Toutes les victimes sont innocentes, mais l’innocence est l’apanage des enfants et, hier à Toulouse, comme partout ailleurs dans le monde où la folie meurtrière des hommes se déchaîne, c’est du blé en herbe qu’une main a sauvagement coupé, devant leur école, lieu de paix, de transmission. C’est un sanctuaire violé. Les enfants de Toulouse sont nos enfants, mes enfants, la prunelle de mes yeux, la chair de ma chair, je les pleure, je m’incline face à la douleur des leurs et je me tais respectueusement.
Je poste des vieilles photos images de l’innocence et de la joie de vivre, et pour eux un très beau poème de René Char : Cet amour à tous retirés, que leurs yeux à jamais fermés ne découvriront jamais…
Sur la terre de la veille
La foudre était pure au ruisseau,
La vigne sustentait l’abeille,
L’épaule levait le fardeau.
Les routes flânaient, leur poussière
Avec les oiseaux s’envolaient,
Les pierres s’ajoutaient aux pierres,
Des mains utiles les aimaient.
Du moins à chaque heure souffrante
Un écho devait répéter
Pour la solitude ignorante
Un grêle devoir d’amitié.
La violence était magique,
L’homme quelquefois mourrait,
Mais à l’instant de l’agonie,
Un trait d’ambre scellait ses yeux.
Les regrets, les basses portes
Ne sont que des inductions
Pour incliner nos illusions
Et rafraîchir nos peaux mortes.
Ah ! crions au vent qui nous porte
Que c’est nous qui le soulevons.
Sur la terre de tant d’efforts,
L’avantage au vaillant mensonge
Est la franche consolation.