J’en veux beaucoup au sieur ami Lalau de m’avoir accolé, dans l’une de ses chroniques gentiment consensuelle link, à Deux Ruines, qu’il ne faut pas confondre avec B&D ses tauliers. Son « un peu de tout » me dérange un peu, non que je fusse contre la diversité mais parce qu’il semble préconiser une forme de relativisme, très en vogue par les temps qui courent, en sous-entendant que toutes les opinions sont à placer sur le même plan. C’est le consensus mou que lui-même d’ailleurs ne pratique pas lorsqu’il étrille la Sandrine Goeyvaerts par exemple.
La blogosphère est un média où n’importe qui peut entrer, émettre une quelconque opinion plus ou moins bien fondée, exister, durer, perdurer, dire tiout et son contraire, copier-coller, invectiver, car c’est un espace dans liberté sans régulation, sans filtre éditorial, sans réel modèle économique. C’est d’ailleurs pour cette raison que des journalistes patentés y postent des chroniques qui n’engagent pas leur rédaction.
C’est donc un média mais pas un média de même nature que ceux qui l’ont précédé et il ne faut pas s’étonner qu’il reproduise et amplifie toutes les tares et pratiques qui discréditent les médias traditionnels. De plus l’instantanéité, le désir de dégainer le premier, pas vrai Hervé, de faire le buzz induit des contenus creux, peu documentés, à la limite de la légèreté, du n'importe quoi. Le monde est alors binaire, les pour les contre, les bons et les méchants, les sachants et les ignorants…
Qu’importe, ne survivront, ne dureront que ceux qui, dans la plus grande sérénité, traceront leur route depuis longtemps entamée. Tout le reste n’est qu’écume sans lendemain et appeler à une sorte d’armistice c’est l’équivalent de pisser dans un violon.
Qu’il faille lire l’ensemble des opinions qui s’expriment sur un sujet avant de se forger sa propre opinion j’en suis le premier partisan mais, pour autant, ce ne doit pas déboucher sur le plus petit commun dénominateur, sorte de petit robinet d’eau tiède dans un monde de bisounours où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil.
Car, tout le monde n’est pas beau, tout le monde n’est pas gentil, le déluge d’injures déversé sur Isabelle Saporta en est la preuve et Hervé tu as aussi subi ce genre de Lalau Bashing pour tes propos de « camionneur » sur la nouvelle star de la vieille RVF.
Si tout sur la blogosphère du vin n’était qu’une question de point de vue il nous suffirait d’agglomérer des opinions inconciliables, de faire des synthèses improbables à la façon des motions du PS, de faire semblant que le monde du vin est un bel ensemble de convivialité, de se congratuler de manière hypocrite, ça n'ajouterait qu'à la confusion et au discrédit.
En effet, un point de vue, c’est à la fois l’endroit à partir duquel on voit bien un paysage, c’est choisir un angle (viewing point) et une opinion, une façon de penser (point of view).
Cette dualité n’a rien d’innocente et elle permet d’affirmer aussi bien « De ce point de vue, vous avez raison. » qu’ « À mon point de vue, cela est faux. »
Le débat, la confrontation des idées, exigent de la clarté, de la netteté, du tranchant parfois, du respect toujours sauf pour ceux qui sortent de la bienséance, invectivent, insultent.
Il est aussi une autre restriction d’importance concernant les intervenants sur la Toile dont la plume est serve, au service exclusif de la main qui les paie, pour moi ils se placent d’emblée hors-jeu et ils sont disqualifiés.
La presse du vin, les blogs de vin, souffrent trop du mélange des genres, de certaines adhérences peu compatibles avec la sérénité de l’expression de point de vue pour que l’exigence de clarté ne soit pas un impératif catégorique.
Non aux faux nez, à celles et ceux qui avancent plus ou moins masqués, libre à eux d’exercer leur métier mais qu’on ne vienne pas me demander d’être des leurs.
Les gens infréquentables je ne les fréquente pas, c’est mon droit, et je ne fais pas ami-ami avec eux sur Face de Bouc, je les vire.
Intolérance me direz-vous ?
Absolument pas, ignorer cette engeance ce n’est pas remettre en cause leur droit d’expression mais une simple mesure d’hygiène intellectuelle.
En dépit de mon goût pour la médiation, je ne suis pas un modéré comme je l’ai écrit ICI en mars 2009 link
Certes, mon cher Hervé, certains sur le Net sont pathétiques, d’autres de mauvaise foi, mais pourquoi diable t’en inquiéter puisque ça ne censure pas ta liberté de pensée. Tu peux le regretter mais pourquoi préciser que tu n’as pas d’autre ligne rédactionnelle que l’air du temps, que tes coups de cœur ou tes indignations, aussi variées qu’instinctives. Que c’est ce que tu aimes dans le blog, le côté carnet de bord, le côté herbier, « choses bues », miscellanées.
Pourquoi te justifier en affirmant que l’on pourra trouver sous ta plume « autant d’articles pro-bio que critiques du bio, par exemple ; autant de papiers à la gloire des AOC que de charges à leur encontre. On me taxera aussi facilement de jouer les antisystèmes que les béni-oui-oui, au gré des billets. »
Tu dis ne pas demander grand-chose : « juste d’être jugé sur pièces, et non en fonction de prétendues affiliations ou d’agendas secrets. »
Très amicalement je sens poindre sous tes phrases une grande envie d’être aimé du plus grand nombre et ça, cher Hervé, c’est demander l’impossible…
Comme le chante Tonton David :
Chacun sa route
Chacun son chemin
Chacun son rêve
Chacun son destin
Dites-leur que:
Chacun sa route
Chacun son chemin
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