Il est de bon ton sur les réseaux sociaux de basher les fonctionnaires obtus qui appliquent sans nuance la règlementation. Mais dans ce domaine les zinzins inventés par les professionnels, ici vignerons, n’ont rien à leur envier. Les technostructures type ODG et Organisme d’Inspection et de Contrôle, se complaisent à aller chercher des poux sur la tête chez ceux qui ne pensent pas comme eux.
Sans déflorer de secrets ma boîte mail recèle une foultitude de cas où les technocrates de la profession, appuyés par leurs chefs, font la démonstration que dans notre beau pays le droit à la différence n’est pas inscrit au fronton des maisons qui vivent sous perfusion de cotisations.
Charbonnier maître chez lui me rétorquera-t-on, les fameux cahiers des charges de l’appellation en sont les tables de la loi.
Circulez y’a rien à voir !
Moi je veux bien mais au bout du bout je compte aussi un brin en tant que consommateur. Sans me faire le porte-parole de qui que ce soit j’estime avoir le droit de mettre mon grain de sel là où il ne faut pas.
Attention à votre entre soi messieurs les vignerons, vos vignes nickel chrome qui ressemblent de plus en plus à des décors de cinéma des années 60 en technicolor, vos vins formatés qui sont tous cousins-germains, même si ça vous plaît participent à la dévaluation et à la dilution de vos fameux terroirs que vantent vos belles plaquettes oenotouristiques.
Le monde change mais à trop suivre le grand courant d’uniformisation on risque fort à terme de ne plus être très convaincant sur son authenticité. Le syndrome de la boîte de camembert avec vache normande incorporé pour un produit bien pasteurisé vous guette au bout du chemin de la mondialisation.
Valable même à Sancerre qui est une success story !
Comme l’écrit très justement l’intransigeant François Morel dans son papier « Vous avez dit « différence » ? paru dans le dernier n° de LeRouge&leBlanc n°113 « L’intelligence » des choses, c’est au sens strict, dans le cas présent, se donner les moyens d’acquérir la capacité de relier le vin à tout ce qui participe à l’authentique produit de la vigne, d’un terroir et de l’homme… »
Dans l’un des 2 cas présentés, celui de Sébastien Riffault l’OIVC lui reproche un « entretien du sol insuffisant » et la présence « d’herbes » - « végétation concurrentielle » qui ne doit pas dépasser « la moitié de la hauteur de palissage » - trop hautes dans ses vignes, « manquement » qui n’est pas une négligence du vigneron mais le choix, pour lui, « d’un engrais vert qui permet l’apport naturel d’éléments fertilisants ». Le problème de la hauteur de l’herbe ne concerne en réalité que les vignes vendangées à la machine, mais la règlementation est applicable à tous, même à ceux qui vendangent manuellement !
Donc il faut supprimer l’herbe et payer le contrôle – car il est payant pour celui qui en est la cible – sous peine d’être refusé pour l’appellation. Mais payer revient à reconnaître « le manquement »… On est en droit de penser que le droit de désherber ne saurait être une obligation de désherber, et qu’il y a tout le moins plusieurs façon de concevoir la viticulture. Dans le cas présent, on voit à l’œuvre une appropriation de l’AOC et de son contenu au nom d’une seule de ces conceptions, avec une tentative d’exclusion des autres. »
Je partage l’analyse de François Morel mais je suis beaucoup plus optimiste que lui : les lignes Maginot sont faites pour être contournées, c’est une vérité stratégique. Ils ont déjà perdus la bataille et l’avenir les verra battre en retraite piteusement.
En attendant, bien mieux que ce poseur de Nossiter, organisons la Résistance sans enfourcher les oppositions éculées, comme le note Morel, entre le genre « bio » et le « conventionnel ». Créer des espaces de liberté permettra de refonder nos appellations, les sauver de la dilution…
Dans le dernier numéro LeRouge&leBlanc n°113 mademoiselle Sonia Lopez Calleja fait son cinéma, y’en a presque que pour elle…