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7 août 2020 5 07 /08 /août /2020 06:00

Dessin de Jacques Touchet en illustration du poème dans le recueil La négresse blonde, 1945 ICI 

J’ai peine à imaginer ce qu’aurait écrit Vialatte dans sa chronique pour La Montagne, sans aurait-il dépassé le côté anecdotique pour souligner l’originalité et la saine conception de notre  retour en terre de René Armentier.

 

Vialatte allait aussi aux enterrements. D'abord, celui de Roger Nimier, dont lui restait un petit lancier en plomb - «la lance est brisée, le cheval galope». Ensuite, celui de son cher Jean Paulhan, qui tenta de le faire libérer quand il était prisonnier des Allemands, publia son premier roman chez Gallimard, et y accueillit toutes ses traductions de Kafka. Paulhan, avec lequel il jouait aux boules le dimanche et mangeait de l'estomac de requin dans un resto chinois du Panthéon. Paulhan, le patron, qui lui avoua, un jour où il corrigeait des épreuves :

 

« J'ajoute quelques fautes d'impression. Pour la vraisemblance

 

En effet, « Pour lui (René Armentier), les obsèques étaient une opération mercantile et il voulait consacrer son argent à ce qui l’intéressait, raconte Martine Glorieux sa fille unique. Il aurait voulu un cercueil en sapin basique qui n’existe pas et ne voulait pas de capitonnage. Lorsque je lui ai dit qu’il faudrait peut-être bien mettre quelque chose, il m’a dit : « eh bien, il n’y a qu’à mettre mon journal ! » Je n’étais pas certaine que ce soit possible, mais les pompes funèbres Ducron m’ont assurée que si, à la grande satisfaction de mon père »

.

Mon père a toujours été abonné à La Montagne, dimanche et jours fériés compris. Il lisait son journal de A à Z.

 

« D’abord les avis d’obsèques, pour voir s’il y avait des célébrités comme il disait, c’est-à-dire des gens qu’il connaissait. Il poursuivait par le sport, le foot surtout car je crois qu’il y avait joué étant jeune. Et puis la politique nationale et surtout régionale : aux dernières municipales, il m’avait demandé de lui donner le nom de tous les maires des communes qu’il connaissait. Il finissait par le programme télé pour les info, les documentaires et le foot ».

 

L’article Un Puydômois emporte le journal "La Montagne" dans sa dernière demeure ICI 

 

 

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6 août 2020 4 06 /08 /août /2020 06:00

Investiture: le look de Michelle Obama décrypté

Dans une des toutes premières chroniques de ce blog, le 26 septembre 2005, titrée Le beau linge, j’avouais :

 

J’aime le beau linge, les belles étoffes, c'est la trace de ma mère dans mon élevage de petit vendéen : elle était couturière et j'ai passé ma tendre enfance au milieu du fil à faufiler et des coupons d'organdi ou de crêpe georgette...

 

Comme vous pouvez le constater, sur mon espace de liberté, le vin n’était déjà pas ma seule préoccupation et pendant les congés je me permettais de chroniquer sur le panty ou la mini-jupe.

 

10 juillet 2007

Qui se souvient du panty ?

 

« À bas les jarretelles ! » proclamait une publicité de l'époque. Avec la généralisation du jean unisexe moulant le bassin, puis l'irruption de la minijupe, finies les fanfreluches, les dessous qui volettent, ondoient, le corps se caparaçonne à nouveau. ICI 

 

20 juillet 2007

Mini, mini, tout est mini dans notre vie...

 

Ceux qui me lisent le savent, j'aime Jacques Dutronc. En 1966, il écrit et interprète : Mini, Mini, Mini. La première jupe rase-pets est apparue dans le quartier de Chelsea dans la boutique Bazaar sur King's Road et est l'oeuvre d'une jeune styliste autodidacte : Marie Quant. La mini-jupe va déferler sur le monde : 200 000 pièces vendues en 1966 pour la France. Coco Chanel la trouve « ridicule ». Le Ministre de l'Education Nationale, Christian Fouchet, la juge déplacée "dans les lycées " ; en Pologne le Parti dit "oui" ; en Hollande le Parlement vote "non". ICI

 

Ce matin je renoue  avec cette tradition pour évoquer un tissu la guipure qui n’est pas de la  dentelle…

 

Un ouvrage de Forster Rohner. — © Adrien Quan

 

Cette idée m’est venue suite à la lecture dans l’excellent journal Le Temps d’une série manufacturière autour de produits iconiques et emblématiques de la Suisse.

 

Forster Rohner, maître de la guipure

 

Le groupe saint-gallois avait fait sensation en 2009 lorsqu’une certaine Michelle Obama s’était parée de sa broderie pour la cérémonie d’investiture de son mari. En toute discrétion, l'entreprise familiale continue d’approvisionner les grands noms de la haute couture. ICI 

 

Une mariée sensuelle et romantique avec la guipure

 

La guipure est mal connue, on la confond souvent avec la dentelle de par ses vides et ses pleins. C’est en réalité une broderie sans support dont les motifs sont espacés et liés entre eux formant une surface plus ou moins épaisse.

 

LA GUIPURE D'IRLANDE Bibliotheque D.m.c. Patrons Planches Dentelle ...

 

Elle tient son aura avec les traditionnelles Guipure d’Irlande, de Flandre, du Puy qui hélas n’existent plus, ou presque plus.

 

Amazon.fr - La Guipure du Puy : Volume 2 - Hubert, Nathalie ...

 

La production de guipures a été reprise par les brodeurs qui sont les seuls à encore pouvoir leur donner vie.

 

Étymologiquement, le mot veut dire « tortiller ». Alors, suivons le fil, et entrons dans les méandres de sa riche histoire.

 

Si la guipure est généralement rangée dans la catégorie des dentelles, elle n’est pas fabriquée sur des métiers à dentelle, mais sur des métiers à broder, et c’est là le secret de sa différence. La guipure est une broderie dont le fond a été éliminé. Dès lors, Il est assez facile de la distinguer d’une dentelle. La dentelle est plus légère, et possède toujours un fond. La guipure est souvent lourde, épaisse et très ouverte. En regardant de plus près, on peut remarquer un détail qui ne trompe pas. Dans la guipure, le fil peut suivre les contours d’un motif quelles que soient ses sinuosités. On dit  qu’il « grimpe » sur le dessin. Cela permet d’obtenir des décors très nets, bien ourlés et de haut relief. Alors que dans la dentelle, le fil ne peut jamais retourner en arrière : il suit la progression de la fabrication de l’étoffe, puisque le fond et le motif sont confectionnés ensemble.

 

La suite ICI 

 

Carte Postale Ancienne Série des industries Bretonnes – La Guipure ...

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5 août 2020 3 05 /08 /août /2020 06:00
 
26 juillet 
 
 
Banon 2020

Au temps où j’allais, profitant de mes congepés, traîner mes guêtres du côté de Buoux je me rendais de temps en temps à Banon.

 

9 juillet 2011

 

BANON : pourquoi en faire tout un fromage ? Les bleuets, les feuilles de châtaignier et qu’est-ce-que vous boirez avec ça ? ICI 

 

 

Banon est un charmant petit village des Alpes-de-Haute-Provence adossé au plateau d'Albion entre Lure et Ventoux dans les collines chères à Jean Giono. 878 habitants et plus de 100 000 livres à la librairie « Les Bluets » de Joël Gatefossé menuisier originaire de l’Essonne qui raconte avoir « cassé sa vie » à la mort de ses parents en 1990 et être venu s’installer un peu par hasard à Banon. Les débuts sont difficiles puis c’est le décollage et enfin le succès du au bouche à oreille. 

 

250px-Banon.jpg

 

Le banon est un petit fromage français de 6 à 7 cm de diamètre, au lait cru de chèvre d'une centaine de grammes issu d'anciennes recettes des fermes des Alpes-de-Haute-Provence. Les chèvres sont exclusivement de races provençale, rove et alpine et elles doivent paître sur les collines de la région pendant au moins 210 jours par an. Fromage à pâte molle à croûte naturelle, élaboré à partir de la technique du caillé doux et moulé à la louche avant d'être habillé, à la main, dans des feuilles de châtaigniers brunes et liées par un brin de raphia naturel (il est auparavant trempé dans l'alcool pour éviter les moisissures). Le ramassage des feuilles, qui doivent être récoltées brunes, se fait en automne lors de leur chute. Elles sont ramassées par des équipes de saisonniers sur le plateau d'Albion, dans les Cévennes, en Corse et en Ardèche.

 

À la récré, du pain, du banon, un livre, avec 1 petit coup de Bel-Air&Chardy d’Alice et Olivier de Moor : goûtons le silence !

 

17 mars 2017

À la récré, du pain, du banon, un livre, avec 1 petit coup de Bel-Air&Chardy d’Alice et Olivier de Moor : goûtons le silence !  ICI 

 

« À Banon, on ne plaisante pas avec les livres. La preuve avec cette expérience géniale et exemplaire que personne ne semble regretter ! »

 

À Banon si vous vous promenez dans les couloirs du collège après l’heure du déjeuner, vous serez sans doute surpris par un silence complet…

 

Depuis la rentrée de septembre, c’est en effet devenu un rituel : des élèves à la cantinière en passant par le principal et le secrétaire, plus personne ne parle, plus personne ne bouge, plus personne ne travaille… mais tout le monde lit ! Lumière sur une initiative exemplaire qui a l’air de faire énormément de bien à tous !

 

Cette nouvelle habitude pour le moins originale a été prise au collège de Banon (Alpes-de-Haute-Provence). Désormais, entre 13h40 et 14h05, il y est interdit de faire autre chose que de lire. On peut lire n’importe quel livre, n’importe où ET dans n’importe quelle position, mais on est obligé de lire !

 

Je ne sais si ces vieilles chroniques ont donné à Alice et Olivier de Moor l’envie d’aller prendre du repos, goûter de la beauté, dans cette belle région où se situe Banon, mais Olivier m’a fait parvenir un petit mot :

 

Bonsoir Jacques,

 

Nous sommes rentrés: trop tôt. Car la vendange va devoir se faire trop tôt. Par obligation et déjà je sens l'obligation de courir une fois de plus.

 

J'aime beaucoup les "basses alpes". Et la librairie de Banon. Dans l'offre des livres offerte à l'acheteur, je suis tombé sur un livre consacré à la peinture et c'est passionnant.

 

Ha ! les Basses-Alpes...

 

Carte des Basses-Alpes de 1852

 

Souvenir  de mes années où nous récitions les noms des départements, préfecture et sous-préfecture.

 

Le nom de Basses-Alpes était jugé péjoratif, surtout quand on le comparait à celui du département voisin : les Hautes-Alpes. D'autres départements d'ailleurs avaient déjà ouvert la voie : la Charente-Inférieure était devenue en 1941 la Charente-Maritime, la Seine-Inférieure changeait de nom en 1955 pour devenir la Seine-Maritime, la Loire-Inférieure devenait en 1957 la Loire-Atlantique et les Basses-Pyrénées s'appellent depuis 1969 les Pyrénées-Atlantiques. Enfin, les Côtes-du-Nord, qui ne sont pas situées dans le nord de la France mais au nord de la Bretagne, sont devenues les Côtes-d'Armor en 1990.

 

C'est en 1952-1953 que l'idée d'un changement de nom pour les Basses-Alpes fait son chemin, au moment où le tourisme commence à se développer et où la mention de "Provence" veut être mise en avant, comme l'indique sur France Bleu 100% Sud Jean-Christophe Labadie, directeur des Archives Départementales des Alpes-de-Haute-Provence.

 

La suite ICI 

 

Le sauvetage de la librairie "Le Bleuet", qui voulait concurrencer ...

 

Et la librairie de Banon. Dans l'offre des livres offerte à l'acheteur, je suis tombé sur un livre consacré à la peinture et c'est passionnant. C'est un résumé d'émissions que Daniel Arasse a fait avant de décéder. C'est Laure Adler qui lui confia pour France Culture une émision mensuelle sur les arts plastiques et l'histoire de l'art. Un extrait que voici :

 

 

FINALEMENT, La Joconde est un de mes tableaux préférés, il a fallu pour l'aimer beaucoup plus de temps que les cinq ans pris par Léonard de Vinci pour la peindre. Moi il m'a fallu plus de vingt ans pour aimer La Joconde. Je parle de l'aimer vraiment, pas seulement de l’admirer. C'est pour moi aujourd'hui l'un des plus beaux tableaux du monde, même si ce n'est pas nécessairement l'un des plus émouvants, quoique, franchement, c'est l'un des tableaux qui ont eu le plus de commentaires enthousiastes, jusqu'à la folie, de la part des gens qui l’aimaient, et cela montre qu'il touche. Moi, j'étais dans l’état d'esprit d'un spectateur de la deuxième moitié du XXe siècle, c'est-à-dire qu'on avait tellement vu La Joconde, on la connaissait tellement, qu'elle était devenue plus une plaisanterie qu'autre chose, d'autant que, Duchamp l’ayant reproduite avec cette inscription en bas du tableau : « L.H.O.O.Q. », on ne pouvait plus la prendre au sérieux. Il m'a fallu remonter ce handicap duchampien, non pas pour retrouver le regard de Léonard de Vinci ou de l'un de ses contemporains sur ce tableau, mais simplement pour comprendre comment celui-ci, peint dans des circonstances tout à fait particulières, pouvait avoir encore un tel effet, à bientôt cinq cents ans de distance. Cela ne tient pas seulement au délire de Walter Pater ou de Théophile Gautier. Même Kenneth Clark, le grand spécialiste de Léonard de Vinci, un homme très sérieux et l'un des meilleurs historiens de l’art du milieu du XXe siècle, dans un article, non pas de jeunesse mais de pleine maturité, écrit que La Joconde a l’air d'une déesse sous-marine : cette femme est assise dans une loggia, en hauteur devant un paysage très lointain, et il la voit comme une déesse sous-marine. Que se passe-t-il dans ce tableau pour que des gens sérieux, des responsables de musée et de grand savoir, puissent en dire des choses pareilles ? Ce tableau avait sûrement quelque chose. Personnellement, cela m'intéressait à moitié, mais à partir du moment où je devais écrire un livre sur Léonard de Vinci, je ne pouvais pas évacuer La Joconde, Je devais essayer de comprendre les enjeux de cette œuvre pour ce peintre. Et là, mon travail a été très fructueux. Je me suis demandé comment ce tableau était fait. Je vais en faire la description et vous verrez qu'apparaissent beaucoup de choses qu'on ne voit pas.

 

 

D'abord, la Joconde est assise dans une loggia, c'est-à-dire qu'il y a des colonnes de part et d'autre, sur les bords droit et gauche, jointes par le muret, derrière elle. Elle tourne le dos au paysage, qui est très lointain. Ensuite, elle est assise dans un fauteuil, je le sais uniquement parce que le bras gauche de la figure est appuyé, parallèlement au plan de l’image, sur un accoudoir. Mais cet accoudoir est Punique trace du fauteuil, il n'y a pas de dossier, ce qui est étrange. Et puis le paysage à l'arrière-plan est curieux puisqu'il est composé uniquement de rochers, de terre et d'eau. Il n'y a pas une seule construction humaine, pas un arbre, il y a seulement dans ce paysage quasiment pré-humain un pont, et c'est cela qui m'a posé beaucoup de problèmes d'interprétation. Ce pont enjambe ce qui doit être une rivière, mais qu'on ne distingue pas. Or, comment se fait-il que dans ce paysage des origines il y ait déjà un pont alors que toute présence humaine a disparu ?

 

 

J'ai donc commencé à me rendre compte que ce tableau recelait une méditation de Léonard particulièrement dense. Je ne devais pas m'en étonner puisque Vinci a dit que la peinture est cosa mentale c'est une chose mentale, et que par ailleurs, lorsqu'il a reçu cette commande en 1503 - il avait besoin d'argent et n'avait pas encore en ce temps-là de grandes commandes de la ville de Florence ça précédait de quelques mois la grande commande du palais de la Seigneurie (cf. Bataille d’Anghiari) qui fait qu’il ne livrera jamais le tableau à son commanditaire, Messere Giocondo, et le gardera pour lui toute sa vie. Il a achevé ce portrait pour lui-même. On a la preuve que l’idée de l’arrière-plan est venue très lentement. Il fallait comprendre le rapport qui liait cette figure assise si singulièrement dans ce fauteuil sans dossier et ce paysage : y a-t-il simplement opposition entre d’une part la beauté et le charme de la Joconde et d'autre part l’arrière-plan du paysage, ou bien y a-t-il aussi une relation entre les deux ?

 

 

J’ai essayé de mieux voir comment était peinte cette figure. Si vous la regardez bien, elle a le bras parallèle au plan de l’image, appuyé sur l’accoudoir. Elle est proche de nous, puisqu’on ne voit pas d'espace entre ce bras et une zone plus basse qui inscrirait une distance. En fait, elle est passée devant le parapet qui traditionnellement à l’époque séparait la figure peinte du spectateur, comme dans ces portraits d'origine flamande où le personnage est visible, mais où la base du tableau est faite d'un petit parapet, situé devant lui et devant lequel il place éventuellement sa main. Petit trait de génie de Léonard : mettre la Joconde dans l’espace du spectateur en faisant passer le parapet derrière elle, tandis qu'en même temps son bras fait barrière, bloquant la pénétration. Ensuite, le buste est de trois quarts, elle se tourne donc légèrement vers nous, le visage presque de face, et les yeux, perpendiculaires au plan, nous regardent directement où que nous nous trouvions par rapport à elle. Donc, depuis le bas du tableau jusqu'aux yeux, il y a une torsion de la figure qui fait qu'elle vous fixe. On est sous son regard, ce qui constitue un élément de fascination de ce tableau, tout comme on est un peu sous celui de la Vénus d'Urbin de Titien, le premier grand nu de la peinture occidentale, et ce n'est certainement pas un hasard si l'on est sous le regard de l’archétype du nu occidental. c'est-à-dire que du chaos on passe à la grâce, et de la grâce on repassera au chaos. Il s'agit donc d'une méditation sur une double temporalité, et nous sommes là au cœur du problème du portrait, puisque le portrait est inévitablement une méditation sur le temps qui passe. Montaigne le dit dans ses Essais : « J'ai plusieurs portraits de moi, combien suis-je différent aujourd'hui d'à cette heure. » On passe donc, avec ce sourire éphémère de La Joconde, du temps immémorial du chaos au temps fugitif et présent de la grâce, mais on reviendra à ce temps sans fin du chaos et de l’absence de forme.

 

Restait ce pont, dont je ne comprenais pas la présence jusqu'au moment où j'ai lu Carlo Pedretti, le grand spécialiste de Léonard de Vinci, capable d'écrire comme lui de la main gauche et à l'envers. C'est un homme admirable qui a passé toute sa vie avec Léonard de Vinci. À propos de cette interrogation sur la présence du pont, il dit une chose très simple à laquelle je n'avais pas pensé, à savoir que c'est le symbole du temps qui passe ; s'il y a pont, il y a une rivière, qui est le symbole banal par excellence du temps qui passe. C'est un indice donné au spectateur que l’étrangeté du rapport entre ce paysage chaotique et cette grâce souriante est le temps qui passe. Le thème du tableau c'est le temps. C'est aussi pour cette raison que la figure tourne sur elle-même, car un mouvement se fait dans le temps... Et l'analyse peut repartir à ce moment-là. Le tableau est fascinant parce que sa densité et sa sobriété font qu'il n'arrête pas de renvoyer la réflexion et le regard au regard...

 

 

Cela dit, et je n'en dis pas plus sur La Joconde. ]e ne pense pas que messere Giocondo aurait aimé le tableau s'il l'avait vu. Je pense même qu'il l'aurait refusé parce qu'il ne lui aurait pas plu.

 

Et le fait de faire de l'histoire permet là aussi d'avoir un regard un peu plus neuf sur les choses. Je pense que Francesco del Giocondo n'aurait pas accepté le tableau fini pour une bonne et simple raison : c'est qu'à l'époque, c'est un tableau scandaleux.

 

Aujourd'hui c'est le chef-d'œuvre des chefs-d'œuvre, mais en 1503-1505, c'est un tableau inadmissible.

Pourquoi?

Voilà un bon bourgeois florentin, et pas n'importe qui, qui commande au plus grand peintre du moment le portrait de sa femme parce qu'elle lui a donné des enfants, et ce peintre lui présente, comme portrait, une jeune femme qui sourit, ce qui est incorrect, toute proche de nous, épilée des sourcils et des cheveux - alors qu'on sait très bien qu'à cette époque seules les femmes de mauvaise vie s'épilent - et ensuite il la plante devant un paysage pré- humain affreux, terrible. Or, comment voulez-vous qu'un mari souhaite voir sa femme charmante, aimante, qui lui a donné deux enfants, devant un tel paysage et non pas devant des prairies, des arbres et des petits oiseaux, ce qu'on trouve dans les fonds de portraits de Raphaël contemporains de Léonard. Il n'aurait pas pu comprendre, et je pense que c'est pour Francesco del Giocondo ou pour ce genre de spectateur que Léonard de Vinci a peint le pont, pour leur expliquer qu'il ne faisait pas n'importe quoi, et qu'il y avait effectivement une méditation profonde sur le temps. Mais je crois que ce tableau était trop innovateur il impliquait à l'époque un tel bouleversement des pratiques du portrait qu'il ne pouvait pas être compris immédiatement.

 

On le voit d'ailleurs dans les répliques qui en ont été faites. Raphaël a admiré La Joconde mais quand il fait La Dame à la licorne, il la normalise. La Joconde est à part.

 

 

Ce qui m'a aussi beaucoup frappé quand je travaillais sur La Joconde, c'est que je travaillais en même temps sur tout Léonard de Vinci et donc sur les cartes géographiques qu'il a réalisées à la même époque, et un soir j'ai eu une sorte d'illumination, peut- être une sorte de folie, en regardant ces cartes : j'ai perçu que le paysage de La Joconde en arrière-plan, avec son lac très élevé et son val aquatique et marécageux dans la partie gauche, était pratiquement la prise en vue cavalière d'une carte de la Toscane que Léonard de Vinci réalise aussi en 1503-1504, et l'un des problèmes qu'il se pose dans cette carte est de savoir comment le lac Trasimène a pu jadis, dans un temps immémorial, expliquer les marécages du Val d'Arno, qui se trouve au sud d'Arezzo, en Toscane. On voit sur sa carte qu'il a dessiné un cours d'eau qui n'existe pas dans la réalité, allant du lac Trasimène au Val d'Arno. Ce qui m'a frappé, c'est de voir que la construction de La Joconde s'accordait pleinement à une réflexion cartographique et géologique de Léonard de Vinci, si bien que le paysage représenté derrière elle, c'est la Toscane immémoriale, celle qui existait avant que l’humanité n'y crée la grâce de ce pays, car la Toscane est très belle et c'est La Joconde. Ce cours d'eau qui relie le lac Trasimène au Val dArno, c'est le sourire de la Joconde. On pourrait continuer.

 

 

Par exemple, c'est vrai qu'elle a l'air d'être dans une grotte, et on a un très beau texte de Léonard sur la grotte : comme il se penche pour voir ce qu'il y a dans la grotte, il est attiré et il a peur. Cette attirance et cette peur de Léonard de Vinci par rapport au corps féminin sont bien connues : il est le premier artiste à avoir dessiné un sexe féminin comme une grotte. On peut continuer indéfiniment comme cela. La Joconde condense, je crois, une méditation sur le portrait et le temps qui est fondamentale pour l'art du portrait occidental, et en même temps c'est certainement l'un des tableaux les plus personnels de Léonard, parce qu'il a peint pour lui le portrait de la femme fertile, l’épouse de Francesco del Giocondo.

 

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4 août 2020 2 04 /08 /août /2020 06:00

 

Joël Giraud, secrétaire d'Etat à la Ruralité auprès de Julien Denormandie

 

Maire de l'Argentière-la-Bessée et député LREM des Hautes-Alpes, Joël Giraud est le nouveau secrétaire d'Etat à la Ruralité. En novembre 2013, il avait posé une question au ministre de l'Ecologie sur les phénomènes des "chemtrails". Ces traînées blanches laissées par les avions dans le ciel sont formées par la condensation de vapeur d'eau dégagée par les moteurs des avions. Des thèses conspirationnistes, nées dans les années 60 aux Etats-Unis, affirment que ces traînées sont des produits chimiques volontairement répandus depuis le ciel. Le ministère de l'Ecologie avait répondu à Joël Giraud en 2013 que les traces des avions dans le ciel n'étaient "pas nocives pour la santé".

 

Un parcours agro-écologique, gastronomique et culturel au ministère - Journées du Patrimoine 2017

 

Ça m’a donné l’idée de vous dresser le panorama des secrétaires d’État auprès du Ministre de l’Agriculture sous la Ve République…

 

L'HÔTEL DE VILLEROY

 

C’est une denrée rare : 10 (Méhaignerie l’a été 2 fois)

 

Le plus gros problème : où le loger ?

 

L’hôtel de Villeroy n’a rien de prévu à cet effet alors il ne reste plus qu’à le parquer dans la galerie Sully là où sont affichés les portraits des Ministres, ça fait un peu soupente de luxe.

 

 

  • Bernard Pons  (22 juin 1969-16 juillet 1972) sous Jacques Duhamel (22 juin 1969-7 janvier 1971) puis Michel Cointat (7 janvier 1971-5 juillet 1972)

 

  • Jean-François Deniau   Secrétaire d’État auprès du ministre de l'Agriculture (31 janvier 1975    12 janvier 1976) sous Raymond Marcellin

 

  • Pierre Méhaignerie  (12 janvier 1976-25 août 1976) sous Christian Bonnet

 

  • Jean Tiberi         Secrétaire d'État chargé des Industries alimentaires (12 janvier 1976-25 août 1976) sous Christian Bonnet

 

  • Pierre Méhaignerie (27 août 1976-29 mars 1977) sous Christian Bonnet

 

  • Jacques Blanc   (30 mars 1977-31 mars 1978) auprès de Pierre Méhaignerie

 

  • Jacques Fouchier (5 avril 1978   13 mai 1981) auprès de Pierre Méhaignerie

 

  • André Cellard (22 mai 1981-22 mars 1983) auprès d’Edith Cresson.

 

  • René Souchon (22 mai 1981- 4 avril 1985) auprès de Michel Rocard

 

  • Nicolas Forissier (31 mars 2004-31 mai 2005) auprès d’Hervé Gaymard puis de Dominique Bussereau.
  •  

Ces Auvergnats qui ont été ministres sous la Ve République ...

 

Une exception : Michel Debatisse, fut secrétaire d'Etat auprès du premier ministre (Raymond Barre) chargé des industries agro-alimentaires du 22 octobre 1979 au 13 mai 1981. Il ne fut donc pas logé au 78 rue de Varenne mais  à des adresses exotiques.

 

2 éphémères Ministre délégué René Souchon à la forêt (4 avril 1985-20 mars 1986) et Guillaume Garot  Ministre délégué chargé de l'Agroalimentaire 16 mai 2012- 2 avril 2014, nommé auprès de Le Foll pour faire plaisir à la Ségolène dont il fut un fidèle soutien.

 

Passons-les en revue :

 

  • Bernard Pons ICI   longue carrière politique de ce chiraquien s’est illustré à Ouvéa ICI 

Amazon.fr - Mémoires de 7 vies - Tome 1 - Les temps aventureux ...

 

 

  • Jean-François Deniau homme politique grand ami de Giscard, diplomate et écrivain, également navigateur, conteur, aventurier des droits de l'homme ICI  Je lui garde une grande reconnaissance c’est lui qui m’a recruté en 1975, sur la recommandation de son ami Michel Albert, comme chargé de mission contractuel auprès du directeur de la Production et des Echanges, Bernard Auberger, mon premier poste, le pied à l’étrier.

 

  • Pierre Méhaignerie  on ne le présente pas même s’il est maintenant retiré des voitures ICI  soutien Emmanuel Macron à l'élection présidentielle de 2017. « Cet homme est une borne », disait de lui l'ancien président socialiste François Mitterrand.

 

  • Jean Tiberi, moins connu que Xavière celle par qui les corses, retournés auprès de Dieu le père votaient dans le Ve, fut maire de Paris, soutien de Macron il n’a laissé aucune trace dans l’industrie de la charcuterie-salaisons pourtant fleuron de l’Ile de Beauté.

 

  • Jacques Blanc je l’ai bien connu lorsqu’il présidait, au  nez à la barbe des socialos, la région Languedoc-Roussillon, et que nous négociions sous la houlette de Michel Rocard l’élargissement de l’Europe à l’Espagne et au Portugal. Un roublard sympathique, sincèrement attaché à sa Lozère natale.

 

  • Jacques Fouchier, vétérinaire de son état, élu des 2 Sèvres, s’est rendu célèbre dans tout le Ministère pour  avoir, lors d’un Conseil des Ministres de l’agriculture de la CCE, prononcé à plusieurs reprise MAIS au lieu de MAÏS en lisant le papier de son conseiller technique qui omis le tréma sur le I.

 

  • André Cellard, les mauvaises langues affirmaient qu’il devait son poste au fait que cette nomination ouvrait les portes du Palais Bourbon à Lydie Dupuy sa suppléante qui se trouvait être la belle-mère de Jean-Christophe Mitterrand, dit « papa m’a dit ».

 

  • René Souchon fut nommé pour, disait-on, marquer à la culotte, le tout nouveau Ministre de l’Agriculture Michel Rocard, en fait la cohabitation fut sans nuages, j’en témoigne, les réunions de cabinet étaient communes, René avait toute liberté en son domaine et, comme la France présidait le Conseil des Ministres européen, il prit le fauteuil de Rocard lors de l’instauration des quotas laitiers. Pour la petite histoire il suivait un régime draconien pour plaire à sa dulcinée.

 

Le 26 janvier 1986, à la maire de Vic-sur-Cère dans le Cantal, Michel Rocard et René Souchon entouraient Jacques Gilzome, maire de la commune. © Agence AURILLAC

 

Réné Souchon : "Michel Rocard ne faisait pas de la politique pour faire des coups" ICI

publié le 03/07/2016 

 

On a quand même fait la mise en place des quotas laitiers européens, le 31 mars 1984. Nous avions un cabinet commun, on se parlait tous les jours. J’avais d’autres secrétaires d’Etat au téléphone qui se plaignaient de n’avoir aucune marge de manoeuvre. Ce n’était pas mon cas, il me donnait carte blanche sur les dossiers dont j’avais la charge.”

 

René Souchon, qui était alors plus mitterrandien que rocardien, se souvient d’un homme “impressionnant par son intelligence”. “Au début, son entourage pensait que j’avais été mis là par Mitterrand pour le surveiller. Il a vite compris que ce n’était pas le cas, entre nous il n’y a jamais eu de coup tordu”. 

 

En avril 1985, Michel Rocard démissionne parce qu’il est opposé à l’instauration du mode de scrutin proportionnel aux législatives de 1986. Henri Nallet prend son poste à l’agriculture, René Souchon reste en place, cette fois comme ministre délégué.

 

“Ce n’était pas un politicien, il avait une rectitude morale extraordinaire, il ne faisait pas de la politique pour faire des coups. Il était vraiment sur les idées, il allait tout droit… et ne voyait pas venir les coups des autres. C’est pour cela que Michel, que je n'ai pas vu depuis deux ans, était très critique sur la politique d’aujourd’hui, avec ses “coups” politiques et sa médiatisation.”

 

  • Nicolas Forissier n’a laissé aucune trace.

 

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3 août 2020 1 03 /08 /août /2020 06:00
La meilleure carbonara de Paris, tout comme celle de Nabil Hassen Hadj chez Roscioli la cantine de Ben Stiller à Rome, c’est ICI

Tout comme le Jadot vert poireau aurais-je pris le melon ?

 

Je suis tout prêt à l’admettre mais, que voulez-vous que j’y fasse, ma carbonara est plébiscitée par les plus fines gueules de Paris.

 

Quelle en est la raison ?

 

Ce n’est nullement dû à mon génie culinaire mais à 2 choix essentiels :

 

  • La qualité des ingrédients utilisés, tout particulièrement la pasta.

 

  • L’exclusion de la crème fraîche épaisse.

 

La crème fraîche, un sacrilège ! Denny Imbroisi, chef du restaurant IDA

 

Dans la recette française qui a fait bondir les Italiens, tous les ingrédients sont mélangés et cuits dans une même casserole. C’est tout ce qu’il ne faut pas faire : avec cette méthode, impossible de maîtriser les cuissons.

 

De plus, certains ingrédients utilisés, à savoir les oignons, les lardons et la crème, n’apparaissent pas dans la recette traditionnelle. Même les pâtes choisies, des farfales, ne sont pas les bonnes, puisque l’on opte habituellement pour des pâtes longues.

 

La présence des lardons est elle aussi curieuse : dans la véritable recette des pâtes à la carbonara, on utilise de la guanciale, une spécialité italienne à base de joue de porc. Pour finir, l’utilisation de la crème fraîche est un véritable sacrilège : cet ingrédient n’a jamais existé dans ce plat.

 

C’est écrit.

 

Bien évidemment je ne vais pas dévoiler ce qui fait le succès de ma carbonara auprès de mes fans, vous livrer mon petit plus, à vous de laisser libre court à vos talents de cordon bleu.

 

 

La carbonara de Roscioli a été élue la meilleure d'Italie en 2008.

 

Ça fait un bail, j’espère que depuis la maison Roscioli, grisée par son succès, n’a pas bu l’eau des nouilles…

 

Roscioli n'est pas qu’un restaurant c'est avant tout une famille.

 

Le grand, l’immense, l’incontournable, le chouchou de Paulo le tombeur des dames, François-Régis Gaudry, titrait en juin 2014 la pasta diva des frères Roscioli ICI 

 

« Nous avons porté une attention extrême à toutes les composantes de cette grande spécialité romaine », explique Alessandro Roscioli, à la tête de l'établissement, avec son frère Pierluigi. Le guanciale provient d'un élevage fermier du mont Conero, dans les Marches; les oeufs sont livrés par Paoli Parisi, l'éleveur star de Toscane; le poivre est un cru exceptionnel de Sarawak (Malaisie) ; deux variétés rares de fromage pecorino sont utilisées. Quant aux pâtes, elles sont signées Benedetto Cavalieri, le nec plus ultra des fabriques artisanales, dans les Pouilles! Autant d'ingrédients haute couture subtilement mélangés à la dernière minute par Nabil Hadj Hassen, le cuisinier d'origine tunisienne. « C'est un magicien! Il est le seul étranger capable de préparer la pasta mieux que les Italiens », avoue Alessandro.

 

Cette bonne table s'est distinguée en 2008, lorsque la carbonara de Roscioli, préparée par le chef Nabil Hassen Hadj, reçoit le prix de meilleure d'Italie, faisant de ce plat la pierre angulaire du menu.

 

 

Mais qu'est-ce qu'une carbonara, pour les Romains ?

 

Certainement pas un plat à base de crème, exclue de la liste des ingrédients. Mais plutôt des œufs fouettés avec le pecorino, le guanciale saisi à la poêle, croquant à l'extérieur et fondant à l'intérieur, et beaucoup de poivre. Parce que carbonara viendrait de carbone, le charbon en italien. Le résultat est crémeux, piquant et fondant à la fois : un délice qui se déguste le long du comptoir où reposent les produits disponibles à la vente à emporter.

 

Roscioli. Via dei Giubbonari, 21. Du lun-sam 12h30-16h et 19h-minuit. Tél. : +39 06 687 5287. Réservation indispensable. ICI 

 

roscioli-restaurant-christmas-dinner-rome - LivItaly Tours

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2 août 2020 7 02 /08 /août /2020 08:00
Pour faire plaisir à ce bon PAX les photos du père et la tribune de la fille « Ce mortel ennui qui me vient… »

Ce mortel ennui qui me vient quand je suis avec toi

Ce mortel ennui qui me tient et me suit pas à pas

Le jour où j'aurais assez d'estomac et de toi

Pour te laisser choir ce jour-là oh oui ce jour là

Je crois, oui je crois, que je pourrais voir…

 

C’est du Gainsbourg.

 

Notre cher Pax ne porte guère le petit gars fils d’un vinaigrier de Jarnac dans son cœur :

 

J'ai beaucoup de mal à m'intéresser aux histoires de coeur du bonhomme dont j'ai du mal à croire qu'en écrivant ses lettres il ne se regardait pas écrire, pour la postérité.

 

Bref, comme disait l'autre, je n'ai pas de glande pour ce genre de type.

 

Moi non plus mais, ayant servi comme matelot sur le porte-avions dont il était le pacha, Rocard n'étant qu'un quartier-maître je me dois d’assumer ces années.

 

Mais comme j’aime titiller PAX, surtout le dimanche, je lui offre quelques friandises :

 

 

Mazarine Pingeot au sujet des nouveaux combats féministes : « Ce mortel ennui qui me vient… »

TRIBUNE

Mazarine Pingeot

Autrice

La romancière dénonce le nouveau féminisme qui, selon elle, se complaît dans la morale au lieu d’agir de façon politique.

Publié le 28 juillet 2020

Ce mortel ennui qui me vient, devant la victoire d’extrémistes de la médiocrité au nom de « l’éthique », discréditant les combats féministes : ceux qui luttent pour l’égalité des droits, l’égalité des chances, avec à l’horizon une véritable révolution anthropologique. Combats politiques et non moraux !

 

Aujourd’hui, les femmes sont assez puissantes pour mener ce combat politique, pourquoi s’en tiendraient-elles à occuper la seule place du ressentiment et de la vengeance, de la délation et de la vindicte ? Est-ce cela, la place naturelle de la femme ?

 

Ce mortel ennui qui me vient, devant une certaine jeunesse sans désir mais pleine de colère, ces jeunes femmes mieux loties que leurs mères et leurs grands-mères, qui ont mené la lutte pour elles, déblayé le terrain pour leur laisser en héritage de continuer le combat : les unes se sentent insultées quand un homme, de sa violence ancestrale, ose un compliment – et c’est comme une gifle en plein visage, certaines appellent ça un viol, au mépris de celles qui en ont vraiment été victimes ; les autres se déguisent en putes pour imiter les danseuses des clips de rap qui vantent l’argent facile et l’amour monnayable.

 

Elles ne se connaissent pas, elles cohabitent. Il y a les pauvres, celles qui pensent que cacher un bifton dans leur string est le comble de la classe ; il y a les riches, les pourvues socialement et culturellement, qui identifient tout acte évoquant leur corps sacré comme un viol – réveil la nuit, manifestation du désir, expression du vivant.

 

Ce mortel ennui, devant les générations à venir, qui en seront réduites à des relations tarifées ou contractuelles. Devant les enivrés de haine, qui ne considèrent pas l’intelligence comme un atout et ont décidé plus que de s’en passer, de la piétiner systématiquement.

 

Qu’est-ce qu’une morale adossée à la haine ?

 

Devant le règne de la bêtise, du mimétisme, de la libération des pulsions de haine, et, pire que tout, de l’exaltation narcissique de croire appartenir à la morale, s’en revendiquer, en être le bras armé. Mais qu’est-ce qu’une morale adossée à la haine ?

 

Ce mortel ennui devant ce qui était l’arme des révolutionnaires – l’indignation – devenue la monnaie courante de tous les frustrés de la terre, des médiocres, de ceux qui veulent exister mais n’ont d’autres moyens que de vomir des insultes, de confondre les plans, l’opinion, la justice, la rumeur, les faits, d’invoquer un nouvel ordre moral au lieu de faire de la politique.

 

Ce mortel ennui devant ces combattants des réseaux, qui prennent le risque suprême de descendre dans la rue masqués – le Covid-19 aura au moins fourbi les armes de la lâcheté – pour hurler des approximations et des contresens, avec le but avoué de détruire psychiquement et socialement des cibles qui sont toutes masculines, blanches et d’un certain âge, n’importe qui fera l’affaire. L’homme blanc occidental a exploité tant de monde, de cultures, et même la nature. L’homme blanc n’est pas un concept, puisqu’il est incarné par tous les hommes blancs, indistinctement. Le concept n’a plus lieu d’être, le symbolique est déchiré, anéanti, il n’y a plus de commun, pour ne pas dire d’universel, ce gros mot honni par les partisans identitaires.

 

Ce mortel ennui devant ces gens fiers d’eux, sûrs de leur bon droit, et qui crient. Crient pour tout, contre tout, enfonçant des portes ouvertes.

 

Devant les contempteurs de la domination masculine, blanche et occidentale, qui ont comme seul projet de renverser la domination, non pour un monde plus égal et construit sur un autre paradigme, mais bien pour substituer une domination à une autre.

 

Et l’art, dans tout ça ?

 

Ce mortel ennui devant l’orgasmique onanisme d’une colère pseudo-féministe, quand des femmes sont encore excisées, quand des femmes sont encore lapidées, quand des femmes sont exploitées, quand des femmes gagnent moins bien leur vie que les hommes, se battent sur tous les fronts… Il faut respecter les différences culturelles, diront les nouveaux révolutionnaires, et reconstruire des murs. On se régale d’avance à la perspective de la convergence des luttes qui, à ce compte, ne peut aboutir qu’à de nouvelles frontières. Ennui mortel devant l’inconséquence des nouveaux maccarthystes.

 

Et que deviendra l’art, dans tout ça ? Des livrets de vertu qu’on distribuera au seuil des nouvelles églises ? Des éditoriaux pleins de bons sentiments mâtinés de haine rance de vieilles filles ? Des imprécations béni-oui-oui de néoromantiques exaltés par les combats sur Facebook ? Des œuvres théâtrales où l’on dira le catéchisme, le mal contre le bien, dont on voit vite les incarnations ? Des tableaux respectant la parité, homme, femme, Noir, Blanc, vieux, jeunes, handicapés, dans des champs de blé bio et des plants de tomates en permaculture ?

 

Mortel ennui. Et où mettra-t-on donc les déviants ? Car ils risquent de devenir très nombreux. Si la police des mœurs s’exerce comme l’appellent de leurs vœux les nouveaux parangons de vertu. Reste l’autocensure, l’intériorisation de l’interdit. Un nouveau vocabulaire est à disposition, et, pour les écrivains, on pourra toujours fournir un dictionnaire officiel des mots acceptables. La morale a aussi son mot à dire sur la culture. Dieu merci, morale et culture sont des substantifs féminins…

 

Avant même de mourir du réchauffement climatique, nous risquons de mourir d’ennui. Car nous avons prévenu nos enfants qu’ils auraient à se battre pour sauvegarder la planète. Mais leur avons-nous glissé qu’ils auraient aussi à affronter le mortel ennui qui s’abat sous le drapeau brandi d’une morale de la haine ? L’idée même de combat politique risque d’y succomber.

 

Mazarine Pingeot est agrégée de philosophie et autrice. Elle a notamment écrit « La Dictature de la transparence » (Robert Laffont, 2016) et « Se taire » (Julliard, 2019).

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2 août 2020 7 02 /08 /août /2020 06:00

Truman Capote : l'enfant terrible de la littérature américaine ...

Qui n’a pas lu à 50 ans De sang-froid de Truman Capote a raté sa vie !

 

Amazon.fr - Truman Capote - De sang-froid - traduit par Raymond ...

 

Dans le cadre d’un été résolument culturel je vous offre une réflexion sur la vérité romanesque, dans Cercueil sur mesures, Capote a poussé le bouchon un peu loin, mais peu m’importe ça m’est égal car il a atteint un degré de vérité incomparable.

 

Après le succès phénoménal remporté par De sang-froid, Capote avait délaissé le genre romanesque pour revenir à ses premières amours : la nouvelle. Le recueil Musique pour caméléons, publié en 1980, réunit 7 textes, dont un, en particulier… sous-titré Récit véridique non romancé d’un crime américain, Cercueils sur mesures décrit une série de 7 meurtres ayant frappé une petite ville américaine du Midwest, que Capote prétend ne pas pouvoir nommé, pour ne pas interférer avec le processus de la justice.

 

Amazon.fr - Cercueils sur mesure - Capote, Truman - Livres

 

Enquête faite, Capote a produit un faux plus vrai que nature.

 

Truman Capote : «De sang-froid», le livre d'une vie | Télépro

 

Rappelons que Capote, en 1959, voit son attention attirée par le meurtre d’une famille de fermiers du Kansas. Il se rend sur les lieux. Les deux vauriens Dick Hickock et Perry Smith sont rapidement arrêtés et passent aux aveux. Capote conçoit alors le projet d’un livre à mi-chemin entre la réalité et la fiction : la réalité parce qu’il va rencontrer tous les protagonistes de l’affaire ; la fiction parce qu’il devra reconstituer de nombreuses scènes auxquelles il n’a pas assisté. On a parlé pour décrire le résultat de « roman non-roman » ou de « roman-vérité »

 

« A new understanding of the différence between what is true and what it really true. »

 

Dans Cercueils sur mesures, les victimes présentent deux points communs : elles ont siégé au sein d’une commission ayant voté le détournement d’un cours d’eau arrosant le ranch d’un riche fermier du nom de Quinn et elles ont reçu, peu avant leur mort, un cercueil miniature en bois. Les assassinats sont autant d’œuvres d’art : un couple d’avocats périt sous les piqûres de serpents à sonnettes préalablement dopés aux amphétamines qui ont été placé dans leur voiture ; les victimes trois et quatre meurent carbonisées dans leur maison à laquelle on a mis le feu après avoir scellé les issues par des parpaings ; le conducteur d’une décapotable est décapité par un filin invisible tendu à travers de sa route ; un médecin est empoisonné ; une professeure se noie dans de mystérieuses circonstances. Le facteur, se sachant sur la liste, décampe à Hawaii, tandis que le dernier membre de la commission, le seul à avoir voté en faveur du fermier, est épargné. Car il ne fait pas de doute pour personne que Quinn est à l’origine de l’hécatombe. Il ne fait d’ailleurs pas grand-chose pour démentir la rumeur. Par bravade – à moins que ce ne soit par courtoisie – il accepte de rencontrer Capote. Les entrevues glaçantes entre les deux hommes et leurs parties d’échecs constituent le point d’orgue de la nouvelle.

 

Quel régal que ces nombreuses métaphores : Elle était bâtie comme Poncho Villa et portait des pantalons de cow-boy avec une braguette à glissière … Tempérament aussi bouillant qu'un tamale au poivre rouge … Plus saoul qu'une tribu d'Indiens en train de danser dans les maïs.

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1 août 2020 6 01 /08 /août /2020 06:00

Charles Ponzi dans les années 1910. | Via Wikimedia Commons

Je suis fasciné, moi qui ne suis que titulaire de livrets de Caisse d’Epargne, qui ignore les SICAV, qui ne surveille pas d’un œil anxieux le CAC 40, le Nasdaq, le Dow Jones, par les goulus, les voraces, les rapaces qui se jettent comme des morts de faim sur des produits, dit dérivés, comme des morts de faim.

 

Rappelez-vous au temps du vibrionnant Sarkozy, la crise des subprimes, le tristement célèbre Bernard Madoff, condamné à 150 ans de prison en 2009 pour avoir monté une escroquerie façon Ponzi dont on estime qu'elle a pu porter sur environ 65 milliards de dollars.

 

 

« C’est quand la marée se retire qu’on voit qui nageait tout nu », a coutume de dire Warren Buffett. Le reflux des marchés et l’argent facile avaient mis au jour un véritable musée des horreurs : les appartements en construction qui changeaient trois ou quatre fois de main pendant les travaux ; les municipalités endettées à taux variable dans des monnaies exotiques ; les banques suisses qui enseignaient à leurs clients comment frauder le fisc… Le temps était peut-être venu de raconter certaines de ces histoires ou, mieux, d’en inventer d’encore plus jubilatoire. »

Vlad Eisinger Du Rififi à Walla Street

 

The Big Short (2015)

 

The Big Short : le casse du siècle de Adam McKay - (2015 ...

 

The Big Short raconte comment une poignée d’outsiders ont vu venir avant tout le monde la crise des subprimes et le retournement brutal du marché immobilier (et hypothécaire) américain. Le film décrit un peu l’ensemble des acteurs de la finance comme des crétins aveugles. Ce qui est un peu dur mais tout à fait distrayant. Ils ont néanmoins oublié de mentionner le cas de John PAULSON. Un gestionnaire de hedge fund qui a aussi parié contre les subprimes et qui a gagné environ 10 milliards de dollars avec la crise. Or lui n’était pas un “outsider”, mais un “insider” qui bossait de très près avec Goldman Sachs. Le film reste super marrant. Un de mes préférés de 2015.

 

Revenons à ce cher PONZI

 

Pyramide de Ponzi

 

D'après l'histoire officielle, Carlo Ponzi est né en 1882 dans la ville italienne de Lugo, située en Émilie-Romagne. Après avoir étudié pendant quatre ans à La Sapienza, principale université romaine, il serait arrivé aux États-Unis à la fin de l'année 1903. La légende dit que lorsqu'il posa pour la première fois le pied sur le territoire américain, à Boston, il avait moins de trois dollars en poche.

 

Bien décidé à empoigner la vie, désireux de ne pas faire de la figuration et de vivre à fond son rêve américain, Carlo Ponzi se résolut néanmoins à commencer au bas de l'échelle. Dès 1904, il décida de se faire appeler Charles, ce qui ne suffira pas à favoriser son intégration: parlant un anglais rudimentaire, n'ayant ni ressources ni contacts, il ne parvint qu'à se faire engager en tant que plongeur dans un restaurant, où il finit serveur après la défection d'un autre employé.

 

[…]

 

DAOs, Corporate Finance and Ponzi Schemes — Korporatio

 

La justice finit par s'emparer de l'affaire, et en 1926, Charles Ponzi fut condamné à un an de travaux forcés. Tentant de rentrer clandestinement en Italie pour ne pas purger sa peine, il fut arrêté sur le bateau à bord duquel il avait embarqué et resta six ans en prison.

 

Charles Ponzi (@charlesponzi) | Twitter

 

Expulsé vers l'Italie, il tenta ensuite de refaire sa vie au Brésil, où il finit de rédiger The Rise of Mr. Ponzi, qui parut en 1936. Il mourut finalement pauvre et aveugle à Rio de Janeiro en 1949, loin du triomphe auquel il aspirait. Au total, quelque 15 millions de dollars lui furent confiés par environ 40.000 individus, mais seuls 5 millions leurs furent redistribués.

 

L’ensemble de l’article ICI 

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31 juillet 2020 5 31 /07 /juillet /2020 06:00
Je suis d’accord avec Philippe Ridet « Lands of Murders » : une copie mais pas du toc

Dimanche, première sortie dans une salle de ciné depuis leur réouverture.

 

 

J’ai choisi « Lands of Murders », film allemand de Christian Alvart. Avec Trystan Pütter, Felix Kramer, Nora von Waldstätten (2 h 08), pour deux raisons, une fois n’est pas coutume j’ai fait confiance à un critique, en l’occurrence Philippe Ridet du Monde, et parce que j’avais beaucoup aimé La Isla Minima (2014), film du réalisateur espagnol Alberto Rodriguez.

 

Le MK2 bibliothèque, j’aime bien ce complexe avec ses longues passerelles et c’est 15 mn de chez moi à vélo.

 

 

Je choisis la dernière séance 22h 50.

 

 

Je dîne frugalement, la bouffe des food-trucks du parvis du MK2 n’est pas très alléchante.

 

Je prends mon billet dans la petite machine à billets, y’a plus de guichets.

 

Je suis masqué bien sûr.

 

Salle 9, en bas, 90 places.

 

Je descends, 2 personnes sont déjà en place, une tout en haut et l’autre tout en bas. Je me place au milieu de l’avant-dernière rangée.

 

Nous serons 10 en tout, démasqués.

 

La présentation des futures projections est interminable, plus d’un quart d’heure.

 

Le générique de « Lands of Murders » apparaît enfin.

 

Lands of Murders | STREAMINZ.COM

 

Un flic de l’Ouest, Patrick Stein, propre sur lui et bien mis, un flic de l’Est, Markus Bach, alcoolique et ancien membre de la Stasi. Nous sommes en 1991 ; le mur de Berlin est tombé depuis deux ans. A Görlitz, un bled collé à la frontière polonaise, des gamines disparaissent. Ils ne seront pas trop de deux pour démêler les fils de ces crimes sordides. Et si l’Allemagne unie pouvait triompher du mal ?

 

« J’ai comme une impression de déjà-vu », pourront se dire certains spectateurs de ce film glauque et aquatique. Lands of Murders est le décalque presque parfait de La Isla Minima (2014), film du réalisateur espagnol Alberto Rodriguez. Même scénario, mêmes dialogues parfois, mêmes paysages lagunaires, même opposition politique. Espagne des années 1980 ou Allemagne des années 1990 : deux prétextes pour évoquer la difficile construction d’une identité commune.

 

Mépriser ce film qui emprunte un scénario, comme un rôti déjà bardé et prêt à enfourner ?

Ou applaudir cette transposition du soleil de plomb de l’Andalousie à l’hiver de la Saxe, où le jour et la nuit se confondent ?

Fable politique et vrai thriller, Lands of Murders est peut-être une copie mais pas en toc. Patrick et Markus vont-ils se réconcilier au fil de leur enquête ou rester seuls avec leurs mystères et leur défiance réciproque ?

Philippe Ridet

 

« Lands of Murders », film allemand de Christian Alvart. Avec Trystan Pütter, Felix Kramer, Nora von Waldstätten (2 h 08).

 

Après 2 h 08 de séance je suis reparti ravi, ce film tient bien la route, rythmé, nulle impression de déjà vu, 6 ans après La Isla Minima je mettais mes pas dans les pas des deux flics : Patrick Stein, un peu falot, propre sur lui, insignifiant, et Markus Bach, l’ancien de la Stasi, poilu, lourd, bâfreur, pissant le sang, qui crève l’écran.  

 

À voir, pour se plonger dans l’ambiance de la RDA déchue, en voie de paupérisation…

 

Je rentre dans un Paris désert...

 

 

« La Isla Minima » : guerre civile froide sur les rives du Guadalquivir

 

Achat La Isla mínima en Blu Ray - AlloCiné

 

Le polar efficace d’Alberto Rodriguez met aux prises deux policiers dans les années qui suivirent la mort de Franco.

Par Franck Nouchi Publié le 10 juillet 2015

 

Tout commence d’en haut. De très haut même, quelques plans tournés à partir de photos aériennes du photographe Hector Garrido. Des séquences fascinantes en forme de coupes de cerveau ou de lames d’histologie qui permettent de découvrir une partie peu connue de l’Andalousie : les rives marécageuses du Guadalquivir. Spectaculaire entrée en matière pour un film étonnant : La Isla Minima est à la fois un polar de bonne facture et une passionnante plongée dans l’Espagne de l’immédiat post-franquisme ; autrement dit, la période dite de la « transition démocratique », ces sept années allant de la mort de Franco, le 20 novembre 1975, à l’arrivée au pouvoir de Felipe Gonzalez, en 1982, durant lesquelles se joua le sort du pays.

 

Il y a là deux flics représentatifs de ces deux Espagne qui depuis des décennies ne cessent de s’opposer. Le plus vieux, au passé trouble, formé dans les rangs de la police politique de Franco, semble a priori le plus sympathique, le plus gentil des deux. L’autre, plus grand avec son physique à la Sean Penn, est caractéristique de ces Espagnols pressés d’arrimer son pays à l’Europe démocratique. Ambitieux et efficace, bien décidé à en découdre avec la moindre résurgence du franquisme honni.

 

Il sera servi. S’il est là ce soir-là, avec son collègue, dans l’hôtel miteux d’un petit village, c’est que deux jeunes filles ont mystérieusement disparu à bord d’une Citroën. Et qu’apparemment nul ne sait ce qui s’est passé.

 

Où chercher ? Qui interroger dans ces paysages désespérément plats, où la culture du riz semble être la seule activité un tant soit peu lucrative ? Enquête d’autant plus compliquée qu’en ces lieux inhospitaliers, le mutisme semble être la règle numéro un.

 

Alberto Rodriguez, le réalisateur, dit s’être inspiré pour l’écriture de son scénario de 2666, l’extraordinaire roman de l’écrivain chilien Roberto Bolaño. Ce dernier s’était beaucoup intéressé à la série d’assassinats de femmes commis à partir de 1993 à Ciudad Juarez, dans le nord du Mexique.

 

Bien évidemment, il est impossible de voir La Isla Minima sans penser immédiatement à Memories of Murders de Bong Joon-ho. Deux flics, un tueur en série, des femmes assassinées, des rizières… : le cousinage est évident, même si, in fine, l’un (le film coréen) est un chef-d’œuvre, tandis que l’autre est juste un bon polar.

 

Retour en Andalousie. A mesure que l’enquête avance, émergent çà et là quelques lourds secrets de l’Espagne franquiste. Dans ce coin reculé entrecoupé de canaux, règne une loi du silence où criminalité et politique se confondent. Franco est mort, mais persistent des poches de résistance à la démocratie naissante qui inquiètent d’autant plus le plus jeune des deux policiers que le passé de son collègue semble également des plus douteux.

 

De temps à autre, comme si elle finissait, elle aussi, par étouffer dans cette atmosphère moite, la caméra reprend son vol. Prise de recul nécessaire. Changement d’axe. Là-bas, tout en bas, des hommes et des femmes savent mais ne disent rien. Complicité ? Terreur ? Les policiers ne vont plus tarder à découvrir la terrible vérité des disparues du Guadalquivir.

 

Présenté au festival de San Sebastian en 2014, grand triomphateur des derniers Goya (l’équivalent des Césars en Espagne) avec pas moins de dix récompenses, La Isla Minima est le sixième film d’Alberto Rodriguez (qui réalisa, en 2005, Les 7 Vierges). Raúl Arélavo (découvert dans Les Amants passagers, de Pedro Almodovar) et Javier Gutiérrez (très populaire dans son pays depuis qu’il a tourné dans la série Aguila Roja – L’Aigle rouge) symbolisent parfaitement l’affrontement perpétuel entre les deux Espagne.

 

Avec "La Isla minima", l'Espagne tient son "True Detective" | LCI

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30 juillet 2020 4 30 /07 /juillet /2020 06:00

Aimer c'est mourir : Gabrielle Russier et Christian Rossi - Bababam

Ma chronique à 6 ans, publiée le 18 janvier 2014, hier matin a capté l’intérêt de 1500 lecteurs.

 

ICI 

 

Gabrielle Russier s’et suicidée le 1er septembre 1969 par le gaz dans son appartement marseillais de la Résidence Nord. Ses obsèques sont célébrées par le pasteur Michel Viot. Elle est enterrée au cimetière du Père-Lachaise (26e division), à Paris.

 

Extraits de ma chronique :

 

Quel crime avait commis Gabrielle pour être jetée, pour 8 semaines, à la fin du printemps 69, dans une cellule sordide de la prison des Baumettes ?

 

Aimer un grand jeune homme, qui aurait pu être moi, c’est tout, alors qu’en ces temps gris, Papon fut, lui, le préfet de police de Paris, le Ministre du Budget du madré de Montboudif, avec du sang sur ses belles mains d’administrateur impitoyable.

 

Crime suprême, leurs corps s’étaient mêlés, enflammés, Christian avait empli cette « vieille » femme de sa jeune sève. Ils avaient jouis. Condamnée, le 12 juillet – mon jour anniversaire – à 12 mois de prison avec sursis et 500 francs d’amende, le Parquet jugeait la condamnation trop faible et faisait appel a minima, et Gabrielle ouvrait le 1er septembre le robinet du gaz. Exit la femme de mauvaise vie, celle qui avait détourné l’innocence vers les infâmes plaisirs de la chair. Bouclé dans une maison de repos par les psychiatres de service, Christian, lui, grâce à la protection de ses parents, allait enfin voir s’ouvrir une sacré belle vie.

 

Lorsque le 22 septembre, notre normalien de Président, questionné par Jean-Michel Royer, sur ce qu’il était maintenant de bon ton d’appeler « l’affaire Russier », allait convoquer Paul Eluard pour jeter un étrange voile sur Gabrielle, délivrer, une brève et ambiguë, oraison funèbre : « Comprenne qui voudra… » lance-t-il.

 

En exergue de son poème, Eluard avait écrit : «  En ce temps-là pour ne pas châtier les coupables, on maltraitait les filles. On allait jusqu’à les tondre. »

 

Gabrielle, dans le quartier de Montmartre, à Paris, en juillet 1967, après avoir été reçue à l'agrégation de lettres modernes.

 

A l’aide de témoignages et de documents inédits, « Le Monde » retrace le destin de cette enseignante dont l’histoire d’amour avec l’un de ses élèves fit scandale au tournant des années 1960-1970.

 

« L’affaire Gabrielle Russier » : une professeure unique

Par Pascale Robert-Diard et Joseph Beauregard

Publié le 26 juillet 2020

 

« Je vous rappelle qu’il est interdit de fumer dans les couloirs, dit le pion en lui tapotant l’épaule.

 

– Même pour les profs ?

 

– Ah, pardon. Je ne vous avais pas reconnue au milieu des élèves. »

 

Gabrielle Nogues, née Russier, tire sur sa Gauloise bleue. Elle a 30 ans. Trois mois plus tôt, elle a brillamment réussi l’agrégation de lettres modernes. Ce 14 septembre 1967, elle effectue sa première rentrée comme professeure de français et de latin au lycée Nord de Marseille.

 

Un coup de pouce de dernière minute de sa tante Suzanne, qui connaît du monde au ministère, lui a permis d’échapper à une nomination dans un lycée de jeunes filles à Nîmes. L’immense paquebot qui domine la rade de Marseille, sacré « lycée le plus moderne d’Europe » par le premier secrétaire du Parti communiste de l’Union soviétique, Nikita Khrouchtchev, lors de sa visite en 1960, lui convient bien mieux. Un lycée mixte, le seul des quartiers nord de Marseille, qui rassemble les élèves des barres HLM de Saint-Louis, Saint-Henri, la Cabucelle, Saint-Antoine ou Saint-André, ceux qui grimpent depuis les petites maisons de l’arrière-port de Mourepiane ou qui quittent chaque jour, dans la voiture de leurs parents, les belles villas lovées dans ce coin de « campagne » que sont alors l’Estaque, la Gavotte, Verduron ou Bouc-Bel-Air. Un brassage de fils et filles d’ouvriers ou d’employés, de pieds-noirs rapatriés depuis peu, de commerçants, de bonne bourgeoisie marseillaise et même deux des héritiers de Norodom Sihanouk, chef d’Etat du Cambodge.

 

La suite ICI (c’est une chronique réservée aux abonnés) 

Mourir d'aimer

La professeure de français et le lycéen, l’amour interdit qui passionna la France de Pompidou ICI

 

La romance de Gabrielle Russier et Christian Rossi a agité une France déjà bouleversée par les évènements de Mai 68. Elle était professeure dans un lycée, il était son élève… Cet amour, aux conséquences tragiques, a fait s’interroger médias, politiques et tout un pays sur les ravages de la passion.

Publié le MERCREDI, 29 AOÛT 2018
par Pierrick Geais
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