J’aime les jours qui commencent en pente douce dès l’éveil, me laisser-aller, me laisser porter la tête dans les étoiles et le cœur léger. Cap au nord, sous la Grande Verrière de la Gare du Nord je rejoins mes deux compagnons de voyage tout juste sortis des brumes de la nuit, direction Bruxelles-Midi d’un seul trait. Notre guide Patrick nous accueille et nous marchons sous un franc soleil jusqu’à la Grande Place où nous effectuons notre première station d’un chemin qui ne sera pas de croix mais de joie.
Nous marchons dans la ville. Ma meilleure amie, la folle du logis, ce petit vélo qui vagabonde dans ma tête, m’investit, baguenaude, trace des échappées belles, me nourrit d’images et de mots. M’éclaire. En ce beau jour Bruxelles plante le vaste décor de mon imaginaire, je suis ailleurs et ça me va.
J’aime !
Nous restaurer…
Les Brigittines, havre de paix art nouveau, du beau, discrète élégance, adéquation parfaite avec l’insoutenable légèreté de mon vieux cœur tout boucané.
J’aime !
Il m’est dit que, Dirk Myny, « fait partie des rares chefs à s’évader dans le vignoble dès que l’occasion se présente et qu’il propose la plus belle carte de la capitale en vins d’Alsace, une région qu’il connaît sur le bout des doigts et qui lui a donné le goût des crus qui sentent la terre et le travail. » L’homme aime tous les vins, pourvu qu’ils soient élégants et généreux.
Nous sommes ici pour Cantillon !
Mon petit doigt me dit aussi qu’il fait partie d’une bande des 4, de bons vivants, des noceurs, des bosseurs… Dirk, la suite nous le prouvera, est fidèle à ses origines la campagne du Pajottenland, où il a grandi.
Nous sommes 7 à table, une petite Europe du Sud à nous tous, franco-italienne, cornaquée par notre ami Patrick, belgo-suisse, qui aime tant les vins nature de nos voisins de la Péninsule.
Nous mangerons et boirons avec les accents des flacons de Cantillon.
C’est aujourd’hui Quintessence de Cantillon.
René Sépul du Soir souligne très justement que « Dirk, Maître cuisinier de Belgique, s’est surtout fait seul, traçant ses sillons gourmands sans s’occuper de ses voisins, toujours concentré à tirer vers le haut les produits de terroir qu’il apprécie. Son assiette est franche, joyeuse, goûteuse… il a su faire évoluer les choses. Mettant l’accent sur des plats plus personnels et plus créatifs, sa maison est aujourd’hui paradoxalement plus bruxelloise, et c’est un plus. Dirk a rencontré des artistes du goût, comme Jean Van Roy de la Brasserie Cantillon, dont il intègre les impeccables lambics et autres gueuzes dans ses casseroles. »
Table vivante, sans chichis, créative, dénuée des artifices des chefs qui privilégient la forme, exaltation de saveurs riches, alliance précise tels le petit épeautre cuit en risotto et les fines crevettes grises décortiquées qui accompagnent le cabillaud vapeur nappé d’un sabayon au lambic Cantillon. Et puis, quels mots mettre sur son zennepot, « un plat créé un soir de fête en pensant aux copains, un truc un peu dingue où se rencontrent chou cuit à la gueuze, bloempanch, saucisse sèche et bulots… » ?
Un seul : c’est grand !
J’aime !
Je ne suis pas très dessert mais le granité de Kriek de Dirk m’a enchanté et ravi. Pensez-donc un granité accompagné d'un bleu !
Au long de ce très beau repas le temps s’est suspendu, aérien, sensible à la magie du génie de la main qui fait, fort de la supériorité radicale et indépassable de l’artisan, j’étais heureux. Nous étions heureux !
Loin de nous faire redescendre sur terre, Patrick, zélateur infatigable et sincère des vins natures nous abreuvait de magnificence : un Muenchberg Grand cru Riesling n°3 1999 Julien Meyer.
Grand !
Nous pouvions continuer notre pèlerinage au pays des merveilles : cap sur Cantillon !
Pour connaître Cantillon lire mon reportage de 2013 : Vigneronne link