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4 novembre 2018 7 04 /11 /novembre /2018 07:00
Que Ségolène Royal réglât ses comptes avec son ex, les éléphants du PS, Macron… etc. c’est son droit mais elle devrait aussi endosser ses responsabilités pour faire bon poids…

Que le monde politique, ou plus généralement les lieux de pouvoir, soient entre les mains des mâles c’est incontestable, que les femmes doivent se battre à armes inégales pour s’y faire une juste place c’est un fait, que les inégalités soient criantes est indéniable.

 

Que Ségolène Royal ait souffert tout au long de son parcours politique, surtout lors de sa candidature à la Présidentielles, je n’en disconviens pas. Cependant, dans ce marigot politique sans pitié, au sein d’un PS nid d’intrigues, de rancœurs recuites, de manœuvres sournoises, d’apparatchiks sans talent, elle ne peut s’exonérer, au nom de sa féminité, de ses propres responsabilités, de ses choix, de ses erreurs, de ses échecs. 

 

Pour avoir pratiqué Ségolène Royal lorsque j’étais Directeur de cabinet je puis témoigner que j’ai rarement vu dans mon parcours sous les ors de la République quelqu’un(e) d’aussi méprisant(e) vis-à-vis de ceux qu’elle considère comme des domestiques, d'aussi impérieuse, d’aussi soucieuse de son intérêt exclusif… Comme pour ses collègues mâles je n’ai jamais cédé à ses diktats pour obtenir des passe-droits pour ses chers électeurs des Deux-Sèvres.

 

« La ministre a un sens aigu de la hiérarchie- des employés du ministère rapportent qu'elle refuserait d'ouvrir les portes elle-même, ou de s'encombrer de ses documents et autres effets personnels. Comme ce soir du printemps 2000 où, ministre déléguée à la Famille du gouvernement de Lionel Jospin, en panne d'essuie-glaces sur l'autoroute, elle exige qu'une personnalité officielle de la préfecture de Poitou-Charentes vienne la chercher. Au moment d'entrer dans la voiture de secours, d'un geste, elle tend à la sous-préfète, qui a fait le déplacement... son sac à main. »

 

« Devenue assistante parlementaire en titre à l'été 1996, Évelyne Pathouot est victime quelques mois plus tard d'un accident vasculaire cérébral et verra son salaire « suspendu » en février 1997 pour cause de congé maladie. Elle dénonce l'irrégularité aux services administratifs de l'Assemblée, qui convoquent Royal, «folle de rage ». «Quand je lui expliquai que la suspension d'un mois de salaire était une véritable catastrophe, elle me rétorqua simplement : “Mais Évelyne, vous avez une pension alimentaire !”». Évelyne Pathouot s'interroge : comment une «militante de la cause des femmes (…) pouvait-elle considérer une pension alimentaire comme un privilège et non comme un droit ?»

 

Lire ICI 

 

« Ces travers pourraient conduire à une multitude de contentieux mais rares sont ceux qui osent briser la loi du silence et porter l'affaire en justice. D'autant que le principe de séparation des pouvoirs interdit tout contrôle de l'Inspection du travail dans les murs des deux Assemblées. Pourtant, certains sont allés au bout de leur démarche. Sylvia Edom, attachée parlementaire de Christiane Taubira d'octobre 2002 à avril 2003, a fini par obtenir, aux prud'hommes, la condamnation de l'ancienne Garde des Sceaux pour licenciement injustifié et par recevoir 5.300 euros de réparation. Les deux ex-attachées parlementaires de Ségolène Royal ont également obtenu, après un très long combat judiciaire, la condamnation de la ministre par la Cour de cassation. Mais ces cas sont isolés. "Personne n'a envie d'attaquer son député de peur d'être définitivement écarté de ce très petit milieu professionnel", constate Mickael Levy, secrétaire général adjoint de SNCP (syndicat national des collaborateurs parlementaires) FO. »

 

Autre versant occulté par Ségolène Royal : sa gestion de la région Poitou-Charentes

 

QUAND ROYAL RÉÉCRIT L'HISTOIRE DES COMPTES DE POITOU-CHARENTES 

 

«Un rapport bâclé par une stagiaire venue quelques heures sur place», «officine privée», accusations vicieuses... Il n’a fallu qu’une seule des 290 pages de son livre sorti hier, Ce que je peux enfin vous dire, à Ségolène Royal pour réécrire en trois formules l’épisode des comptes de Poitou-Charentes qui a agité la première année du conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.

 

«Calomnie», «prétexte pour démolir toutes les actions régionales que nous avions créées, notamment en matière d’excellence environnementale et de démocratie culturelle», Ségolène Royal reste fidèle à la ligne qu’elle tenait déjà en 2016, à une époque où la chambre régionale des comptes épluchait les comptes de la collectivité qu’elle a présidé dix ans: il n’y a rien à voir, rien à redire et toutes les accusations ne sont que règlement de comptes politiques. Histoire de convaincre un lectorat national, qui n’a pas forcément suivi tous les épisodes de ce psychodrame, Ségolène Royal ironise sur l’audit réalisé par Ernst and Young. Le cabinet international est renvoyé au simple rang «d’officine privée»: un rapport qu’elle décrédibilise, estimant qu’il a été effectué en quelques heures par «une stagiaire».

 

Problème, cet audit avait été effectué sur plusieurs mois, en plusieurs volets: et, surtout, Ségolène Royal oublie totalement de mentionner le rapport de la chambre régionale des comptes dont les conclusions étaient sévères: «l’état des finances de l’ancienne région Poitou-Charentes aurait nécessité à court terme, et ce vraisemblablement dès 2016, des décisions importantes en matière de réduction des dépenses et/ou de modification de la politique suivie auparavant en matière de fiscalité», écrivaient pourtant les magistrats, qui détaillaient par le menu la situation budgétaire «sous tension» de Poitou-Charentes, pointaient du doigt les prêts toxiques et leurs dérives et mettaient en exergue des ratios financiers ahurissants: 19 années pour rembourser la dette, une capacité d’autofinancement négative de 6 millions... En clair, une collective au bord de la cessation de paiement.

 

Dans le livre de Ségolène Royal, donc, tout ça n’existe pas. Zéro dérive, mais une femme politique courageuse face à un Alain Rousset qualifié de «président (qui m’a accusé) de façon vicieuse». Contacté ce mercredi, Alain Rousset a refusé de commenté ce passage du livre.

 

Hollande, Macron, Valls, Hulot, Jospin... On a lu le livre de Ségolène Royal, et ils en prennent pour leur grade

 

  • Sur François Hollande

 

Comme tout le monde le sait maintenant, j'ai été cruellement trahie avant et pendant la campagne de 2007, pour une femme de dix ans plus jeune, elle-même ensuite trompée pour une femme de dix ans plus jeune.

 

  • Sur Emmanuel Macron

 

On m'a parfois comparée à Emmanuel Macron ou à d'autres, comme surgissant au dernier moment. Rien n'est plus inexact !

 

  • Sur Nicolas Hulot

 

A mes yeux, chacun des pas en arrière [de Nicolas Hulot] l'a affaibli lui-même et surtout a affaibli la position du ministère pour les arbitrages à venir.

 

 

  • Sur Manuel Valls

 

Il me dit que c'est lui le chef. Je lui réponds que je ne trahirai pas la mission qui est la mienne : protéger l'environnement et la santé publique.

 

  • Sur Lionel Jospin

 

Quelle sagesse ? Il est évident que si, dans son livre, il avait mis le mot 'candidat noir' à ma place, l'auteur de ce chapelet d'injures aurait été renvoyé en correctionnelle pour propos racistes.

 

  • Contre les éléphants du PS qui l'ont "dénigrée" durant la campagne de 2007

 

Ils ont essayé de me manger, mais ils n'ont pas eu ma peau.

 

Lire l’intégrale ICI

 

Ségolène Royal encense Brigitte et Emmanuel Macron

 

Pourtant, si Ségolène Royal ne semble pas porter le chef de l’Etat de 40 ans dans son cœur, cela ne l’empêche pas de le complimenter sur son couple avec Brigitte Macron. Admirative de leur amour, l’ancienne ministre de l’Ecologie explique dans son livre : « Ce que je trouvais très sympathique et respectable, c'est qu'il ait osé épouser une femme de vingt ans de plus que lui. Je me disais qu'il leur en avait fallu, à tous les deux, de la détermination, du courage, en un mot de l'amour, pour affronter les critiques, les sarcasmes, la bêtise et la méchanceté ». De tendre déclarations, qui devraient ravir la première dame de 65 ans, quelque peu éprouvée par les nombreuses railleries dont elle fait l’objet.

 

Ségolène Royal dans "Ce que je peux enfin vous dire"

 

 

Pour finir une petite anecdote qui traduit bien l’ambiance entre mâles blancs :

 

Sur le plateau de France Inter, Ségolène Royal l'ex-ministre de l'environnement du gouvernement de Manuel Valls est revenue sur un échange sans filtre entre le Premier ministre d'alors et le futur président, Emmanuel Macron

 

Celui qui était alors ministre de l'économie, avait expliqué dans la presse que la croissance était en berne. Furieux, Manuel Valls lui aurait alors lancé en plein Palais Bourbon: « Et ta queue, elle est en berne? »

 

 Un mot que Ségolène Royal a pris soin de censurer avec des *** dans son livre... et qu'elle ne s'est pas risquée à répéter au micro de France Inter.

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4 novembre 2018 7 04 /11 /novembre /2018 06:00
Emmanuel Bove et sa fille Nora au jardin du Luxembourg à Paris, vers 1924.

Emmanuel Bove et sa fille Nora au jardin du Luxembourg à Paris, vers 1924.

Rassurez-vous je ne suis pas en train de vous faire un coup de Jarnac même si le François, le fils de vinaigrier y est né, même si son parcours politique fut bien sinueux, pas toujours glorieux, on pourrait le qualifier de tordu, même s’il fut l’objet lui aussi victime de coups tordus « l’attentat de l’Observatoire », il n’en  reste pas moins vrai qu’il battit sur le fil, après deux tentatives infructueuses, le sémillant déplumé de Chamalières Valéry Giscard d’Estaing après avoir réduit en cendres Georges Marchais au premier tour.

 

Mais pourquoi diable lors de son second septennat l’a-t-on affublé du surnom de Tonton ?

 

« Le surnom Tonton a été donné à François Mitterrand par le Canard enchaîné. Il viendrait pour certains d'un nom de code que François Mitterrand aurait eu pendant la Seconde Guerre mondiale, pour d'autres de l'irruption télévisuelle de son neveu Frédéric Mitterrand, que Roland Topor caricaturera dans son émission Téléchat.

 

L'ancien conseiller en communication de François Mitterrand, Gérard Colé, explique dans son livre Le Conseiller du Prince que Tonton était le surnom donné au président par les agents chargés de sa sécurité personnelle, ce surnom a ensuite été diffusé dans le but de remplacer le surnom "le Vieux" qui était jusque-là généralement utilisé. Il fut repris ensuite par des sympathisants socialistes tels que Renaud qui donna ce surnom pour titre d'une chanson consacrée au président. Dans une récente émission, le publicitaire Jacques Séguéla a prétendu que ce surnom venait du publicitaire lui-même, qui était chargé de la campagne publicitaire des élections de 1981. »

 

La suite ICI 

 

D’accord me direz-vous mais qu’est-ce que vient faire Valéry Giscard d’Estaing dans cette galère ?

 

Voici la réponse ci-dessous :

 

« J’avais rendez-vous à deux heures sous la grande horloge de la gare du Nord. C’était un rendez-vous impérieux à cause du peu de temps qui le séparait de l’instant où il m’avait été donné. Et, sous une horloge, ç’avait en outre quelque chose de sérieux, d’autant plus que cette horloge était dans une gare.

 

Il avait été convenu que l’on manquerait les premières courses et, au fond, ce fut sage, car les chevaux que nous eussions joués ne sont pas arrivés.

 

Cette radieuse journée de printemps commença bien. Mon ami était là quand j’arrivai. Les guichets étaient déserts ; une pancarte nous mit, sans chercher, dans notre train et, à peine étions-nous assis qu’un employé vint soigneusement fermer la porte du wagon. Tout cela était de bon augure.

 

Les vitres baissées, nous traversâmes une campagne ensoleillée. Soit qu’il n’y eût pas de vent, soit que le train n’allât pas vite, la fumée de la locomotive montait toute droite dans le ciel bleu. On voyait, dans la prairie, son ombre qui passait avec facilité les ruisseaux, les fossés et les murs.

 

C’était la première fois que j’allais aux courses et mon ami, qui parlait avec connaissance des chevaux, avait toute ma confiance, j’étais seul à l’avoir et que nos voisins ne se donnaient pas la peine de noter les chevaux gagnants de de mon ami.

 

  • Nous reviendrons avec cinq mille francs, dit-il, après avoir pris des notes et consulté un journal sportif.

 

  • Pour nous deux ?

 

  • Non, pour chacun.

 

Bien qu’il jouât depuis des années, je ne le crus pas. J’eusse mieux aimé qu’il prédît un gain moins important mais plus sûr.

 

[…] je coupe car je ne peux reproduire intégralement la nouvelle. Ils perdent deux courses.

 

  • Nous allons tout mettre sur Tonton.

 

  • Et Isis ? …

 

  • Non, c’est Tonton qui va gagner. Il fera deux cents francs. Il n’y a pas à hésiter.

 

  • Et si Isis…

 

  • Non, nous jouons Tonton gagnant. Il gagne, Tonton, comme il veut.

 

[…] nouvelle coupure

 

Et si Tonton n’arrivait pas ?

 

  • On a joué Tonton, je te dis… C’est un grand cheval. Tu veux donc que nous perdions !...

 

Quelques minutes s’écoulèrent, puis une rumeur vint jusqu’à nous. Nous entendions crier : « Tonton ! »… « C’est Tonton !... Vive Tonton !... » On eût dit qu’une nuée de bourdons survolaient le champ de courses, Tonton avait gagné.

                                                                    *

                                                              *         *

Dans la nuit tombante, les phares de l’autocar éclairaient à peine. Les feuilles des arbres s’agitaient à notre passage. À un point inattendu de l’horizon la lune brillait. Elle nous apparaissait à chaque lacet de la route, tantôt à gauche, tantôt à droite. La tête contre la bâche de l’autocar, nous dévalions vers Paris. Et, au loin au-dessus de la ville, le ciel avait cette rougeur dont on a sis souvent parlé. »

 

Une journée à Chantilly Emmanuel Bove dans Petits contes ICI 

 

 

Fort bien me direz-vous, c’est un peu tiré par les cheveux mais quel rapport avec Valery Giscard d’Estaing ?

 

La réponse est ci-dessous :

 

Cher Monsieur,

 

J'espère que vous ne m'en voudrez pas de l'indiscrétion qui consiste à vous écrire sans vous connaître et qui est d'autant plus coupable qu'il s'agit de renseignements à vous demander. J'ai été intéressé récemment par la lecture de l'oeuvre d'Emmanuel Bove, qui a aujourd'hui complètement disparu, non seulement de la devanture mais de l'arrière-fond des librairies. J'imagine que vous avez eu l'occasion de le rencontrer, puisque l'essentiel de son oeuvre se situe à une époque où vous animiez les mouvements littéraires contemporains. Ce serait pour moi un grand privilège si vous pouviez me donner quelques renseignements à son endroit. Qui était-il ? Quelle était sa manière d'être ? Quelles traces a-t-il laissées ? J'ai appris que madame Bove vivait encore à l'heure actuelle. Avez-vous eu l'occasion de savoir où on peut la joindre ?  Vous serez surpris de cette curiosité qui n'entre pas dans l'exercice normal de mes fonctions, mais s'il est interdit au ministre des Finances d'avoir un coeur, du moins selon la réputation, il ne lui est pas interdit de s'intéresser à la littérature. » 

 

Valéry Giscard d'Estaing en 1972

Lettre adressée au surréaliste Philippe Soupault

 

Si je vous ai mis en appétit commencez donc par le premier roman de Bove, Mes Amis publié chez Flammarion. Les deux premières phrases sont un extrait sec du style bovien « Quand je m'éveille, ma bouche est ouverte. Mes dents sont grasses : les brosser le soir serait mieux, mais je n'en ai jamais le courage. »

 

 

Un autre beau texte de Bove, pour moi, est la nouvelle Bécon-les-Bruyères dont je possède l'édition originale. Il vient d’être rééditer.

 

Je vous en offre un petit extrait, pour le plaisir :

 

« Bécon-les-bruyères existe à peine. La gare qui porte pourtant son nom printanier prévient le voyageur, dès le quai, qu'en sortant à droite il se trouvera côté-Asnières, à gauche côté Courbevoie. Il est donc nécessaire, avant de parler de cette ville, de tirer à soi tout ce qui lui appartient, ainsi que les personnes qui rassemblent les objets qui leur appartiennent avant de les compter. L'enchevêtrement des communes de banlieue empêche d'avoir cette manie. Aucun accident de terrain, aucune de ces rivières qui suivent le bord des départements ne les séparent. Il y a tant de maisons que l'on pense être dans un vallon alors que l'on se trouve sur une colline... »

 

 

Le coup de Jarnac

 

Jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, le coup de Jarnac était une expression synonyme d’habileté, d’ingéniosité et d’une parfaite loyauté.

 

Mais en 1771, deux cent vingt-quatre ans après le combat, le dictionnaire de Trévoux, œuvre des Jésuites fait évoluer la dernière définition du coup de Jarnac en rajoutant, à la définition de de Furetière datant de 1727 qui exprimait seulement que c’était un coup mortel et imprévu, « se prend toujours de mauvaise part. » Le mal était fait.

 

A noter que le dit dictionnaire est imprimé par des Jésuites et que les descendants de Guy Chabot ont fait acte de foi dans la R.P.R., la religion prétendue réformée, autrement dit le Protestantisme…

 

Larousse et Littré ont rectifié à la fin du XIXe siècle cette expression qui était dévoyée en écrivant: « le coup fut trouvé fort habile et fournit une expression proverbiale qui a pris un sens odieux; mais c’est un tort de l’usage, le coup de Jarnac n’eut rien de déloyal, c’est un coup loyal mais inattendu, inespéré ».

 

En vérité, cette botte secrète est un coup technique originaire d’Italie, alors inconnu en France au milieu du XVIe siècle, dont l’utilisation en plein duel a été décisive pour la victoire.

 

Le « coup de Jarnac » est bel et bien une expression synonyme d’habileté et d’ingéniosité.

 

L’histoire ICI 

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3 novembre 2018 6 03 /11 /novembre /2018 06:00
3 articles intéressants dans le débat anti-viande : Soyez écolo, mangez de la viande !  & Que deviendraient les animaux d’élevage si on arrêtait de les manger?

Les militants de la cause animale, ceux opposés à l'exploitation des animaux, se mobilisent partout en France. Leur action était redoutée, particulièrement dans le Nord. Comment s'est passé ce face-à-face entre deux mondes inconciliables ?

 

Une altercation a eu lieu au matin du samedi 22 septembre à Paris. Deux militants vegans ont organisé un happening devant une boucherie du 16e arrondissement. Dans les bras d'une jeune militante : un porcelet mort. L'action n'a duré que 10 minutes mais elle n'a pas échappé aux clients de la boucherie voisine. Aux commandes de cette action, des anti-spécismes. Ils s'opposent à toute hiérarchie entre les espèces pour sauver les animaux. "Ce sont des individus qui ont le droit de vivre, de quel droit on se permet de les exploiter !" s'exclame Alizée Denis, du mouvement Boucherie abolition

 

Après une série d’attaques par des vegans, les bouchers-charcutiers reçus au ministère de l’intérieur

 

Ils demandaient à être protégés face à « la violence » vegan. Les bouchers-charcutiers avaient rendez-vous, mardi 3 juillet, au ministère de l’intérieur pour évoquer les attaques qu’ils subissent de la part de groupuscules vegans anti-viande et anti-élevage.

 

Les professionnels, qui ont été reçus pendant une bonne heure, ont réclamé « la vigilance, l’arrêt de l’impunité et faire en sorte que les artisans puissent faire leur métier », a déclaré le président de la Confédération française de la boucherie-charcuterie et traiteurs (CFBCT), Jean-François Guihard, également boucher dans le Morbihan.

 

« Je pense que l’impunité va s’arrêter », a-t-il estimé, indiquant qu’il y avait « des procédures judiciaires et il y aurait aussi certainement une surveillance accrue de ces organisations ».

 

  • Soyez écolo, mangez de la viande ! 

 

La viande, nous dit-on, est mauvaise pour la planète. Elle cause le réchauffement climatique, détruit des forêts, détourne une part substantielle des céréales destinées à l'alimentation humaine, le tout pour produire une viande que seuls les riches Occidentaux peuvent se permettre de consommer. En 2002, l'iniquité de cette situation aura conduit George Monbiot à déclarer : « Le véganisme est la seule réponse éthique à ce qui est probablement le problème de justice sociale le plus urgent au monde. » Monbiot est ensuite revenu sur ses dires, mais on ne cesse depuis de nous répéter que, pour sauver la planète, il faudrait diminuer radicalement notre consommation de viande. Face à ce qui semble être un consensus universel sur le péché de chair animale, existe-t-il vraiment un argument écologique en faveur de la viande ? Je pense que oui, et je pense aussi que nous devrions en parler. Car non seulement le débat public est extrêmement partial, mais le risque du message anti-viande est de détruire ce même environnement qu'il prétend protéger.

 

La suite ICI 

 

  • Que deviendraient les animaux d’élevage si on arrêtait de les manger?

Timothée de Rauglaudre — 28 octobre 2018 à 14h42 

 

Le revers de ce projet de société serait une disparition quasi inévitable des espèces domestiquées depuis onze milliers d’années.

 

«Imaginons que demain, on arrête de manger [les animaux d'élevage], qu'est-ce qu'on en fait, on les tue?» Samedi 6 octobre 2018. Sur le plateau de l’émission «Les Terriens du samedi!», après un débat houleux opposant deux militantes de la cause animale à un boucher, au vice-président de la FNSEA et à Yann Moix –qui lâche au détour d’une phrase: «L’homme, c’est le singe plus Dieu»–, Thierry Ardisson pose cette question.

 

La suite ICI 

 

  • Quand le «manger mieux» creuse la fracture alimentaire

 

Manger bio, local, en vrac: les appels à prendre le pouvoir sur son assiette foisonnent. Mais lorsqu’ils se transforment en injonctions individuelles, le risque est de se tromper de responsables.

 

«On a oublié de dire que manger des fruits et légumes qui ne sont pas bios, c’est mieux que de ne pas en manger du tout.»

Nicole Darmon, directrice de recherche en nutrition et santé publique à l’Inra

 

Pour sortir de cette nouvelle forme d’«alimentation à deux vitesses», Isabelle Saporta a quelques idées. La journaliste d’investigation, qui travaille depuis une quinzaine d’années sur l’agroalimentaire, pointe la responsabilité des pouvoirs publics: «La bouffe industrielle coûte moins cher parce que 80% des subventions [de la politique agricole commune, ndlr] vont à l’agriculture industrielle la plus polluante. Et les dommages collatéraux ne sont pas à la charge des pollueurs. Si demain on leur disait de payer la dépollution des cours d’eau, des sols, de l’air, les politiques de santé publique, la nourriture industrielle reviendrait beaucoup plus cher.»

 

Pour la pourfendeuse des lobbies, rétablir les justes prix ne suffira pas: «Il faudra en passer par un retour de l’éducation au goût et aux choses saines à l’école. Ce n’est pas parce que pour le moment il n’y a que les classes les plus aisées qui mangent bien qu’il faut arrêter. Il faudrait que ça se démocratise.» Si elle estime que «la révolution viendra du consommateur», par des mouvements de boycott et de «name and shame», elle le reconnaît: «Sans volonté politique forte, on n’y arrivera pas.»

 

Lire ICI 

 

La consommation de viande a chuté de 12% en 10 ans

 

Charal voit les choses en grand. Il faut dire que la situation est assez morose pour les professionnels de la viande. Si la viande est le premier secteur des industries alimentaires en France avec un chiffre d'affaires de 33 milliards d'euros, selon l'Insee, ce dernier a augmenté moins rapidement en moyenne que celui de l'ensemble des industries alimentaires entre 2000 et 2016. Le tout sur fond de crises sanitaires qui ont égratigné le secteur. Pire la consommation de viande a chuté de 12% entre 2007 et 2016 selon le Crédoc. Et la viande rouge, cœur de métier de Charal, est particulièrement touchée. "La baisse de la consommation de viande rouge a été plus forte que celle du vin depuis les années 1980", pointe Pascale Hébel, directrice du département Consommation du Crédoc. Deux explications sont à apporter: les inquiétudes pour la santé et le prix élevé de la viande ont impacté négativement la consommation.

 

Et les habitudes de consommation de la viande ont évolué. Si la viande reste associée à un produit "plaisir", les consommateurs privilégient la qualité à la quantité. D'où le succès des Label rouge et du bio notamment. Trois Français "carnivores" sur quatre consomment ainsi de la viande bio, au moins occasionnellement selon une étude Ifop pour Interbev. Ce qui n'a pas échappé à Charal: "Un de nos deux axes d'innovation est la valorisation", explique Stéphanie Bérard-Gest qui précise que l'offre bio compte pour 10% de leur activité.

 

"Les jeunes générations ne mangent plus la viande comme avant", souligne aussi Pascale Hébel. De plus en plus, elle est consommée via des produits transformés: à 30% en 2016, contre 25% en 2007. Parmi les produits à succès: le burger. "Le burger, c'est 15% de notre activité" précise Stéphanie Bérard-Gest. D'où le deuxième axe d'innovation de Charal: les usages. En 2005, la marque lançait ainsi GrillBox pour réchauffer les burgers. "Les gens consomment de plus petites quantités de viande et l'on constate aussi la perte d'une certaine maîtrise pour cuisiner la viande. Le 1er octobre, nous avons donc lancé par exemple des aiguillettes de bœuf: ce sont de petites portions très faciles à cuisiner."

 

S'adapter aux nouvelles tendances de consommation: inévitable pour faire face à cette baisse de la consommation. Avec un chiffre d'affaires de quelque 900 millions d'euros en 2017 – un chiffre d'affaires "plutôt stable ces dernières années", selon la directrice marketing de la marque–, Charal est incontournable dans le secteur, touchant un foyer sur deux. La marque revendique une part de marché de "15% en valeur sur le total du marché de la viande", en progression. Et largement prédominant sur le segment des viandes sous vide puisque Charal est né en 1986 avec la technologie Hebdopack.

 

Bien-être animal et produits végétaux

 

Mais en plus du facteur prix et des inquiétudes vis-à-vis de la santé, deux autres éléments viennent s'ajouter pour comprendre la baisse de la consommation de viande: "la sensibilisation à l'impact sur l'environnement" et "la question du bien-être animal" selon le Crédoc. Impossible de ne pas penser aux manifestations des pro-vegans et antispécistes qui se sont multipliées ces dernières semaines devant des boucheries. Face à cette situation, la directrice marketing de Charal –une marque qui compte 500 bouchers professionnels sur ses 3.000 collaborateurs– se montre extrêmement mesurée: "C'est une question de respect et de dialogue. Nous respectons les convictions des vegans mais il faut aussi respecter ceux qui mangent de la viande et ceux qui vivent en travaillant la viande", commente-t-elle simplement.

 

Si Pascale Hébel note que la part de flexitariens, cette pratique qui consiste à réduire sa consommation de viande notamment– "augmente à chaque enquête", elle voit une forte tendance: les produits végétaux. "Il suffit de voir les produits présentés au Sial la semaine dernière pour comprendre que l'offre végétale va se développer" note-t-elle. Au point de ne pas pouvoir échapper au radar de Charal? "Pour l'instant, c'est en opposition avec la philosophie de Charal mais des acteurs comme Fleury Michon, Herta ou Danone se sont emparés de la question."

 

Et c'est bien la viande qui est mise à l'honneur sur le stand Charal à Saint-Malo jusqu'au départ de la Route du Rhum. Une manière de communiquer différemment avec les consommateurs. Dans un climat de défiance généralisée des Français envers les marques, Charal dispose pourtant d'un taux de notoriété de 97%, et 56% des Français citent cette marque en premier de manière spontanée lorsqu'on leur demande s'ils connaissent des marques de viande. Et 96% de leurs clients se déclarent satisfaits ou très satisfaits. Mais en développant des projets avec des influenceurs pour toucher des publics plus jeunes et avec ce partenariat sportif, Charal fait évoluer sa communication et toucher plus directement les consommateurs. Un pari dans lequel la marque croit: à budget communication constant, Charal engage l'équivalent de deux grosses campagnes télé dans ce projet de sponsoring sportif.

 

 

En bonus

 

25 mars 2011

  • Le Curé Nantais, la Nantaise et les Nantais qui n’aiment pas le Muscadet

ICI 

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2 novembre 2018 5 02 /11 /novembre /2018 07:00
Ouvéa, les accords Matignon sous Rocard, 30 ans après les Calédoniens sont appelés à répondre à la question suivante :

« Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? »

 

174 154 électeurs qui pourront défiler dans l'isoloir. La composition du corps électoral pour cette consultation a fait l'objet d'âpres négociations, si bien que les non-Kanaks arrivés après 1993 ne pourront pas faire entendre leur voix. Les Kanaks, eux, qui ne représentent plus que 39% de la population, sont sur-représentés. Ils forment même 63% de ce corps électoral, selon le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS).

 

« J’ai confiance. » C’est par ces mots qu’Edouard Philippe a conclu son discours devant le Congrès de Nouvelle-Calédonie, mardi 5 décembre, dernier jour de son séjour sur le territoire. Un déplacement de quatre jours durant lesquels il aura rencontré l’ensemble des responsables politiques du territoire et des trois provinces, échangé longuement avec chacun avant de s’adresser aux élus en ce jour anniversaire de la mort des « dix de Tiendanite », dix jeunes Kanak, dont deux frères de Jean-Marie Tjibaou, massacrés dans une embuscade le 5 décembre 1984, et sur la tombe desquels il s’était recueilli deux jours plus tôt.

 

4 avril 2006

 

Le Caillou

 

En juin 1988 je quitte les rives "verdoyantes" du port de Gennevilliers pour rejoindre le rez-de-chaussée de l'Hôtel de Villeroy comme directeur-adjoint du cabinet du Ministre. J'occupe le plus beau bureau du lieu, vaste il donne sur le petit parc : aujourd'hui c'est celui du Ministre. Mon portefeuille : les 30 000 fonctionnaires, les relations avec les OPA, les DOM-TOM, la Corse et les Courses : de quoi occuper mes journées.

 

Alors pourquoi ce titre d'aujourd'hui : le Caillou ?

 

Vais-je vous parler des galets roulés de Châteauneuf -du-Pape ? Non, je suis trop ignare des choses du terroir. Les accords de Matignon ça vous dit quelque chose ?

 

1936 ?

 

Non ceux du 26 juin 1988 !

 

La poignée de mains Lafleur-Tjibaou c'est loin, vous avez oublié. Et pourtant, sur le Caillou – la Nouvelle Calédonie – ces deux-là, quelques temps avant, ne semblaient pas fait pour s'entendre. Le sang avait coulé. Rocard nommait une mission de conciliation emmenée par Christian Blanc pour renouer les fils du dialogue, sortir des postures, retrouver la confiance, aller à l'essentiel : les accords Matignon c'est un feuillet dactylographié.

 

 

L'encre était à peine sèche que Rocard demandait à Henri Nallet de se rendre sur le Caillou. Je suis du voyage. Une trentaine d'heures de vol jusqu'à Nouméa sur UTA. Nous allons d'abord à Wallis et à Futuna en Transaal. Touffeur. L'administrateur supérieur en uniforme blanc, son chauffeur pieds nus, les rois, les églises et les cases, des îles sans pêcheurs : encore un mauvais coup des missionnaires, les petits cochons noirs, le bout d'un monde immobile. Nous enverrons aux femmes de Futuna des machines à coudre...

 

Retour à Nouméa, la résidence du Haut-Commissaire, un parfum colonial, mais nous ne sommes pas là pour faire du tourisme : le Nord, territoire kanak, puis les éleveurs caldoches, enfin l'île de Lifou et son jeune chef à l'écharpe rouge qui a fait ses études à la Sorbonne, danses traditionnelles des guerriers lances à la main, on palabre, on mange des ignames, on crapahute, le FLNKS et le RPCR, le début d'un processus de paix...

 

Une anecdote pour finir ce petit papier : « Jacques Lafleur ne boit jamais une goutte d'alcool, il pourrait en mourir. Mais par un bel après-midi d'hiver austral, seul dans sa propriété d'Ouaco perdue dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, il s'est versé une coupe de champagne... »

 

 Le pari du grand chef blanc l'Express du 02/09/1988 par Florent Leclerc. Sabler ou sabrer le champagne pour la paix tout est toujours possible chers lecteurs... 

 

Quelles sont les forces politiques en présence ?

 

La famille indépendantiste dispose de 25 élus sur 54 au Congrès de Nouvelle-Calédonie, l'instance législative locale. Elle est dominée par le FLNKS, un regroupement de quatre partis politiques, qui appelle le "peuple kanak" à "conclure un combat qui dure depuis 164 ans". Plus radical et très minoritaire, le Parti travailliste prône, lui, "une non-participation massive" au référendum, qu'il juge trop ouvert aux non-Kanaks. "Nos militants joueront aux boules ou iront à la pêche", prévient son leader.

 

En face, les non-indépendantistes sont majoritaires au Congrès, avec 29 membres. Divisés, ils mènent campagne sur le terrain autour de slogans tels que "La France est une chance" ou "Pour une Nouvelle-Calédonie dans la France et dans la paix". En mai, ils ont reçu le soutien (timide) d'Emmanuel Macron. En visite à Nouméa, le président de la République n'a pas souhaité "prendre parti dans ce référendum" mais a affirmé que "la France serait moins belle sans la Nouvelle-Calédonie".

 

Lire l’article ICI 

 

Dans le roman à 4 mains d’Évelyne Pisier et Caroline Laurent Et soudain la liberté, la jeune Lucie (Évelyne Pisier) arrive avec ses parents à Nouméa en provenance de Saigon, « Hô Chi Minh et Giáp étaient grand vainqueurs. La France balayée, cèderait le terrain aux Américains », « Le voyage fut éprouvant : une vingtaine d’heures, avec deux escales en Australie, pour parcourir les 7500 km qui les séparaient de Nouméa. »

 

« La Nouvelle-Calédonie était une toute petite colonie, mais il s’y était passé des choses. Le Code de l’indigénat avait été aboli le 7 mars 1944. Depuis 1946, les Canaques disposaient d’un droit à la nationalité française pleine et entière. En d’autres termes, ils pouvaient voter, circuler, être propriétaires, accéder aux institutions et créer leur parti, ce qu’ils n’avaient pas tardé à faire. »

 

Lucie allait à l’école des sœurs, à la naissance de son frère, sœur Marie de Gonzague la trimballe dans toutes les classes pour « annoncer l’heureuse nouvelle à tes camarades. » Pensez-donc, un garçon !

 

« Dans chaque classe où s’arrêtait sœur Marie de Gonzague, Lucie annonçait la bonne nouvelle et les enfants applaudissaient. Lorsqu’elle arriva devant le bâtiment réservé aux Canaques, l’enseignante lui fit signe de se taire. Elles entrèrent par une porte de service et, silencieusement toujours, s’approchèrent.

 

Par la grande fenêtre, Lucie les vit. Ils étaient au moins quarante, entassés les uns sur les autres, indisciplinés, sales et joyeux. Eux aussi portaient l’uniforme, mais aucun n’avait de chaussures. Un petit garçon récupéra un crayon avec ses doigts de pieds et le fit sauter à hauteur du bureau. Des filles, au fond de la salle, se tiraient violemment les cheveux, pendant qu’une autre, très grosse, attaquait sa troisième banane. Un brouhaha de français et de canaque parvenait aux oreilles, dans lequel perça soudain un rot sonore, lâché par la petite boulotte. Lucie fit une grimace de dégoût. « Tu vois, chuchota la sœur au menton fripé, voilà des choses que l’on ne verra jamais chez les Blancs. » Et elle l’entraîna vers la sortie.

 

Comme André Desforêt, sœur Marie de Gonzague croyait en l’inégalité des races. Le spectacle de ces sauvages était à ses yeux un argument suffisant. Depuis de nombreuses années, les pères maristes tentaient de les faire progresser grâce à l’enseignement religieux, mais le chemin serait long. La nonne sourit à Lucie. « Dieu a fait ainsi les hommes. Différents les uns des autres. » Elle ne lui parla pas des terres canaques spoliés par les colons ou des bidonvilles dans lesquels s’aggloméraient comme des grappes les familles, et où le Christ n’avait envoyé ni l’eau courante ni l’électricité.

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2 novembre 2018 5 02 /11 /novembre /2018 06:00
Délices de la pauvreté Giono Lettre aux paysans sur la pauvreté et la paix

Eugène Saccomano, le journaliste sportif qui préfère Giono à Zidane. ICI

 

Ça c’est un titre qui fait le buzz !

 

(©REAU ALEXIS/SIPA

 

A 77 ans, (ndlr il en a 80 aujourd’hui) Sacco consacre un petit essai bienvenu à l’auteur des «Vraies richesses» et de «Recherche de la pureté», qu’il a bien raison de considérer comme un de nos plus grands écrivains. Il le lit en boucle pendant que sa femme regarde des «couillonnades à la télévision». Il l’a toujours aimé. Plus que Pagnol.

 

« Au début, bien que Marseillais, j’étais très anti-Pagnol. J’ai modulé mon jugement parce qu’il a fait de jolis livres et des films très bien, mais c’est un grand voleur sympathique. Il a beaucoup piqué à Giono. ‘‘La Femme du boulanger’’, c’est une séquence de ‘‘Jean le Bleu’’. D’ailleurs, ils ont eu des procès tous les deux. En fait ils n’ont jamais été vraiment fâchés. Tant mieux. »

 

Collabo, Giono ?

 

Son livre évoque brièvement ce derby provençal. Mais Sacco y refait surtout le match qui, à la Libération, a opposé l’écrivain de «Refus d’obéissance» à certains chantres de la France Libre. Il avait quelques erreurs d’arbitrage à contester. En repassant au ralenti les actions du libéro de Manosque, il tenait à arracher le maillot de collabo qui lui colle à la peau :

 

Le vrai problème avec Giono, c’est qu’il s’en foutait : il ne voulait ni les Allemands, ni les Américains, ni personne. Lui, c’était : "tout ça ne m’intéresse pas".

 

Pour le comprendre, il faut lire "Recherche de la pureté", un texte fantastique qui sert de préface aux "Carnets" de Lucien Jacques. Il raconte comment, dans un bataillon qui a refusé de monter au front, en 1917, les types ont été fusillés. Il a vécu tout ça, Giono...

 

Alors évidemment, son refus de choisir ouvertement un camp sous l'Occupation, ça prête à différentes interprétations. Mais au moins, s’il n’est pas un résistant au sens propre du terme, il n’est ni facho, ni pro-allemand.

 

Aragon a été terrible avec lui à la Libération. Il y a des faits, tout de même ! Giono a autorisé le premier maquis armé des Basses-Alpes à s’installer dans la ferme des Graves.

 

Il y a aussi les gens qu’il sauve et abrite chez lui: son beau-frère communiste qu’il héberge au nez des Allemands, la femme de Max Ernst dont il paie l’hospitalisation, des juifs comme Jan Meyerowitz, Jean Malaquais et les sœurs Fradisse qu’il sauve de la Gestapo.

 

« L’auteur bien connu d’Un Hussard sur le toit ne fut pas qu’un romancier de la paysannerie ou de la vie pastorale : il fut aussi un penseur, « un penseur qu’on ignore volontairement pour toutes sortes de raisons », affirme E. Schaelchli qui considère que Giono, finalement, « a le malheur d’être à la fois trop bien et très mal connu »

 

 

Mais en 1943, en dépit d’un dernier essai contre la fatalité de la guerre (Triomphe de la vie), Giono décide de déserter le combat et la réflexion théorique : le divorce entre l’homme d’imagination et l’histoire est consommé, même si cette dernière le rattrape. Car, avec le thème du «retour à la terre», la propagande – vichyste notamment – s’empare de l’écrivain. Bête noire du Comité des écrivains de la Résistance (depuis son retournement contre Staline en 1935), emprisonné en 1944 et interdit de publier pendant quatre ans, son nom est resté attaché au rêve supposé passéiste d’une paysannerie heureuse et libre, synonyme pour certains d’une nostalgie malsaine. Ne daignant se défendre, Giono mourut le 6 octobre 1970, soit quelques mois avant les évènements du Larzac (1972) qui verront, d’une certaine manière, son rêve se réaliser : d’authentiques paysans qui, soucieux de faire marcher leurs petites exploitations, lutteront pour conserver leurs terres face à une décision expropriatrice de l’État. La lettre aux paysans sur la pauvreté et la paix (1938) deviendra un véritable manifeste politique.

 

 

 

Je vous écris cette lettre surtout pour mettre vos tourments en face des délices de la pauvreté. Il y a une mesure de l’homme à laquelle il faut constamment répondre.

 

Le chou bouilli dans une simple eau salée donne une soupe claire qui ne contente pas totalement. Si c’est tout ce que l’on a à manger, on est obligé d’imaginer le surplus ou de se fabriquer des raisons de contentement ; chaque fois, au détriment des vraies raisons de vivre. Un jarret de porc salé dans la soupe de chou blanc commence à fournir déjà assez de matière. Surtout si c’est un jarret un peu rose, avec d’onctueuses petites mottes de gluant dans les jointures. Quelques pommes de terre fournissent à la soupe une épaisseur qui non seulement satisfait l’appétit mais encore permet au goût de rester plus longtemps sur la langue. Nous ne sommes pas loin de la perfection. Peut-être un petit morceau de lard maigre. Et si nous voulons pousser cette perfection jusqu’à ses limites les plus extrêmes, de quoi contenter l’homme le plus aristocrate, quelques carottes, un poireau, deux coques d’oignons, trois grains de genièvre, composeront à notre pauvreté les plus riches arrière-goûts, presque des aliments de rêve ; une possession de grands civilisés. La civilisation c’est la possession du monde ; l’art d’en jouir; c’est une union avec le monde de plus en plus intime où des couteaux très aiguisés tranchent en de brusques joies vos veines et vos artères pour en aboucher la coupure aux veines et aux artères du monde et vous mélanger avec lui. Au moment où elle a la plus belle fumée, versez la soupe dans vos assiettes creuses, sur des tranches de pain de ménage légèrement rôties. Les paysans du monde entier savent faire sept mille sortes de saucisses. C’est être riche que de les posséder toutes dans son saloir. Mais il est impossible de les mettre toutes dans votre soupe ; même pas en petites rondelles: ce ne serait pas bon. Et même si ce devait être bon, au bout de tout le trafic qu’il vous faudrait mener pour les dépendre et en couper des morceaux, vous auriez perdu l’appétit sans lequel rien ne compte. Il est donc inutile de travailler à les posséder toutes.

 

La pauvreté, c’est l’état de mesure. Tout est à la portée de vos mains. Vivre est facile. Vous n’avez à en demander la permission à personne. L’état est une construction de règles qui créent artificiellement la permission de vivre et donnent à certains hommes le droit d’en disposer. En vérité, nul n’a le droit de disposer de la vie d’un homme. Donner sa vie à l’État c’est sacrifier le naturel à l’artificiel. C’est pourquoi il faut toujours qu’on vous y oblige. Un État, s’il est supérieurement savant en mensonge pourra peut-être réussir une mobilisation générale sans gendarmes, mais je le défie de poursuivre une guerre sans gendarmes car,  plus la guerre dure, plus les lois naturelles de l’homme s’insurgent contre les lois artificielles de l’État. La force de l’État c’est sa monnaie. La monnaie donne à l’État la force des droits sur votre vie. Mais c’est vous qui donnez la force à la monnaie ; en acceptant de vous en servir. Or, vous êtes humainement libre de ne pas vous en servir: votre travail produit tout ce qui est directement nécessaire à la vie. Vous pouvez manger sans monnaie, être à l’abri sans monnaie, assurer tous les avenirs sans monnaie, continuer la civilisation de l’homme sans monnaie. Il vous suffit donc de vouloir pour être les maîtres de l’État. Ce que le social appelle la pauvreté est pour vous la mesure. Vous êtes les derniers actuellement à pouvoir vivre noblement avec elle. Et cela vous donne une telle puissance que si vous acceptez enfin de vivre dans la mesure de l’homme, tout autour de vous prendra la mesure de l’homme. L’État deviendra ce qu’il doit être, notre serviteur et non notre maître. Vous aurez délivré le monde sans batailles. Vous aurez changé tout le sens de l’humanité, vous lui aurez donné plus de liberté, plus de joie, plus de vérité, que n’ont jamais pu lui donner toutes les révolutions de tous les temps mises ensemble.

 

Le texte intégral ICI 

 

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1 novembre 2018 4 01 /11 /novembre /2018 06:00
Faut arrêter de prendre les cons pour des gens ! Le peuple de notre Mélenchon quoi !

C’est d’un blogueur belge, Philippe Schoepen, et ça ne se fume pas comme la moquette…

 

Les gens c’est du Mélenchon de campagne (ne pas confondre avec le pâté) : adieu « camarades », bonjour « les gens » !

 

Et pourtant, juste après mai 68, où le PCF et la CGT s’étaient encore illustrés par leur incapacité à comprendre la nature profonde du mouvement, sauvant De Gaulle du naufrage, Jean Ferrat, l’Ardéchois, compagnon de route fidèle, chantait :

 

«C’est un joli nom camarade, c’est un joli nom tu sais, qui marie cerise et grenade, aux cents fleurs du mois de mai»

 

Le Grand soir c’était même le titre de l’album.

 

À la poubelle camarade en compagnie de l’Internationale, comme le dit Manuel Bompard, ancien directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon : « Les gens », c’est le peuple.

 

Nous y voilà : Le PEUPLE.

 

Voilà le grand fourre-tout où tu entasse indistinctement tous les mécontents des deux bords, des deux extrêmes, c’est commode et jugé plus efficace que l’appel au grand soir qui comme l'Arlésienne n’arrive jamais.

 

C’est une expression pensée politiquement « Notre volonté était de nous adresser au plus grand nombre, pas qu’à la gauche de la gauche. »reconnait Manuel Bompard. « Ça s’inscrit dans la logique d’une stratégie politique, on doit parler grand angle, et pas seulement à des catégories particulières. »

 

Ha ! Le peuple :

 

« De Gaulle rentre dans la capitale l’après-midi du 25 août 1944. A la gare Montparnasse, le général Leclerc lui remet la lettre de reddition du gouverneur allemand, Von Choltitz, arrêté le matin même à l’hôtel Meurice. Malgré les réverbères éteints, faute d’électricité et les habitants privés de bus, de métro et pratiquement de voitures, la capitale, se réveille avec ferveur de quatre années d’occupation. Un peu partout les gens descendent dans la rue manifester leur joie. Les drapeaux tricolores, sortis comme par miracle, fleurissent jusqu’au au sommet de la tour Eiffel. Sur le parvis de l’Hôtel de ville, les ministres et commissaires de la République qui viennent d’être nommés attendent le chef de la Résistance. C’est ici que ce dernier prononce sont célèbre discours : « Nous sommes ici… Nous sommes ici chez nous ! Paris outragé, Paris brisé, Paris martyrisé mais Paris libéré ! »

 

« Le samedi 26 août, à 15 heures c’est l’apothéose, sous l’Arc de triomphe le Général ranime la flamme du Soldat inconnu et se retournant descend les Champs Elysées devant une foule innombrable qui se presse pour officialiser ce premier jour de liberté. Ce jour, de Gaulle le célébrera chaque année comme le jour de l’élan national. »

 

« Mais quatre mois plus tôt, le 26 avril 1944, à quelques semaines du débarquement, le maréchal Pétain s’adressait dans ce même Hôtel de Ville à une foule très dense, ressemblant fort à celle massée en août. Or cette foule en liesse l’acclame et chante… la Marseillaise. Ce jour-là, Philippe Pétain déclare aux Parisiens : « Je ne voulais pas passer à Paris sans venir vous saluer, sans venir me rappeler à votre souvenir, une circonstance malheureuse m’y a ramené (les 641 victimes des bombardements alliées). Je suis venu ici pour vous soulager de tous les maux qui planent sur Paris. J’en suis encore très, très, très attristé. Mais c’est une première visite que je vous fais. J’espère bien que je pourrai venir facilement à Paris, sans être obligé de prévenir mes gardiens… Aujourd’hui, ce n’est pas une visite d’entrée dans Paris, que je vous fais, c’est une petite visite de reconnaissance. Je pense à vous beaucoup. Soyez sûrs que dès que je le pourrai, je viendrai et alors ce sera une visite officielle. Alors, à bientôt j’espère. »

 

Le peuple c’est un tout informe, la somme de non-identifiés, c’est commode, ça se jette au gré des circonstances, des humeurs, dans les bras du premier venu, un Trump par exemple, c’est le terreau du populisme, perméable aux forts en gueule, les Doriot, les Céline, c’est nous, c’est moi, c’est vous, c’est notre voisin qui gave ses allées de Roundup, qui chasse, qui a un 4x4, qui n’aime pas les arabes… je ne sais…

 

Qui se souvient de l’épisode : NUIT DEBOUT et d’un de ses chantres Frédéric Lordon qui a disparu des radars laissant la place à son ex-compagne insoumise Aude Lancelin boss du fameux Média de la sulfureuse Chikirou ?

 

« Frédéric Lordon, économiste et philosophe, s’est construit sur la scène contemporaine l’image d’un intellectuel intransigeant. Il a été identifié comme l’un des porte-paroles du mouvement Nuit Debout. Croyant vivre un moment historique, il éructa, à l’occasion d’une assemblée générale du mouvement dans un amphithéâtre de la Sorbonne : « Nous n’apportons pas la paix ! » Finalement, le « peuple » n’a pas voulu de  sa révolution. Et c’est là une ingratitude incompréhensible, car l’intellectuel ne cesse d’invoquer ce peuple et la trahison dont il serait victime par les élites, en particulier médiatiques. Il sait, lui, ce que veut le peuple. À la façon d’un ventriloque avec sa marionnette, il nous fait entendre que son aspiration profonde serait la lutte contre ce qu’il est convenu d’appeler la mondialisation néo-libérale. Cependant, cette aspiration est contrariée par le « système », qui l’empêcherait de penser librement et le conduirait vers les affres de la théorie du complot et de la post-vérité. C’est de cette façon, mais reconnaissons-le par des tournures plus habiles, qu’il évoque dur un blog qu’il tient dans les pages du Monde diplomatique, certaines formes de la crédulité contemporaine. Le conspirationnisme,  écrit-il, est « le symptôme nécessaire de la dépossession politique et de la confiscation du débat public ».

 

[…]

 

« Or, ce type d’approche herméneutique qui consiste à décrypter ce qu’un groupe voudrait dire mais qu’il ne peut pas dire et qui, par un heureux hasard, correspond justement à ce que le ventriloque savant voudrait qu’il dise, est une forme d’égarement bien connu de la littérature académique qui s’est intéressée aux théories du complot. Il est donc dommage que Lordon ne l’a manifestement pas lue, sinon il aurait vu que la fait de manipuler sans précaution des entités collectives – le peuple, le pouvoir, etc. – en leur prêtant des intentions cohérentes est un processus intellectuel douteux. »

 

Confirmation par Emmanuel Todd le sociologue du café de commerce :

 

« Le 11 janvier 2015, quatre millions de personnes sont descendues dans la rue en France pour manifester leur effroi après les attentats ayant frappé Charlie Hebdo. Au-delà de cette manifestation même, les déclarations « Je suis Charlie » sont devenues virales au point de devenir l’étendard de beaucoup. »

 

J’en étais même si par la suite je n’ai brandi aucun étendard.

 

Dans son livre Qui est Charlie ? Monsieur Todd nous assène sa vérité, celle qui se cache dans le fond de nos têtes, nos ressorts profonds que nous feignons d’ignorer.

 

« Pour lui, la belle unanimité qui se réclamait d’une indignation généreuse et humaniste cachait ses vraies raisons : il s’agissait en réalité d’une manifestation de haine de l’islam, « la religion des plus faibles », venant d’une part des classes moyennes, et d’autre part, de zones géographiques historiquement les moins républicaines, celle que Todd estime caractérisées par un « catholicisme zombie ». Ce terme est intéressant, car il signifie que les individus n’ont pas forcément conscience de porter des valeurs catholiques et haineuses. Au-delà même, l’essayiste considère qu’une « quantité innombrable de gens ne savaient pas ce qu’ils faisaient là le 11 janvier ». Charitable, il ajoute : « Mon but, c’est de faire comprendre aux gens les valeurs profondes qui les font agir et qui ne sont généralement  pas celles qu’ils imaginent. »

 

Fermez le ban !

 

Les Nabilla de la pensée faut arrêter de prendre les cons pour des gens !

 

Les citations ci-dessus sont extraites du livre de Gérald Bronner Cabinet de curiosités sociales

 

 

« … dans le marché saturé d’informations, l’économie de l’attention est très concurrentielle. Dans ces conditions les  différentes formes de l’outrance constituent des stratégies possibles pour se distinguer.

 

Le monde intellectuel ne paraît pas faire exception lorsque certains ne souhaitent pas tant défendre une idée qu’ils croient juste, qu’une posture qu’ils espèrent visible. Ces buzzophages, dont certains prétendent pourtant penser les conditions de ce qui nous détermine, ne paraissent pas clairement voir qu’ils sont comme des rats dans un labyrinthe, instrumentalisant et en étant victimes à la fois des mécanismes du marché. »

 

Et Onfray apparu sur nos écrans en glosant de doigt dans le cul, Nabilla n’en est pas arrivé là…

 

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31 octobre 2018 3 31 /10 /octobre /2018 06:00
Cher Jean-Pierre Sautreau votre livre « Une croix sur l’enfance en Vendée », la vôtre volée, violée, martyrisée, par le clergé, est une œuvre de salubrité publique…

Suis comme vous un bocain né en juillet 1948, un rejeton du baby-boom. Lors de ses vœux pour l’année 1945, le général de Gaulle, chef du gouvernement, avait appelé de ses vœux la naissance, dans les dix ans à venir, de « 12 millions de beaux bébés. », j’étais l’un d’eux, le petit dernier de la famille de trois enfants.

 

Ma mère était, comme la vôtre, couturière. J’ai vécu ma prime jeunesse au milieu des coupons de tissu, des patrons en papier soie et du fil à faufiler, elle m’a transmis le virus des belles étoffes et le sens de l’appariement. C’était une courageuse qui veillait tard.

 

Comme la vôtre elle espérait que je prenne la soutane.

 

En ce temps-là, en Vendée, le joug du clergé passait par les femmes.

 

J’ai été élevé dans les jupons des femmes, ce petit clan soucieux que je grandisse en âge et en sagesse.

 

À la maison, vêtues de noir, encadrant maman, ma grand-mère maternelle Marie, dite mémé Marie, épouse du pépé Louis, moustache à la Foch, amoureux de ses grands bœufs blancs tachés de roux, 7 ans sous les drapeaux, service militaire et 14-18 à la file, et sa sœur, la tante Valentine, qui se prénommait officiellement Eugénie, veuve de guerre après un bref mariage, gardienne de l’heure où l’on devait se rendre à la grand-messe du dimanche.

 

En ce temps-là, dans les métairies du bocage, encore en métayage chez les grands propriétaires fonciers, les maîtres, la cohabitation de plusieurs générations sous le même toit était la règle. Chez nous, même s’il régnait au sein du clan une concurrence feutrée, faites de silences désapprobateurs, de respect de règles rigides, pour exercer le leadership sur mon élevage, les choses étaient claires : c’était maman, sous le regard bienveillant de papa, qui dirigeait la manœuvre. Dire que je ne profitais pas de cette situation serait mentir.

 

Pour parfaire mon image de sainte nitouche, à qui on pouvait donner le bon Dieu sans confession, un jour j’ai déclaré à maman que je voulais être enfant de chœur ; elle en fut bien sûr ravie vu ses visées cléricales et plaida ma cause auprès du curé-doyen qui m’enrôla.

 

Mes motivations n’avaient rien de très catholiques, je les cite en vrac : le service des mariages et des enterrements permettait de sécher une matinée d’école ; nous nous partagions les quêtes de sacristie suite aux mariages et aux baptêmes ; nous nous baladions dans les rues, croix en tête pour les sépultures, la Fête-Dieu avec ses chemins de pétales de rose, et nous allions même dans les champs pour la fête des Rogations – les rogations, prières publiques et solennelles dont le but est d’attirer les bénédictions de Dieu sur les biens de la terre, célébrées les lundi, mardi et mercredi qui précèdent le jeudi de l’Ascension. Je n’ai jamais accompagné le curé pour porter l’extrême-onction.

 

Aller servir la messe, au petit matin, avant que le jour ne se lève me donnait le frisson lorsque je traversais la peupleraie dont les grands futs ressemblaient à une armée de l’ombre. Je détestais les Vêpres. Le jeudi Saint le curé nous lavait les pieds. J’adorais l’odeur de l’encens et le crépitement de la crécelle qui remplaçait la cloche pendant le carême. Tenir le petit plateau doré sous le menton des jeunes femmes du bourg lorsqu’elles communiaient alimentait mes « mauvaises pensées » que le curé me demandait d’avouer lors de la confession, ce que je refusais. « De quoi je me mêle ! » Je n’ai jamais sifflé du vin de messe. Servir la messe était un jeu, les burettes, le latin de cuisine, les génuflexions, la distribution du pain béni, la quête, le surplis empesé sur la soutane rouge ou noire, le rêve pendant le prêche du curé, l’ostensoir, le ciboire, le calice, les lourds ornements du curé, l’aube, l’étole, la chasuble, la chape, changeant de couleur en fonction du calendrier liturgique, les cloches carillonnées des baptêmes et des mariages, lugubres pour les enterrements…

 

Je n’ai jamais cru en Dieu, ni en la Vierge Marie, et encore moins au drôle de Saint-Esprit, seul Jésus, le rebelle, me donnait à réfléchir. Sous ma bouille d’angelot se cachait un païen. Je donnais le change pour avoir la paix.

 

Et pourtant rien ne nous était épargné pour faire de nous des curés ; chaque année passait à l’école un envoyé spécial de l’évêque chargé d’éveiller nos vocations, les hommes le surnommaient « le grand inséminateur ». À la fin de sa réclame il nous demandait d’écrire sur un petit papier ce nous voudrions faire plus tard. Un jour, je ne sais quelle mouche m’a piqué, sans doute la curiosité, j’ai répondu : prêtre.

 

Que n’avais-je fait là !

 

Me voilà embarqué dans une vis sans fin, des courriers de relance, puis, un jour, la proposition d’aller faire une retraite au Grand Séminaire de Luçon. J’ai dit oui. Lorsque je me suis retrouvé, le premier soir, là-bas, loin de chez moi, dans une immense chambre haute de plafond, j’ai pleuré toutes larmes de mon corps. Un jeune abbé est venu me consoler et, même si mon petit corps d’angelot semblait lui plaire, il ne toucha pas ma bistouquette.

 

Rentré au bercail je me rendis au fond du jardin pour brûler la masse de propagande du « grand inséminateur ». Le clan des femmes s’en étonna, mon père, pourtant avare de ses paroles, leur balança « foutez-lui la paix ! »

 

Maman en fut marrie. Jamais je ne lui ai avoué que la raison profonde de mon refus se nichait dans la petite culotte des filles.

 

En vous lisant je me disais : « Je l’ai échappé belle… »

 

Votre « grand cheval » dont j’avais oublié le nom et le prénom, Eugène Arnaud, est bien celui qui a cherché à m’enrôler, qui m’a harcelé et à qui j’ai échappé. Nous nous rejoignons quand vous écrivez « si le sobriquet s’est transmis à travers les générations de séminaristes c’est qu’il allait une casaque à ce fameux étalon, le plus grand inséminateur de vocations artificielles. »

 

Il était le bras armé de la reconquête décrétée par Mgr Antoine-Marie Cazaux évêque de Luçon.

 

 

Deux détails, il m’a confirmé en l’église Saint Jacques le majeur de la Mothe-Achard  et j’ai le souvenir des sacs de blé donnés par les paysans chaque année pour l’œuvre des séminaires.

 

C’est lui qui décide de faire de 1959 « l’année su sacerdoce et des vocations »

 

Dans sa lettre pastorale titrée « L’Église a besoin de prêtres » 8 pages pour appeler au renforcement du « corps franc des consacrés à Dieu : Si tous le chrétiens de Vendée étaient pénétrés de cette pensée de l’Église, si tous obéissaient docilement et activement à ces impulsions de l’Église, bien plus large et bien plus efficace serait la réponse de notre diocèse à l’appel de Dieu et des hommes qui demandent des prêtres… l’Église a besoin de prêtres, à vous de lui en donner. »

 

 

Langage de combat, relayé par les prédicateurs venus en chaire, en mission, celles-ci étant souvent  marquées par l’érection de calvaires, il s’agit d’étendre l’œuvre civilisatrice de la religion catholique, de lutter sur tous les continents contre « les dangers mortels menaçant l’Église : « l’invasion des sectes protestantes, la sécularisation de toute la vie, un marxisme agressif, un spiritisme inquiétant… un islam qui répond sans effrayer par les exigences que présente la doctrine du Christ… un athéisme dont la contagion est d’autant plus redoutable qu’elle coïncide avec un progrès matériel qui porte l’homme à s’imaginer qu’il peut se passer de Dieu. »

 

Si j’ai été sauvé des rets du grand inséminateur c’est que ma mère m’aimait pour de vrai, elle n’était pas bigote, et que mon père, plutôt libre penseur, pratiquait pour lui faire plaisir. Il marquait sa distance en allant à la messe, sur une chaise, sous le clocher, tout au fond où, souvent, il en profitait pour s’offrir un petit roupillon. De plus, ni le curé-doyen, ni les fameux frères de Saint Gabriel qui tenait l’école primaire n’ont exercé une quelconque pression sur moi. D’ailleurs, aucun de mes camarades de classe de l’école sainte Marie n’est entré au séminaire.

 

La pression à la Mothe-Achard tenait plus de la perpétuation de vieilles histoires, on ne se regardait pas en chien de faïence, chacun était dans son rôle, les laïcs minoritaires se tenaient à carreaux et les culs bénis ne pratiquaient aucun prosélytisme. Je dois à mon appartenance à ceux qui allaient à la messe d’avoir pratiqué le basket à la Vaillante Mothaise, le patro mais mes copains d’enfance les Remaud, dont la mère était la plus grande amie de la mienne, jouaient au foot, au FCM tenu par ceux d’en face.

 

Je dois avouer mon extrême plaisir de 68 hard d’avoir vu les séminaires de Vendée se vider comme des outres à la suite du mouvement. Enfin, toute cette séquence m’a vacciné contre le danger des Églises, de leur clergé, de leur soumission, ce qui m’a évité l’enrôlement par le Parti Communiste.

 

Votre livre, cher Jean-Pierre Sautreau, m’a touché, ému, elle est une œuvre salutaire qui, au-delà de votre douloureux parcours personnel, témoigne de ce qu’a été cette Vendée sous le joug des maîtres et du clergé.

 

 

 

Comme vous l’écrivez pages 163-165 ce sont « les conditions familiale et sociale difficiles qui font souvent basculer les familles paysannes qui fournissent du coup pratiquement les deux tiers du bataillon des nouvelles recrues.

 

Beaucoup d’entre elles, particulièrement dans le bocage, en plus de n’être pas insensibles à la notoriété pouvant rejaillir de l’illumination de l’un des leurs, surtout vis-à-vis de leurs bailleurs, notre maître, conviennent facilement de caser un enfant ou deux au Séminaire peut contribuer à résoudre l’excès de bras sur une exploitation de trop peu d’hectares. Et puis ainsi ces pauvres castrés ne feront pas de vieux gars. Combien de cadets (les aînés étant destinés à recevoir et poursuivre l’exploitation) vont être ainsi les victimes, avant que l’industrialisation ne les sauve plus tard, d’une telle rouerie des faiseurs de vocation ? »

 

Les maîtres, chez moi, les de la Bassetière régnaient sur toutes les métairies de la Mothe-Achard et de Saint Julien des Landes. Mon père Arsène, entrepreneur de battages, était leur obligé, souvenir du maître derrière la bascule pour tarer les sacs du métayage et des tournées avec lui dans les fermes du docteur Louineau où les gamins pliaient le genou devant le maître.

 

 

« Comment comprendre que les familles arrivent ainsi à admettre que leur intérêt rejoint là celui de l’Église, au point  de sacrifier un enfant par calcul ? Les curés sont encore les rois au pays des insurgés de 1793, des descendants de l’armée contre-révolutionnaire catholique et royale. Quelques années plus tôt, ils ont, sans difficulté, fait se dresser les faux contre la Loi de séparation. Ils continuent de s’opposer viscéralement à l’implantation des écoles publiques. Ils menacent du haut de leur chaire d’excommunier tous ceux qui seraient tentés d’y inscrire leurs drôles. Ils ont l’appui des possesseurs et des entrepreneurs qui apprécient la force fédératrice de la religion dans les bourgs, son pouvoir émollient et conciliateur sur les esprits et donc garantie la paix sociale. Au besoin, ils savent aussi se montrer diablement malins. Ainsi  pour lever une ultime hésitation des parents ils en viennent à dépeindre l’incroyable bénéfice que le fils va aussi retirer de ce troc. Leur magnifique abnégation et leur indéniable clarté de vue va lui permettre d’accéder à un cursus d’études à priori inespéré et décrocher une situation plus qu’enviable, glorieuse, qui honorera toute leur maison. Et puis, quoi de plus naturel, quand on a la foi enracinée et têtue et qu’on reçoit chaque naissance comme un don du ciel, de rendre, à ce Dieu qui bénit ainsi son toit, un fruit, en quelque sorte lui appartenant. »

 

Maquignonnage dites-vous, je souscris à 100%

 

Ce fardeau reste toujours présent dans la Vendée moderne, ma famille est montée en force, en 1984, sans me le dire, j’étais membre du cabinet de Michel Rocard, manifester pour l’enseignement libre. Vilain petit canard noir qui a rompu avec eux. Cet inconscient collectif a aussi donné Philippe de Villiers, son radio Alouette, son Puy de Fou, cet homme est un concentré des scories de ce temps que vous avez vécu.

 

Photo   OUEST-FRANCE

 

Je ne vais aller au-delà, cher Jean-Pierre Sautreau, ils vous ont brisé, bousillé une grande part de votre vie, vous en voulez à cette Église qui a mangé votre mère avant de tenter de vous dévorer. Comme je vous comprends et je mesure toute la chance que j’ai eu d’avoir des parents aimants, avant tout soucieux de me laisser le choix de mon avenir.

 

Merci pour ce livre bien écrit, bien construit, vivant, poignant, mes chers lecteurs je vous encourage à le lire.

 

LIRE 4 septembre 2018

 

UNE CROIX SUR L'ENFANCE en Vendée ICI 

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30 octobre 2018 2 30 /10 /octobre /2018 06:00
Ne vous moquez pas de mes Veja je ne porte que ça depuis 2006, écoutez plutôt l’histoire de cette marque de baskets pas comme les autres

Le 6 septembre 2006 rentrant de vacances j’écrivais :

 

Tout ça pour mes Veja...

 

Résumé : Début août je rentre de vacances, rechausser des grolles normales après trois semaines de tongs me pèse. Passant à vélo dans le quartier des Halles –  l'ex ventre de Paris, le trou bouché des Halles devenu un haut lieu de la consommation des banlieusards drainés par le RER –  je tombe en arrêt devant une vitrine de pompes de sport. J'entre, montre du doigt la paire qui me plaît. Je dis je peux les essayer. Des bateaux, légères, aérées, à l'opposé des écrases merde rutilantes des marques leaders.

 

 

J'achète.

 

Avant de remettre mes nouvelles pompes dans leur boîte je soulève la languette. J'ironise pour cacher ma mauvaise conscience : « Alors elles sont fabriquées au Brésil ? » 

 

Le grand type qui tient boutique me toise : « Ce sont des Veja » 

 

Moi penaud j'ouvre des yeux ronds et me tiens coi. Face à mon ignorance crasse le vendeur de pompes très militant me sert tout sur les Veja : « Veja en brésilien veut dire regarde : caoutchouc, coton naturels, commerce équitable... » Je suis tout ouïe, remercie et repars. En entrant dans cette boutique je me contentais d'acheter des pompes alors qu’en ressortant je transportais dans un carton un autre monde.

 

La suite ICI 

 

Depuis ce jour je vis en Veja tout au long de l’année.

 

Depuis l’an dernier j’achète le modèle Wata imaginé en partenariat avec l’association Surfrider Foundation qui protège les océans.

 

Cet organisme lutte pour la protection des océans, rivières et littoraux. 269 000 tonnes de plastique rejetées dans la mer chaque année. L'association organise régulièrement des collectes de déchets sur les plages (et au bord du Canal Saint-Martin), des opérations "ramassage" de mégots (11 505 mégots récoltés lors de la dernière), intervient dans les écoles, donne des conférences, distribue des cendriers portables. "La majorité des déchets viennent directement des rues de grandes villes, telles que Paris, pour finir sur nos plages et dans nos océans" expliquent les intervenants. Exemple typique, les cotons tiges, négligemment jetés par milliers dans la cuvette des toilettes. Le ballet affligeant de ces petits tubes blancs et bleus à la surface de nos mers peut durer des centaines d'années.

 

Oui Veja est une marque de baskets pas comme les autres

 

Caoutchouc

 

« Depuis 2005, VEJA a acheté plus de 100 tonnes de caoutchouc sauvage au Brésil. L’Amazonie est le seul endroit au monde où poussent à l’état sauvage les hévéas, les arbres à caoutchouc. C’est dans l’état de l’Acre que les Seringueiros, les saigneurs d’hévéas, récoltent le caoutchouc utilisé pour les semelles. Les seringueiros vivent dans la forêt et de la forêt. Tous les matins, ils parcourent les étendues de forêt dont ils possèdent le droit d’exploitation et saignent les arbres à caoutchouc selon un parcours que seuls eux connaissent. Leur méthode de saignée et le parcours permettent aux arbres de se régénérer. Chaque seringueiro récolte en moyenne 1 litre de caoutchouc par jour. Après la récolte, ils utilisent un procédé développé par l’université de Brasilia, cette technologie leur permet de transformer le latex sauvage en feuille de caoutchouc, sans intermédiaire industriel. Grâce à cette technique, le caoutchouc est plus pur, ne s’oxyde pas, et garde toute son élasticité. Ce procédé permet surtout aux seringueiros de fabriquer un produit semi-fini à la valeur économique beaucoup plus élevé que le caoutchouc classique. Ils obtiennent donc un revenu plus décent de l’exploitation de la forêt. En valorisant économiquement la forêt, il la protège. Pour un kilo de caoutchouc récolté, 1,2 ha de forêt est protégé. Aujourd’hui, plus de 200 familles travaillent avec VEJA dans 3 réserves de l’Amazonie.

 

Coton

 

Depuis 2005, VEJA a acheté plus de 180 tonnes de coton dans l’état du Ceará au Brésil, directement auprès des producteurs locaux. Depuis sa création, VEJA remonte la chaîne de valeur pour fabriquer des baskets différemment, et c’est ce qui a été fait pour la filière du coton. Au lieu d’acheter directement de la toile, nous avons voyagé dans le nord-est du Brésil pour comprendre et trouver le meilleur coton pour nos baskets. Ce coton n’est pas seulement bio – cultivé sans pesticide ni engrais – il est aussi agroécologique, un type d’agriculture qui consiste à rendre la terre plus riche qu’elle ne l’était avant d’être cultivée. Produire du coton bio et agroécologique a un coût, pour s’assurer que les petits producteurs obtiennent un revenu digne de ce travail, nous appliquons à notre relation les principes du commerce équitable. Nous réduisons les intermédiaires en négociant directement avec les familles. Nous fixons le prix du coton dans des contrats de 3 ans, ils savent ainsi combien va leur rapporter leur culture avant même de planter les graines. Nous ajoutons une prime collective de 0,5€ par kilo de coton qui permet d’améliorer les conditions de travails et les infrastructures partagées. En 2017, le coton conventionnel se vendait 1,73€/kg sur le marché, nous avons acheté notre coton 3,07€/kg. Après sa culture, le coton est filé puis tissé par des usines avec qui nous travaillons depuis des années. Nous utilisons la toile sur la plupart des baskets VEJA.

 

Veja, des baskets vraiment pas comme les autres.

 

« Ce n’est pas une histoire de style d’être écolo, c’est une question de bon sens. On ne veut pas se battre pour convaincre, on propose simplement, on montre comment on fonctionne ». Ne pas tomber dans le matraquage, les remontrances et la culpabilisation, prouver simplement que d’autres manières de faire existent.

 

Lancée en 2005, elle enregistre une croissance de 50 à 60 % par an, a réalisé un chiffre d’affaires de 20 millions d’euros en 2017 avec 550 000 paires vendues, dont 40% aux Etats-Unis et 20% en France. Elle respecte des règles éthiques et environnementales. Afin de garder des prix comparables à ceux de ses concurrents malgré des coûts de production plus élevés, Veja ne consacre pas un centime au marketing ou à la publicité –ces dépenses représentent parfois plus de la moitié du prix des autres baskets.

 

« Nous sommes comme un cheval de Troie. La plupart de nos nouveaux clients ignorent notre démarche», s’amuse Sébastien Kopp, fondateur de Veja avec François-Ghislain Morillion, dans son siège parisien.

 

Fait rare, ce sont les cofondateurs qui pointent les limites à lever : des lacets en coton non bio faute de quantités suffisantes, des teintures naturelles abandonnées à cause de leur qualité…

 

Loin de l’Asie et de ses usines d’où sortent quasiment toutes les paires de chaussures du monde, ils s’envolent pour le Brésil et mettent en place une chaîne de production suivant les principes du commerce équitable. Le caoutchouc des semelles vient des «seringueiros» qui récupèrent le latex sur des hévéas sauvages, payé 2,77 euros le kilo quand le synthétique peut se négocier à 1,35 euro. Le coton bio est acheté à des producteurs du Nordeste. Les tennis sont fabriquées à Porto Alegre dans une usine respectueuse des règles de l’Organisation internationale du travail.

 

Chez Veja, la transparence est revendiquée. L’écart de salaires entre les 80 employés va de 1 à 6. «Nous avons vécu une époque où le capitalisme “buggait” beaucoup, dit Sébastien Kopp. Nous ne sommes ni des décroissants ni des alter. Au lieu de râler, nous montrons que c’est possible de faire autrement. Nous sommes trop petits pour embêter nos concurrents mais assez grands pour les influencer.» Développer la fabrication en France n’est pas d’actualité, pour l’instant du moins.

 

LIRE 

19/09/2017

Veja, la basket équitable ICI 

Veja : "Ce n’est pas une histoire de style d’être écolo, c’est une question de bon sens" ICI 

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29 octobre 2018 1 29 /10 /octobre /2018 06:00
Extension du domaine du flou : « Quand on a la prétention de mener par la main des néophytes du vin sur des chemins de traverse on ne confond pas les départementales goudronnées avec les chemins de terre. »

Sur cet espace de liberté j’ai pour principe de ne jamais éreinter un livre, acheté ou reçu par service de presse, ou de me gausser d’un vin que je n’apprécie pas.

 

Dans la préhistoire du blog les agences de com me faisaient porter des bouteilles et au sortir des déjeuner de presse je recevais, comme mes collègues, des flacons de la puissance invitante. N’étant pas un dégustateur patenté je les distribuais à ceux de mes amis qui me disaient les apprécier. Je ne suis pas sectaire.

 

Du côté du vin, ayant quitté depuis un bon bout de temps le circuit des agences, et celles-ci trouvant de moins en moins de clients pour ce genre d’exercice, par bonheur on ne m’inflige plus des bouteilles indésirables.

 

Pour les livres, ceux qui les écrivent ou leurs éditeurs, se classent en deux catégories :

 

  • Les qui ont la rancune tenace, grand bien leur fasse, les qui ne supporte pas la moindre critique sur leur art de mélanger la défense d’une cause et le développement de leur fonds commerce. Blacklisté. Sous-entendu : t’as qu’à l’acheter ! Ce que je ne fais pas bien sûr. Mon budget et mon temps de lecture ne sont pas extensibles.

 

  • Les qui pensent que mes petites chroniques ont une quelconque influence pour inciter mes lecteurs à acquérir le livre. Je les remercie. Je les lis et s’ils me plaisent je chronique.

 

Dans le lot, je l’ai déjà écrit, certains soit me tombent des mains, soit ils m’irritent.

 

Comme je ne vais ne pas me faire des trous dans l’estomac c’est ce dernier cas que je souhaite, très brièvement, aborder ce matin.

 

Ces derniers temps les opus sur les vins nature déferlent sur le marché.  C’est porteur. C’est vendeur. Les opportunistes ne me font ni chaud ni froid mais cette cohorte d’ouvriers de la 25e heure qui vient, la gueule enfarinée, nous conseiller, nous guider, sur des chemins qu’ils viennent tout juste d’emprunter, ça me gonfle absolument.

 

J’oubliais : je ne jette jamais un livre.

 

Qu’en faire alors ?

 

Les donner ?

 

Non, l’ignorer, les laisser prendre la poussière dans un coin !

 

J’en ai reçu un ce matin, doublement signé où, joyeusement, les auteurs font un méli-mélo des vins bio avec les vins nature. Pour résumer, avec eux c’est l’extension du domaine du flou puisque leur cible va du naturiste pur et dur jusqu’à notre Gérard Bertrand. C’est l’Antonin qui va être content. Les citations sont d’un grand éclectisme, faut ratisser large, mais je n’y ai retrouvé aucune mes références de vin  nature, sans doute ne suis-je plus dans le coup mais à force de tirer sur la corde elle s’effiloche et ne sert plus à rien.

 

Je ne vais pas reprendre mes explications sur le thème : la vigne et le chai, j’ai mieux à faire. C’est lassant.

 

Quand on a la prétention de mener par la main des néophytes du vin sur des chemins de traverse on ne confond pas les départementales goudronnées avec les chemins de terre.

 

Voilà c’est dit. Je vous en prie, auteurs et éditeurs, épargnez-moi ce genre d’envoi. Par avance merci.

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28 octobre 2018 7 28 /10 /octobre /2018 07:00
L'arrestation de Robespierre, la nuit du 8 thermidor. Huile sur toile de Jean-Joseph Weerts

L'arrestation de Robespierre, la nuit du 8 thermidor. Huile sur toile de Jean-Joseph Weerts

Marcel Gauchet: « J’ai eu l'impression en écrivant ce livre de me libérer moi-même de toute une série de clichés hérités, qui m'encombraient la mémoire sans que j'en sois conscient. » F. Mantovani/ Gallimard

 

J’avoue, même si je ne dispose pas du même outillage intellectuel que Marcel Gauchet, que pour moi Robespierre était en quelque sorte le fondateur de la tradition des dictateurs modernes.

 

En passant à la librairie Gallimard j’ai donc acheté Robespierre l'homme qui nous divise le plus de Marcel Gauchet Collection L'Esprit de la cité, Gallimard

 

 

 

Il y a bien du Robespierre chez Mélenchon

 

« Je vais vous citer un auteur que vous aimez » lança-t-il lors du débat sur le projet de loi de confiance dans la vie publique.

 

« Avant cela, je veux résumer notre ligne. Il faut débarrasser la vie publique et celle de la nation de l’emprise de l’argent devenu fou dans le pays. Si vous voulez poursuivre les corrompus, traquez les corrupteurs. Ils ne sont pas si difficiles à trouver car ils sont peu nombreux et ne se cachent même pas de leurs activités. »

 

« Un mot donc pour conclure, celui de Robespierre, fondateur de nos libertés : « Nous ne sommes pas réunis pour gouverner le crime mais pour le combattre ».

 

Il s'agit cependant d'une paraphrase. Le 8 thermidor de l'an II au calendrier révolutionnaire (le 26 juillet 1794 selon le nôtre), Maximilien de Robespierre déclarait devant la Convention, réunie aux Tuileries: « Je suis fait pour combattre le crime, non pour le gouverner. Le temps n'est point arrivé où les hommes de biens peuvent servir impunément la patrie; les défenseurs de la liberté ne seront que des proscrits, tant que la horde des fripons dominera. » Il prononçait alors ce discours dans un climat de grande fébrilité politique et était décrété d'arrestation, ainsi que quelques-uns de ses partisans, dès le lendemain.

 

De quoi Jean-Luc Mélenchon est-il le nom en histoire ?

 

Les Insoumis vous rétorqueraient, sans hésiter, Maximilien Robespierre, le prêtre de la Révolution, l'homme qui défia la monarchie et ses privilèges, l'instituteur d'une République vertueuse. Les plus critiques, eux, vous répondraient également Robespierre, mais l'autre revers de la médaille, le virtuose de la terreur, l'incarnation redoutable d'une intransigeance politique ponctuée d'obsessions vertueuses, aussi dangereuses qu'irréalistes.

 

Lire ICI 

 

Marcel Gauchet cherche à penser par quelle métamorphose le « champion des droits du peuple à la Constituante » a été, quelques années plus tard, le « pourvoyeur de la guillotine de la Convention montagnarde ». Troublant et passionnant.

 

Retour en arrière :

 

Cinq mois après l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, le Parti socialiste tient congrès à Valence du 23 au 25 octobre 1981. Une banderole est déployée dans la salle des orateurs

 

« Avec les socialistes, réussir le changement ». C’est en effet la première fois que la gauche accède au pouvoir sous la Ve République.

 

Ce congrès restera comme celui des « coupeurs de têtes ».

 

Le premier jour, le jeune député Paul Quilès  prononce un discours enflammé : « Personne ne nous saurait gré de laisser en place tous les hauts responsables de l’économie ou de l’administration, qui sont nos adversaires. Souvenons-nous qu’en politique, faire un cadeau de ce genre, c’est se condamner soi-même. Mais il ne faut pas non plus se contenter de dire de façon évasive, comme Robespierre à la Convention le 17 thermidor 1794 : Des têtes vont tomber… Il faut dire lesquelles et le dire rapidement !»

 

Paul Quilès, tout occupé à réclamer des têtes, a cité la date erronée du 17 Thermidor. Robespierre a en fait prononcé son discours le 8 Thermidor. Le député de Paris rappelle ainsi que l’incorruptible avait fait ce jour-là un discours menaçant contre les « traîtres » et les «fripons» de l’assemblée. Mais Robespierre n’avait dénoncé personne en particulier, laissant planer la menace sur l’ensemble des députés. Cette erreur avait été exploitée dès le lendemain par ses ennemis, qui l’avaient arrêté puis envoyé à l’échafaud le surlendemain.

 

L’exhortation de Quilès suscite l’indignation à droite, j'étais en séance de nuit à l'Assemblée Nationale Toubon, Séguin et Cie poussèrent les hauts cris et le gouvernement fut un peu mal à l'aise. Le ministre de l’intérieur Gaston Defferre précise aussitôt : « Notre juge à tous, c’est le peuple. Nous sommes condamnés à être solidaires, camarades.»

 

Paul Quilès gagne pour longtemps le surnom de «Robespaul». Mais celui qui voulait couper des têtes se révélera plus tard un ministre assez modéré.

 

Paul Quilès député du XIIIe arrondissement de PARIS, où j’habitais à l’époque, fut fort marri de ce surnom et de l’interprétation de ses propos :

 

« Personne n’a mieux résumé le travestissement médiatique dont a été l’objet mon intervention au congrès de Valence (1981) que Michel Rocard (“l’Histoire” – octobre 1993) : « la télévision a besoin d’images et elle déforme tous les débats d’idées, les transforme en déviances, en crise, pour les besoins du spectaculaire. On a fait dire à Paul Quilès le contraire de ce qu’il avait dit, puisque ses propos visaient précisément à empêcher toute chasse aux sorcières » La suite ICI

 

Robespierre reste une énigme, et une énigme qui soulève les passions. Il a ses admirateurs inconditionnels et ses détracteurs farouches. À la ferveur pour l' «Incorruptible» des uns répond la répulsion pour le «Tyran» sanguinaire des autres. Cette division reflète l'antagonisme des mémoires de la Révolution française. 1789 et 1793 continuent de symboliser les deux faces contrastées de notre événement fondateur : le glorieux avènement de la liberté, d'un côté, et la dérive terroriste, de l'autre. Or Robespierre a pour originalité de faire le lien entre ces deux visages. Le champion des droits du peuple à la Constituante est aussi le pourvoyeur de la guillotine de la Convention montagnarde. Comment passe-t-on de l'un à l'autre? Rupture ou continuité?

 

C'est cette question classique que reprend ce livre. Il s'efforce d'y répondre en scrutant minutieusement l'itinéraire de pensée que l'abondant discours robespierriste permet de reconstituer. Un parcours qui éclaire le sens de l'événement révolutionnaire lui-même. Robespierre apparaît dans cette lumière comme l'homme qui a le plus intimement épousé le principe de la «révolution des droits de l'homme» qu'a été la Révolution française. Il est également celui qui a érigé la Terreur en instrument du règne de la Vertu, dans la tourmente de 1793-1794, en échouant, pour finir, à procurer une fondation durable au régime politique que les droits de l'homme appelaient comme leur traduction.

 

En quoi ce parcours donne exemplairement à comprendre le problème que la Révolution a légué à la France et que, plus de deux siècles après, elle n'a toujours pas fini de résoudre.

 

Gauchet: « Il y a une thématique populiste chez Robespierre »

Propos recueillis par Alexis Lacroix et Anne Rosencher, publié le 16/10/2018

 

L'EXPRESS. Votre livre sur Robespierre est le premier d'un projet éditorial sur les personnages "qui ont fait la France". Pourquoi avez-vous choisi Robespierre ? Quels "liens" aviez-vous avec lui, que vous n'aviez pas avec Jeanne d'Arc ou Napoléon, par exemple ?

 

Marcel Gauchet : J'ai rencontré Robespierre il y a longtemps, et je dois dire qu'il m'a surpris. C'était dans les années 1980, lorsque je travaillais avec d'autres, autour de François Furet, sur ce qu'allait être le bicentenaire de 1789. Mon objet, à l'époque, était l'irruption, avec la Révolution, des droits de l'homme dans la tradition politique française. Et c'est dans ce contexte, donc, que j'ai rencontré un Robespierre très différent de celui auquel je m'attendais, et très différent de celui que les historiens portraituraient à l'époque. 

 

On était en pleine vague antitotalitaire, qui a trouvé son point d'aboutissement en 1989 dans une extraordinaire coïncidence de calendrier, avec l'écroulement du mur de Berlin et du système soviétique. Le Robespierre que l'on racontait alors était en quelque sorte le fondateur de la tradition des dictateurs modernes. Or le Robespierre que j'ai rencontré en travaillant dessus était beaucoup plus singulier. Depuis lors, je n'ai cessé de garder ce thème de recherche en tête. 

 

Vous venez de dire plusieurs fois "j'ai rencontré Robespierre". C'est tout de même intéressant comme formulation...

 

Oui, c'est une rencontre au sens où Robespierre est un personnage mystérieux et un cas fascinant. Il y a un élément de sa personnalité qui est parfaitement insaisissable, et son mystère est décuplé par ce qui se joue durant la Révolution : c'est le même homme qui passe de chantre de toutes les libertés, entre 1789 et 1791 - j'oserais dire que c'est le premier vrai libéral de l'Histoire française - à l'homme du comité de Salut public et de la Terreur deux ans plus tard. Comment bascule-t-il de l'un à l'autre alors que, par ailleurs, quand on regarde de près son propos et ses discours, on voit que c'est le même homme ? Il garde une continuité d'inspiration, mais, en même temps, il change du tout au tout. C'est pour le moins troublant.

 

Un autre élément qui m'a frappé dans le personnage, c'est que Robespierre, dans sa période Salut public, est le contraire d'un dictateur ordinaire : il ne règne que par la parole. Et il ne se préoccupe pas, au fond, des vrais moyens du pouvoir. Alors qu'en général les dictateurs commencent par s'emparer de la police, de l'armée, de la propagande... Robespierre, lui, exerce une manière de dictature dans un temps très court, quelques mois, par son prestige et le fait qu'il donne à ses compères le sentiment que toute la crédibilité politique de leur projet repose sur lui. J'ai eu beau chercher, il n'y a rien qui ressemble à cela. Robespierre est unique en son genre.

 

la suite ICI 

 

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