Mercredi dernier j’ai déjeuné à la Cagouille avec mon ami Jacques et, sans le savoir, en entrée, j’ai consommé une toute nouvelle Spécialité Traditionnelle Garantie : des moules de bouchot « brûle-doigts ». Ne vous y trompez pas jeunes louves et petits loups des villes, Bouchot n’est pas une contrée reculée de notre beau terroir mytilicole et « brûle-doigts » est la recette. En revanche qu’est-ce donc que cette Spécialité Traditionnelle Garantie que votre Taulier ignorait ?
Les faits d’abord : le Journal officiel de l'Union Européenne du 7 mai 2013 vient d’enregistrer en tant que Spécialité Traditionnelle Garantie Les moules de bouchot, spécialité française de moules élevées sur des pieux.
Bouchot n’est donc ni une ville ni un lieu-dit mais l’une des façons d’élever des moules « C'est un élevage spécifiquement français, et la production française est essentiellement en moules de bouchot » Selon l'Inao en 2011 41.000 tonnes de moules de bouchot ont été produites en France, sur le littoral de l'Atlantique et de la Manche.
Une pincée d’Histoire « C’est un voyageur irlandais, Patrick Walton, qui en 1235, a inventé la culture sur bouchot. Victime d’un naufrage dans la Baie de l’Aiguillon, il s’installe et se consacre à la capture d’oiseaux d’eau à l’aide de filets.
Il s’aperçoit rapidement que les piquets retenant ses filets, plantés dans la mer, se recouvrent de moules. Il multiplie les piquets et les réunit par des claies. Il baptise son invention avec les mots « bout » et « choat » : la clôture en bois. »
La STG, Spécialité Traditionnelle Garantie, est un signe européen qui met en valeur la composition d’un produit ou son mode de production traditionnel. Elle atteste de la spécificité et de la qualité d’un produit.
Encore un me direz-vous ? Oui, mais sachez aussi qu’il existe une AOP «Moules de Bouchots de la Baie du Mont Saint-Michel» La zone d’élevage s’étend de la partie de l’estran de la Baie du Mont-Saint-Michel située au sud de l’alignement du clocher de Carolles et de la pointe de la Chaîne, et à l’ouest de la limite entre les départements de l’Ille-et-Vilaine et de la Manche. « Cette zone offre aux moules les conditions d’une alimentation abondante, spécifique et variée, qui est liée à l’originalité de la Baie (présence d’un vaste estran), sédimentaire, hydrodynamique (interactions entre le courant issu du plus important marnage des marées de France et le flux des rivières qui se jettent dans la Baie), et écologique (transfert et interactions entre divers écosystèmes dont les polders, les vasières et les marais maritimes). Les mécanismes d’alimentation des moules dépendent également des caractéristiques (température, salinité, turbidité) des eaux de la zone dans laquelle elles sont élevées. »
Revenons à la STG, ne pas confondre avec la CSCG, réclamée par les producteurs français, « va permettre de définir une norme de calibrage, de type d'élevage, une norme qui est applicable et contrôlable » et éviter que certaines moules, provenant parfois de pays où il n'y a pas d'élevage de moules de bouchot, portent le nom de moules de bouchot lors de leur commercialisation, trompant ainsi le consommateur. ». Du côté de la mécanique c’est l’ODG représente et rassemble les opérateurs de la filière des produits labellisés « STG ». « Les règles de production sont consignées dans un cahier des charges dont le respect est contrôlé par un organisme certificateur. Le champ d’application du cahier des charges concerne uniquement les produits dénommés « Moules de bouchot », c’est-à-dire des moules d’élevage produites exclusivement sur bouchot dans les estrans après captage de larves en milieu naturel. Les produits de la pêche et tous les autres modes d’élevage en sont exclus. Les moules bénéficiant de la Spécialité Traditionnelle Garantie « Moules de bouchot» sont des moules fraîches entières, vivantes. »
Pour produire une moule de bouchot il faut une année : « C’est au début du printemps que naissent les Moules de bouchot entre la Charente et la Loire. Des cordes sont tendues horizontalement pour recueillir ce naissain qui peut se fixer facilement. En juin, les cordes sont disposées sur des portiques en bois appelés chantiers. Le naissain se développe ici jusqu’à la fin de l’été. Les cordes sont enroulées en spirale autour des bouchots à partir de septembre. Pour protéger les Moules de bouchot contre l’invasion des crabes, les pieux sont habillés d’une jupe ou tahitienne. Le développement des Moules de bouchot a lieu pendant l’hiver et le printemps suivants. Les artisans producteurs veillent au bon développement des Moules de bouchot et interviennent tout au long de leur croissance pour garantir une qualité optimale. Par exemple, le catinage consiste à entourer les pieux de filets pour que les Moules de bouchot ne soient pas emportées par les tempêtes. Les algues sont enlevées régulièrement et les invasions de prédateurs surveillées. Après un an sur le bouchot, les moules sont cueillies mécaniquement par bateau amphibie ou tracteur pour être lavées, triées et conditionnées pour l’expédition et la vente. »
Moules de bouchot « brûle doigts »
Ustensiles
- 1 poêle en tôle assez mince, genre plat à paella de bazar. Faites le chauffer à blanc, et versez-y les moules de façon à ce qu’elles tiennent sur une seule couche. Continuer à feu vif, en remuant jusqu’à ce qu’elles s’ouvrent bien.
Pas de poêle antiadhésive.
Ingrédients
- Moules de bouchots bien sûr mais les coques et les couteaux peuvent subir le même sort.
- Poivre du moulin
Voilà mais ce n’est pas tout ça qu’est-ce-qu’on boit avec mes moules de bouchot « brûle doigts » ?
En bonus
1- Une belle chronique de novembre 2006 du blog Cuisine de la Mer Moules à la brûle doigtlink
2- Comme c’est bientôt l’été et que le soleil va nous cuire une recette du Taulier : une salade de pâtes aux moules de bouchotlink