link cette lettre : la moutarde me monte au nez.

 

Bonjour,

 

J'étais dans les gradins à « l'université » de Ferrals. J'en ressors encore une fois avec la même impression : trop de blabla... et de moins en moins de vignerons !

Je suis un « jeune » vigneron des Corbières. Depuis mes premiers coups de sécateurs en 2007, je prends un plaisir énorme à tailler et à bichonner mes vieux Carignan. Je confectionne patiemment, mon « Carignan 1515 » ... que je déclare en « vin de table »!

Appellation ou marque ? Peu importe le flacon... c'est le vin qui compte !

J'avoue que plus ça va, plus je me sens mal à l'aise dans le « prêt à porter » de l'appellation Corbières. Dans quelques jours, je vais remplir ma 5ème déclaration de récolte et ça y est, c'est décidé : elle sera pour la première fois 100% Vin de France ! Vive la haute couture et vive la liberté !

En cela, je ne renie en rien mes racines, j'éprouve seulement le besoin de lâcher du lest afin de mieux exprimer l'identité de mes vins, l'identité de ma Corbières.

Et ce n'est qu'un au revoir...

Didier Ferrier


1-    Que ce « jeune » vigneron trouvât qu’il y eu trop de blabla ne me trouble pas. Difficile dans un amphi de se livrer à autre chose qu'à l’exercice de la parole ;

 

2-  Qu’il regrettât qu’il n’y eu pas assez de vignerons dans l'amphi me semble contradictoire avec son regret du peu de contenu des interventions. Ses collègues avaient mieux à faire et contrairement à lui ils n’ont pas perdu leur temps.

 

3-  Ce qui me rend vénère c’est que ce « jeune » vigneron ne se soit pas levé pour dire haut et fort sa frustration. Moi ça m’aurait plu.

 

4-  Il proclame « peu importe le flacon... c'est le vin qui compte ! »  fort bien !

 

5-   Il avoue « que plus ça va, plus je me sens mal à l'aise dans le « prêt à porter » de l'appellation Corbières. » très bien !

 

6-  Il s’écrie « Vive la haute couture et vive la liberté ! » excellent !

 

Donc ce « jeune » comme beaucoup d’autres est le monde a lui tout seul : il exprime mieux que quiconque l’identité de sa Corbière (moi je la mets au singulier). Il fait un vin de haute expression et il lui fallait un espace de liberté et il l’a trouvé. Grand bien lui fasse et je lui souhaite bon vent. Ce que comprends mal c’est qu’il dise que ce n’est qu’un au revoir alors qu’il a choisi son positionnement. Il faudra qu’il m’explique le futur scénario pour que je comprenne bien le sens de ses propos.

 

Pure curiosité intellectuelle car, comme je l’ai affirmé à Ferrals je n’ai nul message à délivrer le devenir de la Corbière ou des Corbières est entre les mains de ceux qui font le vin. Choisir ! Faire ! Moi j’ai le dos en compote et heureusement que Michel m’a pris en photo ça flatte mon ego !

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En Corbières je suis 100% addict Embres&Castelmaure et, cher Didier Ferrier, si vous vous êtes tant fait chier (pardon Nadine c’est du français) vous auriez dû me libérer et comme ça je serais allé partager quelques gorgeons avec mes amis car, pour eux,  le temps est à vendre, pas le mien puisque je sais le gaspiller…

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