J’aurais pu titrer cette chronique « Affreux, sales et méchants / Brutti, sporchi e cattivi » en référence au superbe film d’Ettore Scola, sorti en 1976 avec un remarquable Nino Manfredi, prix de la mise en scène à la 29e édition du Festival de Cannes. Mais c’eut été injuste car mes 3 fromages : le Castelmagnio 24 mois, le Termignon d’alpage, et le vieux Saint Nectaire, ont certes de sales gueules, des affreux mais qui ne sont ni sales, ni méchants.
Mon titre reste encore un chouïa racoleur car ces 3 bons vieux briscards n’ont guère d’odeur. Bien sûr ce ne sont pas des enfants de chœur ni des chanoines ou des prélats vêtus de brocart (une étoffe de soie rehaussée de dessins brochés d’or et d’argent) mais des marauds, à forte personnalité, venus du plus profond de leur terroir ancestral. Ne voyez aucune malice en leur association avec les vins des 2 Brocard, Jean-Marc le père, Julien le fils, même si, eux aussi savent ce qu’ils veulent et font. J’aime les gens qui font sans se soucier du quand dira-t-on.
J’ai passé une matinée entière avec Jean-Marc Brocard dans ses vignes et il a fait en permanence référence à ceux qui lui ont appris le métier de la vigne Emile Petit, son beau-père, ainsi que de « P’tit Louis », parent éloigné. Ces deux personnes qui lui ont transmis tout leur savoir et leurs connaissances sur le métier de la vigne et du vin. Alliance d’un savoir-faire ancestral (plus de quatre siècles) et le désir d’entreprendre et de créer du jeune homme de Saint-Bris le pays des cerisiers. Jean-Marc, en s’adressant à un vieux briscard comme moi, à propos de l’histoire du Chablis, que j’ai vécu aux côtés d’un certain Henri Nallet, député-maire de Tonnerre, et Ministre de l’Agriculture ayant la haute main sur les fameux droits de plantations permettant une expansion parfois inconsidérée, jouait cartes sur table. Nous nous comprenions. Constater avec lui sur les pentes abruptes les conséquences du non labour entre deux vignes côte à côte, l’une cultivée la sienne, l’autre désherbée. Des rigoles dans cette dernière, la terre qui dégringole tout en bas dans la chaintre et qu’il faut remonter. Et pourtant le propriétaire continue avec un stupide acharnement à ignorer les principes élémentaires de l’agronomie. Quand est-ce que nos plumes vineuses iront jeter un œil dans les vignes pour constater les « ravages » d’une conduite insoucieuse des grands équilibres ?
Je ne sais. Ce que je sais, c’est que Jean-Marc a eu l’intelligence, tout en passant petit à petit la main à son fils Julien qui, diplôme d’ingénieur en poche, revient s’installer auprès de son père par passion du métier au milieu des années 90, de prendre en compte le regard de celui-ci sur la vigne et son environnement. Avec lui, les pratiques de la culture en biodynamie sont appliquées au terroir et à la vigne. « Nous restituons la vigne au cœur de son environnement et utilisons des préparations à base de plantes afin de réveiller le système de défense naturelle de la vigne – à la manière du système immunitaire pour les êtres humains – en suivant le cycle lunaire pour les différents travaux de la vigne et du vin. Actuellement, une bonne partie du domaine est cultivée selon les pratiques de l’agriculture biologique et biodynamique. Nous continuons notre travail toujours dans le but d’améliorer la qualité de nos produits.» et de citer Lao Tseu « Produire et faire croître, Produire sans s’approprier, Agir sans rien attendre, Guider sans contraindre »
J’attends l’objection des petits loups et des petites louves adeptes du « petisme » que dénonce Jacques Dupont le régional de l’étape : mais Brocard père&fils ce sont des grands, beaucoup d’hectares ! Oui, ma réponse est celle du très sage Olivier de Moor « Si l’on souhaite vraiment voir se développer une viticulture soucieuse de son environnement, plus propre, ça passe par la conversion des domaines importants. » Elémentaire mon cher Olivier.
Retour sur mes 3 affreux pour vous les présenter :
1- Le Castelmagno l’italien 24 mois 71,65€ le kg Lire ICI link
2- Le Termignon d’alpage 46,50€ le kg Lire ICI link
3- le Vieux Saint-nectaire 29,75€ le kg ICI link
L’histoire du saint Nectaire link
« Le fromage Saint Nectaire prend la forme d'un disque plat de 20 cm de diamètre, 4 cm d'épaisseur pour un poids de 1,5 kg. L'affinage dure au minimum 6 semaines en cave humide sur lit de paille de seigle, avec raclages de la croûte. L'Appellation d'Origine est consentie aussi bien aux produits de fabrication laitière industrielle ou coopérative qu'aux fromages fermiers. Seul le marquage du fromage Saint Nectaire diffère. Les fromages fermiers sont revêtus d'une plaque elliptique (72 mm dans le plus grand diamètre, 38 mm dans le petit) portant imprimée en noir, dans des caractères de 8 mm de hauteur, la mention suivante « Saint-Nectaire fermier ». On y trouve également, au milieu de la plaque, sur la ligne de plus grand diamètre, le numéro d'immatriculation de l'atelier de fabrication.»
1 - Chablis 1er Cru MONTÉE DE TONNERRE link
2- Chablis 1er Cru Côte de Léchet link
Et j'aime beaucoup le Chablis la Boissonneuse link